LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par Mme F... V... et M. N... V..., agissant en leur nom personnel et en leur qualité d'ayants droit de O... G..., que sur le pourvoi incident relevé par le directeur général des finances publiques ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 30 octobre 2009, O... G... a fait donation à Y... G..., épouse V..., sa fille, de la nue-propriété de la moitié indivise de diverses parcelles de terres et de bois situées à [...] ; que Y... V... est décédée le [...] , laissant pour héritiers ses deux enfants Mme F... V... et M. N... V... (les consorts V...) ; que considérant que les biens donnés avaient été sous-estimés parce que n'avait pas été pris en compte le fait que l'une de ces parcelles était constructible, l'administration fiscale a notifié les 21, 27 novembre et 12 décembre 2012 une proposition de rectification ; qu'après rejet de leur réclamation, puis mise en recouvrement, le 9 septembre 2013, des impositions rappelées assorties d'intérêts de retard, O... G... et les consorts V... ont assigné le directeur départemental des finances publiques de Haute-Savoie pour demander l'annulation de la procédure de rectification et de l'avis de mise en recouvrement ainsi que la décharge des droits supplémentaires réclamés ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que les consorts V... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande d'annulation de la procédure de rectification alors, selon le moyen :
1°/ qu'ils faisaient expressément valoir dans leurs conclusions que « l'administration fiscale ne pouvait motiver sa décision de rejet [
] en ne s'appuyant que sur la seule lettre de la préfecture en date du 13 avril 2013 à l'exclusion des éléments de service dont elle a refusé la communication aux exposants » ; qu'il était ainsi clairement soutenu que les documents de service détenus par la préfecture relatifs à la parcelle cadastrée [...] située sur la commune de [...] avaient été transmis à l'administration sans qu'elle leur en adresse une copie ; qu'en retenant pourtant qu' « il n'est pas fait état d'éléments détenus par la préfecture qui auraient été communiqués à l'administration fiscale à l'insu des consorts V... », la cour d'appel a dénaturé les conclusions des consorts V..., en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ que l'administration a l'obligation de tenir à la disposition du contribuable qui le demande avant la mise en recouvrement des impositions les documents ou copies de documents contenant les renseignements qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux rehaussements ; que dans le cas où les documents que le contribuable demande à examiner sont détenus non par l'administration fiscale qui en a seulement pris connaissance dans l'exercice de son droit de communication mais par d'autres administrations, l'administration fiscale a l'obligation de renvoyer l'intéressé vers le service pertinent ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que la préfecture n'aurait pas communiqué de documents à l'insu des consorts V... ; qu'en statuant ainsi sans rechercher si l'administration n'avait pas, à tout le moins, pris connaissance des documents de service qu'elle avait sollicités dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ;
Mais attendu qu'après avoir énoncé qu'en application de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, l'administration a l'obligation, sur la demande qui lui en est faite, de communiquer au contribuable faisant l'objet d'une procédure de rectification contradictoire les documents fondant le redressement, dont n'étant ni l'auteur, ni le destinataire, il n'a pas connaissance, l'arrêt constate que l'administration a communiqué aux consorts V... la lettre datée du 9 avril 2013 qu'elle avait reçue de la préfecture de Haute-Savoie, et que cette lettre ne fait état d'aucune autre pièce qui aurait pu être transmise ; qu'en l'état de ces énonciations et constatations, dont elle a déduit que la procédure de rectification était régulière, la cour d'appel, qui n'a pas dénaturé les conclusions des consorts V..., qui se bornaient à soutenir que d'autres « éléments de service » fondaient la proposition de rectification, et qui n'avait pas à procéder à la recherche invoquée à la seconde branche dès lors que ces éléments dont l'administration aurait eu connaissance n'étaient pas identifiés, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi principal :
