LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 562 du code de procédure civile ;
Attendu que, selon ce texte, l'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs du jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, et les pièces de la procédure, que, le 19 janvier 2018, M. I..., de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative par décision du préfet ; que le juge des libertés et de la détention, saisi, le 20 janvier, par M. I... d'une contestation de cette décision et, le lendemain, par le préfet, d'une demande de prolongation de la mesure, a joint les deux procédures, constaté l'irrégularité de la procédure préalable à la rétention, dit n'y avoir lieu de statuer sur la requête de M. I... et rejeté la demande de prolongation du préfet de police ;
Attendu que, pour décider le maintien de la rétention, l'ordonnance retient que le délai de mise à disposition de l'intéressé avant la rétention n'est pas excessif et relève qu'aucun autre moyen n'est soutenu en cause d'appel ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'appel relatif au chef de l'ordonnance constatant l'irrégularité de la procédure préalable à la rétention s'étendait au chef disant n'y avoir lieu de statuer sur la requête en contestation de la décision de placement en rétention, qui en dépendait, le premier président, qui n'a pas examiné la légalité de cette décision, a violé le texte susvisé ;
Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 23 janvier 2018 par le premier président de la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille dix-neuf et signé par lui et par Mme Randouin, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour M. I....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée D'AVOIR ordonné la prolongation de la rétention de G... I... dans les locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire ;
AUX MOTIFS QUE « la cour considère que la mise à disposition de l'intéressé n'ayant duré que 3 h 55, ladite durée ne saurait être considérée comme excessive s'agissant du temps de formalisation des décisions administratives, étant rappelé que la rétention pour contrôle d'identité de l'article 78-3 du code de procédure pénale, certes non applicable au cas d'espèce, ne peut excéder 4 heures, d'où il se déduit par parallèlisme qu'une durée inférieure à 4 heures n'apparait pas déraisonnable ; c'est donc à tort que le premier juge a fait droit au moyen, sans autre moyen soutenu en cause d'appel, l'ordonnance sera en conséquence infirmée » ;
1°) ALORS QUE les juges doivent rappeler les moyens invoqués par les parties ; qu'en énonçant seulement que M. I... demandait « la confirmation de l'ordonnance », sans rappeler les moyens soutenus par son conseil présent à l'audience en cause d'appel, le délégué du premier président a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent ; que le préfet a interjeté appel de l'ordonnance ayant constaté l'irrégularité de la procédure et, en conséquence, dit n'y avoir lieu à statuer sur la requête en contestation de la décision de placement en rétention, chef de dispositif qui dépendait du premier ; qu'en n'examinant pas la légalité du placement en rétention administrative, le délégué du premier président a excédé ses pouvoirs et ainsi violé l'article 562 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE les juges ne sauraient méconnaître les termes du litige ; qu'en cause d'appel, M. I... avait invoqué à l'audience l'ensemble des moyens qu'il avait soutenus en première instance ; qu'en considérant qu'il invoquait exclusivement le moyen tiré du caractère excessif de la durée écoulée entre le contrôle d'identité et la décision de placement en rétention, le délégué du premier président a méconnu les termes du litige et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée D'AVOIR ordonné la prolongation de la rétention de G... I... dans les locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire ;
AUX MOTIFS QUE « la cour considère que la mise à disposition de l'intéressé n'ayant duré que 3 h 55, ladite durée ne saurait être considérée comme excessive s'agissant du temps de formalisation des décisions administratives, étant rappelé que la rétention pour contrôle d'identité de l'article 78-3 du code de procédure pénale, certes non applicable au cas d'espèce, ne peut excéder 4 heures, d'où il se déduit par parallèlisme qu'une durée inférieure à 4 heures n'apparait pas déraisonnable ; c'est donc à tort que le premier juge a fait droit au moyen, sans autre moyen soutenu en cause d'appel, l'ordonnance sera en conséquence infirmée » ;
1°) ALORS QUE le délai écoulé entre le contrôle d'identité de l'intéressé et la notification de son placement en rétention administrative ne doit pas être d'une durée excessive ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. I... a fait l'objet d'un contrôle d'identité à 8 heures et que son placement en rétention administrative lui a été notifié à 11 h 55, de telle sorte qu'une durée de 3 h 55 s'est écoulée entre son contrôle d'identité et son placement en rétention ; qu'en considérant totuefois que cette durée n'était pas excessive et, partant, que la procédure était régulière, la cour d'appel a violé l'article L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
2°) ALORS QUE le délai écoulé entre le contrôle d'identité de l'intéressé et son placement en rétention ne doit pas être d'une durée excessive ; que le temps de formalisation des décisions administratives est à cet égard indifférent ; qu'en énonçant, pour juger non excessive la durée écoulée entre le contrôle d'identité de l'intéressé et son placement en rétention, que la durée de 3 h 55 correspondait au « temps de formalisation des décisions administratives », le délégué du premier président a statué par des motifs inopérants et ainsi violé l'article L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3°) ALORS QUE le délai écoulé entre le contrôle d'identité de l'intéressé et la notification de son placement en rétention ne doit pas être d'une durée excessive ; que les dispositions de l'article 78-3 du code de procédure pénale ne sont, pour apprécier cette durée, pas applicables ; qu'en appréciant le caractère excessif de la durée écoulée entre le contrôle d'identité de l'intéressé et son placement en rétention administrative au regard des dispositions de l'article 78-3 du code de procédure pénale dont il a admis l'inapplication au litige, le délégué du premier président a violé l'article L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.