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04/12/2019 | FRANCE | N°18-13449

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 décembre 2019, 18-13449


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 9 janvier 2018), que M. C... a été engagé à compter du 1er juillet 2014, par la société LPG Systems, en qualité de directeur des opérations, statut cadre de direction ;
que par lettre du 29 janvier 2016, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail et a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié certaines sommes à

titre d'indemnité de préavis, d'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommage...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 9 janvier 2018), que M. C... a été engagé à compter du 1er juillet 2014, par la société LPG Systems, en qualité de directeur des opérations, statut cadre de direction ;
que par lettre du 29 janvier 2016, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail et a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié certaines sommes à titre d'indemnité de préavis, d'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement abusif, de rappels de salaire, de rémunération variable, de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, d'indemnité de repos compensateur et des congés payés afférents alors, selon le moyen, que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial et que l'exigence d'impartialité doit s'apprécier objectivement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a condamné la société LPG Systems à payer diverses sommes à M. C... a statué dans une composition présidée par M. P... J..., dont l'épouse, Mme T... E... épouse J..., se trouvait dans un lien de subordination avec la société LPG Systems dont elle était salariée ; qu'en statuant ainsi lorsque sa composition faisait naître un doute quant à l'impartialité de la juridiction, elle a violé l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que les débats ayant eu lieu devant une formation collégiale dont la composition pouvait être connue de l'employeur, représenté par son avocat, celui-ci n'est pas recevable à invoquer devant la Cour de cassation la violation de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que l'employeur n'a pas fait usage de la possibilité d'en obtenir le respect en récusant, par application des articles 341 du code de procédure civile et L. 111-6 7° du code de l'organisation judiciaire, le magistrat faisant fonction de président, et qu'en s'abstenant de le faire avant la clôture des débats, l'employeur a ainsi renoncé sans équivoque à s'en prévaloir ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur les deuxième et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société LPG System aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société LPG System à verser à M. C... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société LPG Systems

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société LPG Systems à verser à M. C... les sommes de 21000 euros à titre d'indemnité de préavis et 2100 euros à titre d'indemnité compensatrice des congés payés afférents, 2000 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, 42 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif, 2100 euros de rappels de salaire et 210 d'indemnité compensatrice des congés payés afférents, 15 000 euros au titre de la rémunération variable et 1500 euros d'indemnité compensatrice de congés payés, 36 528,59 euros de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et 3652, 85 euros d'indemnité compensatrice des congés payés s'y rapportant, 9452, 38 euros d'indemnité de repos compensateur et 945, 23 euros d'indemnité compensatrice des congés payés afférents, outre une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « Il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail.
Cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.
Selon les termes de son courrier daté du 29 janvier 2016, M. C... a pris acte de la rupture de son contrat de travail au motif que depuis le 20 octobre 2015, il considère être l'objet de mesures de harcèlement, notamment d'une mise au placard et de ne pas avoir perçu de prime contractuelle sur objectif pour l'année 2015, ni l'augmentation de 300 € de son salaire initialement prévu à compter du mois de juillet 2015.
Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.
Le contrat de travail de M. C... stipulait dans son article 4 que sa rémunération brute mensuelle forfaitaire était fixée à 6700 euros et que: « sous réserve d'avoir pleinement réussi sa mission selon les attentes de l'entreprise »elle serait portée à 7000 euros au terme d'une année de présence ».
Il était également prévu la possibilité d'une: « rémunération variable sur objectif d'un montant brut de 15000 € dont les modalités d'attribution seront définies en relation avec la Direction Générale ».
Il est constant que la société LPG n'a pas versé au salarié la prime d'objectifs au titre de l'année 2015, ni mis en oeuvre l'augmentation de salaire, prenant motif de son insatisfaction quant à la prestation de travail de M. C....
Si par courriel du 27 février 2015, M. C... a clairement sollicité de son employeur la fixation de ses objectifs pour l'année 2015, la société LPG ne fournit aucun élément de nature à justifier qu'elle lui a apporté une réponse sur ce point, ni que des objectifs aient été déterminés.
Par ailleurs, si l'appréciation portée sur l'activité du salarié relève du pouvoir de direction de l'employeur, le juge prud'homal exerce son contrôle sur les éventuels abus commis dans l'exercice de ce pouvoir et sur ses conséquences dans l'exécution des obligations respectives découlant du contrat de travail.
Or, bien que la société LPG affirme que M. C... n'a pas fourni la prestation de travail attendue de lui pour justifier sa décision de ne pas mettre en oeuvre l'augmentation de salaire contractuellement prévue, elle n'apporte aucune justification concrète des manquements ou insuffisances reprochés au salarié, la seule délivrance d'un avertissement en date du 1er octobre 2015, soit postérieurement à l'échéance fixée par le contrat de travail le 1er juillet 2015, qui plus est pour des faits intervenus dans le courant du mois de septembre, ne pouvant suffire à caractériser a posteriori la non réalisation de la condition suspensive de l'obligation incombant à l'employeur.
L'absence de réclamation par le salarié pendant le temps d'exécution de la relation travail ne peut pas non plus être analysée comme un consentement au différé de l'augmentation prévue, voire une renonciation à son bénéfice.
Le défaut de fixation par l'employeur des objectifs permettant au salarié de percevoir une prime contractuellement prévue et subordonnée à leur réalisation, comme la privation injustifiée du bénéfice d'une augmentation de salaire contractuellement définie sont de nature à priver le salarié d'une partie de sa rémunération et constituent des manquements suffisamment graves de l'employeur à ses obligations contractuelles pour empêcher la poursuite de la relation de travail et justifier la prise d'acte du salarié.
En conséquence, la prise d'acte de la rupture du contrat de travail étant justifiée par la faute de la société LPG, doit produire les effets d'lm licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit pour le salarié à la perception des indemnités de rupture.
Le jugement de première instance sera infirmé et la société LPG sera condamnée à verser à M. C... l'indemnité compensatrice du préavis de trois mois soit 21000 euros, outre 2100 euros d'indemnité compensatrice des congés payés afférents, l'indemnité conventionnelle de licenciement soit 2000 euros, le rappel des salaires du mois de juillet 2015 au mois de janvier 2016 soit 2100 euros outre 210 euros d'indemnité compensatrice des congés payés afférents et la rémunération variable au titre de l'année 2015 soit 15 000 euros et 1500 euros d'indemnité compensatrice de congés payés.
M. C... avait une ancienneté de 18 mois et a trouvé un nouvel emploi à compter du 1 er mars 2016 à des conditions de rémunération moins élevées.

