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08/01/2020 | FRANCE | N°18-20315

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 08 janvier 2020, 18-20315


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, que le Conseil national de l'ordre des vétérinaires (le CNOV) a obtenu à l'encontre de la société civile professionnelle de vétérinaires des [...] (la SCP) une ordonnance d'injonction de payer des cotisations ordinales, rendue le 18 septembre 2017 et signifiée le 21 septembre 2017, laquelle a donné lieu à une opposition ;

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles 114, alinéa 2, et 654 du code de procédure civile ;

Att

endu que, selon le premier de ces textes, la nullité d'un acte de procédure ne peut êtr...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, que le Conseil national de l'ordre des vétérinaires (le CNOV) a obtenu à l'encontre de la société civile professionnelle de vétérinaires des [...] (la SCP) une ordonnance d'injonction de payer des cotisations ordinales, rendue le 18 septembre 2017 et signifiée le 21 septembre 2017, laquelle a donné lieu à une opposition ;

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles 114, alinéa 2, et 654 du code de procédure civile ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, la nullité d'un acte de procédure ne peut être prononcée qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité alléguée ;

Attendu que, pour dire que l'ordonnance d'injonction de payer est non avenue comme n'ayant pas été signifiée dans le délai de six mois et que le tribunal d'instance n'a pas été valablement saisi, le jugement relève que cette ordonnance a été signifiée à la personne de M. U... et Mme H..., personnes physiques, et non à la SCP ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne résulte ni du jugement ni des productions que la SCP ait allégué un grief résultant de l'irrégularité prétendue de la signification, le tribunal d'instance a violé les textes susvisés ;

Sur la quatrième branche du moyen :

Vu les articles 58, 114, alinéa 2, 117 et 1407 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour prononcer la nullité pour irrégularité de fond de la requête du CNOV en injonction de payer, le jugement retient que celui-ci ne précise dans sa requête ni le nom ni la qualité de son représentant et que les dispositions de l'article 117 du code de procédure civile sanctionnent cette absence par la nullité de l'acte ;

Qu'en statuant ainsi, alors que si la requête doit, lorsque le requérant est une personne morale, indiquer, à peine de nullité, la forme, la dénomination, le siège social et l'organe qui la représente légalement, le défaut de désignation de ce dernier, lorsque ces mentions sont prévues à peine de nullité, ne constituent que des vices de forme, le tribunal d'instance a violé les textes susvisés ;

Et sur la sixième branche du moyen :

Vu la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires ;

Attendu que, pour rejeter la demande du CNOV, le jugement retient qu'il résulte de l'article L. 242-4 du code rural et de la pêche maritime relatif à l'inscription au tableau de l'ordre des vétérinaires qu'une alternative entre deux inscriptions est offerte, soit celle du praticien à titre personnel, soit celle de la SCP comprenant deux ou plusieurs praticiens, qu'il n'y a pas d'obligation d'une double affiliation et que la double cotisation réclamée induit une différence de traitement entre les praticiens exerçant à titre individuel et ceux exerçant au sein de la SCP en contradiction avec les principes d'égalité et de liberté d'entreprendre et qui est de nature à pénaliser la poursuite de l'activité en société professionnelle ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'appréciation de la validité de la décision par laquelle le CNOV, exerçant en cela une prérogative de puissance publique, fixe le montant de la cotisation due obligatoirement par toute personne inscrite au tableau relève, à titre principal ou préjudiciel, de la compétence des juridictions administratives, le tribunal d'instance a excédé ses pouvoirs et méconnu le texte et le principe susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 29 juin 2018, entre les parties, par le tribunal d'instance de Perpignan ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal judiciaire de Perpignan ;

Condamne la SCP de vétérinaires des [...] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit janvier deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour le Conseil national de l'ordre des vétérinaires

Il est reproché au jugement attaqué d'avoir dit que l'ordonnance d'injonction de payer du 18 septembre 2017, non avenue pour n'avoir pas été signifiée dans le délai de 6 mois, n'a pas saisi valablement le tribunal, d'avoir déclaré irrecevable les demandes formulées par le Conseil national de l'ordre des vétérinaires, d'avoir prononcé la nullité pour irrégularité de fond de la requête aux fins d'injonction de payer ainsi que les conclusions du Conseil national de l'ordre des vétérinaires, d'avoir déclaré irrecevables les demandes formulées par le Conseil national de l'ordre des vétérinaires et de l'avoir débouté de l'ensemble de ses prétentions, d'avoir déclaré prescrites les demandes formulées au titre des cotisations de l'année 2012 et d'avoir débouté le Conseil national de l'ordre des vétérinaires de sa demande de majorations de retard ;

