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11/12/2019 | FRANCE | N°18-14056

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 décembre 2019, 18-14056


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 2 février 2018), qu'engagé par la société EDF le 13 novembre 1982 en qualité de technicien, M. C... occupait en dernier lieu le poste de responsable régional ensemblier externe au centre Délégation immobilière régionale Méditerranée, correspondant au groupe fonctionnel (GF) 14 ; que l'employeur a prononcé une mesure de rétrogradation à titre disciplinaire et lui a notifié sa mutation au sein de la délégation immobilière régionale Rhône-Alpes ; que le

salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir l'annulation de sa r...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 2 février 2018), qu'engagé par la société EDF le 13 novembre 1982 en qualité de technicien, M. C... occupait en dernier lieu le poste de responsable régional ensemblier externe au centre Délégation immobilière régionale Méditerranée, correspondant au groupe fonctionnel (GF) 14 ; que l'employeur a prononcé une mesure de rétrogradation à titre disciplinaire et lui a notifié sa mutation au sein de la délégation immobilière régionale Rhône-Alpes ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir l'annulation de sa rétrogradation et de sa mutation, le paiement de diverses sommes et sa réintégration sous astreinte au centre de Marseille ;

Sur le moyen unique, pris en ses première, troisième et quatrième branches :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les griefs ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes alors, selon le moyen, que l'article 148 de la PERS 846 indique que « le déplacement n'étant pas prévu parmi les sanctions disciplinaires énumérées à l'article 6 du statut national, cette mesure, qui n'intervient qu'exceptionnellement ne doit jamais être appliquée à titre de sanction. Dans le cas où un déplacement vient à être décidé dans l'intérêt du service il ne doit pas figurer dans la lettre signifiant la sanction à l'intéressé mais faire l'objet d'une notification séparée » ; que l'arrêt constate que le 29 avril 2013, l'employeur a écrit à M. C... « J'ai décidé, en application des dispositions de l'article 6 du Statut National et de la circulaire Pers 846 du 16 juillet 1985, de vous infliger la sanction de rétrogradation de 2GF, en raison des manquements graves qui vous sont reprochés...Il en résulte qu'à compter du 1er juin 2013, votre nouveau classement sera le suivant : GF 2 NR 240. Par ailleurs dans la mesure où vous ne pouvez être reclassé dans un emploi correspondant à ce nouveau GF au sein de la délégation immobilière régionale Méditerranée, vous serez affecté dans un emploi de chargé de mission à la délégation immobilière régionale Rhône-Alpes de la DIG. Je vous rappelle que dans la mesure où cette sanction modifie votre contrat de travail elle nécessite votre acceptation écrite » ; que le 12 juin 2013, l'employeur a confirmé son nouveau classement en GF 12-NR 240 à compter du 1er juillet 2013 ; que le 13 juin 2013 l'employeur a écrit à l'agent : « Par courrier du 12 juin je vous ai notifié aux termes de la procédure votre sanction disciplinaire. Comme nous vous l'avions déjà évoqué, compte tenu de la nature des faits et afin de préserver l'intérêt des services et le bon fonctionnement de la DIR Méditerranée, les circonstances me conduisent à confirmer votre affectation dans un emploi de chargé de mission au sein de la DIR Rhône-Alpes Auvergne situé à Lyon à compter du 1er juillet dans l'attente d'une possible mutation sur la région de Marseille » ; qu'en ne tirant pas les conséquences de ses constatations, qui faisaient ressortir que l'employeur avait irrégulièrement sanctionné M. C... en le rétrogradant et en l'affectant à la DIR Rhône Alpes, la cour d'appel a violé l'article 148 de la PERS 846, ensemble les articles L. 1332-1, L. 331-1, L. 1332-1 du code du travail ;

Mais attendu que l'article 148 de la circulaire réglementaire Pers. 846 du 16 juillet 1985 n'interdit aucunement à l'employeur de procéder, concomitamment à la notification de la sanction disciplinaire, à une mutation dans l'intérêt du service ;

Et attendu que la cour d'appel a constaté que l'agent occupant un poste de « responsable régional ensemblier externe » au sein de l'antenne de Marseille Sud et disposant toujours du pouvoir de signer et valider des demandes d'achats, sa mutation à Lyon était justifiée par les nécessités du service ; qu'elle en a exactement déduit que la mutation ne constituait pas une sanction ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. C... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. C....

