La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/02/2020 | FRANCE | N°18-21730

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 février 2020, 18-21730


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 février 2020

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 201 F-D

Pourvoi n° S 18-21.730

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. F... E....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 18 mars 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRA

NÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2020

La caisse d'assurance retraite et de...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 février 2020

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 201 F-D

Pourvoi n° S 18-21.730

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. F... E....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 18 mars 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2020

La caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Sud-Est (la CARSAT), dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° S 18-21.730 contre l'arrêt rendu le 22 juin 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (14e chambre), dans le litige l'opposant à M. F... E..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Sud-Est, de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de M. E..., et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 janvier 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Szirek, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. E... (l'assuré), ayant été victime le 18 mars 1996 d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle, a sollicité le bénéfice d'une pension de retraite pour pénibilité à compter de l'âge de 60 ans ; que la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Sud Est (la CARSAT) lui ayant refusé le bénéfice de cette prestation, il a saisi une juridiction de sécurité sociale d'un recours ;

Sur le moyen unique pris en ses première, deuxième, troisième et cinquième branches :

Attendu que la CARSAT fait grief à l'arrêt d'accueillir le recours de l'assuré, alors, selon le moyen :

1°/ que, en cas de litige sur la qualification d'accident du travail, il appartient aux juges du fond de rechercher si l'accident est survenu aux temps et lieu de travail à un moment où le salarié était placé sous la subordination de son employeur ; qu'en l'espèce, pour dire que M. E... avait été victime d'un accident du travail, les juges du fond ont relevé qu'il produisait des décomptes de versement d'indemnités journalières et qu'il avait bénéficié d'une rente « accident du travail » ainsi que d'une rente d'incapacité permanente ; qu'en statuant ainsi, par des motifs ne permettant pas de caractériser l'existence d'un d'accident du travail et sans rechercher à quel moment et dans quelles conditions avait eu lieu l'accident de M. E..., la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 411-1 du code du travail ;

2° / que l'accident du travail est celui qui survient aux temps et lieu de travail à un moment où le salarié était placé sous la subordination de son employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'il ressortait du rapport du 13 décembre 1999 que M. E... avait été victime d'un accident « sur le trajet vers son lieu de travail » ; qu'en énonçant néanmoins que M. E... avait été victime d'un accident du travail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constations, a violé l'article L. 411-1 du code du travail ;

3° / que pour bénéficier d'une retraite anticipée pour pénibilité, l'assuré doit justifier d'une incapacité permanente de 20 % ou d'une incapacité permanente de 10 % en cas de durée d'exposition d'au moins 17 ans ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas de l'arrêt que la situation de M. E... répondait à l'une ou l'autre de ces conditions, la cour d'appel ne faisant pas même mention de son taux d'incapacité ; qu'en jugeant néanmoins que M. E... pouvait bénéficier des dispositions de retraite anticipée prévues par l'article L. 351-1-4 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a violé les articles l'article L. 351-1-4, D. 351-1-9 et D. 351-1-10 du code de la sécurité sociale ;

4° / qu'une pension de retraite pour pénibilité ne peut être cumulée avec l'allocation chômage ; qu'en l'espèce, M. E... était en situation de chômage indemnisé au cours de la période du 5 juillet 2014 au 1er avril 2016 ; qu'en jugeant que M. E... devait bénéficier de la retraite pour pénibilité de manière rétroactive du 5 juillet 2014 au 1er avril 2016, la cour d'appel a violé l'article L. 5421-4 du code du travail ;

Mais attendu que l'arrêt retient que l'assuré verse aux débats de nombreuses pièces contemporaines à la survenance de cet accident le qualifiant d'accident du travail et des documents aux termes desquels son accident a, pendant vingt années, toujours été qualifié et pris en charge au titre d'un accident du travail par la caisse primaire d'assurance maladie et notamment plusieurs décomptes de versement d'indemnités journalières, dès le 19 mars 2016, et des attestations de la caisse primaire indiquant l'octroi d'une rente d'incapacité permanente fixée à 67 % et le versement d'une rente accident du travail de 4 009,64 francs pour le mois de novembre 2000, en visant expressément son accident du travail du 18 mars 1996 ;

