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27/11/2019 | FRANCE | N°18-14950

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 novembre 2019, 18-14950


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. H... a été engagé verbalement le 1er juillet 1996 par la société Sotapor en qualité d'employé polyvalent, puis de vendeur suivant contrat de travail du 3 janvier 2000, qui a été transféré à la société Socimat à compter du 1er mai 2000 ; que le salarié a été désigné délégué syndical le 11 juin 2013 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes, notamment à titre indemnitaire pour harcèlement moral et pour discrimination syndicale et en rai

son de son état de santé ;

Sur les premier, deuxième, troisième moyens et quatri...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. H... a été engagé verbalement le 1er juillet 1996 par la société Sotapor en qualité d'employé polyvalent, puis de vendeur suivant contrat de travail du 3 janvier 2000, qui a été transféré à la société Socimat à compter du 1er mai 2000 ; que le salarié a été désigné délégué syndical le 11 juin 2013 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes, notamment à titre indemnitaire pour harcèlement moral et pour discrimination syndicale et en raison de son état de santé ;

Sur les premier, deuxième, troisième moyens et quatrième moyen pris en sa première branche :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le cinquième moyen pris en sa première branche :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande indemnitaire pour discrimination syndicale, alors, selon le moyen, que le salarié soutenait qu'il avait été victime d'une discrimination syndicale dans l'évolution de sa carrière professionnelle, notamment du fait qu'il n'avait pas eu une progression de carrière identique à celle des autres salariés à ancienneté et qualification équivalente ; qu'au soutien de sa demande, il produisait des éléments relativement à son évolution salariale et au fait qu'il avait dû solliciter lui-même son passage dans la 6e catégorie des employés, au contraire des autres salariés qui n'ont eu à réaliser aucune démarche en ce sens ; qu'en affirmant que le salarié ne pouvait se prévaloir de mesures discriminatoires ni à raison de son état de santé, ni des mesures financières injustes, ni d'une carrière professionnelle rendue difficile par l'employeur sans aucunement expliciter en quoi il convenait d'exclure le fait que la carrière professionnelle du salarié avait été rendue difficile par l'employeur, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard de l'article Lp. 1121-2 du code du travail de la Polynésie française, ensemble les articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, qu'en vertu des articles 13 et 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, les articles L. 1132-1 et suivants du code du travail ne sont pas applicables en Polynésie française ;

Et attendu que la cour d'appel qui a retenu, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis et sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que le salarié ne pouvait se prévaloir d'une carrière professionnelle rendue difficile par l'employeur et que la preuve d'un comportement discriminatoire de l'employeur en raison de l'activité syndicale de l'intéressé n'était pas rapportée, a légalement justifié sa décision ;

Mais sur le quatrième moyen pris en sa seconde branche :

Vu l'article 268 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

Attendu que si, en vertu des articles 13 et 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ne sont pas applicables en Polynésie française, il appartient au juge de motiver sa décision conformément aux dispositions de l'article 268 susvisé ;

Attendu que pour rejeter la demande indemnitaire du salarié au titre du harcèlement moral, l'arrêt retient que celui-ci, qui occupe désormais le poste de vendeur, a été victime d'un grave accident de trajet le 29 décembre 2008 et souffre de douleurs séquellaires d'un traumatisme du plexus brachial gauche, que par lettre adressée le 15 juillet 2015 l'employeur a expliqué que le siège qui existait auparavant au comptoir peinture, et qui était destiné à tous les salariés ayant besoin de faire des opérations à ce comptoir, a été supprimé par le responsable peinture car la présence de ce siège ne permettait pas à deux personnes de se retrouver derrière le comptoir, qu'aucun élément ne permettait de faire douter de cette explication, que sur les recommandations du médecin du travail, à savoir dix minutes de pause toutes les deux heures, depuis le mois d'avril 2014, une chaise a été mise à disposition du salarié dans un espace climatisé, qui est le bureau du chef d'équipe du salarié, qu'aucun élément n'établit ni que le salarié n'a pu se reposer pour prévenir ou soulager ses douleurs, ni que son état de santé s'est dégradé durant l'année qui a suivi la mise à disposition de la chaise, ni que la cohabitation de l'intéressé avec son supérieur ait été constante et tendue, que les pièces versées aux débats font ainsi ressortir que l'employeur a pris des mesures destinées à protéger la santé du salarié, qu'il n'y a donc pas lieu de constater l'existence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, ni d'un harcèlement ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié qui faisait valoir qu'il avait été sanctionné de manière répétée et injustifiée par trois avertissements et un rappel à l'ordre, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et sur le cinquième moyen pris en sa seconde branche :