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. C... de ses demandes ;

Aux motifs que l'article L. 1332-1 du code du travail prévoit qu'aucune sanction ne peut être prise à l'encontre du salarié sans que celui-ci soit informé, dans le même temps et par écrit, des griefs retenus contre lui ; que la circulaire PERS 846 prévoit de même aux différents stades de la procédure disciplinaire que l'agent est informé des griefs retenus contre lui et peut prendre connaissances des pièces relatives aux faits reprochés ; que, suite à une alerte intervenue fin août 2012 faisant état qu'EDF pouvait avoir été victime d'agissements frauduleux consistant en des surfacturations ou des facturations de prestations fictives de la part de différents prestataires, alerte ciblant plus particulièrement la DIR Méditerranée (DIRMED) et notamment l'Antenne de Marseille Sud ainsi que son ancien chef de secteur PACA ouest en poste de janvier 2004 à juin 2012 (D... C...), EDF a décidé au dernier trimestre 2012 de commander une mission d'audit ; que Mme P..., Directeur Groupe Immobilier, atteste dans son rapport dressé par l'autorité compétente en application de l'article 2331 de la PERS 846 du 4 février 2013 les circonstances de la mise en place de cet audit ; que dans le cadre de cette mission confiée au cabinet PWC, le disque dur de M. C... a été saisi par huissier le 18 octobre 2012 ; que l'intimé ne peut soutenir que EDF avait à cette date connaissance des faits fautifs, la saisie pratiquée ayant justement pour objectif de procéder à des investigations sur son ordinateur ; que M. C... ne peut donc objecter à l'appelant que la procédure disciplinaire à son encontre devait être engagée avant la mi-décembre 2012 ; que le moyen tiré de la prescription sera écarté, d'autant que EDF justifie n'avoir eu connaissance de faits fautifs reprochés à M. C... que le 11 janvier 2013 par une information de l'audit communiquée à cette date ; que cela ressort en effet des éléments suivants : - un mail du 11 janvier 2013 de Mme P... à Mme E..., Directeur des Opérations, en ces termes : « J'ai été informée ce jour par la direction de l'audit que dans le cadre de la mission en cours concernant la DIRMED un certain nombre de graves dysfonctionnements ont été constatés et mettent en cause deux collaborateurs de la DIRMED : I... V... et D... C.... Je te demande de faire procéder aux dernières vérifications nécessaires et d'engager sans délai la procédure disciplinaire à leur encontre » ; - du rapport dressé par l'autorité compétente Mme P... du 4 février 2013, rappelant ce message et ajoutant qu'immédiatement après cette alerte, Mme E... a opéré les vérifications qui s'imposaient car ces dysfonctionnements mettaient directement en cause M. C.... En particulier ont été rassemblées de nombreuses pièces (factures, devis) relatives à des commandes qu'il avait validées et passées auprès d'entreprises prestataires ; que le directeur des opérations a constaté que les dysfonctionnements étaient avérés ; que s'agissant du moyen tiré de l'absence de contradictoire de la procédure disciplinaire au motif que n'aurait jamais été communiqué dans le cadre de celle-ci le rapport d'audit, dont M. C... affirme qu'il est à la base des poursuites engagées contre lui, la cour constate que, conformément aux instructions de la PERS 846, qui prévoient la communication à l'intéressé des pièces relatives aux faits reprochés avec faculté de présentation d'un mémoire devant la commission secondaire siégeant en matière de discipline (article 2312 de la PERS 846), M. C... ne conteste pas avoir eu accès aux pièces suivantes : - rapport précité de Mme P... du 4 février 2013 reprochant à D... C... les faits suivants: 1°) par comparaison avec les prix du marché, M. C... a passé des commandes sur la base de devis manifestement surévalués conduisant à la surfacturation de plusieurs prestations réalisées par les sociétés Evolution E2J, et Miroiterie Sébastopol (MS) : * validation d'une commande relative à la pose d'un sol et de plinthes en PVC sur la base d'un devis du 16 avril 2010 réalisé par la société E2J, fixant le prix du mètre