Que de ces constatations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, la cour d'appel a exactement déduit que l'assuré, justifiant d'une incapacité permanente supérieure à 20 %, reconnue au titre d'un accident du travail, remplissait les conditions pour bénéficier d'une pension de retraite pour pénibilité au titre de l'article L. 351-1-4 du code de la sécurité sociale ;

Et attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des productions que la CARSAT ait soutenu que l'assuré était en situation de chômage indemnisé au cours de la période concernée ;

D'où il suit que nouveau et mélangé de fait et de droit, et par suite irrecevable en sa cinquième branche, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Vu l'article R. 351-37 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon ce texte, que chaque assuré indique la date à compter de laquelle il désire entrer en jouissance de sa pension, cette date étant nécessairement le premier jour d'un mois et ne pouvant être antérieure au dépôt de la demande formulée pour en obtenir la liquidation ;

Qu'en retenant la date du 5 juillet 2014 pour fixer l'entrée en jouissance de la pension de retraite pour pénibilité de l'assuré, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé au 5 juillet 2014 la date d'entrée en jouissance de la pension de retraite de M. E..., l'arrêt rendu le 22 juin 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne M. E... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formée

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par M. Pireyre, président de chambre, et par Mme Pontonnier, greffier de chambre présent lors de la mise à disposition de l'arrêt le treize février deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Sud-Est

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des Bouches du Rhône du 2 mars 2017 et, statuant à nouveau, d'AVOIR annulé la décision de la commission de recours amiable de la CARSAT du sud-est du 9 septembre 2014 ayant rejeté sa demande de retraite anticipée, d'AVOIR dit que F... E... devait bénéficier de la retraite pour pénibilité de manière rétroactive pour la période du 5 juillet 2014 au 1er avril 2016 avec toutes conséquences de droit, d'AVOIR dit que la CARSAT Sud-Est devait procéder au calcul des sommes dues à ce titre et à leur versement au profit de F... E...,

AUX MOTIFS QUE « Mais attendu que l'article L. 351-1-4 du code de la sécurité sociale dispose que la condition d'âge prévue à l'article L. 351-1 alinéa 1 du même code est abaissée pour les assurés justifiant d'une incapacité permanente au sens de l'article L. 432-2 du même code au moins égale à un taux déterminé par décret lorsque cette incapacité est, notamment, reconnue au titre d'un accident du travail mentionné à l'article L. 411-1 du même code ; que les accidents du trajet sont donc exclus de ces dispositions ; que l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale qualifie d'accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail ; que les juges du fond disposent d'un pouvoir souverain pour apprécier si un accident est survenu par le fait ou à l'occasion du travail ; qu'en l'occurrence et contrairement à ce qu'a dit le premier juge et ce que soutient la CARSAT du sud-est, F... E... ne demande nullement la requalification de son accident survenu le 18 mars 1996 en un accident du travail ; qu'en effet, il verse aux débats de nombreuses pièces contemporaines à la survenance de cet accident le qualifiant d'accident du travail ; qu'ainsi, il produit des documents aux termes desquels son accident a, pendant vingt années, toujours été qualifié et pris en charge au titre d'un accident du travail par la CPAM 13 ; qu'il s'agit notamment de plusieurs décomptes de versements par la CPAM 13 d'indemnités journalières dès le 19 mars 1996 ; qu'il convient d'ajouter que F... E... produit également deux attestations de la CPAM 13 indiquant l'octroi du bénéfice d'une rente d'incapacité permanente fixée à 67% et le versement d'une rente « accident du travail » de 4.009,64 francs pour le mois de novembre 2000 ce, en visant expressément son accident du travail du 18 mars 1996 ; qu'en outre, la CPAM 13 a fait diligenter une expertise médicale protocolaire telle que prévue par l'article L. 141-1 du code de la sécurité sociale en visant l'accident du travail du 18 mars 1996 ; que le rapport du 13 décembre 1999 indique que F... E... a été victime d'un accident « sur le trajet vers son lieu de travail » et conclut à une consolidation au 18 avril 1999 ; qu'en revanche, la CARSAT du Sud-Est produit un courriel du 30 novembre 2016 et un courrier du 27 octobre 2017, soit des documents écrits plus de 20 années après l'accident, indiquant désormais et de manière contradictoire avec toutes les pièces versées par F... E... que ce dernier aurait été pris en charge au titre d'un accident de trajet ; qu'enfin, la déclaration d'accident du travail a été faite par l'employeur le jour des faits et sans avoir émis aucunes réserves à quelque moment que ce soit ; qu'en conséquence, la cour considère, comme le soutient l'appelant, qu'il justifie de sa prétention selon laquelle il a été victime d'un accident du travail et qu'il a droit au bénéfice des dispositions de l'article 3514-1-4 du code de la sécurité sociale avec toutes conséquences de droit ; que la cour infirme le jugement déféré ; que la procédure devant les juridictions de la sécurité sociale est gratuite et sans frais conformément aux dispositions de l'article R. 144-6 du code de la sécurité sociale et qu'il n'y a donc pas lieu de statuer sur les dépens. »

