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28/11/2019 | FRANCE | N°18-23056

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 28 novembre 2019, 18-23056


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article R. 143-8 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon ce texte, que si la caisse primaire d'assurance maladie doit, dès le début de l'instance, transmettre une copie des documents médicaux à l'employeur ou au médecin désigné par celui-ci, cette obligation ne peut porter que sur les documents qu'elle détient en vertu d'une dérogation au secret médical prévue par la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la c

aisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie (la caisse), ayant fixé à 67 % le taux...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article R. 143-8 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon ce texte, que si la caisse primaire d'assurance maladie doit, dès le début de l'instance, transmettre une copie des documents médicaux à l'employeur ou au médecin désigné par celui-ci, cette obligation ne peut porter que sur les documents qu'elle détient en vertu d'une dérogation au secret médical prévue par la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie (la caisse), ayant fixé à 67 % le taux d'incapacité permanente partielle consécutif à un accident du travail subi par M. L..., la société Entreprise Bonglet, employeur de ce dernier (l'employeur), a saisi une juridiction du contentieux technique de sécurité sociale ;

Attendu que, pour accueillir ce recours et déclarer inopposable à l'employeur la décision de fixation du taux d'incapacité permanente partielle, l'arrêt retient que le rapport du médecin sapiteur consulté par le médecin conseil de la caisse n'a pas été communiqué à l'employeur ni au médecin conseil désigné par celui-ci, et que la production en cause d'appel ne peut suppléer l'inobservation des formalités prévues par l'article R. 143-8 du code de la sécurité sociale ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la caisse ne détenait pas le rapport du médecin sapiteur sollicité par le médecin conseil du service national du contrôle médical, la Cour nationale a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 juillet 2018, entre les parties, par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, autrement composée ;

Condamne la société Entreprise Bonglet aux dépens ;

Vu les articles 700 du code de procédure civile, rejette la demande présentée par la société Entreprise Bonglet et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'infirmant le jugement entrepris, il a déclaré inopposable à la société ENTREPRISE Bonglet la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie en date du 27 décembre 2013 reconnaissant à M. V... L... un taux d'incapacité permanente partielle de 67 % à la date de consolidation du 31 octobre 2013, suite à l'accident du travail survenu le 9 décembre 2011 ;

AUX MOTIFS PROPRES QU' « il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ; que, dans les rapports l'opposant à l'employeur, la caisse primaire est tenue de rapporter la preuve du bien-fondé de ses décisions ; Considérant que le praticien-conseil du service médical a fait appel à un expert psychiatre pour évaluer le taux d'incapacité permanente partielle de M. V... L... à la date de consolidation du 31 octobre 2013 ; que le docteur I... a rendu son rapport en date du 17 septembre 2013, dans lequel il conclut à un taux d'incapacité permanente partielle de 60 %, en se référant au chapitre des syndromes psychiatriques psychotiques d'origine traumatique du barème, pour « un syndrome psychotraumatique sévère avec des composantes psychotiques et des complications dépressives » ; que la caisse, par décision en date du 27 décembre 2013, a fixé le taux d'incapacité permanente partielle à 67 %, dont 7 % au titre de l'incidence professionnelle, pour des séquelles consistant en « un syndrome psychotraumatique sévère avec des composantes psychotiques et des complications dépressives » ; Que la transmission des pièces médicales est soumise à des dérogations particulières au secret médical et prévue par les dispositions de l'article L. 143-10 et R. 143-32 et suivants du code de la sécurité sociale ; qu'en l'espèce, la caisse a transmis la copie de la déclaration d'accident de travail en date du 9 décembre 2011, du certificat médical initial en date du 9 avril 2011 et la notification de la consolidation ; que de ce point de vue, elle doit dès lors être considérée comme ayant satisfait à ses obligations résultant de l'article R. 143- 8 du code de la sécurité sociale ; que par ailleurs, le rapport du praticien-conseil — qui n'est pas détenu par la caisse a été transmis par le service médical et a été communiqué au médecin-conseil désigné par l'employeur, et aux médecins-consultants désignés tant en première instance qu'en appel ; Considérant que l'article R. 143-33 du code de la sécurité sociale dispose : "L'entier rapport médical mentionné à l'article L. 143-10 comprend: I ° L'avi,s et les conclusions motivées données à la caisse d'assurance maladie sur le taux d'incapacité permanente partielle à retenir 2 °Les constatations et les éléments d'appréciation sur lesquels lavis s'est fondé, " ; Considérant que ces dispositions n'imposent pas la communication de pièces médicales ayant permis au médecin conseil de rendre un avis, mais la reprise au sein du rapport d'incapacité permanente partielle des constatations et éléments d'appréciation sur lesquels l'avis est fondé ; qu'en l'espèce, le rapport du sapiteur psychiatre, le docteur I..., en date du17 septembre 2013, n'est pas joint au 'rapport, ni repris en son sein ; que cet élément médical fondamental n'est pas une des pièces détenues par le salarié lui-même et donc couvertes par le secret médical ; Considérant que la production en cause d'appel des éléments médicaux, même selon les modalités fixées par l'article R. 143-32 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n° 2010-424 du 28 avril 2010, ne peut suppléer l'inobservation des formalités de communication prévues par l'article R. 143-8 du code de la sécurité sociale avant l'entrée en vigueur du décret précité qu'en effet. la caisse devait produire, avant l'ouverture des débats devant le tribunal du contentieux de l'incapacité, les documents médicaux ; Que cette carence ne peut donc plus être réparée devant la Cour nationale, juridiction du second degré ; Que dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la décision de la caisse primaire d'assurance maladie n'est pas opposable à l'employeur qui n'a pu exercer de manière effective un recours conforme aux principes directeurs régissant tout procès civil » ;