linéaire de plinthes PVC à 65 euros, or un devis similaire de cette même société du 24 octobre 2008 également validé fixait ce prix à 10 euros * validation d'une commande relative à la mise en peinture de sanitaires sur la base d'un devis de la société E2J du 20 décembre 2010, ayant donné lieu à une facture de 6930 euros, prix excessif au regard d'un devis comparable d'octobre 2008 * validation d'une commande relative à la fourniture et pose de 13 plaques de BA13 par la société MS le 3 mars 2011, ayant donné lieu à une facture de 3120 euros, avec un prix de plaque proposée à 240 euros, alors que selon un autre prestataire, Cloisol Sud , le prix unitaire d'une plaque posée est en principe de 80 euros ; 2°) M. C... a ordonné le paiement de prestations proposées par la société E2J dont certaines ont été partiellement réalisées, voire non réalisées : * opération de remise en état de la voirie commandé à la société E2J le 6 décembre 2011, facturée 4205 euros HT * opération de remise en état de la voirie commandée à la société E2J le 30 décembre 2011, facturée 5940 euros HT ; 3°)M. C... a contribué à des mises concurrence fictive dans le choix des entreprises prestataires : mail de E2J du 19 août 2009 transmettant des devis des sociétés Somerbat et Maçonnerie générale ; mail de E2J du 26 septembre 2011 faisant suivre de devis de la société Somerbat ; mail de E2J du 23 septembre 2011 transmettant le devis de la société Maçonnerie générale ; mail de E2J du 17 octobre 2011 produisant un devis de la société Somerbat et mail de E2J à M. C... du 14 octobre 2011 avec le commentaire : « vos désirs sont des ordres » ; annexes de ce rapport : description de l'emploi de chef de secteur, fiche de situation de l'agent, mail du 11 janvier 2013 précité, devis des 16 avril 2010, 24 octobre 2008, 20 décembre 2008, octobre 2008, facture du 3 mars 2011, mail du 28 octobre 2012 avec devis Cloisol Sud, factures E2J du 6 décembre 2011 et du 30 décembre 2011, mails de E2J du 19 août 2009, du 26 septembre 2011, du 23 septembre 2011, du 17 octobre 2011 transmettant des devis de Somerbat ou MG, convocation de M. C... à entretien préalable du 30 janvier 2013, lettre de suspension de fonction remise le 30 janvier 2013 à M. C... contre décharge ; que dès le début de la procédure disciplinaire : - M. C... a été entendu le 13 février 2013 dans le cadre de la procédure de comparution devant la commission de discipline, par le rapporteur désigné, Mme Y... et a pu s'expliquer sur les surfacturations reprochées, les facturations de prestations non réalisées ou partiellement réalisées, et la transmission par la sociétés E2J de devis émanant d'autres sociétés, faits reprochés par l'autorité compétente ; - l'agent a également produit un mémoire en défense le 15 mars 2013 accompagné de 38 pièces annexées, s'expliquant de nouveau sur l'ensemble des faits reprochés ; - l'agent a comparu devant la commission de discipline le 15 mars 2013 assisté de M. Michel U... ; qu'au vu de ces éléments, il est à bon droit soutenu par EDF que l'ensemble des éléments de nature à justifier la matérialité des faits reprochés à l'agent, et résultant des vérifications effectuées par l'employeur, la compilation de factures de devis, de mails, ont été dûment communiqués à M. C... dans le cadre de la procédure disciplinaire dont il a fait l'objet et que ce dernier a pu de manière contradictoire les discuter ; que le moyen tiré de l'absence de contradictoire, en raison de la non communication du rapport définitif d'audit commandé par l'employeur doit être écarté, ce rapport d'audit n'ayant pas été l'élément fondateur des poursuites disciplinaires, comme rappelé par Mme P... dans son audition par le rapporteur de la commission supérieure nationale du personnel, cette dernière précisant que la procédure disciplinaire a été engagée sur la base vérifications effectuées par nos soins suite à une alerte qui nous avait été faite par la direction de l'audit, ceci bien avant qu'elle ait finalisé son rapport ; que M. C... ne peut tirer argument du seul fait qu'à plusieurs reprises mention de cet audit est effectuée par plusieurs personnes