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07/11/2019 | FRANCE | N°18-19027

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 07 novembre 2019, 18-19027


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Allianz IARD du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Lavalin, la société Ilot Kléber, la société F... et N... etamp;amp;amp; associés, la MAF, la société Sefi Intrafor, la société C... bâtiment Nord Est, les héritiers et représentants de L... J... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 avril 2018), que la société civile immobilière I..., aux droits de laquelle vient la société C... immobilier, a fait construire un bâti

ment à usage de centre commercial sur une ancienne darse remblayée en scories au moyen de...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Allianz IARD du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Lavalin, la société Ilot Kléber, la société F... et N... etamp;amp;amp; associés, la MAF, la société Sefi Intrafor, la société C... bâtiment Nord Est, les héritiers et représentants de L... J... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 avril 2018), que la société civile immobilière I..., aux droits de laquelle vient la société C... immobilier, a fait construire un bâtiment à usage de centre commercial sur une ancienne darse remblayée en scories au moyen de pieux de fondation et une dalle en béton armé coulée sur terre plein ; qu'une police d'assurance de responsabilité civile professionnelle du promoteur et une police unique de chantier ont été souscrites auprès de la société AGF, devenue Allianz IARD (la société Allianz) ; que la société Norpac, entreprise générale chargée de l'exécution des travaux tous corps d'état, aux droits de laquelle vient la société C... bâtiment Nord Est, assurée auprès de la SMABTP et au titre de la police unique de chantier, a confié la réalisation d'études géotechniques à la société Simecsol, devenue Arcadis ESG (la société Arcadis), assurée auprès de la société Axa France IARD (la société Axa) ; qu'est intervenue la société Pingat ingénierie (la société Pingat), aux droits de laquelle vient la société Lavalin international, assurée auprès de la société Gan eurocourtage (la société Gan), aux droits de laquelle vient la société Allianz, et au titre de la police unique de chantier, en qualité de bureau d'étude et de sous-traitant de la société Norpac ; que la société Soletanche Bachy, devenue la société Soletanche Bachy pieux (la société Soletanche), assurée pour sa responsabilité civile auprès de la SMABTP et au titre de la police unique de chantier, a, en qualité de sous-traitante de la société Norpac, exécuté le forage des pieux du bâtiment ; que les maîtrises d'oeuvre de conception et d'exécution ont été confiées respectivement à la société F... et N... architectes associés, assurée auprès de la MAF et au titre de la police unique de chantier, et à L... J..., décédé, ingénieur conseil, assuré auprès de la SMABTP et au titre de la police unique de chantier ; que la société Socotec, assurée auprès de la SMABTP, est intervenue en qualité de contrôleur technique ; que les travaux ont été réceptionnés le 22 novembre 1999 ; que, se plaignant de déformations et de fissurations de la structure de la galerie marchande, la société Marine de Dunkerque, devenue propriétaire de l'ouvrage, et à laquelle est substituée la société Ilot Kleber, a adressé une déclaration de sinistre à la société Allianz qui a préfinancé les travaux réparatoires ; que la société Allianz a, après expertise, assigné plusieurs constructeurs et assureurs en remboursement de sommes et en garantie ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu que la société Allianz fait grief à l'arrêt de rejeter son recours contre la société Arcadis et de mettre hors de cause la société Axa ;

Mais attendu qu'ayant retenu qu'en l'état des connaissances techniques, à la date de réalisation des travaux, la société Arcadis ne pouvait pas prévoir que le forage des pieux déclencherait un important potentiel de gonflement des grains de scories par la rupture de leurs gangues sur un terrain stabilisé et qu'il ne peut pas lui être reproché de ne pas avoir fait procéder à l'analyse de l'état réel des scories avant l'exécution du forage des pieux de fondation, la société Allianz ne démontrant pas que celle-ci aurait le cas échéant pu permettre de détecter le gonflement à venir des scories, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le moyen unique du pourvoi provoqué éventuel, ci-après annexé :

Attendu que la société Socotec fait grief à l'arrêt de la condamner sur le fondement de l'article 1792 du code civil à payer à la société Allianz, subrogée en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage dans les droits du maître d'ouvrage, diverses sommes au titre de la réparation des dommages ;

Mais attendu qu'ayant retenu que les dommages compromettaient la solidité de l'ouvrage et que la mission de la société Socotec avait porté sur la solidité des ouvrages et des éléments d'équipement dissociables et indissociables, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes et en a déduit à bon droit qu'elle était tenue de la garantie décennale, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

