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13/11/2019 | FRANCE | N°18-16341;18-16343;18-16344;18-16345;18-16346;18-16347;18-16348;18-16349

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 novembre 2019, 18-16341 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° J 18-16.341, M 18-16.343, N 18-16.344, P 18-16.345, Q 18-16.346, R 18-16.347, S 18-16.348 et T 18-16.349 ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1233-4 du code du travail en sa rédaction issue de la loi n° 2010-499 du 18 mai 2010 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, qu'engagés en qualité de techniciens installation et mise en service et pour M. B... en qualité d'agent professionnel très qualifié installateur par la société Sagemcom Energy etamp;amp

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° J 18-16.341, M 18-16.343, N 18-16.344, P 18-16.345, Q 18-16.346, R 18-16.347, S 18-16.348 et T 18-16.349 ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1233-4 du code du travail en sa rédaction issue de la loi n° 2010-499 du 18 mai 2010 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, qu'engagés en qualité de techniciens installation et mise en service et pour M. B... en qualité d'agent professionnel très qualifié installateur par la société Sagemcom Energy etamp;amp;amp; Telecom, M. J... et sept autres salariés ont été licenciés pour motif économique par lettres des 17 septembre et 26 septembre 2013 ; qu'ils ont contesté leur licenciement devant la juridiction prud'homale ;

Attendu que pour dire leur licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à leur verser une indemnité à ce titre, les arrêts retiennent que sept des huit salariés requérants, qui occupaient tous le poste de technicien installation et mise en service, se sont vu proposer deux postes (agent des services généraux - maintenance et électricité et agent des services généraux - reprographie), lesquels correspondaient à un niveau inférieur à leurs qualifications et compétences, tandis que M. B..., qui occupait le poste d'agent professionnel très qualifié installateur, s'est vu proposer un unique poste (celui d'agent des services généraux - reprographie), lequel correspondait à ses qualifications et compétences et que dans ces conditions il ne peut être retenu que ces offres de reclassement n'étaient pas personnalisées ; que la société ayant adressé un unique courriel aux différents services des ressources humaines des entités du groupe situées en France dans lequel elle leur demandait une remontée régulière d'informations sur les postes disponibles en leur sein tout en les invitant à se rapprocher du responsable ressources humaines de la société au sujet des postes dont la suppression était envisagée et des profils des salariés des catégories professionnelles concernées, sans faire état de la liste des postes supprimés ni des salariés concernés, sa recherche d'un reclassement interne de ces derniers est demeurée insuffisante ;

Attendu cependant qu'il n'y a pas de manquement à l'obligation de reclassement si l'employeur justifie de l'absence de poste disponible, à l'époque du licenciement, dans l'entreprise ou s'il y a lieu dans le groupe auquel elle appartient ;

Qu'en se déterminant comme elle l'a fait , sans rechercher si, comme il le soutenait, l'employeur justifiait de l'absence, au sein des entreprises du groupe de reclassement, d'autres postes disponibles que ceux dont elle constatait qu'ils constituaient une offre personnalisée de reclassement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 15 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne les huit salariés et le syndicat des métallurgistes Force ouvrière de Paris Nord-Ouest aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen commun aux pourvois n° J 18-16.341, M 18-16.343, N 18-16.344, P 18-16.345, Q 18-16.346, R 18-16.347, S 18-16.348 et T 18-16.349 produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Sagemcom Energy etamp;amp;amp; Telecom

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse ;