de la direction dans le cadre de la procédure disciplinaire, pour soutenir le contraire lorsque les pièces produites établissent que les poursuites ont pu être engagées sur la base des vérifications effectuées par Mme E... ; que sur le non-respect du dispositif d'alerte éthique EDF, l'agent produit un document Dispositif d'alerte éthique EDF prévoyant après la saisine du délégué éthique EDF, que la personne mise en cause est informée sans délai par le délégué éthique de la vérification en cours, sans démontrer par aucune pièce la saisine de ce délégué, alors même que ce document rappelle que l'utilisation du dispositif d'alerte n'est une obligation pour quiconque ; que le moyen doit être écarté ; que sur la régularité formelle de la procédure disciplinaire, il est justifié par EDF, au moyen d'une délégation de pouvoirs délivrée le 1er avril 2012 par Z... P... Directeur du pôle immobilier groupe, à Hélène E..., directeur des opérations, que Mme E... pouvait valablement procéder à l'entretien du 30 janvier 2013 ; que la cour rejette le moyen tiré d'une irrégularité de la procédure en ce que cet entretien n'aurait pas été réalisé par l'autorité compétente ; que s'agissant des notifications en lettre recommandée, l'article 20 de la PERS 846 prévoit que les actes de procédure - suspension de fonctions, convocations, notifications - doivent faire l'objet de document écrit remis en mains propres à l'intéressé contre décharge. La procédure de la lettre recommandée avec accusé de réception ne doit être utilisée que si l'agent refuse de recevoir l'acte de la procédure contre décharge. Il en est de même chaque fois qu'il y a impossibilité de remettre la lettre en main propre ; que la société EDF fait valoir qu'une telle possibilité était caractérisée dans la mesure où l'agent travaillant Marseille, il était pas réaliste de lui demander de se déplacer à la direction immobilier du groupe à Paris, pour se voir remettre un courrier en mains propres ; que cette explication peut être effectivement retenue, de sorte que la critique sur ce point n'est pas sérieuse ; qu'il importe peu que pour sa part, l'agent indique qu'il n'aurait jamais refusé de répondre à une convocation à un entretien pour la remise de ces actes de procédure ; que sur le moyen tiré d'une double sanction et d'un procédé violent de notification par huissier de la sanction traduisant un mépris d'un cadre supérieur, l'article 148 de la PERS 846 indique ainsi : le déplacement n'étant pas prévu parmi les sanctions disciplinaires énumérées à l'article six du statut national, cette mesure, qui n'intervient qu'exceptionnellement ne doit jamais être appliquée à titre de sanction. Dans le cas où un déplacement vient à être décidé dans l'intérêt du service il ne doit pas figurer dans la lettre signifiant la sanction à l'intéressé mais faire l'objet d'une notification séparée ; que les pièces produites établissent que le 29 avril 2013 l'employeur écrit à M. C... « J'ai décidé, en application des dispositions de l'article 6 du Statut National et de la circulaire Pers 846 du 16 juillet 1985, de vous infliger la sanction de rétrogradation de 2GF, en raison des manquements graves qui vous sont reprochés...Il en résulte qu'à compter du 1er juin 2013, votre nouveau classement sera le suivant : F12 NR 240. Par ailleurs dans la mesure où vous ne pouvez être reclassé dans un emploi correspondant à ce nouveau GF au sein de la délégation immobilière régionale Méditerranée, vous serez affecté dans un emploi de chargé de mission à la délégation immobilière régionale Rhône-Alpes de la DIG. Je vous rappelle que dans la mesure où cette sanction modifie de votre contrat de travail elle nécessite votre acceptation écrite » ; que ce courrier a été adressé en RAR ; que l'employeur a de nouveau signifié ce courrier du 29 avril 2013 par huissier le 23 mai 2013, ce dont il a pu prendre connaissance le 24 mai 2013 ; que le 5 juin 2013, l'agent a donné son accord ; que le 12 juin 2013, l'employeur accusant réception de cet accord de la sanction de rétrogradation, a confirmé son nouveau classement en GF 12-NR 240 à compter du 1er juillet 