Vu l'article 268 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination en raison de son état de santé, l'arrêt retient que l'employeur a pris des mesures destinées à protéger la santé du salarié, qu'ainsi celui-ci ne peut se prévaloir de mesures discriminatoires relatives à son état de santé ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié qui faisait valoir que par lettre du 19 décembre 2011, il avait été menacé d'un licenciement s'il renouvelait ses arrêts maladie, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. H... de ses demandes de dommages-intérêts pour harcèlement moral et pour discrimination en raison de son état de santé, l'arrêt rendu le 21 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée ;

Condamne la société Socimat aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Socimat à payer à M. H... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. H....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de rappel de prime de fin d'année.

AUX MOTIFS propres QUE l'article 10 du règlement intérieur de la SAS SOCIMAT SOTAPOR prévoit que : « Tout salarié justifiant d'un minimum d'une année de présence dans l'entreprise bénéficiera d'une prime de fin d'année dont le montant sera calculé d'après l'appréciation directe du supérieur hiérarchique » ; Cependant V... H... ne justifie pas qu'avant le 1er mai 2010, date de la reprise de son contrat de travail par la SAS SOCIMAT-SOTAPOR, un texte contractuel ou conventionnel lui donnait le droit de percevoir une telle prime. Et s'il a perçu aux mois de décembre 2007 et 2008 une prime de fin d'année d'un montant de 270 000 FCP, aucune pièce n'établit que cette gratification lui ait été versée à d'autres reprises, ni qu'elle ait été versée à d'autres salariés. Dans ces conditions, V... H... ne rapporte pas la preuve des critères de généralité, de fixité et de régularité qui caractérisent un usage. En tout état de cause, les bulletins de salaire et les écritures d'V... H... démontrent que celui-ci a perçu une prime de 13e mois lorsqu'il est devenu le salarié de la SAS SOCIMAT-SOTAPOR. Or, prime de fin d'année et « 13e mois » possèdent une nature identique, désignent toutes deux une prime à caractère annuel alloué au salarié en fin d'année et ne sont donc pas cumulables.

AUX MOTIFS adoptés QU'il résulte de l'article 10 du règlement intérieur de la SAS SOCIMAT SOTAPOR, que tout salarié justifiant d'un minimum d'une année de présence dans l'entreprise bénéficiera d'une prime de fin d'année dont le montant sera calculé d'après l'appréciation directe du supérieur hiérarchique ; en revanche, aucun texte n'est produit quant à la société SOTAPOR pour la période antérieure au 1er mai 2010, date d'effet du transfert de contrat à la SOCIMAT ; Mr H... justifie avoir perçu une prime de fin d'année de 270 000 FCP en décembre 2007, mais ne produit aucun élément sur les autres années ; qu'il mentionne en revanche des chiffres variables, même si la prime alléguée aurait été croissante dans son montant entre 1999 et 2008 ; qu'il n'est pas justifié que les autres salariés aient tous bénéficié de cet avantage, dont la généralité et la fixité, critères de l'usage, ne sont donc pas démontrées ; il apparaît que Mr H... a perçu une somme de 159 029 FCP au titre d'une prime de treizième mois en décembre 2010 et en décembre 2011 ; qu'il ne prétend pas qu'il percevait déjà une telle prime lorsqu'il était salarié de SOTAPOR ; que cette prime s'est donc substituée, en tout état de cause, à la prime de fin d'année SOTAPOR ; qu'aucun élément n'a été produit pour l'année 2012 et pour l'année 2013 quant à la perception de ce treizième mois ; qu'en janvier 2014, il a perçu la somme de 17 428 FCP de prime de fin d'année SOCIMAT-SOTAPOR.

1° ALORS QUE constitue un élément obligatoire du salaire la prime versée sans discontinuer depuis l'engagement d'un salarié ; que pour débouter le salarié, la cour d'appel a, par motifs propres et adoptés, retenu que la prime litigieuse ne constituait pas un usage ; que cependant, au soutien de sa demande, le salarié se prévalait non seulement de l'existence d'un usage, mais également d'un élément obligatoire du salaire ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans répondre au salarié de ce chef, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1103 du code civil.

