LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société X... BTP services et la société Axa France IARD que sur le pourvoi incident relevé par la Société française de transports B... frères et la société Helvetia assurances ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société X... BTP services auscultation, aux droits de laquelle vient la société X... BTP services (la société X...) a confié à la Société française de transports B... frères (la société B...), commissionnaire de transport, l'organisation du transport, de La Réunion en métropole, de deux remorques ; que celles-ci ont été détruites le 12 décembre 2009 dans l'incendie de l'entrepôt où elles avaient été déposées par la société Magasins et aires de stockages (MAS Réunion), dans l'attente de leur embarquement, incendie qui a pris naissance dans la cellule occupée par la société Comptoirs français d'outre-mer (la société Coframer) ; que le 9 décembre 2010, la société X... et son assureur, la société Axa France IARD (la société Axa) ont assigné la société B... et son assureur, la société Helvetia assurances, la société MAS Réunion et son assureur, la société Allianz IARD (la société Allianz), la société Coframer et son assureur, la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles de La Réunion, en réparation du préjudice résultant de la destruction des deux remorques ; que par actes séparés du 10 décembre 2010, la société B... et son assureur ont assigné la société Necotrans, à qui la société B... soutenait avoir sous-traité l'organisation du transport des remorques, la société MAS Réunion et son assureur, en garantie des éventuelles condamnations à réparer le préjudice subi par la société X... et en réparation du préjudice résultant de la perte des marchandises empotées dans un conteneur, qui a été détruit dans l'incendie du 12 décembre 2009, et dont la société B... devait assurer le transport pour le compte de plusieurs commettants ; qu'en cours d'instance, la société Necotrans ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, ses administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires sont intervenus volontairement ;
Sur la recevabilité du premier moyen du pourvoi principal, contestée par la société B... et son assureur :
Délibéré par la première chambre civile de la Cour de cassation, sur l'avis de M. Lavigne, avocat général, et après débats à l'audience publique du 12 mars 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Duval-Arnould, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre ;
Attendu que la société X... et son assureur font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes à l'encontre des sociétés MAS Réunion, Coframer et B... et de leurs assureurs au titre de la destruction des remorques ;
Attendu que, dans son dispositif, la cour d'appel s'est bornée à rejeter les demandes dirigées contre les sociétés MAS Réunion et Coframer et leurs assureurs ; qu'il s'ensuit qu'en ce qu'il vise la société B... et son assureur le moyen n'est pas recevable, comme critiquant une omission de statuer qui peut être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile et ne donne pas lieu à ouverture à cassation ;
Sur le même moyen, en ce qu'il est dirigé contre les sociétés MAS Réunion et Coframer et leurs assureurs, qui est recevable :
Délibéré par la première chambre civile de la Cour de cassation dans les mêmes conditions que le premier moyen du pourvoi principal ;
Vu les articles 455 et 954, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Attendu que, s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date ;
Attendu que, pour rejeter les demandes de la société X... et de son assureur, la cour d'appel s'est prononcée au visa de leurs conclusions déposées le 12 juin 2014 ;
Qu'en statuant ainsi, sans se référer aux nouvelles conclusions déposées le 10 mars 2015 par la société X... et son assureur qui répondaient aux conclusions déposées entre-temps, d'une part, par la société Necotrans, en contestant le caractère de force majeure de l'incendie tiré de son origine inconnue, d'autre part, par la société Allianz, assureur de la société MAS Réunion, en déniant tout lien contractuel avec celle-ci, et sans exposer ces moyens, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu les articles 31 et 126 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer irrecevable la demande formée par la société B... et son assureur contre les sociétés Necotrans et