Aux motifs qu'aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure, ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ; que le périmètre à prendre en considération pour l'exécution de l'obligation de reclassement se comprend de l'ensemble des entreprises du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; que les offres de reclassement doivent être écrites et précises ; que l'employeur est tenu de faire des offres de reclassement personnalisées ; qu'il revient cependant à l'employeur de justifier d'une recherche active et suffisante de reclassement ; que l'appelant fait valoir que la société Sagemcom energy et Telecom ne lui a pas proposé des postes disponibles de techniciens (et particulièrement le poste de technicien support technique ESM auquel il avait candidaté), a fait des offres de reclassement qui n'étaient pas personnalisées en proposant seulement deux postes à l'identique, lesquels n'étaient en outre pas équivalents à ceux occupés précédemment par les requérants, alors même que la loi priorise les offres de reclassement et enfin que l'employeur n'a pas accompli de diligences suffisantes dans le cadre de la recherche de reclassement, ce qui peut d'ailleurs expliquer l'absence de proposition supplémentaires ; que la société considère avoir respecté ses obligations en matière de reclassement ; qu'elle indique avoir fait appel à l'ensemble des commissions territoriales de l'emploi sur le territoire français, avoir réalisé ses recherches au sein de l'ensemble des entreprises appartenant au groupe, avoir individualisé les offres de reclassement et que les postes de techniciens invoqués par l'appelant ne correspondaient pas à ses qualifications ou compétences ; que le salarié requérant ayant expressément refusé de recevoir des offres de reclassement qui se situeraient en dehors du territoire national, l'employeur se trouvait délié d'avoir à rechercher des offres à l'étranger ; que ce dernier était tenu en revanche d'effectuer des recherches de reclassement parmi les entités du groupe situées en France ; que l'intimée rappelle à cet égard que les sociétés du groupe Sagemcom comptaient 354 salariés au sein de la société Sagemcom documents, 252 salariés au sein de la société Sagemcom, 236 salariés au sein de la société Sagecom Energy etamp;amp;amp; Telecom, salariés au sein de la société Sagemcom Broadband et 32 salariés au sein de la société CDO désormais dénommée Sagemcom mei ; que sept des huit salariés requérants, qui occupaient tous le poste de technicien installation et mise en service, se sont vus proposer deux postes (agent des services généraux - maintenance et électricité et agent des services généraux - reprographie), lesquels correspondaient à un niveau inférieur à leurs qualifications et compétences, tandis que M. B..., qui occupait le poste d'agent professionnel très qualifié installateur, s'est vu proposer un unique poste (celui d'agent des services généraux - reprographie), lequel correspondait à ses qualifications et compétences ; que dans ces conditions, il ne peut être retenu que ces offres de reclassement n'étaient pas personnalisées ; que si aucun d'entre eux ne s'est vu proposer les postes disponibles de technicien d'intervention Laser nord-est et de technicien support technique ESM, l'intimée justifie que ces postes requéraient des connaissances et compétences spécifiques qui leur faisaient défaut et impliquaient donc une formation initiale, de sorte qu'ils n'entraient pas dans le champ des postes à proposer dans le cadre du reclassement interne ; qu'il revient cependant à l'employeur de justifier d'une recherche active dans le cadre de la recherche du reclassement ; qu'à cet égard, la société Sagemcom energy et telecom a adressé un unique courriel aux différents services des ressources humaines des entités du groupe situées en France, dans lequel elle leur demandait une remontée régulière d'informations sur les postes disponibles en leur sein, tout en les invitant à se rapprocher du responsable ressources humaines de la société au sujet des postes dont la suppression était envisagée et des profils des salariés des catégories professionnelles concernées ; qu'en se bornant à adresser ce courriel, sans faire état de la liste des postes supprimés ni des salariés concernés, la recherche d'un reclassement interne de ces derniers est demeurée insuffisante ; que la saisine par l'employeur des commissions territoriales de l'emploi en France, qui se rapporte à un reclassement externe, ne remet pas en cause ce constat ; qu'ainsi, l'appelant soutient à juste titre que l'employeur n'a pas accompli de diligences suffisantes dans le cadre de la recherche de reclassement ; qu'en conséquence, il y a lieu de retenir que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse ;