Attendu que, pour condamner la société Soletanche, assurée auprès de la société Allianz, à garantir la société Socotec, l'arrêt retient que le sinistre, constitué par le soulèvement des pieux de fondation et de la dalle du rez-de-chaussée, résulte d'une erreur d'appréciation des risques de gonflement des scories qui n'a pu être anticipée par les locateurs d'ouvrage en l'état des connaissances techniques à l'époque des travaux, que même, si elle n'a commis aucun manquement aux règles de construction, la société Soletanche, qui a réalisé le forage des pieux ayant déclenché le phénomène de gonflement des scories à l'origine du sinistre, est directement responsable du sinistre et engage sa responsabilité quasi délictuelle à l'égard du maître d'ouvrage et des autres intervenants aux travaux ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la faute délictuelle de la société Soletanche, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen du pourvoi principal :

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

Attendu que, pour condamner la société Soletanche, assurée auprès de la société Allianz, à garantir la société Socotec, l'arrêt retient que le sinistre, constitué par le soulèvement des pieux de fondation et de la dalle du rez-de-chaussée, résulte d'une erreur d'appréciation des risques de gonflement des scories qui n'a pu être anticipée par les locateurs d'ouvrage en l'état des connaissances techniques à l'époque des travaux, que même, si elle n'a commis aucun manquement aux règles de construction, la société Soletanche, qui a réalisé le forage des pieux ayant déclenché le phénomène de gonflement des scories à l'origine du sinistre, est directement responsable du sinistre et engage sa responsabilité quasi délictuelle à l'égard du maître d'ouvrage et des autres intervenants aux travaux, et que la société Socotec est bien fondée à exercer un recours contre la société Soletanche comme étant par sa seule faute à l'origine du sinistre ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le contrôleur technique, en l'état des connaissances techniques existant à l'époque de son intervention, n'aurait pas dû s'interroger sur l'évolution des remblais de scories, procéder à des prélèvements de celles-ci et tester en laboratoire leur potentiel de gonflement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Soletanche Bachy Pieux, venant aux droits de la société Soletanche, garantie par la société Allianz au titre de la PUC, à relever la société Socotec, garantie par la SMABTP, des condamnations prononcées à son encontre, et rejette le recours de la société Allianz, assureur de la société Soletanche, contre la société Socotec et la SMABTP, l'arrêt rendu le 4 avril 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Socotec et la SMABTP aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept novembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Allianz IARD, demanderesse au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Soletanche Bachy Pieux venant aux droits de la société Soletanche garantie par la compagnie Allianz au titre de la PUC à relever la Socotec garantie par la SMABTP en sa qualité d'assureur RC sous déduction des franchises et dans les limites des contrats, notamment de plafond, intégralement indemne des condamnations prononcées à son encontre, d'avoir débouté la société Allianz de son recours dirigé à l'encontre de la société Arcadis ESG, aucune faute n'étant établie à son encontre, d'avoir prononcé la mise hors de cause de la compagnie Axa France en sa qualité d'assureur responsabilité civile de la société Simecsol aux droits de laquelle vient la société Arcadis ESG, et d'avoir rejeté les recours en garantie formés par la société Allianz IARD à l'encontre de la société Socotec et de son assureur la société SMABTP ;

