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30/01/2020 | FRANCE | N°18-25900

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 30 janvier 2020, 18-25900


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 janvier 2020

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 138 F-D

Pourvoi n° Z 18-25.900

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 JANVIER 2020

M. W... P..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n°

Z 18-25.900 contre les arrêts rendus les 20 février 2018 et 23 octobre 2018 par la cour d'appel de Rennes (6e chambre B), dans le litige l'opposa...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 janvier 2020

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 138 F-D

Pourvoi n° Z 18-25.900

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 JANVIER 2020

M. W... P..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° Z 18-25.900 contre les arrêts rendus les 20 février 2018 et 23 octobre 2018 par la cour d'appel de Rennes (6e chambre B), dans le litige l'opposant à Mme B... S..., épouse P..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lemoine, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. P..., et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 18 décembre 2019 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Lemoine, conseiller référendaire rapporteur, Mme Brouard-Gallet, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Attendu, selon les arrêts attaqués, qu'un juge aux affaires familiales a, par un jugement du 27 novembre 2015, notamment prononcé le divorce aux torts partagés de M. P... et Mme S... et condamné cette dernière à verser à M. P... une certaine somme à titre de prestation compensatoire ; que M. P... ayant relevé appel de ce jugement, la cour d'appel a, par un arrêt du 20 février 2018, partiellement infirmé le jugement et a notamment débouté M. P... de sa demande de prestation compensatoire, avant de le débouter, par arrêt du 23 octobre 2018, de sa requête en rectification du précédent arrêt, comme ayant statué ultra petita, fondée sur les dispositions de l'article 464 du code de procédure civile ;

Sur le premier moyen, dirigé contre l'arrêt du 20 février 2018 :

Vu l'article 562 du code de procédure civile, en sa rédaction alors applicable ;

Attendu que les juges d'appel ne peuvent aggraver le sort de l'appelant sur son appel en l'absence d'appel incident de l'intimé ;

Attendu qu'après avoir relevé que Mme S... concluait au débouté de M. P... du chef de sa demande de réformation du jugement quant au prononcé du divorce et à ses conséquences, l'arrêt, réformant le jugement du 27 novembre 2015 ayant alloué à M. P... une prestation compensatoire, a débouté celui-ci de sa demande formée à ce titre ;

Qu'en infirmant ainsi le jugement au préjudice de l'appelant sur un chef non critiqué par l'intimé, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen, dirigé contre l'arrêt du 23 octobre 2018 :

Vu l'article 625 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation de l'arrêt du 20 février 2018 entraîne de plein droit l'annulation de l'arrêt du 23 octobre 2018 qui en est la suite ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. P... de sa demande de prestation compensatoire, l'arrêt rendu le 20 février 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

CONSTATE l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt rendu le 23 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Condamne Mme S... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme S... à payer à M. P... la somme de 1 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. P...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué (Rennes, 20 février 2018) d'avoir débouté M. W... P... de sa demande de prestation compensatoire ;