Aux motifs que la signification de l'ordonnance d'injonction de payer a été réalisée à la personne de M. U... et Mme H... personnes physiques, et non à la SCP [...] ; que le tribunal se trouve non valablement saisi par la signification, ce qui a pour effet de rendre irrecevables les demandes formulées par le Conseil de l'ordre ; que le Conseil de l'ordre ne précise dans sa requête et dans ses conclusions ni le nom et la qualité de son représentant, les dispositions de l'article 117 du code de procédure civile faisant obligation aux personnes figurant au procès comme représentant d'une personne morale de disposer d'un pouvoir et sanctionnant le défaut par la nullité de l'acte, trouvent en l'espèce leur juste application ; que le Conseil de l'ordre ne justifie ni n'allègue avoir autorisé, conformément à l'article R. 242-2 du code rural et à son règlement intérieur, l'engagement de la procédure ; que l'ensemble des actes pris au nom du Conseil de l'ordre sont affectés d'une nullité de fond ; qu'à titre subsidiaire, le principe posé par l'article L. 242-4 du code rural disposant : « l'inscription au tableau de l'Ordre, ou le transfert de l'inscription en cas de changement de domicile professionnel, est demandé par les personnes mentionnées au premier alinéa du I de l'article L. 241-17 agissant en son nom personnel ou en qualité de membre d'une société » doit être interprété comme offrant l'alternative entre deux inscriptions, soit celle du praticien à titre personnel, soit celle de la SCP comprenant deux ou plusieurs praticiens, et non comme l'obligation d'une double affiliation qui dès lors viendrait en opposition avec la pratique des docteurs U... et H... n'exerçant que dans le cadre de la SCP qu'ils ont constitué et non au sein d'une ou plusieurs sociétés d'exercice en commun autorisées ; que la double cotisation réclamée par le Conseil de l'ordre induit une différence de traitement entre les praticiens exerçant à titre individuel et ceux exerçant au sein de la SCP, en contradiction avec les principes d'égalité et de liberté d'entreprendre, de nature à pénaliser la poursuite de l'activité en société professionnelle ; que la prescription de cinq ans s'applique aux sommes réclamées pour l'année 2012, majoration comprise à échéance du 31 mars 2012, à compter du 1er avril 2017, aucun acte interruptif n'étant intervenu dans l'intervalle ; que les majorations de retard se présentant comme clauses pénales ne justifiant pas d'un préjudice particulier seront rejetées ;

Alors 1°) que la signification à une personne morale est faite à personne lorsque l'acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à toute autre personne habilitée à cet effet ; qu'en l'espèce, le tribunal a constaté que la signification de l'ordonnance d'injonction de payer prise à l'encontre de la SCP [...] avait été signifiée à chacun de ses représentants légaux ; qu'en retenant néanmoins que la signification de l'ordonnance d'injonction de payer ayant été réalisée à la personne de M. U... et Mme H... personnes physiques et non à la SCP [...], il se trouvait non valablement saisi par la signification, le tribunal a méconnu l'article 654 du code de procédure civile ;

Alors 2°) qu'en tout état de cause, les dispositions de l'article 654 du code de procédure civile ne sont prescrites à peine de nullité qu'à charge pour celui qui invoque une irrégularité de prouver le grief qu'elle lui cause ; qu'en déduisant de la circonstance que les significations de l'ordonnance d'injonction de payer avaient été faites à M. U... et Mme H... personnes physiques pour en déduire qu'il se trouvait non valablement saisi par la signification, sans rechercher si la SCP [...] rapportait la preuve de l'existence d'un grief que lui aurait causé cette prétendue irrégularité, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles 114 et 654 du code de procédure civile ;

Alors 3°) qu'en toute hypothèse, l'ordonnance portant injonction de payer est non avenue si elle n'a pas été signifiée dans les six mois de sa date ; qu'en statuant au fond sur les demandes du Conseil national de l'ordre des vétérinaires en paiement des cotisations ordinales dues par la SCP [...], tout en retenant que l'ordonnance portant injonction de payer n'aurait pas été régulièrement signifiée à la SCP [...], le tribunal a violé l'article 1411 deuxième alinéa du code de procédure civile ;