Allianz, ce dernier en qualité d'assureur de la société MAS Réunion, au titre de la perte du conteneur, l'arrêt, après avoir énoncé que le commissionnaire de transport ne peut agir à titre principal contre ses substitués que s'il a désintéressé la victime du dommage, retient que la société B... et son assureur, qui n'avaient pas qualité à agir au jour de l'introduction de la demande, n'apportaient pas la preuve de l'indemnisation effective des ayants droit à la marchandise avant le 12 décembre 2010, date à laquelle était acquise la prescription annale, de sorte que la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir n'a pas été régularisée avant l'expiration du délai pour agir ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnisation des ayants droit à la marchandise par le commissionnaire de transport relève de son intérêt à agir contre ses substitués, dont le défaut pouvait être régularisé jusqu'à ce que le juge statue, la cour d'appel a violé les texte susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare la société X... BTP services auscultation et la société Axa France IARD recevables en leurs demandes et en ce qu'il met hors de cause la société Necotrans et les organes de la procédure collective ouverte à son encontre, l'arrêt rendu le 16 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sauf sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Axa France IARD et la société X... BTP services, venant aux droits de la société X... BTP services auscultation
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la Société X... BTP Services Auscultation et la SA Axa France IARD de leurs demandes dirigées à l'encontre de la SARL MAGASINS ET AIRES DE STOCKAGE (MAS REUNION), de la SA ALLIANZ IARD, de la SARL COFRAMER et de la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES DE LA REUNION (GROUPAMA OCEAN INDIEN) la société de TRANSPORTS B... FRERES et la société HELVETIA ASSURANCES au titre des remorques FWD/HWD et STFT Sarsys, d'AVOIR dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et d'AVOIR condamné in solidum la Société X... BTP Services Auscultation et la SA Axa France IARD aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
AU VISA des conclusions de la société X... BTP Services Auscultation et de la société AXA France Iard en date du 12 juin 2014
ALORS QUE le juge doit statuer au visa des dernières conclusions des parties ; qu'en statuant au visa de conclusions qui auraient été déposées par les Sociétés Axa et X... le 12 juin 2014, cependant que ces dernières avaient déposé de nouvelles conclusions le 20 février 2015 puis le 10 mars 2015, précisant leurs demandes et complétant leur précédente argumentation, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la Société X... BTP Services Auscultation et la SA Axa France IARD de leurs demandes dirigées à l'encontre de la SARL MAGASINS ET AIRES DE STOCKAGE (MAS REUNION), de la SA ALLIANZ IARD, de la SARL COFRAMER et de la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES DE LA REUNION (GROUPAMA OCEAN INDIEN) la société de TRANSPORTS B... FRERES et la société HELVETIA ASSURANCES au titre des remorques FWD/HWD et STFT Sarsys, d'AVOIR dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et d'AVOIR condamné in solidum la Société X... BTP Services Auscultation et la SA Axa France IARD aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
AUX MOTIFS QUE « sur la responsabilité du commissionnaire de transport B... et du dépositaire MAS à raison des deux remorques FWD/HWD et STFT Sarsys ; que les sociétés X... et AXA recherchent, en application des articles L.132-5 et L.132-6 du code de commerce, la condamnation solidaire du commissionnaire B... qui a pris en charge les remorques de la société X... et du dépositaire MAS ; qu'en application des dispositions de l'article L.132-5 du code de commerce le commissionnaire de transport 'est garant des avaries ou pertes de marchandises et effets, s'il n'y a stipulation contraire dans la lettre de voiture, ou force majeure ; qu'il est responsable de plein droit, non seulement de sa propre faute, mais également des faits et actes des différents intervenants chargés de l'exécution matérielle de l'opération de transport ; que le dépositaire est tenu d'une obligation de moyens renforcée en application de l'article 1929 du code civil qui dispose que le dépositaire n'est tenu, en aucun cas, des accidents de force majeure, à moins qu'il n'ait été mis en