LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon le jugement attaqué et les pièces de la procédure, que le 5 septembre 2018, l'hôpital Joseph Ducuing (l'hôpital) a signé avec la CGT, organisation syndicale représentative non majoritaire, un accord de substitution à l'accord d'établissement du 28 mai 1999 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail ; que, le 12 septembre 2018, l'employeur a informé le syndicat CFDT de la demande de la CGT d'organiser une consultation des salariés ; que selon le protocole pré électoral étaient expressément exclus du vote certains salariés de l'établissement ; que la consultation s'est déroulée entre le 12 novembre et le 16 novembre 2018 ; que le syndicat CFDT santé sociaux Haute-Garonne et Ariège ( CFDT) a saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation tant du protocole pré électoral que des opérations de consultation ;
Sur les première et deuxième branches du premier moyen :
Attendu que le syndicat CFDT fait grief au jugement de le débouter de sa demande tendant à voir annuler le protocole d'accord relatif à la consultation du personnel conclu le 19 octobre 2018, et de dire la consultation du 12 au 16 novembre 2018 régulière et l'accord collectif du 5 septembre 2018 valide alors, selon le moyen :
1°/ que d'une part, en application des articles L. 2232-12 et D. 2232-6 du code du travail, le syndicat ayant sollicité l'organisation d'une consultation a l'obligation de notifier par écrit sa demande aux autres syndicats dans un délai d'un mois à compter de l'accord et que, d'autre part, le fait pour l'employeur de suppléer la carence de ce syndicat caractérise un manquement à son obligation de neutralité et constitue une irrégularité entraînant en elle-même l'annulation du protocole d'accord et des modalités d'organisation de la consultation du personnel, sans être subordonnée à la preuve d'une influence sur le scrutin ou d'un préjudice ; que le tribunal a constaté que le syndicat CGT n'avait pas notifié par écrit sa demande au syndicat CFDT dans un délai d'un mois à compter de l'accord ; qu'en considérant néanmoins que cette circonstance était inopérante, faute de préjudice, le syndicat CFDT ayant été informé par l'employeur, et de la démonstration d'une influence sur le résultat de la consultation, le tribunal a violé les articles L. 2232-12 et D. 2232-6 du code du travail, ensemble les principes généraux du droit électoral ;
2°/ que l'employeur, signataire d'un accord collectif, est tenu de respecter son devoir de neutralité à l'égard des organisations syndicales ; qu'en refusant l'application du principe de neutralité aux motifs que l'employeur était partie signataire de l'accord du 5 septembre 2018 et n'était donc pas « neutre », le tribunal a violé les articles L. 2232-12 et D. 2232-6 du code du travail, ensemble les principes généraux du droit électoral ;
Mais attendu que la régularité de la demande formée, en application de l'article L. 2232-12 al. 2 du code du travail, par un ou plusieurs syndicats ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés, aux fins d'organisation d'une consultation des salariés pour valider un accord signé par les organisations syndicales représentatives représentant plus de 30 % des suffrages exprimés n'est pas subordonnée à sa notification aux autres organisations syndicales représentatives, laquelle a seulement pour effet de faire courir les délais prévus à l'alinéa suivant ; qu'en l'absence de notification par le syndicat à l'origine de la demande, l'information donnée par l'employeur de cette demande aux autres organisations syndicales représentatives ne constitue pas un manquement à l'obligation de neutralité de l'employeur ; qu'il en résulte que le tribunal d'instance a statué à bon droit ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur la troisième branche du moyen :
Vu l'article L. 2232-12 du code du travail ;
Attendu que, selon ce texte, dans les établissements pourvus d'un ou plusieurs délégués syndicaux, participent à la consultation les salariés des établissements couverts par l'accord et électeurs au sens de l'article L. 2314-18 issu de l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 ; qu'il en résulte que doivent être consultés l'ensemble des salariés de l'établissement qui remplissent les conditions pour être électeurs dans l'entreprise sans préjudice de l'application, le cas échéant, des dispositions de l'article L. 2232-13 du même code ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation du protocole d'accord et de la consultation des salariés, le jugement retient qu'il n'existe qu'un seul établissement ayant appliqué l'accord du 28 mai 1999 qui excluait déjà certaines catégories de personnels et les services de la maternité par adoption d'un avenant du 27 juin 2011, qu'ainsi les salariés des établissements au sens de l'alinéa 5 de l'article L. 2232-12 du code du travail sont tous les salariés de l'hôpital sous réserve qu'ils soient couverts par l'accord, que l'accord du 5 septembre 2018 contrairement à l'accord du 28 mai 1999 exclut de son champ d'application les cadres, les médecins, pharmaciens et dentistes lesquels seront régis par la convention collective CCN51, que cet accord prévoit également qu'il ne revient pas sur les accords antérieurs, de sorte que l'accord d'établissement portant sur l'aménagement du temps de travail au sein de la maternité en date du 27 juin 2011, non dénoncé, reste applicable, qu'il s'ensuit que pour satisfaire aux dispositions de l'article L. 2232-12 du code du travail devaient être consultés tous les salariés de l'hôpital à l'exception des cadres, médecins, pharmaciens, dentistes et sages femmes, auxiliaires de puériculture, aides soignantes et infirmière puéricultrices, ces derniers n'étant pas des salariés couverts par l'accord ;