Attendu que les consorts V... font grief à l'arrêt de déclarer réguliers la méthode d'évaluation et les termes de comparaison retenus par le directeur des finances publiques de Haute-Savoie alors, selon le moyen, que pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit, les immeubles, quelles que soit leur nature sont estimés d'après leur valeur vénale réelle à la date de la transmission ; qu'en zone de montagne, l'urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, et non simplement en projet ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que les constructions entourant actuellement la parcelle [...] « n'étaient pas encore construits » à la date de la donation ; qu'en retenant pourtant qu'au jour de la donation, la parcelle aurait été constructible au prétexte que « les constructions à édifier s'avérait être la continuité de celles en projet pour lesquelles des autorisations avaient été délivrées », la cour d'appel a violé les articles 761 du code général des impôts et L. 145-3 du code de l'urbanisme ;
Mais attendu qu'après avoir rappelé que le plan d'occupation des sols arrêté le 23 mars 1993 par la commune de [...] avait classé, pour partie, la parcelle [...] en zone UB dite « d'habitat résidentiel » et constaté que, par lettre du 24 mai 2002, le préfet de Haute-Savoie avait informé le maire de cette commune de ce que « dans le cadre de l'application de la loi Montagne, et notamment du principe de constructibilité en continuité des bourg, hameau et village », ce plan d'urbanisme recélait cinq secteurs incompatibles avec ce principe, et que, le 1er juillet 2002, le maire de [...] avait notifié à M. G... le fait que sa propriété était concernée par cette instruction préfectorale, ce dont il résultait que son terrain n'était plus constructible, l'arrêt relève que, par lettre du 11 avril 2011, les services préfectoraux ont reconnu que l'évolution du bâti autour de la parcelle [...] rendait celle-ci constructible au regard du principe édicté à l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme ; qu'il ajoute qu'une partie de cette parcelle, cadastrée après division sous le numéro [...], est désormais constructible, qu'une société Romed a déposé, pour ce terrain, une demande de permis de construire deux chalets individuels et que l'examen du plan annexé à une décision de raccordement d'ERDF montre que quatre chalets ont été édifiés au Nord de la parcelle, tandis qu'à l'Est de celle-ci se trouvent désormais sept bâtiments qui n'étaient pas encore construits au moment de la donation mais dont le projet de construction existait dès avril 2008, date de la cession de diverses parcelles voisines, avec pour conséquence la création d'un véritable hameau au [...] ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a exactement déduit que la parcelle [...], très proche de ces nouvelles constructions pour lesquelles des autorisations avaient été délivrées, est devenue constructible dès avril 2008, soit à une époque antérieure à la donation, et que, pour cette partie constructible, la valeur vénale de la parcelle [...] devait être déterminée à partir de comparaisons tirées de la cession de biens intrinsèquement similaires ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en ses deux premières branches :
Vu les articles L. 190 et L. 199 du livre des procédures fiscales ;
Attendu que pour réformer le jugement et annuler la proposition de rectification notifiée les 21, 27 novembre et 12 décembre 2012 et l'avis de mise en recouvrement du 9 septembre 2013, l'arrêt retient que l'insuffisance taxable, arrêtée par l'administration à la somme de 2 604 000 euros, doit être ramenée à celle de 1 514 103 euros et qu'il reviendra à l'administration de procéder à un nouveau redressement sur cette base ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'ayant admis le bien fondé, pour partie, de l'imposition supplémentaire, la cour d'appel, qui ne pouvait dès lors annuler la proposition de rectification et l'avis de mise en recouvrement, mais devait les déclarer valables, sauf à cantonner les effets de cet avis au montant de l'imposition qu'elle retenait, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief du pourvoi incident :
REJETTE le pourvoi principal ;