AUX MOTIFS QU' il ressort ainsi du rapport d'expertise établi le 26 septembre 2012 que « Les désordres sont constitués par la manifestation sur l'ensemble de l'ouvrage réalisé au droit dudit cavalier d'un soulèvement progressif de la dalle du rez-de-chaussée et de la superstructure, cloisonnement compris » « Ce soulèvement, variable d'un point à un autre, n'a cessé de progresser jusqu'à la mise en oeuvre des travaux de réparation ; « Par référence à des points réputés totalement stables (hors zone de scories), le soulèvement a atteint de quelques centimètres par endroits, à 20 cm voire plus, en des points particuliers correspondant à la crête du cavalier [de scories], la variation du soulèvement étant en parfaite cohérence avec le profil et l'implantation du cavalier, sa plus forte épaisseur correspondant au soulèvement le plus important » (cf P36) ; « Les scories d'origine métallurgiques mises en oeuvre en 1988 par immersion dans la darse ont déclenché un phénomène de gonflement à progression linéaire sous l'effet principal de la chaux vive, selon l'analyse du LERM, dont l'augmentation de volume est de 120 % (cf P37) », l'expert ajoutant que cela semble être le seul point partagé par tous, puisque le déclenchement du phénomène, artificiel ou naturel est en débat, principalement entre la compagnie Allianz et la société Arcadis ESG (cf P37 ) ; que les parties sont d'avis contraires sur le caractère imprévisible de la reprise du phénomène de gonflement des scories consécutivement à leur remaniement par forage des pieux ; qu'à l'appui de sa thèse retenant son caractère prévisible, la compagnie Allianz se prévaut de l'avis de deux experts qu'elle a personnellement consultés après le dépôt du rapport d'expertise à savoir M. P... et M. O... ; que dans leur note technique du 27 février 2013 qu'elle verse aux débats, ces derniers ont en effet estimé que les risques de réaction chimique et de gonflements consécutifs à l'hydratation de la chaux vive en présence d'oxyde de magnésium étaient connus depuis 1993 et que le BET géotechnique en charge de la connaissance du sol et le contrôleur technique en charge de la maîtrise des aléas devaient s'intéresser à de tels sols et vérifier s'ils conservaient ou non leur potentiel de gonflement ; que cependant il ressort du rapport d'expertise judiciaire que si le phénomène de gonflement des scories utilisées comme matériaux de remblaiement est connu depuis au moins 1993, la particularité de la présente affaire tient à la réactivation de ce phénomène de gonflement par le remaniement des matériaux à l'occasion du forage de 300 pieux dont plus de la moitié dans le cavalier de scories ; que le forage de pieux a généré l'éclatement des grains de scories qui n'étaient jusque -là pas dégradés ainsi que la mise en contact avec l'eau de la chaux vive jusque -là protégée par une gangue cristallisée (cf P40 du rapport) ce qui a réactivé le gonflement des scories ; que l'expert a par ailleurs souligné que la persistance du potentiel de gonflement bien au-delà de quinze ans n'a jamais été mise en évidence (cf P63) ; que l'expert judiciaire a clairement indiqué que ce phénomène de réactivation du gonflement par l'effet du remaniement des scories immergées n'était pas connu en 1998, année des travaux, et qu'il n'a été identifié et mis en évidence par le LERM qu'en 2004 (cf P63), c'est à dire bien postérieurement aux travaux (cf P45/46 et P64) ; que la Cour retiendra l'avis de l'expert judiciaire rendu à l'issue de ses opérations d'expertise contradictoires, étant observé que la compagnie Allianz qui conteste cet avis ne formule pas de demande de contre-expertise ; qu'il s'ensuit que la reprise du phénomène de gonflement des scories consécutivement à leur remaniement par forage des pieux était en l'état des connaissances de l'époque, imprévisible de sorte qu'il ne saurait être fait grief aux locateurs d'ouvrage de ne pas l'avoir prévu ; que néanmoins, retenant les motifs pertinents du jugement à cet égard, la Cour confirme également celui-ci en ce qu'il a écarté la cause étrangère de nature à exonérer les locateurs d'ouvrage de leur responsabilité envers le maître de l'ouvrage dès lors qu'en vertu de l'article 1792 du code civil les constructeurs sont tenus des dommages résultant d'un vice du sol ; que le seul fait qu'en l'état de l'avancement des connaissances des techniques de construction de l'époque, ils ne pouvaient connaître le risque inhérent aux procédés mis en oeuvre ne constitue pas en soi une cause étrangère exonératoire de leur responsabilité (arrêt, p. 27 et 28) ; qu'il résulte du rapport d'expertise que c'est le forage des pieux en 1998 qui a provoqué un remaniement dans les scories, lequel a, par la rupture des gangues des grains de scories, enclenché un phénomène de gonflement à proximité des pieux générant leur soulèvement ; que même si elle n'a commis aucun manquement aux règles de construction comme l'a reconnu l'expert (P 48 ), la société Soletanche qui a réalisé le forage des pieux qui a déclenché le phénomène de gonflement des scories à l'origine du sinistre (cf P 48 et 71); qu'à ce titre, elle est directement responsable de celui-ci qui engage sa responsabilité tant contractuelle à l'égard de l'entreprise principale que quasi délictuelle à l'égard du maître d'ouvrage et des autres intervenants aux travaux alors que l'expert n'a établi aucune faute à l'encontre des autres intervenants ; que la Socotec garantie par son assureur la SMABTP est donc bien fondée à exercer un recours à l'encontre de la société Soletanche Bachy Pieux venant aux droits de la société Soletanche garantie par la compagnie Allianz au titre de la PUC en vertu de l'article 1382 du code civil comme étant par sa seule faute à l'origine du sinistre ; que la société Soletanche Bachy Pieux venant aux droits de la société Soletanche garantie par la compagnie Allianz au titre de la PUC est donc condamnée à relever la Socotec, garantie par la SMABTP en sa qualité d'assureur RC sous déduction des franchises et dans les limites des contrats notamment de plafond, intégralement indemne des condamnations prononcées à son encontre (arrêt, p. 33) ;

1°) ALORS QUE la charge finale de la condamnation prononcée contre des constructeurs ou assimilés, formant contribution à la dette, se répartit en fonction de la gravité de leurs fautes respectives ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la société Soletanche n'avait commis « aucun manquement aux règles de construction » lorsqu'elle a exécuté sa prestation ; qu'en décidant néanmoins qu'elle avait commis une faute seule à l'origine du dommage, sur le seul constat qu'elle avait « réalisé le forage des pieux qui a déclenché le phénomène de gonflement des scories à l'origine du sinistre » (arrêt, p. 33), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a ainsi violé l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code ;

