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18/12/2019 | FRANCE | N°18-13382

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 décembre 2019, 18-13382


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. P... a été engagé par l'association Centre chorégraphique national de Nantes (CCNN) selon plusieurs contrats à durée déterminée d'usage, en qualité de danseur professionnel entre le 10 septembre 2007 et le 30 avril 2010 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel d'indemnité de déplacement en application de la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984 ;

Sur le moyen unique, pris en s

a quatrième branche :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moy...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. P... a été engagé par l'association Centre chorégraphique national de Nantes (CCNN) selon plusieurs contrats à durée déterminée d'usage, en qualité de danseur professionnel entre le 10 septembre 2007 et le 30 avril 2010 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel d'indemnité de déplacement en application de la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984 ;

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de débouter le salarié de sa demande de rappel d'indemnité de déplacement au titre de l'année 2010 ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de cette demande, alors, selon le moyen, que, selon l'article VIII.2 de la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984, l'indemnité de déplacement représente le remboursement forfaitaire des frais supplémentaires de nourriture et d'hébergement réellement engagés par les membres du personnel artistique, technique et administratif à l'occasion des déplacements imposés par l'exercice de leur profession ; que, selon cette stipulation, l'indemnité due est l'indemnité de grand déplacement quand les conditions du grand déplacement, telles que définies au préambule, sont réunies ; qu'en vertu du préambule de l'article VIII de la convention précitée, le grand déplacement est caractérisé par l'impossibilité pour un salarié de regagner chaque jour son lieu de domicile du fait de ses conditions de travail ; que l'empêchement est présumé lorsque deux conditions sont simultanément réunies, à savoir que la distance lieu de domicile du salarié vers le lieu de travail est supérieure ou égale au seuil conventionnel de distance (trajet aller) de 40 kilomètres et que les transports en commun ne permettent pas de parcourir cette distance dans un temps inférieur à 1 heure 30 (trajet aller et retour) ; que, pour débouter, en l'espèce, le salarié de sa demande en paiement de la partie repas de l'indemnité de déplacement au titre l'année 2010, la cour d'appel a estimé, par motifs propres et adoptés, que l'indemnité ne pouvait être payée que dans l'hypothèse où le salarié se déplace de son domicile à un autre lieu de travail que le lieu d'exercice habituel et que le fait d'avoir des contrats d'engagement précaires ne fait pas obstacle à l'existence d'un lieu d'exercice permanent comme le démontre la situation du salarié qui a travaillé pour l'association pendant trois ans ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans vérifier, comme elle y était invitée, si les conditions du grand déplacement était réunies, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article VIII de la convention collective susvisée ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article VIII.2 de la convention collective applicable, modifié par avenant du 20 février 2009, « L'indemnité de déplacement représente le remboursement forfaitaire des frais supplémentaires de nourriture et d'hébergement réellement engagés par les membres du personnel artistique, technique et administratif à l'occasion des déplacements imposés par l'exercice de leur profession. L'indemnité due est l'indemnité de petit déplacement quand les conditions du petit déplacement, telles que définies au préambule, sont réunies, à moins que l'employeur ne prenne en charge l'organisation d'un repas. L'indemnité due est l'indemnité de grand déplacement quand les conditions du grand déplacement, telles que définies au préambule, sont réunies » ; que selon le préambule du titre VIII de la convention collective, « Les différents déplacements sont les suivants: - lieu de domicile du salarié vers le lieu de travail habituel, précisé au contrat de travail ; - déplacement vers un autre lieu de travail depuis le lieu de travail habituel ; - déplacement vers un autre lieu de travail depuis le lieu de domicile du salarié, qu'il faut distinguer suivant qu'il s'agit d'un petit ou d'un grand déplacement : - le petit déplacement est un déplacement hors des sites de l'entreprise, tel que les conditions de travail interdisent au salarié de regagner son domicile ou les sites de l'entreprise pour le repas ; - le grand déplacement (à défaut de zone géographique précisée dans l'accord d'entreprise, tel que prévu à l'article VIII. 1. 1A) est caractérisé par l'impossibilité pour un salarié de regagner chaque jour son lieu de domicile du fait de ses conditions de travail » ; qu'il résulte de ces dispositions que le salarié pouvant bénéficier de l'indemnité de grand déplacement est celui qui effectue des déplacements de son domicile vers un autre lieu de travail que son lieu de travail habituel et se trouve dans l'impossibilité de regagner chaque jour son lieu de domicile du fait de ses conditions de travail ;

Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté, par motifs propres et adoptés, que le salarié avait son lieu de travail habituel à Nantes et qu'il n'effectuait pas de déplacements de son domicile vers un autre lieu de travail que son lieu de travail habituel, de sorte qu'il ne pouvait prétendre au paiement d'une indemnité de grand déplacement, a, sans avoir à effectuer une recherche que ses constatations rendaient inopérante, légalement justifié sa décision ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de débouter le salarié de sa demande de rappel d'indemnité de déplacement au titre des années 2007 à 2009 :

Vu les articles 2 et 4 de l'annexe à la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984, régissant les rapports entre les directeurs des entreprises artistiques et culturelles, les centres dramatiques et les artistes interprètes, alors applicable, et l'article VIII.4.7. de la convention collective, dans sa rédaction issue de l'avenant du 14 avril 1999 ;

Attendu que, selon le deuxième de ces textes, « L'indemnité de déplacement représente le remboursement forfaitaire des frais supplémentaires réellement engagés par les artistes à l'occasion des déplacements imposés par l'exercice de leur profession. Chaque fois que les activités pour lesquelles il a été engagé obligeront l'artiste à séjourner en dehors de la ville (ou de la banlieue de la ville) où il a son domicile permanent, il a droit à l'indemnité de déplacement » ; qu'aux termes du troisième de ces textes, « Le règlement de l'indemnité peut s'effectuer comme suit : - prise en charge des frais réels directement par l'employeur ; - remboursement des frais directement au salarié, sur présentation de justificatifs dans la limite du montant de l'indemnité forfaitaire ; - versement au salarié de l'indemnité conventionnelle forfaitaire. Le règlement de l'indemnité s'effectuera selon le choix de l'employeur » ; qu'en vertu du premier des textes susvisés, « Dans tous les cas, le contrat d'engagement fera obligatoirement mention des modalités d'attribution de l'indemnité journalière de déplacement »; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque le contrat d'engagement ne mentionne pas les modalités d'attribution de l'indemnité de déplacement, l'employeur ne peut subordonner le paiement de cette indemnité à la présentation par le salarié de justificatifs de frais ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande, l'arrêt retient que l'article VIII-4.7 de la convention collective énonce que « l'indemnité de déplacement en tournée représente le remboursement forfaitaire des frais supplémentaires réellement engagés par les membres du personnel affectés à la tournée à l'occasion des déplacements imposés par l'exercice de leur profession », texte identique au premier alinéa de l'article 4 de l'annexe, qu'il prévoit également que le règlement de l'indemnité peut s'effectuer « selon le choix de l'employeur », soit par la prise en charge des frais réels directement par l'employeur, soit par remboursement des frais au salarié sur présentation de justificatifs dans la limite du montant de l'indemnité, soit par versement de l'indemnité conventionnelle forfaitaire, qu'aux termes de l'article VIII-7 c'est à l'employeur de décider du mode de règlement de l'indemnité de sorte qu'il n'avait pas à recueillir le consentement du salarié, que ce dernier se prévaut de l'article 2 de l'annexe qui prévoit que le contrat d'engagement doit obligatoirement faire mention des modalités d'attribution de l'indemnité journalière, mais que la circonstance que le CCNN ait omis d'insérer une telle clause dans les contrats d'engagement ne saurait avoir pour conséquence d'ouvrir au salarié un droit au versement de l'indemnité que ne prévoient pas les dispositions conventionnelles, que conformément à l'article 1315 du code civil dans sa rédaction applicable, c'est au salarié qui prétend avoir déboursé des frais d'hébergement et de nourriture d'en rapporter la preuve, que force est de constater que l'intéressé ne présente aucun justificatif mais se contente de réclamer les montants forfaitaires pour l'ensemble des journées passées à Nantes pendant sa période d'engagement avec le CCNN ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'employeur n'avait pas mentionné dans les contrats d'engagement du salarié les modalités d'attribution de l'indemnité de déplacement, ce dont elle aurait dû déduire que le salarié était fondé à bénéficier du versement de l'indemnité forfaitaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. P... de sa demande de rappel d'indemnité de déplacement pour les années 2007 à 2009, l'arrêt rendu le 22 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Condamne l'association Centre chorégraphique national de Nantes aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association Centre chorégraphique national de Nantes à payer à M. P... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP [...] et [...], avocat aux Conseils, pour M. P...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. P... de sa demande en condamnation de l'association CCNN à lui payer une somme à titre d'indemnité de déplacement pour les années 2007 à 2010 et une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens

AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris,

« Attendu que l'article 8 1-1 de la Convention collective nationale des entreprises artistiques et culturelles définit le grand déplacement comme "le déplacement qui entraîne pour le personnel l'obligation de se rendre en dehors de la ville où il exerce son activité habituellement" ;
Attendu que le préambule de l'article 8 de la même convention applicable à partir du 1er janvier 2010 stipule que "le grand déplacement est caractérisé par l'impossibilité pour un salarié de regagner chaque jour son lieu de domicile du fait de ses conditions de travail" ;
Attendu que le contrat de travail ne spécifie aucune condition particulière de déplacement ;
Attendu que la convention collective précise que toute particularité relative aux frais de déplacement doit être précisée au contrat ;
Attendu que le CENTRE CHORÉGRAPHIQUE NATIONAL DE NANTES indemnisait le transport de son domicile à Lyon vers Nantes où se déroulaient les préparations et les spectacles ;
Attendu que monsieur P... était hébergé chez ses parents à Nantes ;
Attendu que le lieu habituel de travail, lorsqu'il n'est pas spécifié dans le contrat de travail, est le siège social ;
Attendu que le SYNDEAC considère que "dès lors que le lieu de travail effectif de l'artiste est le lieu habituel de travail [en l'espèce le siège social du CCN de Nantes] cette situation ne peut être analysée comme étant une situation de grand déplacement" ;
Attendu que l'URSSAF de Paris déclare que "le salarié ne peut être considéré sur le plan de la législation de la sécurité sociale comme étant en situation de grand déplacement lorsqu'il se rend sur un lieu de travail à Nantes quand bien même son domicile habituel est situé à Paris" ;
En conséquence, le Conseil de prud'hommes de Nantes dit que monsieur P... n'était pas en grand déplacement et qu'il ne pouvait donc pas bénéficier de l'indemnité correspondante. » ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué,

« Sur les demandes au titre des années 2007 à 2009
L'article 4 alinéas 1 et 2 de l'annexe artistes interprètes de la convention collective nationale des entreprises artistiques et culturelles énonce que :
"L'indemnité de déplacement représente le remboursement forfaitaire des frais supplémentaires réellement engagés par les artistes à l'occasion des déplacements imposés par l'exercice de leur profession.
Chaque fois que les activités pour lesquelles il a été engagé obligeront l'artiste à séjourner hors de la ville où il a son domicile permanent, il a droit à l'indemnité de déplacement dans les conditions prévues à l'annexe "Tournées" et sous réserve des dispositions ci-après".
Ces dispositions opèrent des distinctions en fonction de la durée de l'engagement et précisent que, pour les engagements d'une durée égale ou inférieure à 3 mois, l'indemnité est due du premier au dernier jour.
L'alinéa suivant ajoute : "Dans le cas où la direction serait en mesure de proposer un logement offrant les conditions de confort normales, l'artiste ne saurait être tenu d'accepter cette proposition. S'il acceptait, il ne pourrait lui être demandé un prix de location supérieur à la part d'indemnité de déplacement affectée à la chambre".
L'alinéa 2 de l'article 4 renvoie aux articles de la convention collective relatifs à l'indemnité de déplacement pour les salariés en tournée. Les mots "dans les conditions prévues à l'annexe "Tournées" signifient qu'il existait des conditions. L'appelant ne peut donc se prévaloir uniquement à l'article VIII-4.8 relatif au montant de l'indemnité et à ses modalités de versement.
L'article VIII-4.7 énonce que "l'indemnité de déplacement en tournée représente le remboursement forfaitaire des frais supplémentaires réellement engagés par les membres du personnel affectés à la tournée à l'occasion des déplacements imposés par l'exercice de leur profession", texte identique au premier alinéa de l'article 4 de l'annexe mentionné plus haut. Il prévoit également que le règlement de l'indemnité peut s'effectuer "selon le choix de l'employeur" soit par la prise en charge des frais réels directement par l'employeur, soit par remboursement des frais au salarié sur présentation de justificatifs dans la limite du montant de l'indemnité soit par versement de l'indemnité conventionnelle forfaitaire.
Il suit de là que, pour les déplacements autres que les tournées, le régime des artistes présentait deux particularités par rapport au droit commun de la convention collective, la prise en compte du domicile (et non le lieu d'exercice habituel prévu à l'article VIII-2) et la durée pendant laquelle ils pouvaient réclamer le versement de l'indemnité de déplacement en fonction de la durée de leur engagement. L'intimé est donc fondé à soutenir que l'exigence de frais réellement engagés pour se loger et se nourrir et l'option de l'employeur entre trois modalités de prise en charge étaient les mêmes.
Il est spécifié à l'article VIII-7 que c'est à l'employeur de décider du mode de règlement de l'indemnité de sorte qu'il n'avait pas à recueillir le consentement du salarié, contrairement à ce qui est soutenu. L'appelant se prévaut de l'article 2 de l'annexe qui prévoit que le contrat d'engagement doit obligatoirement faire mention des modalités d'attribution de l'indemnité journalière mais la circonstance que le Centre de Nantes ait omis d'insérer une telle clause dans les contrats d'engagement ne saurait avoir pour conséquence d'ouvrir au salarié un droit au versement de l'indemnité que ne prévoient pas les dispositions conventionnelles.
Conformément à l'article 1315 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, c'est au salarié qui prétend avoir déboursé des frais d'hébergement et de nourriture d'en rapporter la preuve. Force est de constater que l'appelant ne présente aucun justificatif mais se contente de réclamer les montants forfaitaires pour l'ensemble des journées passées à Nantes pendant sa période d'engagement avec le Centre chorégraphique (sa pièce 5).
M. P... sera donc débouté de sa demande au titre des années 2007 à 2009, le jugement étant confirmé par substitution de motifs.