Et sur le pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il annule la proposition de rectification notifiée les 21 novembre, 27 novembre et 12 décembre 2012 et l'avis de mise en recouvrement du 9 septembre 2013, dit que l'administration fiscale établira un nouveau redressement sur la base de l'insuffisance taxable retenue, et statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 28 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne Mme F... V... et M. N... V... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer au directeur général des finances publiques la somme globale de 3 000 euros et rejette leur demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé en l'audience publique du deux octobre deux mille dix-neuf et signé par M. Guérin, conseiller qui en a délibéré, en remplacement de Mme Orsini.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour Mme F... V... et M. N... V...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté que le droit de communication des consorts V... a été respecté et que la procédure de rectification engagée par la direction générale des finances publiques n'est pas nulle et d'avoir, en conséquence, débouté les consorts V... de leur demande de nullité de la procédure de rectification ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE : « sur la régularité de la procédure : que selon l'article 76 du Livre des Procédures Fiscales , « les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions » ; que l'administration a communiqué aux consorts V... la lettre de la préfecture de Haute-Savoie du 09/04/2013, libellée ainsi : « conformément à votre demande du 22/03/2013, j'ai l'honneur de vous faire parvenir sous ce pli les éléments dont je dispose concernant la parcelle cadastrée [...] , située sur la commune de [...]. Cette parcelle classée en zone UB du plan d'occupation des sols du 22/03/1993 dispose d'un caractère constructible. A la date du 30/10/2009, l'évolution du bâti autour de cette parcelle rendait possible sa constructibilité, au regard des dispositions de la loi montagne » ; qu'il résulte de ce courrier que l'administration a donné les éléments dont elle disposait dans sa réponse, sans joindre d'annexes ; que par ailleurs, il n'est pas fait état d'éléments détenus par la préfecture qui auraient été communiqués à l'administration fiscale à l'insu des consorts V... ; que dès lors, c'est par une exacte appréciation des circonstances de la cause que le premier juge a considéré que la procédure suivie était régulière ; que le jugement déféré sera confirmé de ce chef » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE :
« sur la nullité de la procédure de rectification : que l'article 76 du livre des procédures fiscales dispose que l'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76 ; qu'elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en a fait la demande ; qu'en l'espèce, les demandeurs ont sollicité par l'intermédiaire de leur avocat le 25 avril 2013 « les éléments que la préfecture de Haute-Savoie vise dans son courrier en date du 9 avril 2013 » ; qu'or, le courrier de la préfecture en date du 9 avril 2013 indiquait :
« conformément à votre demande du 22/03/2013, j'ai l'honneur de vous faire parvenir sous ce pli les éléments dont je dispose concernant la parcelle cadastrée [...] , située sur la commune de [...] » ; que le terme « éléments » ne signifie pas pièces jointes ou documents annexés, mais désigne les éléments d'appréciation du caractère constructible de ladite parcelle contenus dans le deuxième paragraphe de ladite missive ; que ce deuxième paragraphe indique : « cette parcelle classée en zone UB du plan d'occupation des sols du 22/03/1993 dispose d'un caractère constructible. A la date du 30/10/2009, l'évolution du bâti autour de cette parcelle rendait possible sa constructibilité, au regard des dispositions de la loi montagne » ; qu'ainsi le courrier de la préfecture en date du 9 avril 2013 ayant été adressé à plusieurs reprises aux demandeurs avant la mise en recouvrement, il convient de constater que leur droit de communication a été respecté et que la procédure de rectification n'est pas nulle ; qu'il convient donc de débouter les consorts G... V... de leur demande de nullité de la procédure de rectification » ;
ALORS 1/ QUE les consorts V... faisaient expressément valoir dans leurs conclusions que « l'administration fiscale ne pouvait motiver sa décision de rejet [