2° ALORS QUE n'ont pas le même objet ni la même cause une prime de fin d'année, prime exceptionnelle versée en fin d'année, et une prime de 13ème mois, sursalaire versée globalement à un moment donné, mais pas nécessairement à la fin de l'année ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil.

3° ALORS tout le moins QU'en statuant comme elle l'a fait, sans expliquer en quoi les deux primes avaient le même objet et la même cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1103 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de rappels de salaire au titre des commissions sur le chiffre d'affaires.

AUX MOTIFS propres QUE la lecture des pièces versées aux débats fait ressortir que le tribunal du travail a analysé de façon précise et exacte les éléments de la cause et leur a appliqué les textes et principes juridiques adéquats. Il a ainsi considéré à juste titre que : - le contrat de travail du 2 janvier 2000 mentionne clairement que la commission de 1% sur la marge du chiffre d'affaires comptant ne se calcule que sur le magasin de MAMAO 1, avec un minimum garanti de 180 000 FCP brut; - MAMAO 1 est constitué par le magasin MAMAO, moins les rayons 2, 6, 8, 9, 10, 13, 14 et 17 ; - selon l'attestation de Z... O..., commissaire aux comptes de la SAS SOCIMAT-SOTAPOR, les documents préparés par celle-ci quant au montant des commissions pour la période de mai à décembre 2010, les exercices 2011 à 2013 et les mois de janvier à mars 2014 sont corroborés : *en ce qui concerne le montant de la marge nette servant de base à la commission, par les états de gestion commerciale de la société rapprochés tant au niveau du chiffre d'affaires que de la marge de la comptabilité ; *en ce qui concerne le taux de commissions de 1%, par le contrat de travail du 2 janvier 2000 ; *en ce qui concerne le montant des commissions payées, par les bulletins de salaires d'V... H... ; * - la rectification de l'erreur affectant le calcul des commissions jusqu'à fin 2011 a pour effet d'appliquer les dispositions contractuelles initiales et non pas le nouveau taux de commission, ni la nouvelle assiette prévus par des avenants que le salarié a toujours refusé de signer et qui, pourtant, ne lui auraient pas été défavorables ; * - V... H... « ne justifie pas qu'il a été privé de commissions correspondant à un travail réel personnel antérieur pendant ses absences pour congés » et « ne peut donc cumuler les commissions de la période d'absence avec l'indemnité de congés payés, dont l'assiette intègre déjà les commissions antérieures ».

AUX MOTIFS adoptés QUE le contrat de travail de Mr H... mentionne clairement que sa commission de 1 % sur la marge du chiffre d'affaires comptant ne se calcule que sur le magasin de MAMAO 1, avec un minimum garanti de 180 000 FCP bruts ; c'est donc à tort que le requérant prend, comme assiette de ses calculs, l'entier magasin MAMAO, sans distinguer entre MAMAO 1 et MAMAO 2 ; il résulte des rapports des commissaires aux comptes des sociétés SOTAPOR et SOC1MAT que MAMAO 1 est constitué par le magasin MAMAO, moins les rayons 2, 6, 8, 9, 10. 13, 14 et 17 ; Z... O..., commissaire aux comptes de la SAS SOCIMAT atteste, le 11 juin 2014, que les documents préparés par la société quant au montant des commissions pour la période de mai à décembre 2010, les exercices 2011 à 2013 et les mois de janvier à mars 2014, ont été contrôlés par ses soins et sont corroborés : - d'une part, concernant le montant de la marge nette servant de base à la commission, par les états de gestion commerciale de la société rapprochés tant au niveau du chiffres d'affaires que de la marge de la comptabilité ; - d'autre part, concernant le taux de commissions de 1 % par le contrat de travail du 2 janvier 2000 ; - enfin pour le montant des commissions payées par les fiches de paie de Mr H... ; qu'au regard de ces éléments de vérification, il n'y a aucune raison de faire droit aux demandes de Mr H..., fondées sur des variables erronées ; ainsi se confirme le contexte d'une erreur persistante de la société dans le calcul des commissions du requérant jusqu'à fin 2011 : que la rectification consécutive n'a été qu'un retour aux dispositions contractuelles initiales, et non la mise en oeuvre unilatérale d'un nouveau taux de commission sur une nouvelle assiette figurant aux avenants que le salarié a toujours refusé de signer ; Le salarié ne justifie pas qu'il a été privé de commissions correspondant à un travail réel personnel antérieur pendant ses absences pour congés ; qu'il ne peut donc cumuler les commissions de la période d'absence avec l'indemnité de congés payés, dont l'assiette intègre déjà les commissions antérieures ; La simulation effectuée par le commissaire aux comptes démontre en outre que grâce à la garantie d'une commission mensuelle minimale de 50 000 FCP, le nouveau système proposé au requérant ne lui aurait pas été défavorable ; qu'il ne peut donc se prévaloir des démarches répétées de lui faire signer un avenant pour caractériser un harcèlement qui n'est pas établi au dossier.