2°) ALORS QU'EN OUTRE, en se bornant à énoncer que la société Soletanche avait commis une faute seule à l'origine du dommage puisqu'elle avait « réalisé le forage des pieux qui a déclenché le phénomène de gonflement des scories à l'origine du sinistre » (arrêt, p. 33), sans caractériser en quoi cette société avait commis une faute ayant causé les désordres, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code ;

3°) ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHÈSE, la cour d'appel a considéré que « la reprise du phénomène de gonflement des scories consécutivement à leur remaniement par forage des pieux était en l'état des connaissances de l'époque, imprévisible de sorte qu'il ne saurait être fait grief aux locateurs d'ouvrage de ne pas l'avoir prévu » (arrêt, p. 28 § 1) ; qu'elle a jugé que, si cette imprévisibilité ne suffisait pas à caractériser une cause étrangère exonératoire de la responsabilité des constructeurs (arrêt, p. 28 § 2), cette circonstance excluait néanmoins que les constructeurs aient pu commettre une faute en n'anticipant pas ce phénomène à la suite du forage, ce qui l'a notamment conduite à écarter la responsabilité de la société Arcadis (arrêt, p. 30) ; qu'en décidant que la société Soletanche avait commis une faute seule à l'origine du dommage puisqu'elle avait « réalisé le forage des pieux qui a déclenché le phénomène de gonflement des scories à l'origine du sinistre » (arrêt, p. 33), tout en constatant que ce phénomène était imprévisible pour les constructeurs, ce qui incluait nécessairement la société Soletanche, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Allianz de son recours dirigé à l'encontre de la société Arcadis ESG, aucune faute n'étant établie à son encontre, et d'avoir prononcé la mise hors de cause de la compagnie Axa France en sa qualité d'assureur responsabilité civile de la société Simecsol aux droits de laquelle vient la société Arcadis ESG ;

AUX MOTIFS QUE la compagnie Allianz exerce un recours à l'encontre de la société Arcadis ESG venant aux droits de la société Simecsol, chargée d'effectuer des études géotechniques avant travaux ; qu'elle doit donc rapporter la preuve d'une faute de sa part ; que cependant, il résulte du rapport d'expertise que celle-ci n'a commis aucune faute ; qu'en effet, il ressort clairement du rapport d'expertise qu'en l'état des connaissances techniques, en 1998, elle ne pouvait pas prévoir que le forage des pieux déclencherait un important potentiel de gonflement des grains de scories par la rupture de leurs gangues sur un terrain stabilisé ; que l'expert a notamment indiqué qu' « il n'était pas dénué de pertinence de considérer en 1998 et avant que le délai d'épreuve de dix ans des scories immergées était suffisant pour considérer que les gonflements qui devaient se développer étaient achevés » (cf P43) ; qu'il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir fait procéder à l'analyse de l'état réel des scories avant l'exécution du forage des pieux de fondation, car comme l'a retenu l'expert, elle ne démontre pas que celle-ci aurait le cas échéant pu permettre de détecter le gonflement à venir des scories ; qu'en conséquence, le recours dirigé par la compagnie Allianz à l'encontre de la société Arcadis ESG venant aux droits de la société Simecsol sur le fondement de l'article 1382 du code civil est rejeté comme mal fondé, le jugement étant infirmé en ce sens ; qu'en plus des sommes qui lui ont été allouées par le jugement dont elle demande la confirmation à cet égard, la compagnie Allianz subrogée en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage dans les droits du maître d'ouvrage demande la condamnation in solidum de la société Arcadis ESG et de son assureur Axa France, de la Socotec et de son assureur responsabilité décennale la SMABTP à la relever et garantir de la somme de 484.227,21 € HT correspondant au coût des travaux de réparation réalisés par la société Norpac qu'elle doit rembourser à la société Îlot Kléber, venant aux droits de la société Marine de Dunkerque ; que comme indiqué cidessus, en l'absence de démonstration d'une faute génératrice du sinistre commise par la société Arcadis ESG, le recours subrogatoire exercé par la compagnie Allianz à son encontre est rejeté comme mal fondé, le jugement étant infirmé en ce sens (arrêt, p. 30) ;