Sur la demande au titre de l'année 2010
L'article VIII-2 de la convention collective nationale applicable aux artistes à compter du 1er janvier 2010 énonce que : "L'indemnité de déplacement représente le remboursement forfaitaire des frais supplémentaires de nourriture et d'hébergement réellement engagés par les membres du personnel artistique, technique et administratif à l'occasion des déplacements imposés par l'exercice de leur profession". Il prévoit des indemnités de petit déplacement et de grand déplacement et renvoie au préambule de l'article pour la définition de ces termes.
Ce préambule distingue trois types de déplacement :
- le déplacement entre le domicile et le lieu d'exercice habituel,
- le déplacement vers un autre lieu de travail depuis le lieu de travail,
- le déplacement vers un autre lieu de travail depuis le domicile du salarié, la distinction entre petit et grand déplacement n'étant prévu que dans cette hypothèse.
Ce texte est clair et dénué d'ambiguïté, l'indemnité ne pouvant être payée que dans l'hypothèse où le salarié se déplace de son domicile à un autre lieu de travail que le lieu d'exercice habitue. Le fait d'avoir des contrats d'engagements précaires ne fait pas obstacle à l'existence d'un lieu d'exercice permanent comme le démontre la situation de l'appelant qui a travaillé pour le Centre de Nantes pendant trois ans.
Il n'existe pas non plus de rupture du principe d'égalité, le texte s'appliquant indifféremment aux salariés en contrat à durée déterminée ou en contrat à durée indéterminée.
Le jugement qui a débouté M. P... de l'intégralité de ses demandes sera confirmé en toutes ses dispositions. Il sera condamné aux dépens d'appel et à payer 300 € à l'intimé au titre de ses frais irrépétibles. » ;

