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26/02/2020 | FRANCE | N°18-22790

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 février 2020, 18-22790


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 février 2020

Cassation partielle
sans renvoi

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 219 F-D

Pourvoi n° U 18-22.790

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 FÉVRIER 2020

M. M... L..., domicil

ié [...] , a formé le pourvoi n° U 18-22.790 contre l'ordonnance rendue en référé le 19 mars 2018 par le conseil de prud'hommes d'Avignon, dans l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 février 2020

Cassation partielle
sans renvoi

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 219 F-D

Pourvoi n° U 18-22.790

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 FÉVRIER 2020

M. M... L..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° U 18-22.790 contre l'ordonnance rendue en référé le 19 mars 2018 par le conseil de prud'hommes d'Avignon, dans le litige l'opposant à la société Emma-trans, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. L..., après débats en l'audience publique du 21 janvier 2020 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, M. Maron, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Attendu, selon l'ordonnance rendue en référé, qu'engagé le 19 juin 2017 par la société Emma-trans en qualité de manutentionnaire polyvalent, M. L... s'est trouvé en arrêt de travail à compter du 11 octobre 2017 ; qu'il a saisi en référé la juridiction prud'homale le 8 janvier 2018 pour obtenir la remise d'un chèque en paiement du salaire du mois d'octobre 2017 et du bulletin de paie afférent ainsi que la condamnation de son employeur à lui payer une provision sur dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 32-1 du code de procédure civile ;

Attendu que pour condamner le salarié à verser à l'employeur des dommages-intérêts pour procédure abusive, l'ordonnance retient que le salarié ne pouvait ignorer que l'employeur tenait à sa disposition la fiche de paie d'octobre 2017 et le chèque de salaire correspondant, que ces documents sont quérables et ont été transmis par l'employeur au salarié le 19 janvier 2018 ; que le salarié a tenu à maintenir son action qui s'apparente à un abus de procédure ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser un abus du droit d'agir en justice, alors que l'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans les cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, dont l'application est suggérée en demande ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'elle condamne M. L... à payer à la société Emma-trans la somme de 100 euros au titre du préjudice moral pour procédure abusive, l'ordonnance rendue, le 19 mars 2018, entre les parties, par le conseil de prud'hommes d'Avignon ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Maintient les dispositions de l'ordonnance attaquée relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Emma-trans aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Emma-trans à payer à M. L... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. L...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'ordonnance attaquée d'avoir débouté M. L... de sa demande de dommages-intérêts ;

Aux motifs que sur la demande de dommages-intérêts, l'article R 1455-5 du code du travail dispose que « Dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend » ; que l'article R 1455-7 dispose que « Dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire » ; que la formation de référé a pris connaissance lors des débats et de son délibéré des divers documents étayant les demandes de M. L... et des pièces produites par le conseil de la société Emma trans ; qu'en l'espèce, M. L... ne produit aucune pièces et/ou éléments permettant à la formation de référé d'appréhender le bien-fondé de sa demande ; que la formation de référé déboute M. L... de sa demande ; sur la demande de la société Emma Trans pour procédure abusive, M. L... est lié à la Sarl Emma trans par contrat de travail en date du 16 juin 2017 ; que l'article L. 1222-1 du code du travail dispose que « le contrat de travail est exécuté de bonne foi » ; que la Sarl Emma trans a bien respecté sa part d'engagement fixée par ce contrat de travail ; que M. L... ne pouvait ignorer que la Sarl Emma trans tenait à la disposition de son salarié la fiche de paie d'octobre 2017 et le chèque de salaire correspondant ; que ces documents sont quérables ; que M. L..., s'il était dans l'impossibilité de se déplacer, pouvait donner procuration à un tiers pour récupérer ces documents auprès de son employeur ; que la fiche de paie et le chèque de salaire ont été transmis par la Sarl Emma trans à M. L... le 19 janvier 2018 ; que M. L... a tenu à maintenir son action ; que le conseil dit que l'action de M. L... devant la formation de référé du conseil de prud'hommes s'apparente à un abus de procédure ;