] en ne s'appuyant que sur la seule lettre de la préfecture en date du 13 avril 2013 à l'exclusion des éléments de service dont elle a refusé la communication aux exposants » (conclusions, p. 8, dernier alinéa) ; qu'il était ainsi clairement soutenu que les documents de service détenus par la préfecture relatifs à la parcelle cadastrée [...] située sur la commune de [...] avait été transmis à l'administration sans qu'elle leur en adresse une copie ; qu'en retenant pourtant qu' « il n'est pas fait état d'éléments détenus par la préfecture qui auraient été communiqués à l'administration fiscale à l'insu des consorts V... » (arrêt, p. 4, alinéa 3), la cour d'appel a dénaturé les conclusions des exposantes, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS Et SUBSIDIAIREMENT 2/ QUE l'administration a l'obligation de tenir à la disposition du contribuable qui le demande avant la mise en recouvrement des impositions les documents ou copies de documents contenant les renseignements qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux rehaussements ; que dans le cas où les documents que le contribuable demande à examiner sont détenus non par l'administration fiscale qui en a seulement pris connaissance dans l'exercice de son droit de communication mais par d'autres administrations, l'administration fiscale a l'obligation de renvoyer l'intéressé vers le service pertinent ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que la préfecture n'aurait pas communiqué de documents à l'insu des consorts V... ; qu'en statuant ainsi sans rechercher si l'administration n'avait pas, à tout le moins, pris connaissance des documents de service qu'elle avait sollicités dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté que la méthode d'évaluation et les termes de comparaison retenus et cités par la direction générale des finances publiques en Haute Savoie sont réguliers et appropriés et opposables aux consorts V... et constaté que la parcelle section [...] sur la commune de [...] était constructible lors de la donation du 30 octobre 2009 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur la valeur de la parcelle [...] : que la parcelle [...] a une surface de 2 ha 94 a 64 ca, et a été classée par le plan d'occupation du sol de la commune de [...] du 23/03/1993 : - en zone agricole de loisirs pour 2ha14a54ca ; - en zone de forêt à protéger pour 11a26ca ; - en zone UB dite « d'habitat résidentiel » pour 68a56ca, des réseaux d'eau et d'électricité traversant cette partie du terrain ; que le 24/05/2002, le préfet de la Haute-Savoie a écrit au maire de [...] que « dans le cadre de l'application de la loi Montagne, et notamment du principe de constructibilité en continuité des bourg, hameau et village (article L. 145-3, III du code de l'urbanisme), votre plan local d'urbanisme recèle cinq secteurs qui m'apparaissent incompatibles au regard du principe énoncé ci-dessus » et a transmis 4 extraits de plan localisant les secteurs relevés comme incompatibles ; que le 01/07/2002, le maire de [...] a écrit à M. G... que « votre propriété est concernée par cette instruction préfectorale. Nous avons bien conscience que cette décision est lourde de conséquences pour vous puisque le caractère constructible de votre terrain n'est plus reconnu par l'administration » ; que le 11/04/2011, la préfecture a écrit à Mme C... : « en 2002, mes services avaient estimé que ce terrain était en discontinuité de l'urbanisation existante. (..) Après examen, il apparaît que l'évolution du bâti autour de cette parcelle rend désormais compatible une demande de permis de construire avec le principe édicté à l'article L. 145-3, III du code de l'urbanisme » ; que les consorts V... font valoir que cette lettre ne permet d'établir la constructibilité du terrain qu'à compter de l'année 2011 mais non à la date de la donation ; qu'il résulte des éléments du dossier qu'aujourd'hui, la parcelle en cause est en partie constructible, la société Romed ayant déposé une demande de permis de construire de deux chalets individuels, ERDF ayant donné son accord pour le raccordement au réseau électrique moyennant le remboursement par l'indivision V... à la commune de [...] de la somme de 8.212 euros, la parcelle constructible portant désormais le n° [...], pour 3.554 m², le reste étant cadastré sous le numéro [...] pour 2 ha 58 a 78 ca ; que l'examen du plan annexé à la décision de ERDF montre que 4 chalets ont été édifiés côté Sud de la [...], au Nord de la parcelle, tandis qu'à l'Est de celle-ci, au [...], se trouvent désormais 7 bâtiments ; qu'or, si ceux-ci n'étaient pas encore construits au moment de la donation, en réalité, en avril 2008, de multiples terrains avaient été vendus aux fins de construction, concernant notamment les parcelles [...] , [...] (shon de 399 m²), [...], (shon de 279 m²), [...] (shon de 250 m²), avec pour conséquence la création d'un véritable hameau au [...] ; que la parcelle en cause étant très proche de ces nouvelles constructions, dont le projet existait dès avril 2008, est ainsi devenue constructible dès avril 2008, soit à une époque antérieure à la donation ; qu'en effet, si un permis de construire avait été demandé à ce moment, il aurait été nécessairement accordé sur cette partie du terrain, les constructions à