ALORS, en premier lieu, QUE, selon l'article 4 de l'annexe à la convention collective du 1er janvier 1984, régissant les rapports entre les directeurs des entreprises artistiques et culturelles, les centres dramatiques et les artistes-interprètes, l'indemnité de déplacement représente le remboursement forfaitaire des frais supplémentaires réellement engagés par les artistes à l'occasion des déplacements imposés par l'exercice de leur profession ; que, selon ce même texte, chaque fois que les activités pour lesquelles il a été engagé obligeront l'artiste à séjourner en dehors de la ville (ou de la banlieue de la ville) où il a son domicile permanent, il a droit à l'indemnité de déplacement dans les conditions fixées à l'annexe "Tournées" ; que l'article VIII.4.7 de la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984, dans sa version antérieure à l'avenant du 14 avril 1999, prévoit que le règlement de l'indemnité peut s'effectuer selon le choix de l'employeur, pour ses différentes composantes, comme suit : - prise en charge des frais réels directement par l'employeur ; - remboursement des frais directement au salarié, sur présentation de justificatifs dans la limite du montant de l'indemnité forfaitaire ; - versement au salarié de l'indemnité conventionnelle forfaitaire ; que, selon l'article 2 de l'annexe précitée, le contrat d'engagement doit faire obligatoirement mention des modalités d'attribution de l'indemnité journalière de déplacement ; que, pour débouter le salarié débouter, en l'espèce, le salarié de sa demande en paiement de l'indemnité de déplacement au titre des années 2007 à 2009, la cour d'appel a considéré qu'en vertu de l'article VIII.7 de la convention collective applicable, c'est à l'employeur de décider du mode de règlement de l'indemnité de sorte qu'il n'avait pas à recueillir le consentement du salarié et qu'il pouvait choisir d'exiger du salarié la présentation de justificatifs pour lui rembourser ses frais ; qu'elle a ajouté que, si le salarié se prévalait de l'article 2 de l'annexe qui prévoit que le contrat d'engagement doit obligatoirement faire mention des modalités d'attribution de l'indemnité journalière, la circonstance que l'association CCNN ait omis d'insérer une telle clause dans les contrats d'engagement ne saurait avoir pour conséquence d'ouvrir au salarié un droit au versement de l'indemnité que ne prévoient pas les dispositions conventionnelles ; qu'elle en a conclu que, conformément à l'article 1315 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, c'est au salarié qui prétend avoir déboursé des frais d'hébergement et de nourriture d'en rapporter la preuve et a constaté que le salarié ne présentait aucun justificatif ; qu'en statuant ainsi, alors que, faute pour l'employeur d'avoir inséré au contrat de travail une clause informant le salarié de son choix quant au mode de règlement de l'indemnité de déplacement, le salarié avait droit à l'indemnité forfaitaire de déplacement, la cour d'appel a violé les stipulations susvisées ;

ALORS, en deuxième lieu, QUE, selon l'article 4 de l'annexe à la convention collective du 1er janvier 1984, régissant les rapports entre les directeurs des entreprises artistiques et culturelles, les centres dramatiques et les artistes-interprètes, l'indemnité de déplacement représente le remboursement forfaitaire des frais supplémentaires réellement engagés par les artistes à l'occasion des déplacements imposés par l'exercice de leur profession ; que, selon ce même texte, chaque fois que les activités pour lesquelles il a été engagé obligeront l'artiste à séjourner en dehors de la ville (ou de la banlieue de la ville) où il a son domicile permanent, il a droit à l'indemnité de déplacement ; que, pour débouter, en l'espèce, le salarié de sa demande en paiement de l'indemnité de déplacement au titre des années 2007 à 2009, la cour d'appel a considéré qu'en vertu de l'article VIII.7 de la convention collective applicable, c'est à l'employeur de décider du mode de règlement de l'indemnité de sorte qu'il n'avait pas à recueillir le consentement du salarié et qu'il pouvait choisir d'exiger du salarié la présentation de justificatifs pour lui rembourser ses frais ; qu'elle a ajouté que, si le salarié se prévalait de l'article 2 de l'annexe qui prévoit que le contrat d'engagement doit obligatoirement faire mention des modalités d'attribution de l'indemnité journalière, la circonstance que l'association CCNN ait omis d'insérer une telle clause dans les contrats d'engagement ne saurait avoir pour conséquence d'ouvrir au salarié un droit au versement de l'indemnité que ne prévoient pas les dispositions conventionnelles ; qu'elle en a conclu que, conformément à l'article 1315 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, c'est au salarié qui prétend avoir déboursé des frais d'hébergement et de nourriture d'en rapporter la preuve et a constaté que le salarié ne présentait aucun justificatif ; qu'en statuant ainsi, alors que le fait pour l'artiste de séjourner en dehors de la ville où il a son domicile permanent entraîne nécessairement des frais supplémentaires qui donnent droit à l'indemnité de déplacement, la cour d'appel a violé la stipulation susvisée ;