Qu'en statuant ainsi, le tribunal d'instance a violé le texte susvisé ;
Et attendu que la cassation à intervenir sur la troisième branche du premier moyen entraîne par voie de conséquence la cassation du chef du dispositif visé par le second moyen ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 10 janvier 2019, entre les parties, par le tribunal d'instance de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Foix ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'hôpital Joseph Ducuing à payer au syndicat CFDT santé sociaux Haute-Garonne et Ariège le somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, signé par M. Huglo, conseiller doyen, en ayant délibéré, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile en remplacement du conseiller rapporteur empêché, et prononcé par le président en son audience publique du neuf octobre deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour le syndicat CFDT Santé sociaux Haute-Garonne et Ariège.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté le syndicat CFDT Santé Sociaux Haute Garonne et Ariège de sa demande tendant à voir annuler le protocole d'accord relatif à la consultation du personnel conclu le 19 octobre 2018, et d'AVOIR dit la consultation du 12 au 16 novembre 2018 régulière et l'accord collectif du 5 septembre 2018 valide.
AUX MOTIFS QUE l'article D. 2232-6 du code du travail dispose que la ou les organisations syndicales sollicitant l'organisation de la consultation prévue à l'article L. 2232-12 du même code notifient par écrit leur demande à l'employeur et aux autres organisations syndicales représentatives dans un délai d'un mois à compter de la date de signature de l'accord ; ce texte ne prévoit aucune sanction ; le demandeur ne peut en outre démontrer que l'information donnée par l'employeur 7 jours après l'accord et non par l'organisation syndicale CGT lui ait causé le moindre grief ; il n'est pas établi ni même sérieusement soutenu que l'absence d'information du demandeur par la CGT ait eu une influence sur le résultat de la consultation ; enfin il ne peut être fait application du principe de la nécessaire neutralité de l'employeur puisque ce dernier était partie signataire de l'accord du 05 septembre 2018 et n'était donc pas « neutre » ; il n'y a donc pas lieu de sanctionner le défaut d'information du demandeur par la CGT ;
Et AUX MOTIFS QUE l'article L. 2232-12, aliéna 5 du code du travail dispose : « Participent à la consultation les salariés des établissements couverts par l'accord et électeurs au sens des articles L. 2314-15 et L. 2314-17 à L. 2314-18-1 » ; il n'existe en l'espèce qu'un seul établissement ayant appliqué l'accord du 28 mai 1999, qui excluait déjà certaines catégories de personnels et les services de la maternité par adoption d'un avenant à cet accord, du 27 juin 2011 ; ainsi, « les salariés des établissements » de l'alinéa 5 de l'article L. 2232-12 du code du travail sont tous les salariés de l'Hôpital Joseph Ducuing, sous réserve qu'ils soient couverts par l'accord ; en l'espèce l'accord du 05 septembre 2018, contrairement à l'accord du 28 mai 1999 exclu de son champ d'application « les cadres, les médecins, pharmaciens et dentistes lesquels seront régis par la convention collective CCN51 » ; cet accord prévoit également « Le présent accord ne revient pas sur les accords antérieurs : Maternité 12 h ; Astreintes sage-femme ; Accord astreinte médicotechnique » ; il résulte de cette disposition que l'accord d'établissement portant sur l'aménagement du temps de travail au sein de la maternité du 27 juin 2011, non dénoncé, reste en l'état applicable, après le 05 septembre 2018 ; il s'en suit que pour satisfaire aux prescriptions de l'article L. 2232-12 du code du travail, devaient être consultés tous les salariés de l'hôpital Joseph Ducuing, à l'exception des cadres, médecins, pharmaciens, dentistes et sages-femmes, auxiliaires de puériculture, aides-soignantes et infirmières puéricultrices, ces derniers n'étant pas des salariés couverts par l'accord ; il ne peut donc être fait grief à l'Hôpital Joseph Ducuing de ne pas avoir consulté les personnels de la maternité ; il doit en outre être souligné que les personnels non cadres de la maternité représentaient 61 personnes alors que le nombre d'inscrits lors de la consultation était de 281, que 211 personnes ont voté et que 59 seulement ont voté contre l'accord du 05 septembre 2018 ; il y a lieu de débouter le syndicat Cfdt Santé Sociaux Haute Garonne et Ariège et de juger que la consultation du 12 au 16 novembre 2018 était régulière et que l'accord du 5 septembre 2018 est valide.