1° ALORS QUE la notion de procès équitable requiert qu'une juridiction interne qui n'a que brièvement motivé sa décision, que ce soit en incorporant les motifs fournis par une juridiction inférieure ou autrement, ait réellement examiné les questions essentielles qui lui ont été soumises et qu'elle ne se soit pas contentée d'entériner purement et simplement les conclusions de l'une des parties ; qu'en l'espèce, le salarié critiquait de manière circonstanciée, dans ses conclusions d'appel (v. pp. 19 à 23), les arguments avancés par la société dans ses premières écritures et reprises en cause d'appel, et qui avaient intégralement été repris par les premiers juges ; que, pour confirmer le jugement, la cour d'appel s'est bornée à faire sienne sa motivation au prétexte qu'ils étaient pertinents ; qu'en statuant ainsi, sans examiner les moyens du salarié, et en renvoyant systématiquement aux motifs des premiers juges qui étaient eux-mêmes la reprises des écritures de l'employeur, la cour d'appel a méconnu les exigences du procès équitable, en violation de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

2° ALORS QUE si une clause du contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération, c'est à la condition qu'elle soit fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l'employeur, qu'elle ne fasse pas porter le risque d'entreprise sur le salarié et n'ait pas pour effet de réduire la rémunération au-dessous des minima légaux et conventionnels ; que ne constitue pas un élément objectif indépendant de la volonté de l'employeur l'élément dont l'évaluation dépend exclusivement de l'appréciation subjective de celui-ci ; que pour débouter le salarié, la cour d'appel, faisant sienne l'argumentation de l'employeur et les motifs des premiers juges, a considéré que le magasin Mamao 1 était constitué du magasin Mamao moins les rayons 2, 6, 8, 9, 10, 13, 14 et 17, sur le fondement de l'attestation du commissaire au compte ; que cependant, les éléments servant de base au calcul de la commission sur le chiffre d'affaires relevaient des seules appréciation et évaluation de l'employeur, qui avait unilatéralement modifié l'assiette de calcul de cette prime aux fins d'en réduire le montant ; qu'il s'en déduisait nécessairement que la variation de la rémunération était fondée sur des éléments subjectifs dépendants de sa seule volonté ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et de l'article 1103 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'employeur n'avait pas manqué à son obligation de sécurité et de prévention des actes de harcèlement moral et d'AVOIR en conséquence débouté le salarié de sa demande indemnitaire de ce chef.

