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22/01/2020 | FRANCE | N°18-17836

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 22 janvier 2020, 18-17836


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 janvier 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 60 F-D

Pourvoi n° J 18-17.836

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 22 JANVIER 2020

1°/ M. A... E...,

2°/ Mme T... R..., épouse E...,

domici

liés tous deux [...]

ont formé le pourvoi n° J 18-17.836 contre l'arrêt rendu le 21 mars 2018 par la cour d'appel d'Agen (1re chambre civile), dans le litig...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 janvier 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 60 F-D

Pourvoi n° J 18-17.836

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 22 JANVIER 2020

1°/ M. A... E...,

2°/ Mme T... R..., épouse E...,

domiciliés tous deux [...]

ont formé le pourvoi n° J 18-17.836 contre l'arrêt rendu le 21 mars 2018 par la cour d'appel d'Agen (1re chambre civile), dans le litige les opposant à la société BNP Paribas Personal Finance, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Sygma banque, défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Vitse, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ghestin, avocat de M. et Mme E..., de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société BNP Paribas Personal Finance, après débats en l'audience publique du 10 décembre 2019 où étaient présents Mme Batut, président, M. Vitse, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 21 mars 2018), qu'à la suite d'un démarchage à domicile, M. E... a, le 27 juin 2013, conclu un contrat de vente et d'installation d'un ensemble photovoltaïque avec la société Premium Energy (la société) ; que, le même jour, la société Sygma banque, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance (la banque), lui a consenti, ainsi qu'à son épouse (les emprunteurs), un crédit d'un montant de 30 000 euros destiné à financer l'opération ; qu'invoquant la défaillance des emprunteurs, la banque les a assignés en paiement du prêt ;

Attendu que ceux-ci font grief à l'arrêt d'accueillir partiellement cette demande ;

Attendu qu'ayant relevé qu'il n'était pas justifié ni même allégué que l'installation ne fonctionnerait pas, la cour d'appel a fait ressortir l'absence de préjudice des emprunteurs et ainsi légalement justifié sa décision d'exclure la responsabilité du prêteur ; qu'inopérant en ses diverses branches, le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme E... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour M. et Mme E...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné solidairement M. A... E... et Mme T... R... à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 30 000 euros en remboursement du capital prêté avec intérêts au taux légal ;

AUX MOTIFS QUE Sur la nullité du contrat principal :

que selon l'ancien article L. 121-23 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, les opérations de démarchage doivent faire l'objet d'un contrat comportant, à peine de nullité, les mentions suivantes : nom du fournisseur et du démarcheur, adresse du fournisseur, l'adresse du lieu de conclusion du contrat, désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés, conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services, prix global à payer et modalités de paiement et en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1, faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 ;

qu'en l'espèce, l'examen du bon de commande fait apparaître que ne sont pas mentionnées les dates de livraison et de pose du matériel et d'achèvement des travaux, la désignation précise de la marque, du type et du nombre du matériel vendu ;

que les consorts E... R... qui invoquent la nullité du contrat de vente et d'installation des panneaux photovoltaïques, n'ont pas mis en cause la société venderesse dans le cadre de la présente procédure ; que dès lors l'hypothèse d'une nullité du contrat de prêt qui résulterait de la nullité du contrat principal ne peut être qu'être écartée ;

que les appelants ne peuvent en outre pallier leur carence en demandant à la cour de dire que la banque fera son affaire personnelle de la somme versée à la société Premium Energy ;

que de plus, alors que les appelants reprochent à la société Premium Energy d'avoir failli à la quasi-totalité de ses obligations contractuelles, et si effectivement le bon de commande ne contient pas toutes les mentions obligatoires prévues par le code de la consommation, il n'est pas justifié ni même allégué que l'installation ne fonctionnerait pas ;

Sur l'irrégularité du contrat de prêt et les fautes de la banque :

que les appelants demandent à la cour de prononcer la nullité du contrat de prêt au regard de la négligence, des manquements fautifs de la banque à leurs égards, cette dernière ayant libéré les fonds avec une légèreté blâmable ;

que l'absence d'action en annulation ou en résolution du contrat principal n'interdit pas à l'emprunteur de se prévaloir des dispositions de l'article L. 311-20 du code précité, aux termes desquels lorsque l'offre préalable mentionne le bien ou la prestation de service financé, les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation et en cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci ;