Le préjudice résultant pour lui de la rupture abusive du contrat de travail qui le liait à la société LPG sera réparé par l'allocation d'une indemnité de 42 000 euros »

ET AUX MOTIFS QUE « Il résulte du contrat de travail de travail de M. C... qu'il a été recruté aux fins de seconder le directeur général en qualité de directeur des opérations avec un statut de cadre de direction sans référence horaire, position III A coefficient 135 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, avec une rémunération annuelle de 80 400 € bruts, soit 6700 euros bruts par mois, devant passer à 7000 euros après une année de présence.
Selon l'article L. 3111-2 du code du travail, sont exclus de l'application des dispositions relatives à la durée du travail, à la répartition et l'aménagement des horaires ainsi qu'à celles relatives aux repos et jours fériés, les cadres dirigeants lesquels sont caractérisés par l'importance de leurs responsabilités impliquant une grande indépendance dans l'organisation de leur temps de travail, leur habilitation à prendre des décisions de manière largement autonome, line rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise.
Pour retenir ou écarter la qualité de cadre dirigeant, il appartient au juge de vérifier la fonction et les conditions réelles d'emploi du salarié au regard de chacun des critères cumulatifs énoncés par l'article L.3111-2 du code du travail.
L'organigramme de la société LPG montre que M. C... était placé sous la seule autorité du directeur général, à l'interface entre la direction générale et les différents services de l'entreprise, sur lesquels cependant, il ne disposait pas d'autorité hiérarchique.
Il résulte du courriel de Mme O... X..., en date du 19 janvier 2016, que M. C... avait un pouvoir de décision en matière de rémunération des salariés puisqu'elle fait expressément référence à l'acceptation par ce dernier d'une augmentation contestée par la suite par la responsable des ressources humaines.
Dans un de ses courriels du 22 juillet 2015, M. C... fait état d'une nouvelle organisation validée à son initiative par une autre salariée.
Si ces éléments sont de nature à démontrer une certaine autonomie de M. C... dans la gestion du personnel et l'organisation, ils ne révèlent pas que les décisions qu'il était amené à prendre puissent s'imposer aux autres salariés et cadres de l'entreprise.
L'emploi du temps du salarié pour les mois de septembre 2015 à janvier 2016 permet de constater qu'il participait aux réunions relatives à la stratégie (29 septembre), au compte d'exploitation (14/16 octobre), à la présentation de l'avancement des évolutions et des projets de production (10 septembre), participant ainsi manifestement aux instances dirigeantes de la société LPG.
Pour autant, aucun des éléments fournis ne permet de constater que M. C... disposait d'une rémunération située dans les niveaux les plus élevés parmi celles pratiquées dans l'entreprise, ce qui ne saurait se déduire exclusivement d'un taux de rémunération élevé.
A défaut pour l'employeur de fournir des éléments probants permettant de retenir la qualité de cadre dirigeant de M. C..., ce dernier est légitime à revendiquer l'application des dispositions relatives à la durée du travail et aux repos.
Conformément aux dispositions de l'article L.317l-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, la preuve n'incombe spécialement à aucune des parties, et si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient préalablement à ce dernier de présenter des éléments permettant d'étayer sa demande.
Ces éléments, essentiellement factuels, doivent revêtir un minimum de précision afin de permettre l'établissement d'un débat contradictoire en plaçant l'employeur, à qui incombe la charge de contrôler les heures de travail accomplies, en situation de pouvoir y répondre utilement.
Pour étayer ses prétentions financières, M. C... produit un relevé des heures de travail qu'il affirme avoir accomplies chaque jour du 1er juillet 2014 au 29 janvier 2016.