édifier s'avérant être la continuité de celles en projet pour lesquelles des autorisations avaient été délivrées ; que c'est donc exactement que l'administration fiscale a considéré que la valeur de la parcelle à prendre en cause devait être réévaluée » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « sur le caractère constructible de la parcelle [...] : qu'il convient de déterminer le caractère constructible de ladite parcelle avant de vérifier l'évaluation des biens immobiliers faite par l'administration fiscale puisque de ce caractère dépendra une partie de l'évaluation ; que la préfecture a clairement indiqué le 9 avril 2013 que ladite parcelle classée en zone UB du plan d'occupation des sols du 23 mars 1993 dispose d'un caractère constructible ; qu'à la date du 30 octobre 2009, l'évolution du bâti autour de cette parcelle rendait possible sa constructibilité au regard des dispositions de la loi montagne ; qu'ainsi, quand bien même la préfecture indique le 24 mai 2002 à la commune de [...] que ladite parcelle appartenait à un des cinq secteurs du PLU de ladite commune, apparaissant incompatible au regard du principe de constructibilité en continuité des bourgs, hameau et village, et que cette information a été retransmise par ladite commune le 1er juillet 2002 à un tiers copropriétaire de ladite parcelle, M. U... G..., ces informations ne sont pas contradictoires entre elles ; qu'en effet, cela signifie que la parcelle a été chronologiquement classée en zone constructible dans le plan d'occupation des sols du 23 mars 1993 et ce, par erreur, comme l'indique la préfecture de Haute-Savoie le 4 mai 2002, mais que compte tenu de l'évolution du bâti autour de cette parcelle et en fait du bâti en continuité du bâti déjà existant, ledit bâti s'étant rapproché de ladite parcelle, sa constructibilité en 2009, soit sept années plus tard est avérée en respect dudit principe de constructibilité en continuité ; qu'ainsi, lors de la donation du 20 octobre 2009, les demandeurs ont, au minimum avec une légèreté coupable, requis le notaire de ne pas demander de note de renseignements d'urbanisme alors que sept années s'étaient écoulées depuis l'avis de la mairie de [...], alors que le principe même de la loi Montagne de constructibilité en continuité rend évolutif le caractère constructible des parcelles et qu'à tout le moins les dispositions d'urbanisme pouvaient avoir évoluées durant une si longue période ; que cette déclaration dans l'acte notarié de requérir le notaire de ne pas demander la note de renseignements d'urbanisme en ajoutant qu'il résulte des documents délivrés par la mairie que l'immeuble objet des présentes se situe dans une zone naturelle, sans d'ailleurs préciser la date dudit document, pourrait même faire songer à de la mauvaise foi ; qu'il s'en déduit que l'administration fiscale établit le caractère constructible de l'immeuble disputé au jour de la donation » ;
ALORS QUE pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit, les immeubles, quelles que soit leur nature sont estimés d'après leur valeur vénale réelle à la date de la transmission ; qu'en zone de montagne, l'urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, et non simplement en projet ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que les constructions entourant actuellement la parcelle [...] « n'étaient pas encore construits » à la date de la donation (arrêt, p. 5, alinéa 4) ; qu'en retenant pourtant qu'au jour de la donation, la parcelle aurait été constructible au prétexte que « les constructions à édifier s'avérait être la continuité des celles en projet pour lesquelles des autorisations avaient été délivrées » (arrêt, p. 5, alinéa 5), la cour d'appel a violé les articles 761 du code général des impôts et L. 145-3 du code de l'urbanisme.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour le directeur général des finances publiques
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU' il a réformé le jugement en y ajoutant que l'insuffisance taxable est de 1 514 103 euros et annulé la décision de rejet du 16/06/2014, du redressement notifié les 21/11, 27/11 et 12/12/2013 et de l'avis de mise en recouvrement du 09/09/2013 ;
