LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 3 juillet 2018), que de l'union de Mme E..., de nationalité française et de M. M..., de nationalité australienne, est issu B..., né le [...] , à Randwick (Australie) où le couple était installé depuis 2010 ; qu'en février 2014, Mme E..., qui vivait séparée de M. M... depuis 2012, est partie en France avec l'enfant ; que, par jugement du 10 décembre 2015, le juge aux affaires familiales a fixé la résidence de l'enfant chez la mère et organisé le droit de visite et d'hébergement du père ; que, le 8 juin 2017, M. M... l'a saisi d'une requête tendant à la modification des modalités de l'exercice de l'autorité parentale ;
Attendu que Mme E... fait grief à l'arrêt de fixer la résidence de l'enfant chez le père, alors, selon le moyen :
1°/ que pour se prononcer sur l'intérêt de l'enfant, le juge doit impérativement tenir compte - pour mettre cette donnée en balance avec d'autres considérations - de la situation de l'enfant à la date à laquelle il statue ; qu'en s'abstenant de prendre en considération, au cas d'espèce, le fait que, depuis sa naissance (28 avril 2013), l'enfant réside avec sa mère et qu'âgé de plus de cinq ans à la date de leur décision, l'enfant a toujours résidé avec mère, les juges du second degré ont privé leur décision de base légale au regard des articles 372-2-8 et 373-2-11 du code civil ;
2°/ qu'en tout cas, faute de s'être expliqués sur l'anxiété que l'enfant éprouvait lors de l'exercice par le père de son droit de visite et d'hébergement, sur le fait que le développement psycho-affectif de l'enfant ne permettait pas d'envisager une séparation d'avec la mère, sur sa scolarisation et les activités extra scolaires qu'il déployait accessoirement, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale regard des articles 372-2-8 et 373-2-11 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt constate que l'enfant commun est né en Australie où les parents étaient installés depuis plusieurs années et où ceux-ci ont conclu, le 1er juillet 2013, un accord fixant des modalités d'exercice de l'autorité parentale ; qu'il relève que les conditions du départ de Mme E... en France en 2014 et les difficultés récurrentes rencontrées par M. M... pendant de nombreux mois pour connaître les véritables intentions de la mère quant à son retour en Australie et les conditions de vie et de scolarité de l'enfant mettent en évidence un manque de respect par celle-ci de la place du père, rendant incertain l'accès de l'enfant à sa famille paternelle et à sa double culture ; qu'il ajoute que, pour sa part, M. M... a fait des efforts importants afin de voir son fils régulièrement, louant des appartements en France et en Grande Bretagne, modifiant le lieu de ses activités professionnelles et propose pour l'avenir, après la fin de l'année scolaire, un projet de vie en Australie permettant à la mère, dont il offre de prendre en charge les frais de transport et de séjour, de continuer à entretenir des liens constants et de qualité avec son fils durant un temps pouvant aller de un tiers à la moitié de l'année ; qu'il retient que si D... peut être perturbé, cette insécurité est à mettre en lien avec le conflit parental et les incertitudes sur la fixation de sa résidence habituelle, mais que les deux parents sont également investis dans sa prise en charge et que les deux familles l'entourent également d'affection ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a souverainement déduit que l'intérêt de l'enfant était de résider chez son père, et a ainsi légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme E... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour Mme E....
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a, modifiant la résidence de l'enfant, décidé qu'à compter du 1er août 2018, l'enfant résiderait au domicile de Monsieur M..., en Australie, et organisé un droit de visite et d'hébergement, en Australie, accessoirement en France, au profit de Madame E... ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' « il est constant que l'enfant commun est né en Australie et que les parents étaient installés dans ce pays depuis plusieurs années à sa naissance; que Madame E... n'ignorait pas la nationalité du père de son enfant ; qu'elle avait adhéré à une installation dans ce pays ; que l'accord conclu entre les parents le 1er juillet 2013 matérialisait cette situation et fixait des modalités d'exercice de l'autorité parentale en Australie ; que tes capacités éducatives et d'affection de chacun des parents ne sont pas mises en cause ; qu'il est d'une réalité objective que D... peut posséder une double culture au regard des conditions de sa naissance ; que les conditions du départ de Madame E... en France en 2014 et les difficultés récurrentes du père pendant de nombreux mois, jusqu'au jugement du 10 décembre 2015, à connaître les véritables intentions de la mère quant à son retour en Australie et les conditions de vie et de scolarité de l'enfant, posent question quant au respect par Madame E... de la place du père et de l'instauration, au profit de l'enfant, d'un accès à sa famille paternelle et à sa double culture ; que