1°) ALORS QUE la charge finale de la condamnation prononcée contre des constructeurs ou assimilés, formant contribution à la dette, se répartit en fonction de la gravité de leurs fautes respectives ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a rejeté le recours exercé par la société Allianz IARD, assureur de la société Soletanche, à l'encontre de la société Arcadis et de son assureur la société Axa France IARD, après avoir considéré qu'il résultait du rapport d'expertise qu'en l'état des connaissances techniques, en 1998, la société Arcadis ne pouvait pas prévoir que le forage des pieux déclencherait un important potentiel de gonflement des grains de scories par la rupture de leurs gangues sur un terrain stabilisé, l'expert ayant notamment indiqué qu'il n'était pas dénué de pertinence, en 1998, de considérer que le délai d'épreuve de dix ans des scories immergées était suffisant pour considérer que les gonflements qui devaient se développer étaient achevés (arrêt, p. 30 § 5) ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il résultait d'une fiche Sycodes établie en mars-avril 1993, que la durée de réactivité des scories immergées était considérée, dès cette époque, comme incertaine et, en toute hypothèse, supérieure à dix ans, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code ;

2°) ALORS QUE la charge finale de la condamnation prononcée contre des constructeurs ou assimilés, formant contribution à la dette, se répartit en fonction de la gravité de leurs fautes respectives ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a rejeté le recours exercé par la société Allianz IARD, assureur de la société Soletanche, à l'encontre de la société Arcadis et de son assureur la société Axa France IARD, après avoir considéré qu'il résultait du rapport d'expertise qu'en l'état des connaissances techniques, en 1998, la société Arcadis ne pouvait pas prévoir que le forage des pieux déclencherait un important potentiel de gonflement des grains de scories par la rupture de leurs gangues sur un terrain stabilisé, et qu'il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir fait procéder à l'analyse de l'état réel des scories avant l'exécution du forage, en l'absence de preuve qu'une telle analyse aurait pu permettre de détecter le gonflement à venir de ces scories (arrêt, p. 30 § 5 et 6) ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée (concl., p. 22, 24 et 25), si la société Arcadis s'était interrogée dans son rapport sur le caractère évolutif ou non des scories, compte tenu des conséquences de l'hydratation de la chaux vive présente dans les scories, qui étaient connues à l'époque, et si elle aurait dû, dès lors, attirer l'attention du donneur d'ordre et des constructeurs sur la potentialité d'évolution des scories dans une durée indéterminée, en l'absence de certitude technique sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Soletanche Bachy Pieux, venant aux droits de la société Soletanche garantie par la compagnie Allianz au titre de la PUC à relever la Socotec garantie par la SMABTP en sa qualité d'assureur RC sous déduction des franchises et dans les limites des contrats, notamment de plafond, intégralement indemne des condamnations prononcées à son encontre, et d'avoir rejeté la demande de la société Allianz IARD, en tant qu'assureur de responsabilité décennale de la société Soletanche, de son recours en contribution à l'encontre de la société Socotec et de son assureur la SMABTP fondé sur la faute commise par ce contrôleur technique ;