AUX MOTIFS propres QUE L'article Lp. 1141-1 du code du travail de la Polynésie française dispose que : « Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique oü mentale ou de compromettre son avenir professionnel. » En application dès-dispositions de l'article Lp. 4121-1 du même code, l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat envers ses salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs de l'entreprise. Et l'article A. 4224-4 du même code dispose que : « Un siège approprié et adapté aux exigences de la tâche est mis à la disposition de chaque salarié à son poste de travail, ou à proximité, " lorsque l'exécution du travail est compatible avec la position assise ou semi-assise (position assis-debout), continue ou intermittente ». V... H..., qui occupe désormais le poste de vendeur, a été victime d'un grave accident de trajet le 29 décembre 2008 et souffre de « douleurs séquellaires d'un traumatisme du plexus brachial gauche ». Par lettre du 15 juillet 2015, l'employeur a expliqué à l'Inspection du travail que : « Il existait auparavant un siège, lié au fait que le comptoir « peinture » était assez bas, il était donc destiné à tous les salariés ayant besoin de faire des opérations à ce comptoir (valider commande, émettre facture, encaisser client) et n'a jamais été destiné spécifiquement à M. H.... Ce siège a été supprimé, non par la direction générale, mais par le responsable du rayon peinture, car il a constaté que la présence de ce siège ne permettait pas à deux, personnes de se trouver derrière ce comptoir, alors que les nécessités du service font que les vendeurs doivent pouvoir s'y trouver à deux (plusieurs clients à traiter simultanément), ou avec le responsable du rayon. Il s'agissait donc simplement d'une optimisation du fonctionnement de ce rayon, par son responsable, ce qui correspond à ses attributions normales. Bien entendu, nous avons sur-élevé le comptoir, afin qu'il se trouve à bonne hauteur, pour permettre aux salariés, amenés à y travailler, de le faire debout, donc sans siège, mais sans gêne ergonomique, ce qui a été contrôlé par le Médecin du Travail... ». Aucun élément versé aux débats ne permet de faire douter de l'exactitude de l'explication donnée par la SAS SOCIMAT-SOTAPUR à la suppression du siège litigieux, ni donc de supposer que cette suppression aurait un lien avec V... H.... Par ailleurs, le docteur I... C..., médecin du travail, a conclu sa visite du 2 avril 2014 dans l'entreprise de la façon suivante : « Mr V... occupe le poste de vendeur qui présente comme tout poste, des missions. Il est apte à travailler, sur ce poste avec néanmoins quelques restrictions, je vous rappelle que ce salarié est reconnu travailleur handicapé. J'ai vu que des travaux concernant le comptoir allait commencer, effectivement le poste à la caisse n'était pas ergonomique ; merci de me tenir au courant de la fin des travaux, afin que je puisse programmer une nouvelle visite. V... ne nécessite pas un poste assis pour valider la commande et encaisser le client, qui n'est qu'une partie de sa mission. Par contre compte tenu de son statut, ii doit bénéficier d'une possibilité de pouvoir s'asseoir car la fonction debout prolongée (plus de 2h) peut lui être effectivement pénible ; je prends note que vous lui avez proposé une chaise dans le bureau climatisé de son chef d'équipe... ». Et, dans une lettre du 24 février 2015, le médecin inspecteur du travail répond ainsi au conseil d'V... H... : « Je l'ai bien reçu le 23 octobre 2014 en consultation de médecine du travail. Il a été suivi en médecine du travail par l'AMT-CGPME, et plus particulièrement les docteurs C... et G..., qu'il me dit avoir vu à plusieurs reprises en 2013 et 2014. J'ai procédé à son examen clinique et pris connaissance de son traitement. Je me suis rendu le 15 janvier 2015 sur son lieu de travail. La contestation porte sur la mise à disposition d'un tabouret haut, type tabouret de bar, lors de ses activités au poste de saisie facture. Le poste de monsieur H... V... (d'après monsieur R..., son supérieur hiérarchique) Monsieur H... est employé en tant que vendeur. Il reçoit les clients, les conseille sur les produits. C'est un poste polyvalent, à ce titre, quand le manoeuvre dédié au chargement est indisponible, V... charge les véhicules. Il peut utiliser le diable mis à sa disposition. Il lui arrive de remplacer le coloriste quand celui-ci est indisponible, cela est assez rare. V... effectue la facturation des produits vendus. Pour cela il se rend dans l'îlot de facturation... Il existe un diable à disposition. Le poste de facturation n'est équipé d'aucun meuble, notamment siège. Lors des tâches de facturation et d'encaissement, le salarié y reste quelques minutes par client. Les claviers ont été réinstallés en hauteur de façon à pouvoir permettre une saisie en position debout. Il m'apparaît que le poste de travail tel qu'il m'a été décrit et tel que j'ai pu le visiter me paraît pouvoir être qualifié de poste de travail à astreinte physique modérée. La contrainte principale plutôt que le port de charge me semble être la situation debout mais dynamique puisque monsieur H... doit constamment se déplacer. En l'occurrence il me paraît judicieux au titre de l'aménagement de son poste de travail de lui permettre de s'asseoir de façon régulière. Pauses dont la durée, la fréquence et le lieu devront être fixés en concertation entre le salarié, l'employeur et le médecin du travail. Le tabouret haut, demande du salarié placé dans l'ilot de facturation ne me paraît cependant pas être la solution optimale. Il paraît souhaitable de partir des préconisations du médecin du travail de l'entreprise, à savoir dix minutes de pause toutes les deux heures quitte à en aménager les paramètres selon l'accord que trouveront les parties... ». Une chaise dans un espace climatisé qui est le bureau du chef d'équipe a été mise à la disposition d'V... H... depuis le mois d'avril 2014 mais, dans une lettre du 17 juillet 2015, l'inspectrice du travail expose qu'elle n'est pas favorable à cette solution en précisant : « En effet, il n'a jamais été demandé par le salarié, ni par le médecin du travail, que cette pause s'effectue dans un espace climatisé. Enfin, les relations déjà tendues entre le responsable hiérarchique de monsieur H... et ce dernier, imposent au contraire â ce que cette pause s'effectue dans un endroit plus neutre. Aussi, vous voudrez bien redéfinir les modalités de cette pause en concertation avec le salarié, comme cela a été préconisé par le médecin inspecteur du travail, dans son courrier en date du 24 février 2015. En cas de difficulté, je me tiens à votre disposition et à celle du salarié pour convenir en ma présence, d'un accord amiable ». Toutefois, aucun élément n'établit ni que le salarié n'a pu se reposer pour prévenir ou soulager ses douleurs, ni que son état de santé s'est dégradé durant l'année qui a suivi la mise à disposition de la chaise, ni que la cohabitation d'V... H... avec son supérieur ait été constante et tendue. Par ailleurs, le poste occupé par V... H... ne nécessite pas une présence prolongée au comptoir de vente ; la solution adoptée par l'employeur n'a pas fait l'objet de remarques de la part des médecins du travail ; le fait de s'asseoir dans un endroit frais ne paraît pas comporter d'inconvénient particulier et le refus d'isoler V... H... n'est pas contraire à l'intérêt du salarié. Les pièces versées aux débats font ainsi ressortir que l'employeur a pris en considération l'état de santé du salarié ; qu'après concertation fréquente avec les services de l'inspection du travail et de la médecine du travail, il a pris des mesures destinées à protéger la santé d'V... H... et que la mise â disposition d'une chaise est une solution adaptée à l'état du salarié, ce qui n'exclut pas la possibilité pour les parties d'en rechercher une meilleure avec l'aide de l'inspecteur et du médecin du travail. Il n'y a donc pas lieu de constater l'existence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, ni d'un harcèlement.