1/ ALORS QUE, en cas de litige sur la qualification d'accident du travail, il appartient aux juges du fond de rechercher si l'accident est survenu aux temps et lieu de travail à un moment où le salarié était placé sous la subordination de son employeur ; qu'en l'espèce, pour dire que M. E... avait été victime d'un accident du travail, les juges du fond ont relevé qu'il produisait des décomptes de versement d'indemnités journalières et qu'il avait bénéficié d'une rente « accident du travail » ainsi que d'une rente d'incapacité permanente (arrêt p.3§13 et 14) ; qu'en statuant ainsi, par des motifs ne permettant pas de caractériser l'existence d'un d'accident du travail et sans rechercher à quel moment et dans quelles conditions avait eu lieu l'accident de M. E..., la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 411-1 du code du travail,

2/ ALORS QUE l'accident du travail est celui qui survient aux temps et lieu de travail à un moment où le salarié était placé sous la subordination de son employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'il ressortait du rapport du 13 décembre 1999 que M. E... avait été victime d'un accident « sur le trajet vers son lieu de travail » (arrêt p.3 avant-dernier paragraphe) ; qu'en énonçant néanmoins que M. E... avait été victime d'un accident du travail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constations, a violé l'article L. 411-1 du code du travail,

3/ ALORS QUE pour bénéficier d'une retraite anticipée pour pénibilité, l'assuré doit justifier d'une incapacité permanente de 20% ou d'une incapacité permanente de 10% en cas de durée d'exposition d'au moins 17 ans ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas de l'arrêt que la situation de M. E... répondait à l'une ou l'autre de ces conditions, la cour d'appel ne faisant pas même mention de son taux d'incapacité ; qu'en jugeant néanmoins que M. E... pouvait bénéficier des dispositions de retraite anticipée prévues par l'article L. 351-1-4 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a violé les articles l'article L. 351-1-4, D. 351-1-9 et D. 351-1-10 du code de la sécurité sociale,

4/ ALORS QUE la date d'entrée en jouissance de la pension de retraite est nécessairement le premier jour d'un mois ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a fait prendre effet la retraite pour pénibilité de M. E... de manière rétroactive à compter du 5 juillet 2014 ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article R. 351-37 du code de la sécurité sociale,

5/ ALORS QU'une pension de retraite pour pénibilité ne peut être cumulée avec l'allocation chômage ; qu'en l'espèce, M. E... était en situation de chômage indemnisé au cours de la période du 5 juillet 2014 au 1er avril 2016 ; qu'en jugeant que M. E... devait bénéficier de la retraite pour pénibilité de manière rétroactive du 5 juillet 2014 au 1er avril 2016, la cour d'appel a violé l'article L. 5421-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-21730
Date de la décision : 13/02/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 22 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 fév. 2020, pourvoi n°18-21730


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.21730
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award