AUX MOTIFS QU' il ressort ainsi du rapport d'expertise établi le 26 septembre 2012 que « Les désordres sont constitués par la manifestation sur l'ensemble de l'ouvrage réalisé au droit dudit cavalier d'un soulèvement progressif de la dalle du rez-de-chaussée et de la superstructure, cloisonnement compris » « Ce soulèvement, variable d'un point à un autre, n'a cessé de progresser jusqu'à la mise en oeuvre des travaux de réparation ; « Par référence à des points réputés totalement stables (hors zone de scories), le soulèvement a atteint de quelques centimètres par endroits, à 20 cm voire plus, en des points particuliers correspondant à la crête du cavalier [de scories], la variation du soulèvement étant en parfaite cohérence avec le profil et l'implantation du cavalier, sa plus forte épaisseur correspondant au soulèvement le plus important » (cf P36) ; « Les scories d'origine métallurgiques mises en oeuvre en 1988 par immersion dans la darse ont déclenché un phénomène de gonflement à progression linéaire sous l'effet principal de la chaux vive, selon l'analyse du LERM, dont l'augmentation de volume est de 120 % (cf P37) », l'expert ajoutant que cela semble être le seul point partagé par tous, puisque le déclenchement du phénomène, artificiel ou naturel est en débat, principalement entre la compagnie Allianz et la société Arcadis ESG (cf P37 ) ; que les parties sont d'avis contraires sur le caractère imprévisible de la reprise du phénomène de gonflement des scories consécutivement à leur remaniement par forage des pieux ; qu'à l'appui de sa thèse retenant son caractère prévisible, la compagnie Allianz se prévaut de l'avis de deux experts qu'elle a personnellement consultés après le dépôt du rapport d'expertise à savoir M. P... et M. O... ; que dans leur note technique du 27 février 2013 qu'elle verse aux débats, ces derniers ont en effet estimé que les risques de réaction chimique et de gonflements consécutifs à l'hydratation de la chaux vive en présence d'oxyde de magnésium étaient connus depuis 1993 et que le BET géotechnique en charge de la connaissance du sol et le contrôleur technique en charge de la maîtrise des aléas devaient s'intéresser à de tels sols et vérifier s'ils conservaient ou non leur potentiel de gonflement ; que cependant il ressort du rapport d'expertise judiciaire que si le phénomène de gonflement des scories utilisées comme matériaux de remblaiement est connu depuis au moins 1993, la particularité de la présente affaire tient à la réactivation de ce phénomène de gonflement par le remaniement des matériaux à l'occasion du forage de 300 pieux dont plus de la moitié dans le cavalier de scories ; que le forage de pieux a généré l'éclatement des grains de scories qui n'étaient jusque -là pas dégradés ainsi que la mise en contact avec l'eau de la chaux vive jusque -là protégée par une gangue cristallisée (cf P40 du rapport) ce qui a réactivé le gonflement des scories ; que l'expert a par ailleurs souligné que la persistance du potentiel de gonflement bien au-delà de quinze ans n'a jamais été mise en évidence (cf P63) ; que l'expert judiciaire a clairement indiqué que ce phénomène de réactivation du gonflement par l'effet du remaniement des scories immergées n'était pas connu en 1998, année des travaux, et qu'il n'a été identifié et mis en évidence par le LERM qu'en 2004 (cf P63), c'est à dire bien postérieurement aux travaux (cf P45/46 et P64) ; que la Cour retiendra l'avis de l'expert judiciaire rendu à l'issue de ses opérations d'expertise contradictoires, étant observé que la compagnie Allianz qui conteste cet avis ne formule pas de demande de contre-expertise ; qu'il s'ensuit que la reprise du phénomène de gonflement des scories consécutivement à leur remaniement par forage des pieux était en l'état des connaissances de l'époque, imprévisible de sorte qu'il ne saurait être fait grief aux locateurs d'ouvrage de ne pas l'avoir prévu ; que néanmoins, retenant les motifs pertinents du jugement à cet égard, la Cour confirme également celui-ci en ce qu'il a écarté la cause étrangère de nature à exonérer les locateurs d'ouvrage de leur responsabilité envers le maître de l'ouvrage dès lors qu'en vertu de l'article 1792 du code civil les constructeurs sont tenus des dommages résultant d'un vice du sol ; que le seul fait qu'en l'état de l'avancement des connaissances des techniques de construction de l'époque, ils ne pouvaient connaître le risque inhérent aux procédés mis en oeuvre ne constitue pas en soi une cause étrangère exonératoire de leur responsabilité (arrêt, p. 27 et 28) ; qu'il résulte du rapport d'expertise que c'est le forage des pieux en 1998 qui a provoqué un remaniement dans les scories, lequel a, par la rupture des gangues des grains de scories, enclenché un phénomène de gonflement à proximité des pieux générant leur soulèvement ; que même si elle n'a commis aucun manquement aux règles de construction comme l'a reconnu l'expert (P 48 ), la société Soletanche qui a réalisé le forage des pieux qui a déclenché le phénomène de gonflement des scories à l'origine du sinistre (cf P 48 et 71); qu'à ce titre, elle est directement responsable de celui-ci qui engage sa responsabilité tant contractuelle à l'égard de l'entreprise principale que quasi délictuelle à l'égard du maître d'ouvrage et des autres intervenants aux travaux alors que l'expert n'a établi aucune faute à l'encontre des autres intervenants ; que la Socotec garantie par son assureur la SMABTP est donc bien fondée à exercer un recours à l'encontre de la société Soletanche Bachy Pieux venant aux droits de la société Soletanche garantie par la compagnie Allianz au titre de la PUC en vertu de l'article 1382 du code civil comme étant par sa seule faute à l'origine du sinistre ; que la société Soletanche Bachy Pieux venant aux droits de la société Soletanche garantie par la compagnie Allianz au titre de la PUC est donc condamnée à relever la Socotec, garantie par la SMABTP en sa qualité d'assureur RC sous déduction des franchises et dans les limites des contrats notamment de plafond, intégralement indemne des condamnations prononcées à son encontre (arrêt, p. 33) ;