AUX MOTIFS adoptés cités au deuxième moyen.

ALORS QUE constitue un manquement à l'obligation de sécurité et de prévention le fait pour un employeur de refuser de se conformer aux préconisations du médecin du travail et de l'inspecteur du travail en matière de protection de la santé et de la sécurité du travailleur ; que pour dire que l'employeur avait rempli ses obligations en matière de prévention et de protection de la santé du salarié, la cour d'appel retient qu'aucun élément n'établit ni que le salarié n'a pu se reposer pour prévenir ou soulager ses douleurs, ni que son état de santé s'est dégradé durant l'année qui a suivi la mise à disposition de la chaise, ni que la cohabitation entre le salarié son supérieur ait été constante et tendue, que le fait de s'asseoir dans un endroit frais ne paraît pas comporter d'inconvénient particulier et que le refus d'isoler le salarié n'était pas contraire à l'intérêt du salarié ; que cependant l'arrêt a constaté que, dans un courrier du 17 juillet 2015 (prod n° 7), l'inspecteur du travail avait enjoint l'employeur de trouver une solution alternative à celle de placer un fauteuil dans le bureau climatisé du supérieur hiérarchique du salarié, et que, dans un courrier du 24 février 2015 (prod n° 6), la médecine du travail avait enjoint l'employeur de trouver une solution en concertation avec le salarié ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans tirer les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations desquelles il ressortait que l'employeur n'avait pas respecté les préconisations de la médecine du travail et de l'inspection du travail, la cour d'appel a violé les articles Lp. 4121-1 et A. 4224-4 du code du travail de la Polynésie française, ensemble les articles L. 4121-1 et L. 4624-1 du code du travail.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'employeur n'avait commis aucun acte constitutif d'un harcèlement moral et d'AVOIR en conséquence débouté le salarié de ses demandes indemnitaires de ce chef.

AUX MOTIFS propres cités au troisième moyen.

AUX MOTIFS adoptés cités au deuxième moyen.

1° ALORS QUE, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que la cour d'appel a considéré que les faits de harcèlement allégués, à savoir les sanctions répétées et injustifiées, la retenue illicite sur le salaire, la diminution de la prime de chiffre d'affaires, le manquement à l'obligation de sécurité et de prévention, n'étaient pas avérés ; que la cassation à intervenir au premier et/ou deuxième et/ou troisième moyen entrainera, la censure par voie de conséquence du chef de dispositif ayant débouté le salarié de sa demande au titre du harcèlement moral, en application de l'article 624 du code de procédure civile.

