LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
CM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 13 février 2020
Cassation
sans renvoi
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 136 F-D
Pourvoi n° E 19-11.603
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2020
1°/ M. K... U...,
2°/ Mme I... W..., épouse U...,
tous deux domiciliés [...] ,
ont formé le pourvoi n° E 19-11.603 contre l'ordonnance rendue le 3 décembre 2018 par le juge de l'expropriation du département des Hauts-de-Seine siégeant au tribunal de grande instance de Nanterre de Nanterre, dans le litige les opposant à la société Bouygues immobilier, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations de la SCP Didier et Pinet, avocat de M. et Mme U..., de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Bouygues immobilier, et après débats en l'audience publique du 14 janvier 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. L'ordonnance attaquée (juge de l'expropriation du département des Hauts-de-Seine, 3 décembre 2018) déclare expropriée immédiatement pour cause d'utilité publique, au profit de la société Bouygues immobilier, la parcelle cadastrée section [...] , sise [...] , figurant sur l'état parcellaire annexé comme appartenant à M. et Mme U....
Examen des moyens
Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen
Énoncé du moyen
3. M. et Mme U... font grief à l'ordonnance de déclarer expropriée la parcelle litigieuse, alors que « le juge de l'expropriation ne peut statuer à nouveau sur des parcelles déjà expropriées ; que, par une ordonnance du 25 février 2014, le juge de l'expropriation du département des Hauts-de-Seine a prononcé au profit de la société Bouygues Immobilier l'expropriation pour cause d'utilité publique d'un certain nombre de parcelles dont la parcelle cadastrée section [...] sise [...] appartenant à M. K... U... ; qu'en statuant à nouveau sur cette parcelle déjà expropriée, le juge de l'expropriation a violé l'article L.222-2 du code de l'expropriation ».
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 222-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique :
4. Aux termes de ce texte, l'ordonnance d'expropriation éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés.
5. Par une précédente ordonnance du 25 février 2014, le juge de l'expropriation du département des Hauts-de-Seine avait ordonné le transfert de propriété à la société Bouygues immobilier de la parcelle cadastrée section [...] sise [...].
6. En déclarant exproprié le même bien, au profit de la même société, le juge de l'expropriation a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
7. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile, la cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué au fond.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 3 décembre 2018, entre les parties, par le juge de l'expropriation du département des Hauts-de-Seine ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Condamne la société Bouygues immobilier aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Bouygues immobilier et la condamne à payer à M. et Mme U... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize février deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme U...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR déclaré expropriée immédiatement pour cause d'utilité publique au profit de la société Bouygues Immobilier, la parcelle cadastrée section [...] , sise [...] , appartenant aux époux U....
ALORS QUE le juge de l'expropriation ne peut statuer à nouveau sur des parcelles déjà expropriées ; que, par une ordonnance du 25 février 2014, le juge de l'expropriation du département des Hauts-de-Seine a prononcé au profit de la société Bouygues Immobilier l'expropriation pour cause d'utilité publique d'un certain nombre de parcelles dont la parcelle cadastrée section [...] sise [...] appartenant à M. K... U... ; qu'en statuant à nouveau sur cette parcelle déjà expropriée, le juge de l'expropriation a violé l'article L.222-2 du code de l'expropriation.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR déclaré expropriée immédiatement pour cause d'utilité publique au profit de la société Bouygues Immobilier, la parcelle cadastrée section [...] , sise [...] , appartenant aux époux U....
ALORS QUE l'ordonnance d'expropriation doit viser les pièces justifiant de l'accomplissement des formalités tendant aux avertissements collectifs ; qu'en l'espèce l'ordonnance qui ne vise aucune de ces pièces a violé les articles L.221-1, R.221-1 et R.131-5 du code de l'expropriation.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR déclaré expropriée immédiatement pour cause d'utilité publique au profit de la société Bouygues Immobilier, la parcelle cadastrée section [...] , sise [...] , appartenant aux époux U....
AU VISA DE l'arrêté DCPPAT/BEICEP n° [...] portant cessibilité, au bénéfice de la société Bouygues Immobilier de la parcelle cadastrée section [...], sise [...], et nécessaire à la réalisation du projet Zone d'Aménagement Concerné (ZAC) [...], et désignés ci-dessous, dont l'acquisition est nécessaire pour parvenir à l'exécution de l'acte déclaratif d'utilité publique sus-énoncé.
ALORS QUE l'ordonnance d'expropriation doit viser l'arrêté de cessibilité pris depuis moins de six mois avant l'envoi du dossier au greffe ; qu'en l'espèce l'ordonnance qui ne mentionne pas la date de l'arrêté de cessibilité ne permet pas de vérifier que le juge de l'expropriation a été saisi dans les six mois ; que l'ordonnance a ainsi violé les articles L.221-1 et R.221-1-6°du code de l'expropriation.