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26/02/2020 | FRANCE | N°18-23591

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 février 2020, 18-23591


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 février 2020

Cassation

M. CATHALA, président

Arrêt n° 249 FS-D

Pourvoi n° Q 18-23.591

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 FÉVRIER 2020

La société Sopra Steria group, société anonyme, dont le siège est [...] , a for

mé le pourvoi n° Q 18-23.591 contre l'ordonnance rendue le 5 octobre 2018 en la forme des référés par le président du tribunal de grande instance d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 février 2020

Cassation

M. CATHALA, président

Arrêt n° 249 FS-D

Pourvoi n° Q 18-23.591

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 FÉVRIER 2020

La société Sopra Steria group, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° Q 18-23.591 contre l'ordonnance rendue le 5 octobre 2018 en la forme des référés par le président du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, dans le litige l'opposant :

1°/ au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) d'Aix-en-Provence Toulon de la société Sopra Steria group, dont le siège est [...] ,

2°/ à M. C... H..., domicilié [...] ,

3°/ à la société Sésame ergonomie, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lanoue, conseiller référendaire, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société Sopra Steria group, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du CHSCT d'Aix-en-Provence Toulon de la société Sopra Steria group, et l'avis de M. Weissmann, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 22 janvier 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Lanoue, conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Pécaut-Rivolier, Ott, Sommé, conseillers, Mme Chamley-Coulet, MM. Joly, Le Masne de Chermont, conseillers référendaires, M. Weissmann, avocat général référendaire, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 4612-8-1, L. 4612-12, L. 4614-12 et L. 4616-1 du code du travail, alors applicables ;

Attendu qu'il résulte de ces textes, d'une part, que l'employeur, qui doit consulter les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) sur un projet de règlement intérieur modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, projet important commun à plusieurs établissements, peut mettre en place une instance temporaire de coordination des CHSCT qui a pour mission de rendre un avis après avoir eu recours, le cas échéant, à une expertise unique, d'autre part, que même en l'absence d'expertise décidée par l'instance temporaire de coordination, les CHSCT des établissements concernés par le projet commun ne sont pas compétents pour décider le recours à une expertise sur cette même consultation ;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, que dans la perspective de la mise à jour des dispositions relatives au traitement des données personnelles et d'actualisation de son règlement intérieur et de sa charte informatique, la société Sopra Steria group (la société) a créé une instance temporaire de coordination (ITC) de ses vingt-trois CHSCT ; que l'ITC a décidé de ne pas recourir à une expertise et que les documents soumis à avis seraient communiqués aux CHSCT pour faire connaître leurs remarques et demandes avant le 13 juillet 2018 ; que le CHSCT du site d'Aix-en-Provence / Toulon de la société a décidé de recourir à une expertise sur les documents en cause par délibération du 25 juin 2018 ; que la société a saisi le président du tribunal de grande instance en annulation de cette délibération ;

Attendu que pour rejeter la demande de la société en annulation de la délibération du CHSCT ayant décidé le recours à une expertise portant sur les documents communs, le président du tribunal de grande instance retient que par application des articles L. 4616-1 et L. 4614-12 du code du travail, l'employeur a la faculté de mettre en place, en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, sous certaines conditions, une ITC afin d'organiser le recours à une expertise unique, que si l'employeur exerce cette faculté, deux hypothèses sont à envisager : soit la procédure relative à l'expertise unique est mise en oeuvre par l'ITC, elle a alors seule compétence pour la désignation de l'expert et se substitue aux CHSCT, soit la procédure relative à l'expertise unique n'est pas mise en oeuvre par l'ITC, pour n'avoir pas été instituée par l'employeur ou avoir décidé du non-recours à l'expertise unique, les CHSCT conservent alors leur pouvoir d'initiative en la matière tel que visé par l'article L. 4616-12 ancien du code du travail, qu'au regard de ces éléments, et dès lors qu'il n'est pas contesté que le projet soumis à consultation par l'employeur modifie de façon importante les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, au sens de l'article L. 4614-12, 2°, du code du travail, le recours à l'expertise par le CHSCT d'Aix-en-Provence / Toulon est régulier ;

Qu'en statuant ainsi, le président du tribunal de grande instance a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance, prise en la forme des référés, rendue le 5 octobre 2018, entre les parties, par le président du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cette ordonnance et les renvoie devant le président du tribunal judiciaire de Marseille ;

Condamne la société Sopra Steria group aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Sopra Steria group ;

En application de l'article L. 4614-13 du code du travail, condamne la société Sopra Steria group à payer à la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy la somme de 3 600 euros TTC ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour la société Sopra Steria group