demeure de restituer la chose déposée ; que B... et ALLIANZ soutiennent que les circonstances du sinistre sont constitutives de la force majeure ; que, pour constituer un cas de force majeure, un événement doit présenter cumulativement les caractères d'irrésistibilité, d'imprévisibilité et d'extériorité à celui qui l'invoque ; qu'aux termes des rapports W... et A..., l'incendie du 12 décembre 2009 trouve son origine dans les locaux de la société COFRAMER (cellules n° 5 et 6), dont il n'est pas contesté qu'ils ne sont pas mitoyens du hangar n° 3 occupé par MAS ; que l'incendie, survenu dans des conditions échappant totalement au contrôle de MAS, a constitué un événement extérieur à cette dernière ; que Monsieur A... a constaté que l'incendie du 12 décembre 2009 était hors normes, que l'extrême violence du sinistre a provoqué la ruine d'une grande partie de la charpente du bâtiment dont les poutres métalliques, sous l'effet de la chaleur, se sont effondrées ; que l'expert W... précise que 'Dans un premier temps, le feu a pris naissance dans l'une des cellules 5 ou 6, les gaz de pyrolyse se sont propagés en partie haute formant une masse de gaz chaud rayonnante, 'l'importante quantité de gaz de pyrolyse s'est répandue par les faîtages dans les autres cellules ; que l'expert A... souligne la puissance de l'incendie qui a procédé d'embrasements multiples (page 29 de son rapport) ; qu'au vu de ces éléments, l'évènement était irrésistible ; que l'incendie a été d'une importance exceptionnelle par sa vitesse de propagation particulièrement élevée et la puissance de la chaleur dégagée - l'expert A... retient à cet égard que la chaleur a été capable de plier des poutres métalliques de forte section et a déformé les cloisons séparant les différentes cellules de l'entrepôt - page 12 de son rapport) ; que les précautions et mesures de sécurité normales, préventives de la propagation d'un incendie, que MAS avait dû ou aurait dû prendre, auraient été, en toutes hypothèses, insuffisantes à empêcher ou limiter l'ampleur du sinistre ; que l'incendie du 12 décembre 2009 présentait, dans ces conditions, un caractère imprévisible ; qu'il s'en déduit que l'incendie du 12 décembre 2009 a présenté un caractère de force majeure exonératoire de toute responsabilité ; que X... et Axa seront en conséquence déboutées de leurs demandes dirigées à l'encontre de B..., HELVETIA, MAS et ALLIANZ ; que le jugement entrepris sera infirmé en ce sens » ;
ET QUE « sur la responsabilité délictuelle de la société COFRAMER à raison des deux remorques FWD/HWD et STFT Sarsys : que X... et Axa demandent de dire que la responsabilité de la société COFRAMER est engagée sur le fondement de l'article 1384, alinéa 2, du code civil, à hauteur de la somme en principal de 50.000 euros envers AXA et à hauteur de la somme en principal de 115.600 euros envers X... ; qu'elles ne formulent aucune demande de condamnation à l'encontre de COFRAMER ; que COFRAMER sera en conséquence déboutée de sa demande d'irrecevabilité de l'action de X... et d'Axa au regard des dispositions régissant la procédure de sauvegarde et la procédure d'exécution du plan ; que l'article 1384, alinéa 2, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, dispose que 'celui qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance ne sera responsable, vis-à-vis des tiers, des dommages causés par cet incendie que s'il est prouvé qu'il doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il est responsable.' ; que les rapports W... et A... retiennent que l'incendie du 12 décembre 2009 trouve son origine dans les locaux de la société COFRAMER ; que toutefois Monsieur W... conclut qu'il est quasi impossible de déterminer avec certitude l'origine du sinistre (page 32 du rapport W...) ; que, si l'expert observe que, nous avons relevé un défaut électrique significatif sur l'un des chariots élévateurs et sur les connexions ou dispositifs de charge, il n'évoque cet élément qu'à titre d'hypothèse ; que, de même, Monsieur A... écarte l'hypothèse d'une origine humaine volontaire et, évoquant un processus ayant conduit à des embrasements multiples, ne retient aucune des hypothèses relatives à une origine accidentelle : ni celle d'un dysfonctionnement d'un récepteur électrique et de son alimentation, ni celle d'un mégot de cigarette abandonné (page 29 de son rapport) ; que ni Monsieur W..., ni Monsieur A... ne font état d'un dysfonctionnement du système de