1° ALORS QUE d'une part, en application des articles L. 2232-12 et D. 2232-6 du code du travail, le syndicat ayant sollicité l'organisation d'une consultation a l'obligation de notifier par écrit sa demande aux autres syndicats dans un délai d'un mois à compter de l'accord et que, d'autre part, le fait pour l'employeur de suppléer la carence de ce syndicat caractérise un manquement à son obligation de neutralité et constitue une irrégularité entraînant en elle-même l'annulation du protocole d'accord et des modalités d'organisation de la consultation du personnel, sans être subordonnée à la preuve d'une influence sur le scrutin ou d'un préjudice ; que le tribunal a constaté que le syndicat CGT n'avait pas notifié par écrit sa demande au syndicat CFDT dans un délai d'un mois à compter de l'accord ; qu'en considérant néanmoins que cette circonstance était inopérante, faute de préjudice, le syndicat CFDT ayant été informé par l'employeur, et de la démonstration d'une influence sur le résultat de la consultation, le tribunal a violé les articles L. 2232-12 et D. 2232-6 du code du travail, ensemble les principes généraux du droit électoral.
2° ALORS QUE l'employeur, signataire d'un accord collectif, est tenu de respecter son devoir de neutralité à l'égard des organisations syndicales ; qu'en refusant l'application du principe de neutralité aux motifs que l'employeur était partie signataire de l'accord du 5 septembre 2018 et n'était donc pas « neutre », le tribunal a violé les articles L. 2232-12 et D. 2232-6 du code du travail, ensemble les principes généraux du droit électoral.
3° ALORS QU'en vertu de l'alinéa 5 de l'article L. 2232-12 du code du travail, participent à la consultation les salariés des établissements couverts par l'accord collectif et électeurs au sens des articles L. 2314-15 et L. 2314-17 à L. 2314-18-1 du même code ; qu'il en résulte que participent à la consultation tous les salariés (électeurs) de l'établissement dans lequel l'accord est applicable ; qu'en considérant que le protocole du 19 octobre 2018 avait pu exclure du vote plusieurs catégories de travailleurs, le tribunal a violé l'article L. 2232-12 du code du travail.
4° ALORS subdidiairement QUE l'article 1er du protocole du 19 octobre 2018 n'excluait du vote que les cadres, les médecins et le service de la maternité ; qu'en considérant que devaient être consultés les salariés de l'hôpital à l'exception des cadres, médecins, pharmaciens, dentistes et sages-femmes, auxiliaires de puériculture, aides-soignantes et infirmières puéricultrices, le tribunal a violé les articles 1103 du code civil et L. 2232-12 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté le syndicat CFDT Santé Sociaux Haute Garonne et Ariège de sa demande tendant à voir annuler l'ensemble des opérations de consultation du personnel qui se sont déroulées du 12 au 16 novembre 2018, d'AVOIR dit que la consultation du 12 au 16 novembre 2018 est régulière et d'AVOIR dit que l'accord collectif du 5 septembre 2018 est valide.