Alors 1°) que lors du paiement du salaire, l'employeur doit remettre aux salariés une pièce justificative dite « bulletin de paie » ; qu'il ne peut se borner à tenir le bulletin de paie à la disposition du salarié et qu'il en résulte qu'à défaut d'avoir remis cette pièce au salarié, l'employeur doit la lui faire parvenir par tout moyen ; que pour débouter M. L... de sa demande en dommages-intérêts, le conseil de prud'hommes a retenu qu'il ne produisait aucune pièces et/ou éléments permettant d'appréhender le bien-fondé de sa demande, qu'il ne pouvait ignorer que la Sarl Emma Trans tenait à sa disposition la fiche de paie d'octobre 2017 et le chèque de salaire correspondant, documents quérables, et que s'il ne pouvait se déplacer, il pouvait donner procuration à un tiers pour récupérer ces documents auprès de son employeur ; qu'en statuant comme il l'a fait, cependant que l'obligation de l'employeur de faire parvenir par tout moyen au salarié les documents qu'il sollicitait n'était pas sérieusement contestable, le conseil de prud'hommes a violé ensemble les articles L. 3243-2 et R 1455-7 du code du travail ;

Alors 2°) et en tout état de cause, qu'en statuant sans répondre aux conclusions de M. L... soutenant qu'« à défaut de remise du bulletin de paie au salarié, l'employeur doit la lui faire parvenir par tout moyen. Il ne peut se contenter de tenir le bulletin de paie à la disposition du salarié » et qu'« aucune contestation sérieuse ne saurait être émise pour justifier le non-paiement du salaire, la non-délivrance de l'attestation de salaire et des bulletins de paie » (conclusions p. 3), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. L... à payer à la Sarl Emma Trans la somme de 100 € au titre de préjudice moral causé par sa procédure abusive, outre 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Aux motifs que M. L... est lié à la Sarl Emma trans par contrat de travail en date du 16 juin 2017 ; que l'article L. 1222-1 du code du travail dispose que « le contrat de travail est exécuté de bonne foi » ; que la Sarl Emma trans a bien respecté sa part d'engagement fixée par ce contrat de travail ; que M. L... ne pouvait ignorer que la Sarl Emma trans tenait à la disposition de son salarié la fiche de paie d'octobre 2017 et le chèque de salaire correspondant ; que ces documents sont quérables ; que M. L..., s'il était dans l'impossibilité de se déplacer, pouvait donner procuration à un tiers pour récupérer ces documents auprès de son employeur ; que la fiche de paie et le chèque de salaire ont été transmis par la Sarl Emma trans à M. L... le 19 janvier 2018 ; que M. L... a tenu à maintenir son action ; que le conseil dit que l'action de M. L... devant la formation de référé du conseil de prud'hommes s'apparente à un abus de procédure ; que l'article 32-1 du code de procédure civile dispose que « celui qui agit en justice de manière dilatoire ou de manière abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés » ; que le conseil dit bien fondée la demande de réparation exercée par la Sarl Emma trans et condamne donc M. L... à payer à la Sarl Emma trans la somme de 100 € au titre du préjudice moral causé par sa procédure abusive ;

Alors que l'exercice du droit d'agir en justice est un droit fondamental qui ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans les cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol ; qu'en statuant sans avoir caractérisé l'abus du droit d'agir en justice commis par M. L..., lequel n'a d'ailleurs obtenu le bulletin de paie d'octobre 2017 et le chèque du salaire correspondant que le janvier 2018, soit après avoir saisi en référé du conseil de prud'hommes le 8 janvier 2018, le conseil de prud'hommes a violé l'article 32-1 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-22790
Date de la décision : 26/02/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes d'Avignon, 19 mars 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 fév. 2020, pourvoi n°18-22790


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.22790
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