surveillance et qu'ils observent que, lors du déclenchement de l'incendie, le système d'alarme était actif, que les capteurs ont été activés à 17:56:59, le CODIS ayant été appelé à 18:00, ce qui confirme que l'incendie a été détecté et les sapeurs-pompiers appelés sans retard; que l'expert judiciaire ne retient à la charge de COFRAMER aucune faute ni à raison de marchandises entreposées sans protection appropriée qui aurait contribué à l'extension et à l'aggravation du sinistre, ni au titre de l'entretien du système de protection contre l'incendie, les locaux étant dotés des équipements RIA et COFRAMER justifiant de la vérification du système en place par la production des factures SICLI et HRS Sécurité (pièces COFRAMER n°6 factures SICLI et n°7 factures HRS) ; qu'en l'absence de preuve d'une faute de COFRAMER ou d'une faute des personnes placées sous sa responsabilité à l'origine de l'incendie, X... et Axa seront déboutées de leurs demandes dirigées à l'encontre de COFRAMER et de la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles de la Réunion (Groupama Océan Indien) au titre des remorques FWD/HWD et STFT Sarsys ; que le jugement entrepris sera infirmé en ce sens ; que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ; que la décision déférée sera infirmée sur ce point » ;
1. ALORS QUE le dépositaire doit apporter, dans la garde de la chose déposée, les mêmes soins qu'il apporte dans la garde des choses qui lui appartiennent ; qu'il répond de l'incendie, à moins qu'il ne prouve que celui-ci constitue un cas de force majeure ; qu'en décidant que la Société MAS avait établi que l'incendie était survenu par cas fortuit, après avoir pourtant constaté que la cause de cet incendie était d'origine inconnue, la Cour d'appel a violé les articles 1927 et 1929 du Code civil ;
2. ALORS QUE pour apprécier si un événement constitue un cas de force majeure, le juge doit rechercher s'il présentait un caractère d'imprévisibilité au jour de la conclusion du contrat ; qu'en se fondant, pour retenir que l'incendie avait un caractère imprévisible et exonérer de ce fait la Société MAS de sa responsabilité, sur sa vitesse de propagation et sa puissance, sans rechercher, comme il lui était demandé, si dans un entrepôt contenant des matières particulièrement inflammables, un tel incendie n'était pas au contraire prévisible dès la conclusion du contrat (conclusions p. 8, alinéa 2), la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1929 du Code civil.
3. ALORS QUE pour apprécier si un événement constitue un cas de force majeure, le juge doit rechercher s'il présentait un caractère d'imprévisibilité au jour de la conclusion du contrat ; que l'imprévisibilité se définit comme l'impossibilité légitime, pour celui qui s'en prévaut, de prévoir que l'événement en cause se produirait ; qu'en se fondant, pour retenir que l'incendie avait un caractère imprévisible et exonérer de ce fait la société MAS de sa responsabilité, sur le fait que sa vitesse de propagation et sa puissance auraient prétendument rendu toutes les précautions que ladite société aurait dû prendre inutiles, circonstance qui pouvait être prise en considération pour apprécier son irrésistibilité mais était inopérante à caractériser son imprévisibilité, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1929 du Code civil.
4. ALORS QUE pour apprécier si un événement constitue un cas de force majeure, le juge doit rechercher s'il présentait un caractère d'imprévisibilité au jour de la conclusion du contrat; que pour écarter cette cause d'exonération, la Compagnie AXA France IARD et la Société X... démontraient que la violence de l'incendie était due à l'absence de mise en place d'un dispositif de séparation coupe-feu entre les différentes cellules et à l'absence d'un système de désenfumage adéquat ainsi qu'à la détection tardive du départ de feu qui lui avait permis de prendre de l'ampleur (conclusions p. 8 alinéa 9) ; qu'en se fondant exclusivement sur la violence de l'incendie pour estimer qu'il était imprévisible, sans rechercher si ladite violence n'était pas la conséquence inéluctable de l'absence de mesures de précautions prises par le dépositaire pour empêcher la propagation et l'accumulation de fumées à l'origine exclusive de l'incendie, de sorte qu'il était au contraire quasiment certain qu'un tel incendie ne pouvait manquer de survenir un jour, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1929 du Code civil.