2013 ; que par un deuxième courrier du 13 juin 2013 l'employeur écrit à l'agent : Par courrier du 12 juin je vous ai notifié aux termes de la procédure votre sanction disciplinaire. Comme nous vous l'avions déjà évoqué, compte tenu de la nature des faits et afin de préserver l'intérêt des services et le bon fonctionnement de la DIR Méditerranée, les circonstances me conduisent à confirmer votre affectation dans un emploi de chargé de mission au sein de la DIR Rhône-Alpes Auvergne situé à Lyon à compter du 1er juillet dans l'attente d'une possible mutation sur la région de Marseille ; que dans un courrier du 28 mai 2013, versé aux débats par M. C..., il indique n'avoir jamais eu le courrier du 29 avril avant que l'huissier ne le lui transmettre le 24 mai 2013 ; qu'il ne peut faire grief à l'employeur de la remise par huissier d'un courrier dont l'agent admet lui-même n'avoir pas été destinataire dans sa forme recommandée ; que l'intimé n'est pas fondé à soutenir que la notification par voie d'huissier a constitué un procédé violent traduisant le mépris d'un cadre supérieur ; qu'à bon droit, au vu de ces éléments, la société EDF soutient que la notification effective de la sanction de rétrogradation a été effectuée le 12 juin 2013 ; qu'il ne peut lui être reproché d'avoir notifié à M. C... dans le même courrier la mutation à Lyon, puisque tel n'est pas le cas, cette décision ayant fait l'objet d'un deuxième courrier le 13 juin 2013 ; que s'agissant de la décision de déplacement, il est justifié par l'employeur de la nécessité de celle-ci en raison des nécessités du service, notamment au regard du fait que l'agent occupait un poste de « Responsable Régional Ensemblier Externe » toujours au sein de l'antenne de Marseille Sud, et disposait du pouvoir de signer et valider des demandes d'achats, dans la limite de 250k euros, de sorte que l'intéressé ne pouvait pas être maintenu à de telles fonctions pendant la procédure disciplinaire ; que le moyen tiré de l'existence d'une double sanction doit donc être écarté ; que sur le fond, les faits reprochés à M. C..., précisément portés à la connaissance de l'agent, qui a pu, comme précédemment relevé par la cour, y répondre, sont : - acceptation et validation de prestations surfacturées (validation d'un devis le 16 avril 2010, le 20 décembre 2010, 3 mars 2011) et de prestations partiellement réalisées voire non réalisées (opérations commandées le 6 décembre 2011 et le 20 décembre 2011) ; manquement dans le processus de sélection des sociétés prestataires (constatés les 19 août 2009, 23 septembre 2011, 26 septembre 2011, 17 octobre 2011, 14 octobre 2011) ; que la société EDF ne peut valablement évoquer une facturation pour des prestations non réalisées le 29 juin 2011 (faits ajoutés dans ses conclusions), faits non repris dans le rapport de Mme P... au rapporteur, le 4 février 2013, énumérant les faits objets de poursuites disciplinaires ; que M. C... soutient que les faits reprochés ne peuvent lui être imputés, expliquant qu'il était à l'époque chef de secteur, qu'il avait 3 chefs d'antenne, puis 2, que la description de ses activités résultant de sa fiche d'emploi montre qu'il n'avait pas en charge le contrôle opérationnel des activités et prestations réalisées par les sous-traitants, mission dévolue au chef d'antenne et autre personnel ; qu'il produit notamment le témoignage de M. V..., son supérieur hiérarchique qui, dans une attestation déclare : « l'activité de D... C..., responsable de secteur Paca Ouest n'était pas de réaliser et vérifier toutes les actions opérationnelles (relations avec les fournisseurs, mises en concurrences, analyse technique et économiques des devis, suivi et contrôle des prestations, réception des prestations..) étant donné le volume très important d'opérations réalisées sur son secteur. Ces actions relevaient des chefs d'antenne et de leurs responsables. D... C... devait s'assurer du pilotage organisationnel et des résultats de ses 3 antennes... D... C... a toujours oeuvré pour une maîtrise des coûts au sein de son secteur » ; qu'il est constant que D... C... était au moment des faits