que si les appelants reconnaissent que M. E... a signé le bon de commande et qu'ils ont tous deux signé le contrat de prêt, dans le dernier état de leurs conclusions devant la cour, ils contestent la signature portée sur le certificat de livraison qui ne serait pas celle de M. E..., certificat qu'ils demandent en outre d'écarter au motif que l'original n'est pas produit ;

qu'il ne peut être reproché au prêteur de ne pas produire l'original du certificat de livraison recueilli par la venderesse absence aux débats, alors que même si le contrat de fourniture et d'installation et le contrat de prêt ont un lien d'interdépendance, ils sont distincts et la société de crédit est tiers au contrat de vente et de prestation de service, les appelants précisant que ledit certificat n'a été établi qu'en un seul exemplaire ;

qu'il résulte de l'examen de la signature apposée sur l'offre de crédit du 27 juin 2013 et de celle apposée sur le certificat de livraison du 16 juillet 2013, que la signature de M. E... est parfaitement similaire comme elle l'est également avec celle figurant sur le bon de commande ;

que de plus, il sera observé que dans le premier état de leurs écritures signifiées devant la cour le 29 février 2016, les appelants soutenaient que « le 16 juillet 2013, l'équipe d'installateurs de panneaux solaires a fait signer un document au Requérant pour, disait-elle, confirmer son intervention et la pose des panneaux », qu'il s'agissait en fait « à la fois une attestation de fin de travaux et une autorisation donnée à Sygma de payer »
« que cette tromperie caractérisée de la société est récurrente », la signature ayant ainsi été obtenue par dol ;

qu'enfin, il n'incombe pas au prêteur de s'assurer de la délivrance des autorisations administratives requises préalablement à la mise en service de l'installation – alors que sur le bon de commande la case prévoyant que ces démarches seraient à la charge de l'installateur n'a pas été cochée – ni de l'achèvement des travaux d'installation, alors que la remise des fonds a eu lieu conformément au certificat signé par M. E... le 16 juillet 2013 qui « atteste avoir accepté sans réserve la livraison du bien effectuée le 16/07/2013 » qui « constate expressément que tous les travaux et prestations de services qui devaient être effectués à ce titre ont été pleinement réalisés. En conséquence, le client emprunteur demande au prêteur de procéder au déblocage des fonds au profit du vendeur ou prestataire de services désigné au cadre A ci-contre. » que l'emprunteur qui détermine l'établissement de crédit à verser les fonds au prestataire de services au vu de la signature par lui du certificat de fin de travaux, n'est pas recevable à soutenir ensuite, au détriment du prêteur, que la prestation de service n'a pas été correctement exécutée ;

que les appelants contestent également la régularité du contrat de prêt au regard des dispositions de l'ancien article L. 311-8 du code de la consommation, en soutenant que la banque ne justifie pas de la formation de son intermédiaire auprès des emprunteurs à la distribution du crédit à la consommation et à la prévention du surendettement ;

qu'en l'espèce, le contrat de prêt ne mentionne aucune accréditation de la société venderesse et de son démarcheur, et la banque ne justifie pas par ailleurs d'une quelconque formation du démarcheur, son intermédiaire auprès des consorts E... R... ;

que par application des dispositions de l'ancien article L. 311-48, la banque encourt donc la déchéance du droit aux intérêts de sorte que sa créance sera limitée au montant du capital emprunté soit la somme de 30 000 euros, faute du moindre paiement opéré par les consorts E... R... ;

que sur le grief fondé sur un déblocage prématuré des fonds alors que les travaux ont été réalisés avant l'obtention de l'autorisation de l'administration, le bon de commande ne portait que la fourniture et l'installation de 16 modules photovoltaïques et d'un ondulateur et du raccordement au réseau Erdf sans inclure les démarches administratives ;

que par ailleurs, les appelants soutiennent que la banque n'a pas vérifié les méthodes commerciales de la société Premium Energy, dont le vendeur aurait réussi à obtenir la signature de M. E... en suite de « multiples propos mensongers » et ils dénoncent la « pratique commerciale agressive » de la société venderesse mais aussi celle de la banque, l'opération constituant en fait un véritable gouffre financier au regard des conditions strictes d'achat d'Edf que vendeur et prêteur ne pouvaient ignorer, sans étayer leurs propos par des éléments permettant de caractériser à l'encontre de la banque une pratique commerciale trompeuse telle que visée par les articles L. 121-1 et suivants du code susvisé ;

que les consorts E... R... seront également déboutés de leurs prétentions de ce chef ;