5. ALORS QUE pour apprécier si un événement constitue un cas de force majeure, le juge doit rechercher s'il présentait un caractère d'irrésistibilité au jour du sinistre; que pour écarter cette cause d'exonération, la Compagnie AXA France IARD et la Société X... démontraient que la violence de l'incendie était due à l'absence de mise en place d'un dispositif de séparation coupe-feu entre les différentes cellules et à l'absence d'un système de désenfumage adéquat ainsi qu'à la détection tardive du départ de feu qui lui avait permis de prendre de l'ampleur (conclusions p. 8 alinéa 9) ; qu'en se fondant exclusivement sur la violence de l'incendie au moment où les pompiers l'ont découvert pour estimer qu'il était irrésistible, sans rechercher si ladite violence n'était pas la conséquence du développement exceptionnel de l'incendie qui aurait pu être évité en présence de mesures de précautions prises par le dépositaire pour détecter la présence de fumées et pour empêcher leur propagation ainsi que leur accumulation à l'origine exclusive d'un tel incendie, de sorte qu'il était au contraire quasiment certain que l'incendie aurait pu être maîtrisé si des précautions normales avaient été prises, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1929 du Code civil.
6. ALORS ENCORE QUE pour apprécier si un événement constitue un cas de force majeure, le juge doit rechercher s'il présentait un caractère d'irrésistibilité au jour du sinistre; que pour écarter cette cause d'exonération, la Compagnie AXA France IARD et la Société X... démontraient que la violence de l'incendie était due à l'absence de mise en place d'un dispositif de séparation coupe-feu entre les différentes cellules et à l'absence d'un système de désenfumage adéquat ainsi qu'à la détection tardive du départ de feu qui lui avait permis de prendre de l'ampleur (conclusions p. 8 alinéa 9) ; qu'en se fondant exclusivement sur la violence de l'incendie au moment où les pompiers l'ont découvert pour estimer qu'il était irrésistible, sans se placer en amont pour vérifier si le dépositaire n'avait aucun moyen de prévenir un tel développement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1929 du Code civil.
7. ALORS ENFIN QUE la cassation à intervenir sur l'une des six premières branches doit s'étendre au rejet de la demande en tant qu'elle était dirigée à l'encontre du commissionnaire de transport, la Société B..., et de son assureur la compagnie HELVETIA ASSURANCES dès lors que l'action engagée à leur encontre n'a été rejetée qu'au regard de considérations relatives au caractère imprévisible, irrésistible et extérieur de l'incendie pour le dépositaire, la Société MAS, qui ont conduit la Cour d'appel à déclarer que « l'incendie du 12 décembre 2009 a présenté un caractère de force majeure exonératoire de toute responsabilité » (arrêt p. 15 alinéa 18), tant pour le dépositaire que pour le commissionnaire ; qu'à cet égard, l'arrêt doit être censuré par application de l'article 624 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la Société X... BTP Services Auscultation et la SA Axa France IARD de leurs demandes dirigées à l'encontre de la SARL MAGASINS ET AIRES DE STOCKAGE (MAS REUNION), de la SA ALLIANZ IARD, de la SARL COFRAMER et de la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES DE LA REUNION (GROUPAMA OCEAN INDIEN) au titre des remorques FWD/HWD et STFT Sarsys, d'AVOIR dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et d'AVOIR condamné in solidum la Société X... BTP Services Auscultation et la SA Axa France IARD aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