Monsieur M... a fait des efforts importants afin de pouvoir voir son fils régulièrement ; qu'il a loué des appartements en France et en Grande Bretagne et a modifié le lieu de ses activités professionnelles ; que Madame E... ne conteste pas ne pas avoir informé Monsieur M... durant plusieurs mois qu'elle partageait sa vie avec un autre homme qui se trouvait ainsi vivre au quotidien avec B... ; que Monsieur M... offre de payer tous les frais de transports et les frais de séjours de la mère; que l'enfant pourra ainsi passer un tiers de son temps avec cette dernière dans des conditions d'accueil très confortables ainsi qu'il en résulte des attestations de proches de Monsieur M... et des photographies produites aux débats ; que par ailleurs, B... suivra une scolarité en établissement bilingue à Sydney ; qu'au surplus, Madame E... disposera d'un droit de visite et d'hébergement libre en Australie, les frais afférents étant payés par Monsieur M... ; que ce dernier s'engage à résider uniquement en Australie et à ne plus se déplacer aussi souvent pour des motifs professionnels ; que par ailleurs, de nombreuses attestations produites aux débats font apparaître une famille qui l'entoure et qui connaît l'enfant ; qu'il est constant que D... peut être perturbé du fait de cette situation et du sentiment d'insécurité né du conflit autour de ses conditions de vie et de sa résidence habituelle ; que les deux parents sont également investis dans sa prise en charge et sont désireux de faire partie de sa vie ; que les deux familles sont également présentes autour de lui et l'entourent d'affection au regard des nombreuses photographies présentées ; qu'il doit être constaté que son intérêt passe par le maintien des liens avec ses deux parents et son accès à ses deux cultures, ce qui est une réelle opportunité pour lui ; que Monsieur M... propose de permettre à la mère de continuer à entretenir des liens constants et de qualité avec son fils durant quasiment un tiers du temps et pouvant aller jusqu'à la moitié de l'année ; qu'il s'agit d'une possibilité effective pour Madame E... au regard de la prise en charge de tous les frais par Monsieur M...; qu'à l'opposé, Madame E... ne permet pas l'instauration d'un lien de cette qualité avec le père et a montré des difficultés à respecter la place de ce dernier et à entretenir une communication totalement transparente au sujet de leur enfant commun ; qu'il s'ensuit que la décision déférée sera confirmée quant à la fixation de la résidence habituelle de celui-ci chez son père en Australie à compter du 1er août 2018 au regard de son intérêt » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « s'agissant d'une saisine en la forme des référés, conformément au nouvel article 492-1 du code de procédure civile, la présente décision sera une ordonnance ayant toutefois l'autorité de la chose jugée relativement aux contestations qu'elle tranche, et pourra être frappée d'appel dans un délai de quinze jours ; qu'il convient de rappeler que N... M... et S... E... exercent conjointement l'autorité parentale à l'égard de B... E... M... ; qu'il y a lieu de rappeler ici que l'exercice de l'autorité parentale conjointe à l'égard d'un enfant impose notamment aux deux parents : - de prendre ensemble les décisions importantes concernant la santé, l'orientation scolaire, l'éducation religieuse et le changement de résidence de l'enfant ; - de s'informer réciproquement, dans le souci d'une indispensable communication entre parents, sur l'organisation de la vie de l'enfant (vie scolaire, sportive et culturelle, traitements médicaux. loisirs, vacances, etc.) ; - de permettre la libre communication de l'enfant avec l'autre parent dans le respect du cadre de vie de chacun ; que par ailleurs l'article 373-2 du code civil dispose que tout changement de résidence de l'un des parents, dès lors qu'il modifie les modalités d'exercice de l'autorité parentale, doit faire l'objet d'une information préalable et en temps utile de l'autre parent, qu'en cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le juge aux affaires familiales qui statue selon ce qu'exige l''intérêt de l'enfant, que le juge répartit les frais de déplacement et ajuste en conséquence le montant de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant ; que D... est un enfant âgé aujourd'hui d'un peu plus de 4 ans; qu'il est issu de l'union entre N... M... et S... E..., ces derniers vivant à Londres depuis 2008 puis en Australie depuis 2010; que le couple se séparait peu avant que N... M... et S... E... ne découvrent que cette dernière était enceinte; que N... M... produit un document établi entre S... E... et lui-même et daté du 1er juillet 2013, l'enfant étant âgé de deux mois, indiquant en substance que la résidence de B... était fixée chez la mère en Australie, le père voyant l'enfant quotidiennement et assumant des frais afférents à l'enfant ainsi que certaines dépenses de la mère ; que dans cet accord, il ressort que les parents avaient envisagé un voyage en France de l'enfant avec sa mère et un retour à Sidney, Australie ; qu'en février 2014, S... E..., prétextant que son père était malade, est venue en France avec