Alors 4°) en outre que l'indication de l'organe représentant la personne morale est une simple formalité dont l'omission ne peut entraîner la nullité de la requête en injonction de payer qu'à la condition qu'elle ait causé un préjudice à l'adversaire qui s'en prévaut ; qu'en décidant que le défaut de cette mention affectait l'ensemble des actes pris au nom du Conseil national de l'ordre des vétérinaires d'une nullité de fond, le tribunal a méconnu les articles 58 et 114 du code de procédure civile, ensemble les articles 1407 et 1413 dudit code ;

Alors 5°) que dans les procédures orales, les moyens et prétentions sont présumés, sauf preuve contraire, avoir été contradictoirement débattus à l'audience ; que la présomption de régularité doit être écartée lorsque la preuve contraire résulte des pièces de la procédure ou des énonciations du jugement ; qu'en l'espèce, il résulte des mentions du jugement attaqué que la SCP [...] se bornait à soutenir à l'audience que la requête en injonction de payer était nulle pour défaut de précision du nom et de la qualité de son représentant ; qu'en retenant d'office, et sans provoquer la discussion entre les parties, pour déclarer nulle la requête du Conseil national de l'ordre des vétérinaires, que ce dernier ne justifiait ni n'alléguait avoir autorisé, conformément à l'article R. 242-2 du code rural et de la pêche maritime et à son règlement intérieur l'engagement de la procédure, le tribunal a méconnu l'article 16 du code de procédure civile ;

Alors 6°) que la décision par laquelle le Conseil national de l'ordre des vétérinaires, exerçant en cela une prérogative de puissance publique, fixe le montant de la cotisation devant être obligatoirement versée par ses membres inscrits au tableau, est un acte administratif dont l'appréciation de la validité relève, à titre principal ou préjudiciel, de la compétence des juridictions administratives ; qu'en déboutant le Conseil national de l'ordre des vétérinaires de sa demande en paiement des cotisations ordinales pour des motifs étrangers aux conditions de leur recouvrement, le tribunal a excédé ses pouvoirs et méconnu la loi des 16-24 août 1790 et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires ;

Alors 7°) qu'en tout état de cause, il résulte des articles L. 242-3-1 et L. 242-4 du code rural et de la pêche maritime que sont assujetties à cotisation les personnes physiques et les personnes morales inscrites au tableau de l'ordre des vétérinaires ; que compte tenu des charges particulières que représente pour l'ordre l'exercice de ses missions à l'égard des sociétés inscrites à son tableau, les vétérinaires exerçant en leur nom propre et ceux exerçant comme associés d'une société ne se trouvent pas dans la même situation ; que la différence de traitement qui résulte, entre les vétérinaires exerçant en leur nom propre et ceux qui, exerçant comme associés d'une société, qui doivent la cotisation en qualité de personne physique et en qualité de membres de leur société qui doit la même cotisation et acquittent, de ce fait, une contribution plus élevée aux charges de l'ordre, n'est pas manifestement disproportionnée au regard de cette différence de situation ; qu'en retenant que la double cotisation réclamée par le Conseil de l'ordre induit une différence de traitement entre les praticiens exerçant à titre individuel et ceux exerçant au sein de la SCP, en contradiction avec les principes d'égalité et de liberté d'entreprendre, de nature à pénaliser la poursuite de l'activité en société professionnelle, le tribunal a méconnu les textes susvisés ;

Alors 8°) qu'en toute hypothèse, le juge qui décide qu'une demande dont il est saisi est irrecevable, excède ses pouvoirs en statuant ensuite au fond de ce chef ; qu'en déclarant à la fois irrecevables les demandes formées par le Conseil national de l'ordre des vétérinaires et en le déboutant de l'ensemble de ses prétentions au regard du caractère prétendument injustifié, développé dans les motifs, de la cotisation ordinale litigieuse, le tribunal a excédé ses pouvoirs et ainsi violé les article 122 et 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-20315
Date de la décision : 08/01/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Perpignan, 29 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 08 jan. 2020, pourvoi n°18-20315


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.20315
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