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée D'AVOIR débouté la société Sopra Steria group de sa demande tendant à l'annulation de la délibération du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail d'Aix-en-Provence et de Toulon de la société Sopra Steria group en date du 25 juillet 2018 de recourir à une expertise ;

AUX MOTIFS QU'« aux termes de l'article L. 4616-1 ancien du code du travail, dans sa version applicable au présent litige : " Lorsque les consultations prévues aux articles L. 4612-8-1, L. 4612-9, L. 4612-10 et L. 4612-13 portent sur un projet commun à plusieurs établissements, l'employeur peut mettre en place une instance temporaire de coordination de leurs comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, qui a pour mission d'organiser le recours à une expertise unique par un expert agréé dans le cas mentionné au 2° de l'article L. 4614-12 et selon les modalités prévues à l'article L. 4614-13. L'instance est seule compétente pour désigner cet expert. Elle rend un avis au titre des articles L. 4612-8-1, L. 4612-9, L. 4612-10 et L. 4612-13. L'instance temporaire de coordination, lorsqu'elle existe, est seule consultée sur les mesures d'adaptation du projet communes à plusieurs établissements. Les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail concernés sont consultés sur les éventuelles mesures d'adaptation du projet spécifiques à leur établissement et qui relèvent du chef de cet établissement ". / Aux termes de l'article L. 4614-12 ancien du code du travail, dans sa version applicable au présent litige : " Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agréé : 1° lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement ; 2° en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, prévu à l'article L. 4612-8-1 ". / Par application de ces dispositions légales, l'employeur a la faculté de mettre en place, en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail sous certaines conditions, une instance temporaire de coordination des Chsct afin d'organiser le recours à une expertise unique. / Si l'employeur exerce cette faculté, l'instance temporaire de coordination est alors seule compétente pour désigner un expert, se substituant aux Chsct locaux dans un souci évident de rationalisation et de lisibilité. / Hors ce cas précis, aucune disposition légale ne permet toutefois de priver les Chsct de leur pouvoir décisionnel propre en matière de désignation d'un expert. / Cette procédure donne à l'instance temporaire de coordination le pouvoir d'organiser, ou non, le recours à l'expertise unique. Elle ne lui donne nullement le pouvoir de décider pour les Chsct du non-recours à l'expertise lorsqu'elle ne met pas en oeuvre le recours à l'expertise unique. / Ainsi par application de ces textes, deux hypothèses sont à envisager : soit la procédure relative à l'expertise unique est mise en oeuvre par l'instance temporaire de coordination des Chsct, elle a alors seule compétence pour la désignation de l'expert et se substitue aux Chsct ; soit la procédure relative à l'expertise unique n'est pas mise en oeuvre par l'instance temporaire de coordination des Chsct, pour n'avoir pas été instituée par l'employeur ou avoir décidé du non-recours à l'expertise unique, les Chsct conservent alors leur pouvoir d'initiative en la matière tel que visé par l'article L. 4616-12 ancien du code du travail. / Au regard de ces éléments, et dès lors qu'il n'est pas contesté que le projet soumis à consultation par l'employeur modifie de façon importante les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, au sens de l'article L. 4614-12 2° du code du travail, il appert que le recours à l'expertise Chsct d'Aix-en-Provence / Toulon est régulier. / La demande tendant à l'annulation de la délibération du 26 juin 2018 sera en conséquence rejetée » (cf., ordonnance attaquée, p. 2 et 3) ;

ALORS QUE lorsqu'une instance temporaire de coordination des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a été mise en place, cette instance temporaire de coordination est seule compétente pour décider du recours à une expertise au sujet d'un projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail commun à plusieurs établissements, y compris quand ce projet porte sur la mise à jour du règlement intérieur ; qu'il en résulte que, dans l'hypothèse où une instance temporaire de coordination des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a été mise en place et où cette instance a décidé de ne pas recourir à une expertise au sujet d'un projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail commun à plusieurs établissements, un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ne peut décider de faire appel à un expert agréé au sujet de ce même projet, peu important que celui-ci porte sur la mise à jour du règlement intérieur ; qu'en retenant le contraire pour débouter la société Sopra Steria group de sa demande tendant à l'annulation de la délibération du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail d'Aix-en-Provence et de Toulon de la société Sopra Steria group en date du 25 juin 2018 de recourir à une expertise, la juridiction du président du tribunal de grande instance a violé les dispositions des articles L. 4612-12, L. 4614-12 et L. 4616-1 du code du travail, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 22 septembre 2017, qui est applicable à la cause.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-23591
Date de la décision : 26/02/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, 05 octobre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 fév. 2020, pourvoi n°18-23591


Composition du Tribunal
Président : M. Cathala (président)
Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.23591
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