AUX MOTIFS QUE « c'est donc exactement que l'administration fiscale a considéré que la valeur de la parcelle en cause devait être réévaluée.Toutefois, seule la partie constructible de la parcelle est concernée par cette réévaluation, soit en l'occurrence, la parcelle cadastrée aujourd'hui [...], de 3.354 m². Cette partie du terrain étant désormais parfaitement délimitée, il n'y a pas lieu d'appliquer, pour le calcul de la valeur du bien donné, de procéder à un abattement de 31 % comme effectué par l'administration fiscale sur la totalité de la parcelle. Le prix moyen des parcelles vendues en avril 2008 jouxtant la parcelle en cause est de 1.022,70 euros/m², ce qui permet de valoriser la parcelle [...] à 3.430.135 euros, les références de l'administration étant parfaitement fiables, les biens en cause étant tout à fait similaire à la parcelle litigieuse. Sur cette somme, un abattement de 10 % doit être pratiqué, pour tenir compte de la situation d'indivision de la propriété de cette parcelle entre les consorts V..., soit une valeur vénale réelle du bien de 3.087.122 euros. Après prise en compte de la quote-part d'indivision objet de la donation du 30/10/2009, soit 50 %, la valeur vénale qui sera retenue par la Cour est de 1.543.561 euros. De cette somme doit être déduite la valeur déclarée au prorata de la surface de (250.000 €:29.464 m² x 3.354 m²) soit 29.458 euros, d'où une insuffisance taxable de 1.543.561 euros. L'insuffisance taxable retenue par l'administration étant de 2.604.000 euros, il convient d'annuler la décision de rejet du 16/06/2014, du redressement notifié les 21/11, 27/11 et 12/12/2012 et l'avis de mise en recouvrement du/09/09/2013, à charge pour l'administration fiscale d'établir un nouveau redressement sur la base de l'insuffisance taxable retenue par la Cour » ;
ALORS QUE, premièrement, en application de l'article L.190 du livre des procédures fiscales (L.P.F.), constitue une réclamation contentieuse toute demande tendant à obtenir la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions ; qu'il résulte par ailleurs des dispositions de l'article L. 199 du L.P.F. que les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses portant sur les droits d'enregistrement, la taxe de publicité foncière, les droits de timbre, et de taxes assimilées à ces droits peuvent être portées devant le tribunal de grande instance (T.G.I.) ; qu'en conséquence, le recours introduit par un contribuable devant les tribunaux judiciaires est dirigé contre la décision de rejet de l'administration fiscale ; que par suite, les juges du fond ont compétence pour annuler la décision de rejet de l'administration et non la proposition de rectification notifiée par l'administration fiscale ; qu'ainsi la cour d'appel qui reconnaît partiellement le bien-fondé d'un redressement pour insuffisance de valeur vénale mais annule néanmoins la proposition de rectification qui a établit l'insuffisance viole les dispositions des articles L. 190 et L. 199 précités ;
ALORS QUE, deuxièmement, en application des dispositions combinées des articles L. 190 et L. 199 du livre des procédures fiscales, le juge judiciaire est compétent lorsqu'il s'agit notamment d'obtenir la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions ; que lorsque le juge reconnaît partiellement le bien fondé d'un redressement pour insuffisance de la valeur déclarée d'un bien, en retenant une valeur intermédiaire entre celle que le contribuable a déclarée et celle que le service a déterminée, il ne peut annuler l'intégralité de l'avis de mise en recouvrement ; que dans un tel cas, le juge doit en effet décider que l'administration est fondée à percevoir les droits correspondant à la valeur qu'il a ainsi fixée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel de Chambéry a jugé que la valeur de la propriété située à [...], initialement fixée à 250 000 € dans l'acte de donation, devait être fixée à la somme de 1 543 561 €, validant ainsi implicitement mais nécessairement pour partie le bien-fondé du rehaussement en cause ; qu'elle a pourtant décidé d'annuler dans son intégralité l'avis de mise en recouvrement du 9 septembre 2013 ; qu'en agissant ainsi, sans tirer les conséquences légales de ses propres constatations, la cour a violé les dispositions des articles L. 190 et L. 199 du L.P.F. ;
ALORS QUE, troisièmement, la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel de Chambéry a jugé que la valeur de la propriété située à [...], initialement fixée à 250 000 € dans l'acte de donation, devait être fixée à la somme de 1 543 561 €, validant ainsi implicitement mais nécessairement pour partie le bien-fondé du rehaussement en cause ; qu'elle a pourtant décidé d'annuler dans son intégralité les propositions de rectifications des 21 et 27 novembre et 12 décembre 2012 et l'avis de mise en recouvrement du 9 septembre 2013 ; qu'en agissant de la sorte, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, en violation des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.