ALORS QUE, PREMIEREMENT, en application des articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du Code de la sécurité sociale, la Caisse et le service national du contrôle médical sont tenus de transmettre en temps utile l'entier rapport médical ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité permanente partielle au médecin consultant désigné par la juridiction technique et au médecin désigné par l'employeur ; que tel était le cas en l'espèce ; que la CNITAAT constate d'une part que le rapport du praticien-conseil a été communiqué au médecin-conseil désigné par l'employeur et aux médecins-consultants désignés en première instance et en appel et d'autre part que la Caisse a fourni le 14 décembre 2015 l'intégralité de l'avis du docteur I..., sur lequel le service médical s'est fondé pour fixer le taux d'incapacité ; qu'en décidant dès lors que la décision de la caisse reconnaissant à M. V... L... un taux d'incapacité permanente partielle de 67 % devait être déclarée inopposable à l'employeur, la CNITAAT a violé les articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du Code de la sécurité sociale ;

ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, s'il résulte des dispositions de l'article R. 143-8 du Code de la sécurité sociale que la caisse est tenue de transmettre au secrétariat du tribunal du contentieux de l'incapacité les documents médicaux qu'elle détient en vertu d'une dérogation au secret médical prévue par la loi, cette obligation ne s'étend ni au rapport du médecin-conseil ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité permanente partielle, ni à l'avis médical d'un médecin spécialiste sollicité par le médecin-conseil en vue de fixer ce taux ; que la communication de ces documents, couverts par le secret médical, ne peut être réalisée qu'avec l'accord de l'assuré ou suivant les modalités définies aux articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du Code de la sécurité sociale ; qu'en décidant au contraire que l'avis d'un médecin spécialiste sollicité par le médecin-conseil en vue de fixer le taux d'incapacité permanente partielle n'était pas couvert par le secret médical, la CNITAAT a violé les articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33, ensemble l'article R. 143-8 du Code de la sécurité sociale ;

ALORS QUE, TROISIEMEMENT, si l'article R. 143-8 du code de la sécurité sociale impose une transmission des éléments que la Caisse détient en vertu d'une dérogation au secret médical au début d'instance, en application des articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du même code l'entier rapport médical ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité permanente partielle doit seulement être communiqué en temps utile ; qu'en décidant que la carence de la CPAM dans la production de l'entier avis du docteur I... ne pouvait être réparée devant la Cour nationale quand, s'agissant d'un élément d'appréciation sur lequel le médecin conseil s'est fondé pour fixer le taux d'incapacité, cet avis pouvait être produit en temps utile, la CNITAAT a violé les articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33, ensemble l'article R. 143-8 du Code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-23056
Date de la décision : 28/11/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour nationale de l'incapacité et de la tarification (CNITAAT), 13 juillet 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 28 nov. 2019, pourvoi n°18-23056


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.23056
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