Alors 1°) que l'employeur, qui n'a pas l'obligation de dispenser aux salariés la formation initiale qui leur fait défaut, exécute son obligation de reclassement en leur adressant des propositions de reclassement personnalisées, précises et concrètes ; que la cour d'appel a constaté que sept des huit salariés requérants, tous techniciens installation et mise en service, s'étaient vus proposer deux postes correspondant à un niveau inférieur à leurs qualifications et compétences et que M. B..., agent professionnel très qualifié - installateur, s'était vu proposer un poste unique correspondant à ses qualifications et compétences ; que ces offres de reclassement étaient personnalisées ; qu'en outre, les postes disponibles de technicien d'intervention Laser Nord-Est et de technicien support technique ESM requéraient des connaissances et compétences qui leur faisaient défaut et une formation initiale et n'entraient pas dans le champ des postes à proposer à titre de reclassement ; qu'en ne tirant pas les conséquences de ses constatations dont il résultait que l'employeur avait exécuté son obligation de reclassement en proposant aux salariés les postes disponibles, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du code du travail ;

Alors 2°) qu'en décidant que l'employeur n'avait pas exécuté son obligation de reclassement, cependant que la société Sagemcom Energy etamp;amp;amp; Telecom avait demandé aux responsables des ressources humaines des entités du groupe de mettre à jour la liste des postes disponibles, avait actualisé, en fonction des informations transmises par les sociétés du groupe, la liste des postes ouverts au reclassement, publiée sur l'intranet dédié au PSE, accessible aux salariés qui pouvaient, tout au long de la phase de reclassement, déposer leur candidature sur les postes disponibles, et avait remis aux salariés les fiches des postes disponibles compatibles avec leurs compétences et qualifications et la liste des postes disponibles dans les sociétés du groupe (conclusions d'appel p. 53), et qu'il ressortait des propres constatations de l'arrêt que l'employeur avait adressé un courriel aux services des ressources humaines des entités du groupe situées en France, leur demandant une remontée régulière d'informations sur les postes disponibles en leur sein, en les invitant à se rapprocher du responsable ressources humaines de la société au sujet des postes dont la suppression était envisagée et des profils des salariés des catégories professionnelles concernées, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du code du travail ;

Alors 3°) qu'en ayant reproché à l'employeur, dans le courriel adressé aux différents services des ressources humaines des entités du groupe situées en France, de les avoir invités à se rapprocher du responsable ressources humaines de la société au sujet des postes dont la suppression était envisagée et des profils des salariés des catégories professionnelles concernées, sans avoir fait état de la liste des postes supprimés ni des salariés concernés, ce que l'employeur n'avait pas l'obligation de faire dans le cadre de son obligation de reclassement consécutive à un licenciement pour motif économique, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du code du travail ;

Alors 4°) et en tout état de cause, qu'il n'y a pas de manquement à l'obligation de reclassement si l'employeur justifie de l'absence de poste disponible à l'époque du licenciement, dans l'entreprise ou, s'il y a lieu, dans le groupe auquel elle appartient ; que la société Sagemcom Energy etamp;amp;amp; Telecom a soutenu qu'il résultait des listes de postes disponibles au sein du groupe annexée au PSE, des listes des postes disponibles régulièrement actualisées et des registres uniques du personnel des sociétés du groupe, l'absence de postes disponibles, au sein du groupe, correspondant aux compétences et qualifications des salariés, autres que ceux qui leur avait été proposés et qu'ils avaient refusé (conclusions d'appel p. 63) ; qu'en se déterminant comme elle a fait, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si l'employeur ne justifiait pas de l'absence de postes disponibles à la date du licenciement, autres que ceux proposés aux salariés, dans l'entreprise ou dans le groupe auquel elle appartenait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ;

Alors 5°) et en tout état de cause, qu'en retenant que l'employeur n'avait pas exécuté son obligation de reclassement, cependant qu'il affirmait ne disposer d'aucun poste disponible et avait versé aux débats son registre du personnel et ceux des sociétés du groupe auquel il appartenait (conclusions d'appel p. 53 ; pièces communiquées en appel n° 42 à 45bis), qu'elle devait examiner, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-16341;18-16343;18-16344;18-16345;18-16346;18-16347;18-16348;18-16349
Date de la décision : 13/11/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 15 mars 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 nov. 2019, pourvoi n°18-16341;18-16343;18-16344;18-16345;18-16346;18-16347;18-16348;18-16349


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.16341
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