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03/10/2019 | FRANCE | N°18-19916

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 03 octobre 2019, 18-19916


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. K..., artisan maçon, a souscrit le 16 janvier 2008 auprès de la société MMA IARD assurances mutuelles (l'assureur) une assurance lui garantissant le versement d'indemnités journalières en cas d'arrêt de travail et celui d'une rente en cas d'invalidité ; qu'en raison d'une lombo-cruralgie, il a été placé en arrêt de travail le 18 novembre 2009 et n'a pu reprendre son activité professionnelle ; que le médecin conseil de l'assureur l'ayant examiné a conclu dan

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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. K..., artisan maçon, a souscrit le 16 janvier 2008 auprès de la société MMA IARD assurances mutuelles (l'assureur) une assurance lui garantissant le versement d'indemnités journalières en cas d'arrêt de travail et celui d'une rente en cas d'invalidité ; qu'en raison d'une lombo-cruralgie, il a été placé en arrêt de travail le 18 novembre 2009 et n'a pu reprendre son activité professionnelle ; que le médecin conseil de l'assureur l'ayant examiné a conclu dans un rapport du 1er avril 2010 à la consolidation de son état à cette date ; que M. K... ayant contesté cet avis, un deuxième médecin, désigné d'un commun accord entre les parties, a émis le même avis dans un rapport du 5 novembre 2010 ; que l'assureur a notifié le 15 décembre 2010 à M. K... sa décision de mettre fin au paiement des indemnités journalières à compter du 1er avril 2010 et de ne pas lui verser de rente, son taux d'invalidité étant inférieur à 30 % ; qu'après avoir obtenu en référé la désignation d'un expert, lequel a déposé son rapport le 10 juillet 2012, M. K... a assigné la société MMA vie assurances mutuelles en exécution du contrat ; que l'assureur est intervenu volontairement à l'instance et lui a opposé la nullité de ce contrat en invoquant une fausse déclaration intentionnelle de sa part dans le questionnaire de santé rempli lors de la souscription ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la première branche du moyen unique, annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais, sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 113-8 du code des assurances ;

Attendu que pour prononcer la nullité du contrat d'assurance souscrit le 16 janvier 2008, l'arrêt énonce que la seule poursuite de la perception de primes postérieurement à la connaissance qu'avait l'assureur de la possibilité d'une fausse déclaration dans le questionnaire de déclaration du risque ne vaut pas renonciation de sa part à se prévaloir de l'application de l'article L. 113-2, 2° du code des assurances ;

Qu'en se bornant à une simple affirmation de principe, sans analyser les circonstances dans lesquelles était intervenue la poursuite de la perception des primes en cause, afin de déterminer si elle traduisait ou non une volonté non équivoque de l'assureur de renoncer à se prévaloir de la nullité du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Condamne les sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA vie assurances mutuelles aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne in solidum à payer à M. K... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille dix-neuf.