AUX MOTIFS QUE « sur la responsabilité délictuelle de la société COFRAMER à raison des deux remorques FWD/HWD et STFT Sarsys : que X... et Axa demandent de dire que la responsabilité de la société COFRAMER est engagée sur le fondement de l'article 1384, alinéa 2, du code civil, à hauteur de la somme en principal de 50.000 euros envers AXA et à hauteur de la somme en principal de 115.600 euros envers X... ; qu'elles ne formulent aucune demande de condamnation à l'encontre de COFRAMER ; que COFRAMER sera en conséquence déboutée de sa demande d'irrecevabilité de l'action de X... et d'Axa au regard des dispositions régissant la procédure de sauvegarde et la procédure d'exécution du plan ; que l'article 1384, alinéa 2, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, dispose que 'celui qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance ne sera responsable, vis-à-vis des tiers, des dommages causés par cet incendie que s'il est prouvé qu'il doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il est responsable ; que les rapports W... et A... retiennent que l'incendie du 12 décembre 2009 trouve son origine dans les locaux de la société COFRAMER ; que toutefois Monsieur W... conclut qu'il est quasi impossible de déterminer avec certitude l'origine du sinistre' (page 32 du rapport W...) ; que, si l'expert observe que, nous avons relevé un défaut électrique significatif sur l'un des chariots élévateurs et sur les connexions ou dispositifs de charge, il n'évoque cet élément qu'à titre d'hypothèse ; que, de même, Monsieur A... écarte l'hypothèse d'une origine humaine volontaire et, évoquant un processus ayant conduit à des embrasements multiples, ne retient aucune des hypothèses relatives à une origine accidentelle : ni celle d'un dysfonctionnement d'un récepteur électrique et de son alimentation, ni celle d'un mégot de cigarette abandonné (page 29 de son rapport) ; que ni Monsieur W..., ni Monsieur A... ne font état d'un dysfonctionnement du système de surveillance et qu'ils observent que, lors du déclenchement de l'incendie, le système d'alarme était actif, que les capteurs ont été activés à 17:56:59, le CODIS ayant été appelé à 18:00, ce qui confirme que l'incendie a été détecté et les sapeurs-pompiers appelés sans retard; que l'expert judiciaire ne retient à la charge de COFRAMER aucune faute ni à raison de marchandises entreposées sans protection appropriée qui aurait contribué à l'extension et à l'aggravation du sinistre, ni au titre de l'entretien du système de protection contre l'incendie, les locaux étant dotés des équipements RIA et COFRAMER justifiant de la vérification du système en place par la production des factures SICLI et HRS Sécurité (pièces COFRAMER n°6 factures SICLI et n°7 factures HRS) ; qu'en l'absence de preuve d'une faute de COFRAMER ou d'une faute des personnes placées sous sa responsabilité à l'origine de l'incendie, X... et Axa seront déboutées de leurs demandes dirigées à l'encontre de COFRAMER et de la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles de la Réunion (Groupama Océan Indien) au titre des remorques FWD/HWD et STFT Sarsys ; que le jugement entrepris sera infirmé en ce sens ; que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ; que la décision déférée sera infirmée sur ce point » ;
ALORS QUE lorsque l'exploitant d'un immeuble incendié a commis un manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou un règlement ou toute autre faute résultant d'une imprudence inattention ou négligence dans son obligation de veiller à la sécurité du bâtiment, il commet une faute de nature à engager sa responsabilité en cas de survenance d'un incendie ; que la Compagnie AXA France IARD et la Société X... démontraient, dans leurs conclusions d'appel, que la Société COFRAMER, qui entreposait d'importantes quantités de matière hautement inflammables, n'avait pas équipé ses entrepôts d'une alarme anti incendie ; qu'en ne recherchant pas comme cela lui était demandé si cette carence ne constituait pas une faute d'imprudence de nature à engager sa responsabilité dans l'incendie, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1384 alinéa 2 en sa rédaction applicable au litige, devenu 1242 alinéa 2 du Code civil ;
ET ALORS QUE le rapport d'expertise de Monsieur W... énonçait, en page 24 : « Les capteurs et le câblage de l'alarme anti intrusion étaient installés à environ 2,50m du sol. Les détecteurs étaient de type double détection, peu sensibles à la chaleur ou à la flamme seule. Le système d'alarme était actif, il n'a pas été détecté d'intrusion avant la phase expansée de l'incendie. Tous les capteurs ont été activés à 17 :56 :59, ce qui correspond à une agression du câblage du système d'alarme par incendie (par agression, il faut entendre l'atteinte fonctionnelle à un élément du système : rupture d'alimentation interne, rupture des câbles de branchement de capteurs, etc