1°) ALORS QUE la banque qui a consenti un crédit affecté à la livraison d'un bien et/ou d'une prestation de service est déchu du droit à la restitution du capital emprunté qu'il a libéré directement entre les mains du vendeur-prestataire lorsque le contrat de vente est affecté de causes du nullité dont ce fournisseur de crédit aurait dû se convaincre ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que le contrat de vente et de fourniture de prestations était entaché de multiples causes de nullité dont la société Sygma Banque aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance pouvait aisément se convaincre ; qu'en estimant que cette faute de la banque ne la privait pas du droit à la restitution du capital prêté et en condamnant en conséquence M. E... et Mme R... à lui en payer le montant, aux motifs inopérants que ces derniers n'avaient pas sollicité la nullité du contrat principal de vente et de prestations de service, qu'ils ne justifiaient pas que l'installation ne fonctionnait pas ou encore que M. E... aurait signé une attestation de fin de travaux, demande de financement, la cour d'appel a violé l'article 1147 ancien du code civil, L. 311-9 ancien du code de la consommation (actuellement L. 311-1-11°) et L. 311-31 ancien du même code (actuellement L. 312-48) ;

2°) ALORS QUE la banque ne peut obtenir de l'emprunteur la restitution du capital emprunté sans s'être assuré que le bon de livraison signé des emprunteurs attestait, lors du déblocage des fonds, de l'exécution complète de la prestation convenue et qu'elle était suffisamment précise pour rendre compte de la complexité de l'opération financée ; qu'en estimant que le document préimprimé mentionnant que « le vendeur ou prestataire de service
certifie sous sa responsabilité que la livraison du bien et/ou la fourniture de services au client emprunteur
a été réalisé (ont été réalisés)
conformément à la commande de ce dernier » était suffisamment précis pour permettre le déblocage des fonds entre les mains de ce vendeur, prestataire de services, la cour d'appel a violé l'article L. 311-31 ancien du code de la consommation, devenu l'article L. 312-48 du même code ;

3°) ALORS QUE la vérification d'écriture doit être faite au vu de l'original de l'écrit contesté ; que M. E... déniait sa signature sur le certificat de livraison/demande de déblocage des fonds, faisant valoir dans ses conclusions d'appel (p. 1 in fine et 13 in limine) que la vérification d'écriture ne pouvait être faite qu'au vu de l'original de l'écrit contesté ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que le prêteur n'a pas produit l'original de ce document (arrêt p. 6 al. dernier), la vérification d'écriture ayant été effectuée par la cour d'appel au vu d'une simple copie scannée de cette pièce ; qu'en rejetant la demande de M. E... et de Mme R... tendant à écarter cette pièce des débats et à voir constater que la banque n'avait pas débloqué les fonds entre les mains du vendeur au vu d'un certificat de livraison valable et efficace, en procédant à la vérification d'écritures à partir d'une copie scannée de l'acte contesté, la cour d'appel a violé l'article 1324 ancien du code civil et les articles 287 et 288 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QU'il incombe à celui qui se prévaut de l'écrit contesté d'en établir l'authenticité ; qu'il en résulte que le juge ne peut faire droit à une demande fondée sur un écrit contesté que s'il constate avec certitude que l'écrit a bien été signé par celui auquel la signature est attribuée ; qu'en énonçant que la signature de M. sur les documents de comparaison est « similaire » à celle portée sur l'attestation de livraison, la cour d'appel n'a pas exprimé la certitude de l'authenticité de cette signature, violant les articles 1324 ancien du code civil et 287 et 288 du code de procédure civile ;

5°) ALORS QUE l'absence de dénégation de sa signature devant le tribunal n'emporte pas reconnaissance de son authenticité ; qu'en déboutant M. E... de son incident de vérification d'écriture au motif qu'il ne l'avait pas soulevé devant le tribunal et soutenu que celle-ci avait été surprise par un dol, la cour d'appel a derechef violé les articles 1324 ancien du code civil, ensemble les articles 287 et 288 du code de procédure civile ;

6°) ALORS QUE la banque qui a consenti un prêt affecté ne pouvant être débloqué qu'au vu d'une attestation de livraison avec demande de financement ne peut adresser les fonds au vendeur prestataire qu'au vu de l'original de cette attestation ; qu'en décidant le contraire, au motif que l'établissement de crédit est tiers au contrat de vente et de prestation de service, la cour d'appel a violé l'article L. 311-9 ancien du code de la consommation, devenu l'article L. 311-1-11 du même code, ensemble les articles 1315, 1334, 1379 et 1147 ancien du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-17836
Date de la décision : 22/01/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 21 mars 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 22 jan. 2020, pourvoi n°18-17836


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Ghestin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.17836
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