ALORS QUE la charge finale de la condamnation prononcée contre des constructeurs des contrôleurs techniques au titre de la responsabilité décennale, formant contribution à la dette, se répartit en fonction de la gravité de leurs fautes respectives ; qu'en l'espèce, si la cour d'appel a retenu la responsabilité décennale de la société Socotec, elle a néanmoins considéré que cette société était « bien fondée à exercer un recours à l'encontre de la société Soletanche Bachy Pieux [
] comme étant par sa seule faute à l'origine du sinistre » (arrêt, p. 33 § 7), avant de rejeter le recours récursoire exercé par la société Allianz IARD à l'encontre de la société Socotec et de son assureur la SMABTP, au titre de la contribution à la dette ; qu'en se prononçant ainsi, sans le moindre motif appréciant les fautes reprochées à la société Socotec, et notamment sans rechercher, comme elle y était invitée (concl., p. 26 et 27) si ce contrôleur technique aurait dû s'efforcer, dans le cadre de la mission qui lui avait confiée le 7 juillet 1998, de comprendre les effets du creusement des pieux dans le remblai de scories, compte tenu de la nature très particulière du sol, demander la communication des études de sol antérieures à celle de la société Simecsol réalisée le 15 janvier 1998 pour apprécier la nature du remblai, puisqu'elle ne pouvait avoir ignoré qu'il existait un potentiel de gonflement de la chaux contenue dans les scories, la composition de la darse étant de notoriété publique, et procéder à des prélèvements de scories pour un examen en laboratoire avant d'autoriser le projet de construction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code.
Moyen produit par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour les société Socotec France et SMABTP, demanderesses au pourvoi provoqué éventuel

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné sur le fondement de l'article 1792 du code civil la société Socotec, garantie par la SMABTP en sa qualité d'assureur RC sous déduction des franchises et dans les limites des contrats, notamment de plafond, à payer à la société Allianz, subrogée en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage dans les droits du maître d'ouvrage, l'intégralité des sommes qu'elle a réglées au titre de la réparation des dommages, à savoir : 8 366 598,50 € hors taxes correspondant aux indemnités d'assurance versées au titre du préfinancement des travaux réparatoires, avec intérêts légaux, 180 012,19 € correspondant au prix de l'assurance dommages-ouvrage des ouvrages réparatoires, avec intérêts légaux, 536 489 € hors taxes correspondant aux indemnités d'assurance versées au titre des garanties facultatives avec intérêts légaux, et 484 227,21 € hors taxes au titre des travaux de réparation effectués par la société Norpac, avec intérêts légaux, l'ensemble de ces condamnations devant être garanties par la société Solétanche Bachy, venant aux droits de la société Solétanche, garantie par la société Allianz au titre de la PUC ;

AUX MOTIFS QU'il ressort du rapport d'expertise judiciaire que si le phénomène de gonflement des scories utilisées comme matériaux de remblaiement est connu depuis au moins 1993, la particularité de la présente affaire tient à la réactivation de ce phénomène de gonflement par le remaniement des matériaux à l'occasion du forage de 300 pieux dont plus de la moitié dans le cavalier de scories ; que le forage de pieux a généré l'éclatement des grains de scories qui n'étaient jusque-là pas dégradés ainsi que la mise en contact avec l'eau de la chaux vive jusque-là protégée par une gangue cristallisée, ce qui a réactivé le gonflement des scories ; que l'expert a par ailleurs souligné que la persistance du potentiel de gonflement bien au-delà de quinze ans n'a jamais été mise en évidence ; que l'expert judiciaire a clairement indiqué que ce phénomène de réactivation du gonflement par l'effet du remaniement des scories immergées n'était pas connu en 1998, année des travaux, et qu'il n'a été identifié et mis en évidence par le LERM qu'en 2004, c'est à dire bien postérieurement aux travaux ; que la Cour retiendra l'avis de l'expert judiciaire rendu à l'issue de ses opérations d'expertise contradictoires ; qu'il s'ensuit que la reprise du phénomène de gonflement des scories consécutivement à leur remaniement par forage des pieux était en l'état des connaissances de l'époque, imprévisible, de sorte qu'il ne saurait être fait grief aux locateurs d'ouvrage de ne pas l'avoir prévu ; que, néanmoins, retenant les motifs pertinents du jugement à cet égard, la Cour confirme également celui-ci en ce qu'il a écarté la cause étrangère de nature à exonérer les locateurs d'ouvrage de leur responsabilité envers le maître de l'ouvrage dès lors qu'en vertu de l'article 1792 du code civil les constructeurs sont tenus des dommages résultant d'un vice du sol ; que le seul fait qu'en l'état de l'avancement des connaissances des techniques de construction de l'époque, ils ne pouvaient connaître le risque inhérent aux procédés mis en oeuvre ne constitue pas en soi une cause étrangère exonératoire de leur responsabilité ; qu'en conséquence, par sa gravité, le sinistre qui compromet la solidité et la destination de l'ouvrage entre dans le champ d'application de la garantie décennale des locateurs d'ouvrage intervenus dans le cadre des travaux initiaux couverte notamment par la garantie PUC souscrite auprès de la société Allianz, incluant un volet dommages-ouvrage un volet responsabilité décennale des assurés ; qu'à ce titre, il engage sur le fondement de l'article 1792 du code de procédure civile la responsabilité des locateurs d'ouvrage, et notamment de la société Socotec en qualité de contrôleur technique, assurée auprès de la SMABTP en qualité d'assureur en responsabilité décennale, laquelle ne conteste pas ne pas bénéficier de la garantie PUC de la société Allianz ; que les dommages compromettant la solidité de l'ouvrage, elle est tenue de la garantie décennale dès lors qu'elle était investie d'une mission relative notamment à la solidité des ouvrages et des éléments d'équipement dissociables et indissociables ;