l'enfant; que depuis, S... E... n'est plus repartie en Australie alors qu'il résulte des échanges produits par N... M... que S... E... lui indiquait qu'elle allait revenir en Australie et ce durant plus d'un an ; que l'échange skype du 29 décembre 2014 entre N... M... et S... E... le confirme ; que N... M... indique qu'il faisait confiance à la mère qui lui assurait qu'elle reviendrait en Australie dès qu'elle pourrait voyager ; qu'ainsi, le délai d'un an pendant lequel il était possible pour N... M... d'entamer une procédure de déplacement illicite d' enfant a couru et s'est écoulé, S... E... notifiant sa position de non retour par un courrier de son conseil un an et un mois après son départ ; que depuis, N... M... justifie, par les nombreuses pièces qu'il verse aux débats, avoir tout fait, y compris changer de pays et de société, pour pouvoir se rapprocher de son fils et maintenir un lien entre eux ; qu'aujourd'hui se pose la question du lieu de résidence habituelle de l'enfant; qu'il résulte des différentes pièces produites par S... E... que cette dernière présente les qualités affectives et éducatives non contestées par le père ; que les parties échangent quelques griefs mais ne procèdent en la matière que par voie d'affirmation ; qu'en l'absence de justificatif certain, il doit donc être considéré que les capacités éducatives, attention, conditions de vie et d'hébergement des parents ne pose aucune difficulté sérieuse pour l'enfant commun ; que seul l'intérêt supérieur de l'enfant doit être retenu pour statuer et également la capacité de chacun des parents de respecter les droits et la place de l'autre ; qu'il ressort des pièces fourmes tant par N... M... que par S... E... que le père apparaît plus concerné par la double culture de l'enfant; que S... E... ne semble pas vouloir, pour l'instant, favoriser l'apprentissage de la langue anglaise par l'enfant altérant ainsi les relations avec le père et alors qu'elle est bilingue et a vécu dans des pays de langue anglaise ; que le projet de vie présenté par le père pour B... tient compte d'un cadre de vie équilibré et épanouissant respectant en outre les droits et la place de la mère, ce que cette dernière a démontré ne pas avoir voulu faire lors de son retour en France; que par conséquent, il sera fait droit à la demande du père tendant à voir fixer la résidence habituelle de l'enfant, à compter du mois d'août 2018, en Australie ; que l'article 373-2 alinéa 2 du code civil dispose que, en cas de séparation des parents, chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l'enfant et respecter les liens de celui-ci avec l'autre parent ; que cette même disposition légale dispose que l'exercice du droit de visite et d'hébergement ne peut être refusé à l'autre parent que pour des motifs graves ; qu'il sera fait droit à l'organisation des relations des parents avec l'enfant proposée pur N... M..., celle-ci étant conforme à l'intérêt de l'enfant ; que pendant l'année, entre septembre 2017 et septembre 2018, la résidence habituelle de l'enfant sera maintenue chez la mère, le père exerçant son droit de visite et d'hébergement la première semaine de chaque mois, du samedi soir avant 19 h au dimanche soir suivant à 19 h, la mère devant amener l'enfant sur Paris et le père ramenant l'enfant, outre un mois en janvier 2018 en Australie, la demande concernant la période d'août 2017 étant devenue sans objet ; que s'agissant de la demande présentée par N... M... concernant les vacances de Noël 2017, dans la mesure où le père exercera son droit de visite et d'hébergement le mois de janvier 2018, il convient de le débouter de sa demande et de dire qu'il bénéficiera de la deuxième moitié de cette période outre la moitié de l'ensemble des autres vacances scolaires ; que l'ensemble des frais afférents au frais de voyage de B... sera assumé par le père ; que dans l'attente du transfert de résidence, la contribution de N... M... à l'entretien et à l'éducation de l'enfant sera maintenue » ;
ALORS QUE, premièrement, pour se prononcer sur l'intérêt de l'enfant, le juge doit impérativement tenir compte – pour mettre cette donnée en balance avec d'autres considérations – de la situation de l'enfant à la date à laquelle il statue ; qu'en s'abstenant de prendre en considération, au cas d'espèce, le fait que, depuis sa naissance (28 avril 2013), l'enfant réside avec sa mère et qu'âgé de plus de cinq ans à la date de leur décision, l'enfant a toujours résidé avec mère, les juges du second degré ont privé leur décision de base légale au regard des articles 372-2-8 et 373-2-11 du Code civil ;
ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et en tout cas, faute de s'être expliqués sur l'anxiété que l'enfant éprouvait lors de l'exercice par le père de son droit de visite et d'hébergement, sur le fait que le développement psycho-affectif de l'enfant ne permettait pas d'envisager une séparation d'avec la mère, sur sa scolarisation et les activités extra scolaires qu'il déployait accessoirement (conclusions de Madame E... en date du 22 mai 2018, p. 14 et 15), les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale regard des articles 372-2-8 et 373-2-11 du Code civil.