Le conseiller rapporteur le president

Le greffier de chambre

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour M. K....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la nullité du contrat d'assurance souscrit le 16 janvier 2018 par M. K... auprès de MMA, de l'AVOIR, en conséquence, débouté de l'ensemble de ses demandes indemnitaires et en remboursement et de l'AVOIR condamné à payer à la MMA Iard assurances mutuelles la somme de 5 304 euros correspondant aux indemnités journalières perçues au titre du contrat du 16 janvier 2008 et aux compagnies défenderesses la somme de 900 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS PROPRES QU' « aux termes de l'article L. 113-2-2° du code des assurances, l'assuré est obligé de répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l'assureur l'interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend en charge ; aux termes de l'article L. 113-8 du même code, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le sinistre omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre ; en l'espèce, M. K... a signé le questionnaire médical du 16 janvier 2008, à la suite de l'indication suivante : 'Vous certifiez l'exactitude et la sincérité de vos déclarations et ne pas avoir caché ou dissimulé d'éléments nécessaires à l'assureur pour apprécier les risques à garantir. Vous reconnaissez avoir été informé des sanctions encourues en cas de réticence, fausse déclaration intentionnelle, omission ou déclaration inexacte : réduction des indemnités ou nullité du contrat (article L. 133-8 et L. 113-9 du code des assurances)' ; il a également apposé sa signature à la suite de la formule suivante : 'Vous reconnaissez avoir été informé du caractère obligatoire des réponses faites à la présente adhésion, ainsi que les sanctions encourues en cas de déclaration inexacte (réduction de l'indemnité ou nullité du contrat)' ; dans le questionnaire médical, M. K... a répondu 'NON' à la question claire précise et intelligible suivante : 'Etes vous ou avez vous été, au cours des 10 dernières années, atteint d'une affection ou de douleurs articulaires ou vertébrales nécessitant un arrêt de travail ou un traitement '' ; ensuite, c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que le premier juge, après avoir examiné en détail l'historique médical de M. K..., a mis en évidence que cette réponse négative constitue une fausse déclaration intentionnelle qui a diminué l'opinion du risque que prenait en charge la compagnie MMA Iard assurances mutuelles ; il suffit d'ajouter, pour répondre à l'argumentation développée seulement en appel, que la seule poursuite de la perception de primes postérieurement à la connaissance qu'avait la compagnie de la possibilité d'une fausse déclaration dans le questionnaire de déclaration du risque ne vaut pas renonciation de l'assureur à se prévaloir de l'application de l'article L. 113-2°-2° ; par conséquent, le jugement qui a appliqué la sanction instituée à l'article L. 113-8 du code des assurances, qui emporte conservation des primes versées par l'assuré et restitution des indemnités journalières indûment perçues doit être intégralement confirmé » (cf. arrêt p. 4 -5) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « l'article 113-8 du code des assurances dispose qu'indépendamment des causes ordinaires de nullité et sous réserve des dispositions de l'article 132-26 (erreur sur l'âge de l'assuré), contrat d'assurance est en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou diminue l'opinion pour l'assureur alors nième que risque omis ou dénaturé par l'assuré été sans influence sur sinistre ; il est constant que demande en nullité de contrat présentée en défense par l'assureur et qualifiée d'exception de nullité, comme l'espèce, n'est pas soumise prescription biennale de l'article 114-1 du code des assurances ; aux termes de la police d'assurance versée au débat, M. K... souscrit en sa qualité d'artisan maçon 6janvier 2008 auprès de MMA, une assurance sécurité revenus arrêt de travail prévoyant en cas d'invalidité le versement d'une rente annuelle, et d'indemnités journalières en cas d'arrêt de travail ; la MMA a consenti ce contrat d'assurance au vu notamment du questionnaire préalable aux termes duquel K... déclaré pas être ou avoir été atteint, au cours des 10 dernières années d'une affection ou de douleurs articulaires ou vertébrale nécessitant un arrêt de travail ou un traitement ; or il n'est pas contesté qu'en 2001 soit moins de 10 ans avant souscription de police d'assurance précitée M. K... a présenté un épisode douloureux lombaire ; il résulte des rapports d'expertise établis le 1er avril 2010 par docteur E... mandaté par MMA, le 5 novembre 2010 par docteur U... Q..., mandaté dans le cadre de l'arbitrage et celui déposé le 10 juillet 2012 par le docteur H... expert judiciaire, que l'épisode de blocage lombaire de 2001 avec irradiation dans les membres inférieurs, a conduit M. K... aux urgences de l'hôpital de Villeneuve sur Lot où été diagnostiqué une pathologie des disques L3-L4 et L4-L5 susceptible de comprimer la face antérieure du fourreau dural et d'engendrer des irradiations mal systématisées, nécessitant dans un premier temps une injection de Profenid 100 plus Coltraiviyl suivi d'un traitement avec un antalgique (paracétamol) associé au repos Les différents experts relèvent que selon les propres déclarations de M. K..., cet épisode douloureux lombaire a été suivi par des crises se répétant à raison de 2 fois par an jusqu'en 2008 puis d'une façon plus rapprochée par la suite soit 4 par ans ; il n'est pas contestable que les injections d'anti-inflammatoire et la prescription d'antalgiques constituent cm traitement médical ; il s'ensuit qu'à la date à laquelle M. K... a renseigné le questionnaire de santé il souffrait depuis 2001 de douleurs des vertèbres lombaires chroniques avec blocage plusieurs fois par an, traitées par antalgique, ce qu'il n'a pas déclaré à la MMA alors qu'il était invité à le faire par un questionnaire précis lui demandant de dire s'il était ou avait été atteint au cours des 10 dernières années d'une affection ou douleurs vertébrales nécessitant notamment un traitement et l'avisant des conséquences de toute fausse déclaration ; M. K... n'est pas recevable à soutenir qu'il n'a pas sciemment et déloyalement omis de déclarer dans le questionnaire MMA ses douleurs lombaires avec prises d'antalgiques alors qu'il résulte de ses propres déclarations aux différents médecins experts qu'à la date à laquelle il a rempli le questionnaire, ses problèmes lombaires étaient encore d'actualité dans la mesure où il souffrait depuis 7 ans de lombalgies chroniques à raison de dccix fois par an avec des situations de blocage problématique pour l'exercice de sa profession ; en indiquant à MMA qu'il n'était pas ni n'avait pas été atteint, au cours des 10 dernières années de douleurs vertébrales nécessitant un traitement M. K... a fait une déclaration du risque mensongère ; compte tenu du caractère chronique et persistant des douleurs lombaires dont souffrait M. K..., le fait de ne pas les déclarer à l'assureur a nécessairement faussé l'opinion du risque de l'assureur dans la mesure où une affection chronique de ce type chez un artisan maçon amené pour les besoins de sa profession à porter de lourdes charges et à solliciter son dos, présente un risque élevé de blessures et donc d'arrêts de travail ouvrant droit à indemnisation par l'assureur ; il résulte des différents rapports d'expertise versés au débat que c'est sur le terrain ancien de la lombalgie chronique que l'accident du 18 novembre 2009 est intervenu ; la fausse déclaration intentionnelle de l'assuré entraîne toutefois la nullité du contrat d'assurance même si le risque omis n'a pas eu d'influence sur le sinistre dès lors que dès l'origine, l'opinion du risque de l'assureur a été faussé ce qui est le cas en l'espèce ; par conséquent, il convient de prononcer la nullité du contrat d'assurance souscrit le 16janvier 2008 par M. K... auprès de MMA ; en application de l'article L 113-8 alinéa 2 du code des assurances, la nullité de l'assurance entraîne l'effacement rétroactif de la garantie de sorte que l'assuré doit restituer les indemnités perçues au titre dci contrat, y compris celles versées pour des sinistres antérieurs tandis que les primes payées demeurent acquises à l'assureur qui a droit au paiement de toutes les primes échues à titre de dommages et intérêts ; il s'ensuit que la MMA est bien fondée à conserver les primes d'assurance perçues et à solliciter la condamnation de M. K... à lui payer la somme de 5.304 euros représentant le montant de toutes les indemnités journalières versées dans le cadre du contrat du 16janvier 2008 ce qui conduit au rejet de l'ensemble des demandes de M. K... » (cf. jugement p. 4, 2- sur l'exception de nullité du contrat d'assurance – p. 5) ;