2° ALORS QUE il appartient au salarié de produire les éléments de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral, tandis qu'il appartient à l'employeur de démontrer que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral ; que les juges sont tenus de prendre en considération l'ensemble des éléments produits par le salarié et de procéder à une appréciation globale des éléments produits ; que la cour d'appel a considéré que les faits de harcèlement allégués, à savoir la retenue illicite sur le salaire, la diminution de la prime de chiffre d'affaires, le manquement à l'obligation de sécurité et de prévention, n'étaient pas avérés ; que cependant, le salarié faisaient également valoir qu'il a avait été victime de sanctions répétées et injustifiées ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans examiner l'ensemble des éléments produits, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article Lp. 1141-1 du code du travail de la Polynésie française, ensemble les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'employeur n'avait commis aucun acte constitutif d'une discrimination et d'AVOIR en conséquence débouté le salarié de sa demandes indemnitaires de ce chef.

AUX MOTIFS propres QUE L'article Lp. 1121-1 du code du travail de la Polynésie française dispose que : « Pour l'offre d'emploi, ne peuvent être pris en considération l'origine, le sexe, les moeurs, l'orientation ou l'identité sexuelle, l'âge, la situation de famille ou la grossesse, les caractéristiques génétiques, l'appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, les opinions politiques, les activités syndicales ou mutualistes, les convictions religieuses, l'apparence physique, le nom de famille, l'état de santé ou le handicap ». L'article Lp. 1121-2 du même code dispose que : « Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, applicable en Polynésie française, notamment en matière de rémunération, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de l'un des motifs discriminatoires énumérés à l'article Lp. 1121-1 ». Il a été ci-dessus exposé qu'V... H... ne peut se prévaloir ni de mesures discriminatoires relatives à son état de santé, ni de mesures financières injustes, ni d'une carrière professionnelle rendue difficile par l'employeur. En outre, il n'a pas saisi le tribunal du travail de contestations relatives aux sanctions dont il a fait l'objet. Dans ces conditions, la preuve d'un comportement discriminatoire de l'employeur notamment en raison de l'activité syndicale de l'appelant, n'est pas rapportée.

1° ALORS QUE le salarié soutenait qu'il avait été victime d'une discrimination syndicale dans l'évolution de sa carrière professionnelle, notamment du fait qu'il n'avait pas eu une progression de carrière identique à celle des autres salariés à ancienneté et qualification équivalente ; qu'au soutien de sa demande, il produisait des éléments relativement à son évolution salariale et au fait qu'il avait dû solliciter lui-même son passage dans la 6ème catégorie des employés, au contraire des autres salariés qui n'ont eu à réaliser aucune démarche en ce sens ; qu'en affirmant que le salarié ne pouvait se prévaloir de mesures discriminatoires ni à raison de son état de santé, ni des mesures financières injustes, ni d'une carrière professionnelle rendue difficile par l'employeur sans aucunement expliciter en quoi il convenait d'exclure le fait que la carrière professionnelle du salarié avait été rendue difficile par l'employeur, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard de l'article Lp. 1121-2 du code du travail de la Polynésie française, ensemble les articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail.

2° ALORS QUE en matière de discrimination en raison de l'état de santé, il appartient au salarié de produire les éléments de nature à laisser présumer l'existence d'une discrimination, tandis qu'il appartient à l'employeur de démontrer que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que les juges sont tenus de prendre en considération l'ensemble des éléments produits par le salarié et de procéder à une appréciation globale des éléments produits ; que la cour d'appel a considéré que le salarié ne pouvait se prévaloir de mesures discriminatoires ni à raison de son état de santé, ni des mesures financières injustes, ni d'une carrière professionnelle rendue difficile par l'employeur ; que cependant, le salarié faisaient également valoir, courrier à l'appui, qu'il avait subi des menaces de licenciement en raison de ses absences fondées sur son état de santé ; qu'en s'abstenant d'examiner ce grief, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article Lp. 1121-2 du code du travail de la Polynésie française, ensemble l'article L. 1132-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-14950
Date de la décision : 27/11/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Papeete, 21 décembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 nov. 2019, pourvoi n°18-14950


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.14950
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