Ce relevé, établi pour les besoins de la cause et non au fil de l'exécution du contrat de travail, fait ressortir l'accomplissement très linéaire d'un quasi nombre identique d'heures de travail, selon des horaires invariables (8h15-12h20/ 13h10-18h45).
La liste horodatée des courriels envoyés par le salarié confirme ces horaires de présence habituels.
Le salarié produit ainsi des éléments préalables qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande.
L'employeur ne fournit aucun élément relatif au contrôle de la durée du travail de son salarié.
Au vu de ces éléments, et sans qu'il soit besoin d'une mesure d'instruction, la cour acquiert la conviction au sens du texte précité que M. C..., cadre supérieur au sein de la société LPG, a bien effectué des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées et que la cour retiendra pour un volume de 630 heures, dont 158 exécutées au-delà des 43 heures hebdomadaires, les heures supplémentaires devant être décomptées sur la semaine et non par simple addition des heures journalières.
Le jugement du conseil de prud'hommes sera en conséquence infirmé et la société LPG sera condamnée à verser à M. C... les sommes de 36 528, 59 euros de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et 3652, 85 euros d'indemnité compensatrice des congés payés s'y rapportant.
M. C... a exécuté un volume d'heures supplémentaires de 434 heures en 2015, soit 214 heures hors contingent légal.
Le salarié qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur en temps utile, a droit à l'indemnisation du préjudice subi, celle-ci comportant à la fois le montant de l'indemnité de repos compensateur et le montant de l'indemnité de congés payés afférents.
A ce titre, la société LPG devra verser à M. C... les sommes de 9452, 38 euros outre 945,23 euros d'indemnité compensatrice de congés payés »

ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial et que l'exigence d'impartialité doit s'apprécier objectivement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a condamné la société LPG Systems à payer diverses sommes à M. C... a statué dans une composition présidée par M. P... J..., dont l'épouse, Mme T... E... épouse J..., se trouvait dans un lien de subordination avec la société LPG Systems dont elle était salariée ; qu'en statuant ainsi lorsque sa composition faisait naître un doute quant à l'impartialité de la juridiction, elle a violé l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société LPG Systems à verser à M. C... les sommes de 21000 euros à titre d'indemnité de préavis et 2100 euros à titre d'indemnité compensatrice des congés payés afférents, 2000 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, 42 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif; 2100 euros de rappels de salaire et 210 d'indemnité compensatrice des congés payés afférents; 15 000 euros au titre de la rémunération variable et 1500 euros d'indemnité compensatrice de congés payés, outre une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « sur le défaut de paiement de l'augmentation de salaire et de la part variable de rémunération :
L'employeur a entendu se prévaloir de la rédaction conditionnelle et potestative de certaines clauses du contrat de travail de M. C..., pour soumettre à son appréciation discrétionnaire les termes de la rémunération de son salarié.
Il est avéré et résulte des différents témoignages versés aux débats par l'employeur comme des termes de l'avertissement du 1er octobre 2015, que la société LPG n'était pas satisfaite de la prestation de travail fournie par M. C..., qui en était informé.
Dès lors, la rétention de l'augmentation de salaire et le non versement de la part variable de rémunération repose sur des éléments objectifs ne participant pas d'un harcèlement dirigé contre M. C... »

ET AUX MOTIFS QUE « Il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail.

Cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.
Selon les termes de son courrier daté du 29 janvier 2016, M. C... a pris acte de la rupture de son contrat de travail au motif que depuis le 20 octobre 2015, il considère être l'objet de mesures de harcèlement, notamment d'une mise au placard et de ne pas avoir perçu de prime contractuelle sur objectif pour l'année 2015, ni l'augmentation de 300 € de son salaire initialement prévu à compter du mois de juillet 2015.
Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.
Le contrat de travail de M. C... stipulait dans son article 4 que sa rémunération brute mensuelle forfaitaire était fixée à 6700 euros et que: « sous réserve d'avoir pleinement réussi sa mission selon les attentes de l'entreprise »elle serait portée à 7000 euros au terme d'une année de présence ».
Il était également prévu la possibilité d'une: « rémunération variable sur objectif d'un montant brut de 15000 € dont les modalités d'attribution seront définies en relation avec la Direction Générale ».
Il est constant que la société LPG n'a pas versé au salarié la prime d'objectifs au titre de l'année 2015, ni mis en oeuvre l'augmentation de salaire, prenant motif de son insatisfaction quant à la prestation de travail de M. C....
Si par courriel du 27 février 2015, M. C... a clairement sollicité de son employeur la fixation de ses objectifs pour l'année 2015, la société LPG ne fournit aucun élément de nature à justifier qu'elle lui a apporté une réponse sur ce point, ni que des objectifs aient été déterminés.
Par ailleurs, si l'appréciation portée sur l'activité du salarié relève du pouvoir de direction de l'employeur, le juge prud'homal exerce son contrôle sur les éventuels abus commis dans l'exercice de ce pouvoir et sur ses conséquences dans l'exécution des obligations respectives découlant du contrat de travail.
Or, bien que la société LPG affirme que M. C... n'a pas fourni la prestation de travail attendue de lui pour justifier sa décision de ne pas mettre en oeuvre l'augmentation de salaire contractuellement prévue, elle n'apporte aucune justification concrète des manquements ou insuffisances reprochés au salarié, la seule délivrance d'un avertissement en date du 1er octobre 2015, soit postérieurement à l'échéance fixée par le contrat de travail le 1er juillet 2015, qui plus est pour des faits intervenus dans le courant du mois de septembre, ne pouvant suffire à caractériser a posteriori la non réalisation de la condition suspensive de l'obligation incombant à l'employeur.
L'absence de réclamation par le salarié pendant le temps d'exécution de la relation travail ne peut pas non plus être analysée comme un consentement au différé de l'augmentation prévue, voire une renonciation à son bénéfice.
Le défaut de fixation par l'employeur des objectifs permettant au salarié de percevoir une prime contractuellement prévue et subordonnée à leur réalisation, comme la privation injustifiée du bénéfice d'une augmentation de salaire contractuellement définie sont de nature à priver le salarié d'une partie de sa rémunération et constituent des manquements suffisamment graves de l'employeur à ses obligations contractuelles pour empêcher la poursuite de la relation de travail et justifier la prise d'acte du salarié.
En conséquence, la prise d'acte de la rupture du contrat de travail étant justifiée par la faute de la société LPG, doit produire les effets d'lm licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit pour le salarié à la perception des indemnités de rupture.
Le jugement de première instance sera infirmé et la société LPG sera condamnée à verser à M. C... l'indemnité compensatrice du préavis de trois mois soit 21000 euros, outre 2100 euros d'indemnité compensatrice des congés payés afférents, l'indemnité conventionnelle de licenciement soit 2000 euros, le rappel des salaires du mois de juillet 2015 au mois de janvier 2016 soit 2100 euros outre 210 euros d'indemnité compensatrice des congés payés afférents et la rémunération variable au titre de l'année 2015 soit 15 000 euros et 1500 euros d'indemnité compensatrice de congés payés.
M. C... avait une ancienneté de 18 mois et a trouvé un nouvel emploi à compter du 1 er mars 2016 à des conditions de rémunération moins élevées.
Le préjudice résultant pour lui de la rupture abusive du contrat de travail qui le liait à la société LPG sera réparé par l'allocation d'une indemnité de 42 000 euros »