AUX MOTIFS QUE le premier juge a estimé que "M. W... P... avait travaillé durant la vie commune, ne pouvant justifier avoir sacrifié sa carrière processionnelle à celle de son épouse ou à l'éducation de l'enfant commun" ; QU'il a ajouté "qu'il n'en demeurait pas moins qu'en raison d'un choix qui ne saurait s 'analyser autrement qu'en un choix commun et dont les époux doivent assumer les conséquences ; QUE M. W... P... avait exercé majoritairement, en qualité de salarié de son épouse, la rupture du lien conjugal ayant des conséquences sur son insertion professionnelle et partant créant une disparité dans leur situation respective au regard de la précarité dont justifie M. W... P..." ; QUE le mariage vif a duré 17 ans ; QUE les époux sont âgés de 50 ans et ne font valoir aucune difficulté de santé ; QUE l'enfant du couple sera majeur en juillet prochain, vit au domicile de sa mère et poursuit ses études ; QU'aux termes de sa déclaration sur l'honneur du 25 novembre 2013, M. W... P... a indiqué qu'il percevait la somme de 1 070 € au titre de ses indemnités de chômage, tandis que ses charges s'élevaient à 450 € ; que, s'agissant de sa situation patrimoniale, il visait la valeur du bien indivis ayant constitué la domicile conjugal, à savoir 230 000 € ; QUE M. W... P... a obtenu un BTS en informatique et des brevets de moniteur de voile ; QUE son parcours en entreprise est décrit en pièce 56 du dossier de Mme B... S..., l'intéressé ayant, notamment, travaillé en qualité de dirigeant de l'entreprise familiale, la société [...] , de 1996 à 2001, Il a ensuite été attaché commercial de 2001 à 2002, avant de devenir contrôleur de gestion de la Pharmacie du Bocage de 2002 à 2000 ; QU'il a travaillé à nouveau en qualité d'attaché commercial en 2008 et 2009, puis en qualité de responsable administratif au sein de la Pharmacie de l'Yser et ce jusqu'à son licenciement ; QUE postérieurement, il a travaillé en intérim en 2014 en qualité d'aide livreur, employé de libre-service, agent de quai, préparateur de commandes ; QU'il a bénéficié en 2016 d'une formation en plongée subaquatique, financée par la Région Bretagne, et possède un diplôme de moniteur de plongée ; QU'il justifie de plusieurs recherches d'emploi infructueuses ; QUE selon jugement du 16 avril 2014, le conseil de prud'hommes de Quimper a dit que le licenciement de M. W... P... s'analysait en un licenciement pour cause réelle et sérieuse et condamné l'EURL Pharmacie de l'Yser à lui verser 4 377,16 € au titre de l'indemnité compensatrice, 656,57 € au titre de l'indemnité de licenciement et 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; QUE pour 2016, la totalité de ses ressources s'est élevée à 16 318 € ; QUE selon document de Pôle emploi en date du 23 mai 2017, M. W... P... justifie avoir bénéficié au 30 avril 2017 de 122 allocations et pouvoir prétendre à 323 jours d'allocations journalières ; QU'il acquitte pour l'enfant commun la somme mensuelle de 100 € ; QU'il occupe à titre gratuit, selon les mesures fixées par le juge conciliateur, le bien indivis dont la valeur a effectivement été estimée entre 230 et 240 000 € ; QUE selon relevé de situation individuelle au 31 juillet 2014, M. W... P... totalisait 102 trimestres de retraite de base, 2 535,75 points au titre de sa retraite complémentaire de salarié du secteur privé et 153 points en qualité d'agent non titulaire de l'Etat et des collectivités publiques (IRCANTEC) ; QUE Mme B... S... a fait l'acquisition de la Pharmacie de l'Yser en 2010 pour un montant de 1 500 000 € ; QU'elle est docteur en pharmacie et exerce en qualité de gérante de la société à responsabilité limitée à associée unique ; QU'elle justifie de l'emprunt contracté auprès de la BNP PARIBAS à hauteur de 1 245 000 € remboursable selon 144 mensualités de 10 160 € ; QU'elle a bénéficié en 2015 d'un revenu de 38 400 € outre 5 400 € de pensions alimentaires ; QU'elle s'est affiliée à une société de pharmaciens HPI et a souscrit des actions pour un montant de 14 994 € ; QUE selon états financiers au 31 août 2016, le compte de résultat net de l'EURL fait apparaître un bénéfice de 107 318 € ; QU'elle est locataire et acquitte un loyer de 531 € ; QU'aux ternes des mesures provisoires, elle devait régler, à titre d'avance, le prêt souscrit pour l'acquisition du bien indivis pour un montant mensuel de 757 € ; QUE selon aperçu liquidatif chiffré au 27 octobre 2012, Mme B... S... doit à l'appelant une créance de 214 259 € au titre de l'acquisition de la Pharmacie de l'Yser et celle de 85 034 € au titre de la maison de Tréboul ; QU'au titre du partage, les droits de chacun des époux sur la maison s'élevaient à 64 353,50 €, soit en y ajoutant les créances précitées la somme de 363 646,50 € à revenir à M. W... P... ; QU'en définitive, il ne peut être retenu que M. W... P... a majoritairement exercé une activité professionnelle pendant le mariage au sein des pharmacies, dont son épouse était titulaire ; QU'iI a travaillé au sein de la Pharmacie du Bocage pour partie en 2003, puis en 2004, 2005 et pour partie également en 2006 ; QUE par la suite, la Pharmacie de l'Yser ne sera acquise qu'en octobre 2010, tandis que son licenciement est intervenu début 2013 ; QU'il ne justifie pas, comme l'a précisé le premier juge, de choix professionnels faits pour s'occuper de l'éducation de l'enfant ou favoriser l'emploi de son épouse ; QU'il est titulaire de droits prévisibles à la retraite et peut encore améliorer sa situation ; QUE par ailleurs, M. W... P... percevra, lors du partage, une somme d'environ 363.646,50 E selon un document qu'il n'a pas contesté ; QUE le dessein d'une prestation compensatoire n'étant ni de pallier les qualifications respectives des époux, ni d'aboutir à une égalisation des revenus et patrimoines des intéressés, ni d'éluder les conséquences du choix du régime matrimonial librement choisi par les époux, force est de constater qu'il n'existe, en l'espèce, au jour du divorce, aucune disparité dans leurs conditions de vie respectives, en sorte que le jugement dont appel sera réformé et M. W... P... débouté de sa demande de prestation compensatoire ;

ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions de parties ; que la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; que le jugement avait alloué à M. P... une somme de 20 000 € à titre de prestation compensatoire ; que M. P..., appelant, demandait que cette somme soit portée à 100 000 € ; que dans ses conclusions d'appel, Mme S..., qui ne formait pas appel incident, se bornait à demandait à la cour d'appel de « débouter M. P... de sa demande de réformation du jugement quant au prononcé du divorce et ses conséquences ; que dès lors, la cour d'appel, en infirmant le jugement pour rejeter la demande de prestation compensatoire, a violé les articles 4, 5 et 954 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est reproché à l'arrêt attaqué (Rennes, 23 octobre 2018), d'avoir rejeté la requête en rectification pour ultra petita déposée par M. P... ;

AUX MOTIFS QUE l'article 462 du code de procédure civile dispose que la juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs, sauf à rétablir, s'il y a lieu, le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens ; et QUE l'article 464 du code précité indique que les dispositions de l'article précédent sont applicables si le juge s'est prononcé sur des choses non demandées ou s'il a été accordé plus qu'il n'a été demandé ; QU'en l'espèce, M. P... considère que la cour, dans son arrêt du 20 février 2018, a statué ultra petita en ce que Mme S... n'a pas sollicité la réformation de la décision en ce qu'elle l'a condamnée à verser à son conjoint une prestation compensatoire d'un montant de 20 000 € ; QUE force est de constater, qu'outre l'appel total de M. P... ce qui confrère à la cour l'ensemble du litige, Mme S... a conclu aux termes ses dernières écritures du 24 mai 2017 au débouté de M. P... du chef de sa demande de réformation du jugement quant au prononcé du divorce et quant à ses conséquences, ce qui impliquait nécessairement au titre des conséquences, la question de la prestation compensatoire des époux ; qu'il s'ensuit que la cour a réformé la décision entreprise sur le point de la prestation compensatoire, comme l'a demandé M. P... et Madame S... ; QUE la cour n'a pas statué ultra petita et M. P... sera débouté de sa requête ;

1- ALORS QUE le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; que l'effet dévolutif de l'appel n'a pas pour conséquence de permettre à la cour d'appel de statuer sur ce qui n'est pas demandé ; qu'en rejetant la demande de prestation compensatoire accueillie par le jugement à hauteur de 20 000 €, alors que M. P... demandait seulement qu'elle fût portée à 100 000 € et que Mme S... demandait que la prétention de son mari à l'infirmation du jugement soit rejetée, la cour d'appel a violé les articles 5, 561 et 562 du code de procédure civile ;

2- ALORS QUE le jugement avait alloué à M. P... une somme de 20 000 € au titre de la prestation compensatoire ; que Mme S... ayant seulement conclu aux termes ses dernières écritures du 24 mai 2017 au débouté de M. P... du chef de sa demande de réformation du jugement quant au prononcé du divorce et quant à ses conséquences, la cour d'appel ne pouvait, sans dénaturer ces conclusions, considérer qu'elles lui permettaient de rejeter la demande de prestation compensatoire ; qu'elle a ainsi violé les articles 4, 5 et 464 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-25900
Date de la décision : 30/01/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 20 février 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 30 jan. 2020, pourvoi n°18-25900


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Le Bret-Desaché, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.25900
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