reprochés (2010-2011) chef de secteur au sein de la DIRMED ; que la fiche descriptive de son emploi donne à l'agent la mission générale suivante : Dans le respect des règles juridiques, administratives et techniques applicables au domaine de l'immobilier et des orientations stratégiques de la direction de l'immobilier, l'emploi assure le respect des engagements contractuels et budgétaires de la DIR au niveau des antennes opérationnelles chargées du Facilities management technique et services sur un territoire défini dénommé « secteur » dans une recherche permanente d'optimisation des ressources dédiées à ce domaine ; que cette fiche indique également que l'emploi doit respecter « la déontologie des achats » et « les règles de gestion financière » ; que le document établi le 22 janvier 2008 et mis à jour le 8 janvier 2009, dit « mode opératoire mémento achat (NSIT, PGI, DAUPHIN) du département FM de la DIR Méditerranée », versé aux débats par l'employeur rappelle les conditions dans lesquelles doit être organisée la mise en concurrence des prestataires avant commande pour des montants dépassant 3000 euros, et précise que la réception de chaque commande doit intervenir dès la fin de la prestation ; que la société EDF expose, (ce qui n'est pas contesté par M. C..., notamment dans son audition le 28 avril 2014 par le rapporteur de la commission supérieure), que ce dernier disposait d'une délégation de pouvoirs de son N+2, M. S..., du 27 juillet 2011 au terme de laquelle l'agent disposait donc, dans la limite d'un plafond de 100keuros par opération, des pouvoirs de signer ou valider les demandes d'achats, nécessaires à l'exercice des missions qui lui sont confiées, d'effectuer toutes commandes d'exécution s'intégrant dans tout marché cadre, nécessaires à l'exercice des missions qui lui sont confiées, dans la limite d'un plafond de 20keuros par opération, signer ou valider les commandes DAUPHIN ; qu'au vu de ces éléments, EDF relève à juste titre que M. C... ne peut valablement affirmer qu'il ne lui appartenait pas de procéder au « contrôle opérationnel des activités des prestations réalisées par les sous-traitants, mission dévolue au chef d'antenne et autre personnel », ce dernier ne pouvant s'exonérer de sa propre responsabilité en imputant les faits à ses subordonnés dont il devait en tout état de cause contrôler l'exécution des fonctions ; que ce moyen tiré de l'absence de toute imputabilité des faits sera écarté ; que sur la matérialité des griefs (
) le grief d'un manquement dans le processus de sélection des sociétés prestataires est établi ; que (
) la matérialité du grief de surfacturation est établie ; que la validation d'une commande pour des travaux de mise en peinture (
) est établie ; que les sanctions disciplinaires prévues par la circulaire PERS 846 sont : avertissement et blâme, mise à pied avec privation de salaire, abaissement de niveaux, rétrogradation de groupe fonctionnel, mise à la retraite d'office, révocation sans pension et révocation d'office ; que (
) les membres de la commission supérieure nationale du personnel siégeant le 7 octobre 2014 ont établi un constat de carence, les représentants du personnel ayant quitté la séance au motif de l'absence de production de l'audit ; que pour justifier le degré de responsabilité de l'agent dans les faits reprochés et établis, la cour ne saurait retenir les conclusions de l'audit produit alors que l'employeur considère que cet audit n'est pas l'élément fondateur des poursuites disciplinaires ; qu'il convient d'ailleurs de relever que seuls certains des faits mettant en cause M. C... dans ce rapport d'audit, ont été reprochés à ce dernier ; que la société EDF souligne qu'il avait fait l'objet par un courrier électronique du 30 juillet 2009 de son supérieur hiérarchique d'un rappel à l'ordre relatif à ses relations avec la société E2J, les prestations de cette dernière n'étant pas conformes aux prix qu'elle pratiquait ; que quand bien même M. V..., prenant la défense de M. C... a expliqué dans une attestation : je suis surpris que le mail que j'ai rédigé le 30 juillet 2009 soit sorti de son contexte et serve de pièce à charge. Ce mail ne fait nullement référence à une quelconque relation particulière de D... C... avec la société Evolution 2J, mais à des difficultés d'application du marché PET avec cette société, ces déclarations ne peuvent permettre de faire échec aux termes pourtant clairs de ce courrier électronique en ces termes : je t'alerte une nouvelle fois sur pratiques que j'ai (re) découvert sur ton secteur durant le mois de juillet :... - les déboires du marché PET avec Evolution 2J, mise en place à ta demande, alors qu'on savait parfaitement qu'à 4 personnes ils ne tiendraient pas la route