1/ ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce pour débouter M. C... de sa demande fondée sur un harcèlement moral, la cour d'appel a retenu qu' « il est avéré et résulte des différents témoignages versés aux débats par l'employeur comme des termes de l'avertissement du 1er octobre 2015, que la société LPG n'était pas satisfaite de la prestation de travail fournie par M. C..., qui en était informé » ce dont elle a déduit que « la rétention de l'augmentation de salaire et le non versement de la part variable de rémunération repose sur des éléments objectifs ne participant pas d'un harcèlement dirigé contre M. C... » ; que pour juger que la prise d'acte de la rupture était justifiée, la cour d'appel a au contraire retenu que « bien que la société LPG affirme que M. C... n'a pas fourni la prestation de travail attendue de lui pour justifier sa décision de ne pas mettre en oeuvre l'augmentation de salaire contractuellement prévue, elle n'apporte aucune justification concrète des manquements ou insuffisances reprochés au salarié » si bien que n'était pas caractérisée « la non réalisation de la condition suspensive de l'obligation incombant à l'employeur » ; qu'en affirmant ainsi tout à la fois qu'il était établi que le travail du salarié n'était pas satisfaisant et qu'il n'était pas démontré que son travail était insatisfaisant, la cour d'appel s'est contredite en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

2/ ALORS QU' il n'appartient à l'employeur de fixer et de porter à la connaissance du salarié les objectifs qui lui sont impartis en début d'exercice que lorsqu'il est contractuellement prévu que la rémunération comporte une partie variable fonction de la réalisation d'objectifs ; qu'en l'espèce, le contrat de travail de M. C... prévoyait en son article 4 qu'à la rémunération forfaitaire mensuelle fixée, « pourra s'ajouter chaque année civile une rémunération variable sur objectifs d'un montant de 15 000 € dont les modalités d'attribution seront définies avec la direction générale », ce dont il résultait que le salarié ne bénéficiait d'aucun droit à une rémunération variable en l'absence d'avenant venu confirmer un tel droit ; que dès lors, en jugeant que le défaut de fixation par l'employeur des objectifs permettant au salarié de percevoir une prime contractuellement prévue et subordonnée à leur réalisation, de nature à priver le salarié d'une partie de sa rémunération, constituait un manquement suffisamment grave de l'employeur à ses obligations contractuelles pour empêcher la poursuite de la relation de travail et justifier la prise d'acte du salarié, la cour d'appel a violé l'article 1134 devenu 1103 du code civil, ensemble les articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(Subsidiaire)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société LPG Systems à verser à M. C... la somme de 15 000 euros au titre de la rémunération variable et 1500 euros d'indemnité compensatrice de congés payés, outre une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « Il était également prévu la possibilité d'une: « rémunération variable sur objectif d'un montant brut de 15000 € dont les modalités d'attribution seront définies en relation avec la Direction Générale Il est constant que la société LPG n'a pas versé au salarié la prime d'objectifs au titre de l'année 2015, ni mis en oeuvre l'augmentation de salaire, prenant motif de son insatisfaction quant à la prestation de travail de M. C....
Si par courriel du 27 février 2015, M. C... a clairement sollicité de son employeur la fixation de ses objectifs pour l'année 2015, la société LPG ne fournit aucun élément de nature à justifier qu'elle lui a apporté une réponse sur ce point, ni que des objectifs aient été déterminés. (
)
La société LPG sera condamnée à verser à M. C... (
) la rémunération variable au titre de l'année 2015 soit 15 000 euros et 1500 euros d'indemnité compensatrice de congés payés »

et AUX MOTIFS QUE « il est avéré et résulte des différents témoignages versés aux débats par l'employeur comme des termes de l'avertissement du 1er octobre 2015 que la société n'était pas satisfaite de la prestation de travail fournie ; que dès lors, la rétention de l'augmentation de salaire et le non versement de la part variable de la rémunération repose sur des éléments objectifs (
) » ;

ALORS QUE lorsque la rémunération comporte une partie variable fonction de la réalisation d'objectifs, lesdits objectifs doivent être portés à la connaissance du salarié en début d'exercice ; qu'en l'absence de fixation des objectifs par l'employeur, il appartient au juge de fixer la rémunération variable en fonction des critères visés au contrat et, à défaut, des éléments de la cause ; qu'en accordant à M. C... le montant maximal de la rémunération variable qu'elle a estimé pouvoir être obtenue, sans préciser sur quels critères visés au contrat ou relevant des circonstances de la cause elle se fondait, la cour d'appel, qui a par ailleurs relevé que la société LPG établissait que la prestation de travail fournie par M. C... n'était pas satisfaisante, de sorte que le non versement de la part variable de rémunération était justifié par des éléments objectifs, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 devenu 1103 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-13449
Date de la décision : 04/12/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 09 janvier 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 déc. 2019, pourvoi n°18-13449


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.13449
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