) » ; et le rapport d'expertise de Monsieur A... concluait, p. 27 alinéa 3, « De fait, nous estimons que le début du processus est bien antérieur à la découverte des premières manifestations » ; qu'il résulte des termes clairs et précis de ces rapports que l'incendie n'a pas été détecté avant d'avoir atteint sa phase expansée, que les experts situaient plusieurs heures après le début de l'incendie ; qu'en retenant néanmoins, pour rejeter le moyen de la Compagnie AXA France IARD et de la Société X..., qui faisaient grief à la Société COFRAMER de ne pas avoir installé de système de détection précoce de l'incendie, que « ni Monsieur W..., ni Monsieur A... ne font état d'un dysfonctionnement du système de surveillance et qu'ils observent que, lors du déclenchement de l'incendie, le système d'alarme était actif, que les capteurs ont été activés à 17:56 59, le CODIS ayant été appelé à 18:00, ce qui confirme que l'incendie a été détecté et les sapeurs pompiers appelés sans retard » (arrêt p. 16 alinéa 3), la Cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis en violation de l'article 1103 nouveau du Code civil, anciennement 1134 du Code civil. Moyen produit au pourvoi incident par Me Le Prado, avocat aux Consels, pour la société Helvetia assurances et la Société française de transports B... frères
LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué,
D'AVOIR dit la Société française de Transports B... frères et la société Helvetia assurances irrecevables en leurs demandes au titre du conteneur MSCU,
AUX MOTIFS QUE « sur la recevabilité des demandes des sociétés B... et Helvetia à raison du conteneur MSCU, Necotrans conclut à l'irrecevabilité de l'action de B... et de son assureur Helvetia à raison du conteneur MSCU ; que B... a introduit son action en réparation du dommage subi du fait de la destruction du conteneur le 10 décembre 2010 ; que le commissionnaire de transport ne peut agir à titre principal contre ses substitués que s'il a désintéressé la victime du dommage ; que, si B... et Helvetia prétendent que les ayants droits des marchandises ont été indemnisés (par B..., en ce qui concerne Monsieur F... M..., Monsieur NX... Y..., le laboratoire SQ..., Monsieur OU..., par Helvetia, en ce qui concerne la société Le Croissant d'or, Madame R... K... "Chauss en folie", la société Star Foot-Cosedim), les pièces versées aux débats par B... n'établissent pas le caractère effectif des paiements allégués avant le 12 décembre 2010, date à laquelle était acquise la prescription annale ; que l'action engagée dans le délai de prescription par une personne n'ayant pas qualité pour agir ne peut être régularisée postérieurement à l'expiration du délai de prescription ; qu'en l'espèce, B... et son assureur Helvetia n'avaient pas qualité pour agir au jour de l'introduction de leur demande ; que la cause donnant lieu à la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité n'a pas été régularisée avant l'expiration du délai de prescription annal ; que les sociétés B... et Helvetia seront en conséquence déclarées irrecevables en leurs demandes au titre du conteneur MSCU ; que le jugement entrepris sera infirmé en ce sens » ;
ALORS QUE, un changement de qualité équivalant à un changement de partie, l'action, engagée dans le délai de prescription par une personne n'ayant pas qualité pour agir, ne peut être régularisée en application de l'article 126 du code de procédure civile, alinéas 1er et 2, que par l'intervention de la personne ayant cette qualité avant l'expiration du délai de prescription ; qu'en retenant, pour déclarer prescrit le recours formé par la société B... contre son substitué qu'elle n'avait indemnisé les ayants droit aux marchandises qu'après l'acquisition de la prescription, cependant que cette indemnisation était relative à son intérêt à agir, dont le défaut pouvait être couvert avant que le juge statue, la cour d'appel a violé la disposition susvisée.