Les modes de fonctionnement que vous avez avec ces entreprises ne sont pas satisfaisants et peuvent laisser penser, vue de l'extérieur, à de possibles collusions. Qu'il n'y ait pas d'ambiguïté : je te connais bien et je suis convaincu qu'il n'y en a pas. Par contre je suis aussi convaincu que ces modes de fonctionnement ne te donnent plus la hauteur de vue suffisante dans les prises de décisions...et te (nous) mettent en faiblesse vis à vis de ces prestations que nous payons au prix (très) fort et surtout sans la valeur ajoutée en rapport avec ce prix
Je te demande donc de bien vouloir me préciser les dispositions que tu prends pour arrêter définitivement ces pratiques et revenir dans une situation normale avec ces prestataires ; qu'une surcharge de travail de M. C... ne résulte pas des pièces produites ; que quand bien même ce dernier aurait eu une charge de travail importante, ce qui n'est pas contesté par la société EDF et ressort en tout état de cause de ses fonctions de chef de secteur PACA Ouest, le niveau de hiérarchie et de responsabilité de M. C... impliquait qu'il veille personnellement en sa qualité de cadre référent à l'absence de tout soupçon dans les procédures de marchés, d'autant plus qu'il avait déjà fait l'objet d'un rappel à l'ordre en 2009 quant à ses modes de fonctionnement avec les entreprises prestataires relevés sur son secteur ; que dans cette perspective, les fait reprochés de surfacturations et de manquement dans le processus de sélection des sociétés prestataires, constatés en 2010 et 2011, présentent un caractère de gravité justifiant la sanction, les témoignages élogieux évoquant l'intégrité de l'agent et son engagement n'étant pas de nature à priver de conséquences les faits matériellement établis reconnus par la cour ;

Alors 1°) qu' aucune sanction ne peut être prise à l'encontre du salarié sans qu'il soit informé des griefs retenus contre lui et que l'agent doit être pouvoir prendre connaissance des pièces relatives aux faits reprochés ; que l'arrêt infirmatif a constaté qu'EDF avait mis en place une mission d'audit suite à une alerte relative à des agissements frauduleux consistant en des surfacturations ou facturations fictives de prestataires, ciblant plus particulièrement la Dirmed, l'antenne de Marseille sud et son chef de secteur en poste de 2004 à 2012, M. C... ; que dans ce cadre, le disque dur de M. C... avait été saisi le 18 octobre 2012 pour procéder à des investigations sur son ordinateur ; qu'EDF avait connu les faits reprochés à M. C... le 11 janvier 2013, par information de l'audit communiquée à cette date (p. 8) ; que par mail du 11 janvier 2013, Mme P..., directeur Groupe Immobilier, indiquait à Mme E..., directeur des opérations, que dans le cadre de la « mission en cours » concernant la Dirmed, « un certain nombre de graves dysfonctionnements ont été constatés et mettent en cause deux collaborateurs de la Dirmed : I... V... et D... C... » et lui a demandé après les dernières vérifications nécessaires « d'engager sans délai la procédure disciplinaire à leur encontre » ; qu'en décidant que l'absence de communication de l'audit ne viciait pas la procédure disciplinaire, cependant qu'il ressortait de ses propres constatations que le rapport d'audit était une pièce relative aux faits reprochés, qui avait de surcroît permis de constater les faits et de les imputer à M. C..., la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 1332-1, L. 1331-1, L. 1332-1 du code du travail, et la circulaire Pers 846 relative à la procédure en matière de mesures disciplinaires ;