1/ALORS QUE, d'une part, dans ses conclusions d'appel, M. K... faisait valoir que l'assureur avait renoncé à se prévaloir de la nullité en continuant à percevoir les primes après avoir eu connaissance de la sinistralité réelle de l'assuré (cf. p.11, in medio) ; qu'en réponse à ce moyen, la compagnie MMA Iard assurances mutuelles affirmait que « rien n'interdit à une compagnie d'assurance de continuer à appeler les primes et d'attendre une éventuelle déclaration de sinistre pour soulever la nullité » (cf. p.4, § 1) reconnaissant ainsi, non seulement avoir connaissance d'une « cause plausible de nullité du contrat » mais la volonté de poursuivre néanmoins l'exécution du contrat afin d'en percevoir les primes dans l'attente d'un nouveau sinistre lui permettant de soulever la nullité du contrat tout en conservant lesdites primes ; qu'en refusant néanmoins de juger que la perception des primes postérieurement à la connaissance d'une fausse déclaration - fut-elle seulement probable – ne valait pas renonciation de l'assureur à invoquer la nullité du contrat d'assurance, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2/ALORS QUE, d'autre part et en tout état de cause, la renonciation tacite de l'assureur à se prévaloir de la nullité pour fausse déclaration du contrat d'assurance résulte de la perception des primes du contrat, postérieurement à la révélation de la déclaration inexacte ; qu'en l'espèce, pour écarter la renonciation de l'assureur à se prévaloir de la nullité soulevée par l'exposant, la cour d'appel a énoncé que la seule poursuite de la perception de primes postérieurement à la connaissance de la possibilité d'une fausse déclaration ne valait pas renonciation à se prévaloir de la nullité du contrat ; qu'en statuant de la sorte quand elle avait relevé, par motifs expressément adoptés relatifs à la nullité du contrat d'assurance, que les trois rapports d'expertise effectués en avril 2010, novembre 2010 et en juillet 2012 avaient révélé que M. K... avait souffert, en 2001, de douleurs vertébrales nécessitant un traitement quand il avait répondu par la négative à la question de savoir s'il avait souffert de telles douleurs au cours des dix dernières années avant le questionnaire médical rempli en 2008, de sorte que la compagnie d'assurance était nécessairement informée de la fausse déclaration de M. K... et qu'elle avait volontairement et sans équivoque décidé d'exécuter le contrat d'assurance, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 113-8 du code des assurances.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-19916
Date de la décision : 03/10/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 09 mai 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 03 oct. 2019, pourvoi n°18-19916


Composition du Tribunal
Président : Mme Gelbard-Le Dauphin (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.19916
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