ET AUX MOTIFS QU'en plus des sommes qui lui ont été allouées par le jugement dont elle demande la confirmation à cet égard, la société Allianz subrogée en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage dans les droits du maître d'ouvrage demande la condamnation in solidum de la société Arcadis et de son assureur Axa France, de la Socotec et de son assureur responsabilité décennale la SMABTP à la relever et garantir de la somme de 484 227,21 € HT correspondant au coût des travaux de réparation réalisés par la société Norpac qu'elle doit rembourser à la société Îlot Kléber, venant aux droits de la société Marine de Dunkerque ; que comme indiqué ci-dessus, en l'absence de démonstration d'une faute génératrice du sinistre commise par la société Arcadis, le recours subrogatoire exercé par la société Allianz à son encontre est rejeté comme mal fondé, le jugement étant infirmé en ce sens ; que pour les motifs sus exposés, la Socotec est effectivement tenue de la réparation de l'intégralité du dommage à l'égard de la compagnie Allianz subrogée en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage dans les droits du maître d'ouvrage ; qu'en conséquence, sur le recours subrogatoire exercé par la compagnie Allianz à l'encontre de la société Socotec, il convient de condamner cette dernière, garantie dans les limites de la police par son assureur, la SMABTP à rembourser à la compagnie Allianz subrogée en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage dans les droits du maître d'ouvrage l'intégralité des sommes réglées au titre de la réparation des dommages à savoir : - 8 366 598,50 € HT correspondant aux indemnités d'assurance versées au titre du préfinancement des travaux réparatoires, - 180 012,19 € correspondant au prix de l'assurance "dommages ouvrage" des ouvrages réparatoires, réglée le 4 juillet 2011, - 536 489 € HT correspondant aux indemnités d'assurance versées au titre des garanties facultatives, - 484 227,21 € HT au titre des travaux de réparation effectués par la société Norpac ;

1° ALORS QUE la charge finale de la condamnation prononcée contre des constructeurs ou assimilés, formant contribution à la dette, se répartit en fonction de la gravité de leurs fautes respectives ; que la cour, après avoir jugé que le phénomène de gonflement des scories, consécutivement à leur remaniement par forage des pieux « était en l'état des connaissances de l'époque, imprévisible », de sorte qu'il ne pouvait être reproché aux locateurs d'ouvrage de ne pas l'avoir prévu, encore qu'il ne s'agît point d'une cause étrangère ; que, pour retenir néanmoins la responsabilité de la société Socotec, bureau d'études, la cour s'est bornée à retenir qu'elle était investie d'une mission relative notamment à la solidité des ouvrages et des éléments d'équipement dissociables et indissociables, et que les dommages litigieux avaient compromis la solidité de l'ouvrage ; qu'en se déterminant ainsi, sans avoir retenu aucun élément permettant de justifier que la détection du phénomène de gonflement, cause du dommage, ou l'examen de la conception du dallage, soient entrés dans le champ de la mission de la société Socotec, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil ;

2° ALORS QUE la société Socotec, bureau d'études, avait soutenu que les conditions d'exécution de la mission étaient déterminées, non par les prescriptions contractuelles imposées par le maître de l'ouvrage aux constructeurs, mais par les dispositions de la norme NF P 03-100 [« Critères généraux pour la contribution du contrôle technique à la prévention des aléas techniques dans le domaine de la construction »], de sorte que la mise en jeu de sa responsabilité requérait, non seulement la démonstration d'un aléa technique qu'elle avait mission de déceler, en particulier au regard de la solidité de l'ouvrage, mais encore la violation par elle d'une disposition figurant au référentiel par rapport auquel elle devait apporter ses avis ; qu'en retenant dès lors sa responsabilité, sans avoir retenu ni l'existence d'un aléa qu'elle aurait dû détecter et qu'elle n'a pas détecté, ni un manquement quelconque de sa part aux dispositions qui gouvernaient son intervention, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-19027
Date de la décision : 07/11/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 avril 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 07 nov. 2019, pourvoi n°18-19027


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Alain Bénabent , SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Boulloche, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP L. Poulet-Odent, SCP Le Bret-Desaché, SCP Marlange et de La Burgade

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.19027
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