AUX MOTIFS QUE l'article L. 2232-12, aliéna 5 du code du travail dispose : « Participent à la consultation les salariés des établissements couverts par l'accord et électeurs au sens des articles L. 2314-15 et L. 2314-17 à L. 2314-18-1 » ; il n'existe en l'espèce qu'un seul établissement ayant appliqué l'accord du 28 mai 1999, qui excluait déjà certaines catégories de personnels et les services de la maternité par adoption d'un avenant à cet accord, du 27 juin 2011 ; ainsi, « les salariés des établissements » de l'alinéa 5 de l'article L. 2232-12 du code du travail sont tous les salariés de l'Hôpital Joseph Ducuing, sous réserve qu'ils soient couverts par l'accord ; en l'espèce l'accord du 05 septembre 2018, contrairement à l'accord du 28 mai 1999 exclu de son champ d'application « les cadres, les médecins, pharmaciens et dentistes lesquels seront régis par la convention collective CCN51 » ; cet accord prévoit également « Le présent accord ne revient pas sur les accords antérieurs : Maternité 12 h ; Astreintes sage-femme ; Accord astreinte médicotechnique » ; il résulte de cette disposition que l'accord d'établissement portant sur l'aménagement du temps de travail au sein de la maternité du 27 juin 2011, non dénoncé, reste en l'état applicable, après le 05 septembre 2018 ; il s'en suit que pour satisfaire aux prescriptions de l'article L. 2232-12 du code du travail, devaient être consultés tous les salariés de l'hôpital Joseph Ducuing, à l'exception des cadres, médecins, pharmaciens, dentistes et sages-femmes, auxiliaires de puériculture, aides-soignantes et infirmières puéricultrices, ces derniers n'étant pas des salariés couverts par l'accord ; il ne peut donc être fait grief à l'Hôpital Joseph Ducuing de ne pas avoir consulté les personnels de la maternité ; il doit en outre être souligné que les personnels non cadres de la maternité représentaient 61 personnes alors que le nombre d'inscrits lors de la consultation était de 281, que 211 personnes ont voté et que 59 seulement ont voté contre l'accord du 05 septembre 2018 ; il y a lieu de débouter le syndicat Cfdt Santé Sociaux Haute Garonne et Ariège et de juger que la consultation du 12 au 16 novembre 2018 était régulière et que l'accord du 5 septembre 2018 est valide.
1° ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation relatif à l'irrégularité du protocole du 19 octobre 2018 emportera la censure par voie de conséquence des chefs du jugement querellés par le présent moyen, en application de l'article 624 du code de procédure civile.
2° ALORS QU'en vertu de l'alinéa 5 de l'article L. 2232-12 du code du travail, participent à la consultation les salariés des établissements couverts par l'accord et électeurs au sens des articles L. 2314-15 et L. 2314-17 à L. 2314-18-1 ; qu'il en résulte que participent à la consultation tous les salariés électeurs de l'établissement dans lequel l'accord est applicable ; qu'en considérant que certains des salariés devaient en être exclus, le tribunal a violé l'article L. 2232-12 du code du travail.
3° ALORS, subsidiairement, QU'aux termes de l'article 1er de l'accord de substitution du 5 septembre 2018 relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail, seuls sont exclus du champ d'application de ce texte les cadres, médecins, pharmaciens et dentistes régis par la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soin, de cure et de garde à but non lucratif [dite CCN 1951] ; que seuls ces salariés pouvaient donc être exclus de la consultation, et non les sages-femmes, auxiliaires de puériculture, aides-soignantes et infirmières puéricultrices ; qu'en considérant que non seulement les cadres, les médecins, pharmaciens, dentistes devaient être exclus de la consultation, mais également les sages-femmes, auxiliaires de puériculture, aides-soignantes et infirmières puéricultrices, le tribunal a violé les articles 1103 du code civil et L. 2232-12 du code du travail
4° ALORS, par ailleurs, QUE le syndicat exposant a soutenu et démontré que l'hôpital employait 645 salariés, que seuls 281 salariés avaient été admis à participer à la consultation et que sur ceux-ci, 152 avaient voté en faveur de l'accord, ce dont il résultait que l'exclusion de 364 salariés avait effectivement exercé une influence sur le résultat du scrutin puisque, pour être valide, l'accord devait être approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés ; qu'en considérant que la privation des salariés non cadres de la maternité du droit de vote n'avait pas exercé d'influence sur le vote, le tribunal a violé l'article L. 2232-12 du code du travail.