ALORS, en troisième lieu, QUE, selon l'article VIII.2 de la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984, l'indemnité de déplacement représente le remboursement forfaitaire des frais supplémentaires de nourriture et d'hébergement réellement engagés par les membres du personnel artistique, technique et administratif à l'occasion des déplacements imposés par l'exercice de leur profession ; que, selon cette stipulation, l'indemnité due est l'indemnité de grand déplacement quand les conditions du grand déplacement, telles que définies au préambule, sont réunies ; qu'en vertu du préambule de l'article VIII de la convention précitée, le grand déplacement est caractérisé par l'impossibilité pour un salarié de regagner chaque jour son lieu de domicile du fait de ses conditions de travail ; que l'empêchement est présumé lorsque deux conditions sont simultanément réunies, à savoir que la distance lieu de domicile du salarié vers le lieu de travail est supérieure ou égale au seuil conventionnel de distance (trajer aller) de 40 kilomètre et que les transports en commun ne permettent pas de parcourir cette distance dans un temps inférieur à 1h30 (trajet aller et retour) ; que, pour débouter, en l'espèce, le salarié de sa demande en paiement de la partie repas de l'indemnité de déplacement au titre l'année 2010, la cour d'appel a estimé, par motifs propres et adoptés, que l'indemnité ne pouvait être payée que dans l'hypothèse où le salarié se déplace de son domicile à un autre lieu de travail que le lieu d'exercice habituel et que le fait d'avoir des contrats d'engagement précaires ne fait pas obstacle à l'existence d'un lieu d'exercice permanent comme le démontre la situation du salarié qui a travaillé pour l'association pendant trois ans ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans vérifier, comme elle y était invitée, si les conditions du grand déplacement était réunies, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article VIII de la convention collective susvisée ;

ALORS, en quatrième lieu et subsidiairement, QUE, selon l'article VIII.2 de la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984, l'indemnité de déplacement représente le remboursement forfaitaire des frais supplémentaires de nourriture et d'hébergement réellement engagés par les membres du personnel artistique, technique et administratif à l'occasion des déplacements imposés par l'exercice de leur profession ; que, selon cette stipulation, l'indemnité due est l'indemnité de grand déplacement quand les conditions du grand déplacement, telles que définies au préambule, sont réunies ; qu'en vertu du préambule de l'article VIII de la convention précitée, les différents déplacements sont les suivants : - lieu de domicile du salarié vers le lieu de travail habituel, précisé au contrat de travail ; - déplacement vers un autre lieu de travail depuis le lieu de travail habituel ; - déplacement vers un autre lieu de travail depuis le lieu de domicile du salarié, qu'il faut distinguer suivant qu'il s'agit d'un petit ou d'un grand déplacement ; que, pour débouter, en l'espèce, le salarié de sa demande en paiement de la partie repas de l'indemnité de déplacement au titre de l'année 2010, la cour d'appel a estimé, par motifs propres et adoptés, que l'indemnité ne pouvait être payée que dans l'hypothèse où le salarié se déplace de son domicile à un autre lieu de travail que le lieu d'exercice habituel ; qu'elle a ajouté que le fait d'avoir des contrats d'engagement précaires ne fait pas obstacle à l'existence d'un lieu d'exercice permanent comme le démontre la situation du salarié qui a travaillé pour l'association pendant trois ans ; qu'elle a également considéré qu'il n'existe pas de rupture du principe d'égalité, le texte s'appliquant indifféremment aux salariés en contrat à durée déterminée ou en contrat à durée indéterminée ; qu'en statuant ainsi, alors que, si la stipulation du préambule de l'article VIII de la convention précitée est a priori neutre et ouvre l'octroi de l'indemnité de déplacement quel que soit le contrat de travail considéré, elle a pour effet de priver concrètement de son bénéfice les salariés ayant conclu des contrats à durée déterminée d'usage, la cour d'appel a violé l'article L. 1242-14 du code du travail, la clause 4 de l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée, annexé à la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999, ensemble le principe d'égalité de traitement.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-13382
Date de la décision : 18/12/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Conventions diverses - Convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984 - Article VIII.2 - Déplacements et tournées, voyages - Indemnité de grand déplacement - Octroi - Conditions - Détermination - Portée

Il résulte des dispositions de l'article VIII.2, modifié par avenant du 20 février 2009, de la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984 et du préambule du titre VIII de cette convention collective que le salarié pouvant bénéficier de l'indemnité de grand déplacement est celui qui effectue des déplacements de son domicile vers un autre lieu de travail que son lieu de travail habituel et se trouve dans l'impossibilité de regagner chaque jour son lieu de domicile du fait de ses conditions de travail. Justifie dès lors sa décision la cour d'appel qui, ayant constaté que le salarié n'effectuait pas de déplacements de son domicile vers un autre lieu de travail que son lieu de travail habituel, déboute l'intéressé de sa demande d'indemnité de grand déplacement


Références :

article VIII.2, modifié par avenant du 20 février 2009, de la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984 et du préambule du titre VIII de cette convention collective

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 22 décembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 déc. 2019, pourvoi n°18-13382, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Cathala (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.13382
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