Alors 2°) que l'article 148 de la PERS 846 indique que « le déplacement n'étant pas prévu parmi les sanctions disciplinaires énumérées à l'article six du statut national, cette mesure, qui n'intervient qu'exceptionnellement ne doit jamais être appliquée à titre de sanction. Dans le cas où un déplacement bien être décidé dans l'intérêt du service il ne doit pas figurer dans la lettre signifiant la sanction à l'intéressé mais faire l'objet d'une notification séparée » ; que l'arrêt constate que le 29 avril 2013, l'employeur a écrit à M. C... « J'ai décidé, en application des dispositions de l'article 6 du Statut National et de la circulaire Pers 846 du 16 juillet 1985, de vous infliger la sanction de rétrogradation de 2GF, en raison des manquements graves qui vous sont reprochés...Il en résulte qu'à compter du 1er juin 2013, votre nouveau classement sera le suivant :GF12 NR 240. Par ailleurs dans la mesure où vous ne pouvez être reclassé dans un emploi correspondant à ce nouveau GF au sein de la délégation immobilière régionale Méditerranée, vous serez affecté dans un emploi de chargé de mission à la délégation immobilière régionale Rhône-Alpes de la DIG. Je vous rappelle que dans la mesure où cette sanction modifie votre contrat de travail elle nécessite votre acceptation écrite » ; que le 12 juin 2013, l'employeur a confirmé son nouveau classement en GF 12-NR 240 à compter du 1er juillet 2013 ; que le 13 juin 2013 l'employeur a écrit à l'agent : « Par courrier du 12 juin je vous ai notifié aux termes de la procédure votre sanction disciplinaire. Comme nous vous l'avions déjà évoqué, compte tenu de la nature des faits et afin de préserver l'intérêt des services et le bon fonctionnement de la DIR Méditerranée, les circonstances me conduisent à confirmer votre affectation dans un emploi de chargé de mission au sein de la DIR Rhône-Alpes Auvergne situé à Lyon à compter du 1er juillet dans l'attente d'une possible mutation sur la région de Marseille » ; qu'en ne tirant pas les conséquences de ses constatations, qui faisaient ressortir que l'employeur avait irrégulièrement sanctionné M. C... en le rétrogradant et en l'affectant à la DIR Rhône Alpes, la cour d'appel a violé l'article 148 de la PERS 846, ensemble les articles L. 1332-1, L. 1331-1, L. 1332-1 du code du travail ;

Alors 3°) que la cour d'appel ne peut infirmer le jugement sans en réfuter les motifs déterminants réputés appropriés par le salarié qui demandait la confirmation du jugement ; qu'en ayant statué ainsi, sans avoir infirmé les motifs du jugement dont M. C... demandait la confirmation, et qui avait constaté, pour accueillir ses demandes, que la sanction de rétrogradation avait été acceptée forcée et qu'un recours gracieux pouvait être accueilli même s'il y avait une procédure engagée devant le conseil de prud'hommes (p. 60), la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile ;

Alors 4°) que les juges du fond ne peuvent statuer sans répondre aux conclusions des parties ; qu'en se bornant à retenir que M. C... devait contrôler l'exécution de leurs missions par ses subordonnés, sans répondre précisément à ses conclusions faisant valoir qu'il n'était pas chargé de contrôler les devis, de procéder à leur analyse, ce travail incombant au chef d'antenne et au personnel de l'antenne (conclusions d'appel p. 22 à 24), qu'il n'était chargé ni du suivi des travaux, ni de leur réception, ni de leur paiement (p. 29) ni de la mise en concurrence des prestataires ou du domaine opérationnel (p. 32), de sorte que les dysfonctionnements reprochés relevaient de la compétence des chefs d'antenne comme ils l'avaient confirmé (p. 33), et ne pouvaient justifier une sanction disciplinaire à son encontre, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-14056
Date de la décision : 11/12/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 02 février 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 déc. 2019, pourvoi n°18-14056


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.14056
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