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18/09/2019 | FRANCE | N°18-85396

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 septembre 2019, 18-85396


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. R... C...,
- M. M... C...,
- M. U... F...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 7 juin 2018, qui, pour enlèvement et séquestration en récidive, a condamné, le premier à cinq ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, le deuxième, à quatre ans d'emprisonnement et le troisième, à quatre ans et six mois d'emprisonnement, ainsi qu'à dix ans d'interdiction de détenir ou porter une arme ;

La COUR,

statuant après débats en l'audience publique du 19 juin 2019 où étaient présents dans la f...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. R... C...,
- M. M... C...,
- M. U... F...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 7 juin 2018, qui, pour enlèvement et séquestration en récidive, a condamné, le premier à cinq ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, le deuxième, à quatre ans d'emprisonnement et le troisième, à quatre ans et six mois d'emprisonnement, ainsi qu'à dix ans d'interdiction de détenir ou porter une arme ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 19 juin 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Castel, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Slove, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de Mme le conseiller SLOVE, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires ampliatifs et personnel et les observations complémentaires produits ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'au terme d'une information, le juge d'instruction a, par ordonnance du 16 janvier 2017, renvoyé MM. U... F..., M... et R... C... devant le tribunal correctionnel de Nancy pour avoir, à Algesiras et à Besançon, entre le 10 juillet et le 21 juillet 2011, arrêté, enlevé, détenu ou séquestré M. W... Y... , comme otage pour obtenir une rançon, avec libération volontaire avant le septième jour, ainsi que pour le délit d'association de malfaiteurs ; que le tribunal correctionnel les a déclarés coupables et condamnés à des peines d'emprisonnement ; que les prévenus et le ministère public ont interjeté appel ;

En cet état ;

Sur les premier, deuxième et troisième moyens de cassation présentés pour M. F... ;

Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que les moyens ne sont pas de nature à être admis ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour M. R... C..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 224-1, 224-4 du code pénal, 485, 512, 591, 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué confirmatif a déclaré M. R... C... du délit prévu par l'article 224-4, alinéa 3, du code pénal ;

"1°) alors qu'en matière correctionnelle, le dispositif de la décision de condamnation énonce les infractions dont les personnes citées sont déclarées coupables ou responsables ; qu'en déclarant l'exposant coupable « du délit prévu et réprimé par l'article 224-4 alinéa 3 du code pénal », sans autre précision, lorsque ce texte réprime les délits distincts d'arrestation, d'enlèvement, de détention et de séquestration d'otage, lesquels diffèrent tant par leur nature que par leurs éléments constitutifs, la cour d'appel a violé les articles 485 et 512 du code de procédure pénale ;

"2°) alors que la cour d'appel, qui constatait que M. Y... avait désigné M. R... C... uniquement comme l'un des auteurs directs de son enlèvement et comme le conducteur du véhicule Golf 6 ayant ouvert la route au véhicule Citroën C3 dans lequel il avait été transféré vers la France, ne pouvait retenir que l'exposant avait participé à sa séquestration sans mieux s'expliquer l'implication de celui-ci dans ces faits";

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour M. M... C..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 224-1, 224-4 du code pénal, 485, 512, 591, 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué confirmatif a déclaré M. M... C... du délit prévu par l'article 224-4, alinéa 3, du code pénal ;

"1°) alors qu'en matière correctionnelle, le dispositif de la décision de condamnation énonce les infractions dont les personnes citées sont déclarées coupables ou responsables ; qu'en déclarant l'exposant coupable « du délit prévu et réprimé par l'article 224-4 alinéa 3 du code pénal », sans autre précision, lorsque ce texte réprime les délits distincts d'arrestation, d'enlèvement, de détention et de séquestration d'otage, lesquels diffèrent tant par leur nature que par leurs éléments constitutifs, la cour d'appel a violé les articles 485 et 512 du code de procédure pénale ;

"2°) alors que la cour d'appel qui constatait que M. Y... n'avait désigné comme auteurs directs de son enlèvement que MM. V... K..., M... K... et R... C... ne pouvait retenir que l'exposant avait participé à cet enlèvement, sans mieux s'expliquer sur son implication dans ces faits" ;

Les moyens étant réunis ;

Sur le moyen, pris en sa première branche :

Attendu que, si le dispositif de l'arrêt a omis d'énoncer l'infraction dont MM. R... et M... C... ont été déclarés coupables en méconnaissance de l'article 485 du code de procédure pénale, la censure n'est toutefois pas encourue, dès lors qu'il résulte sans ambiguïté des motifs de l'arrêt que la cour d'appel a déclaré les prévenus coupables du délit d'enlèvement et de séquestration avec libération sans exécution d'une condition ;

D'où il suit que le grief ne peut qu'être écarté ;

Sur le moyen, pris en sa seconde branche :

Attendu que pour retenir la culpabilité de MM. R... et M... C... lors de l'enlèvement et de la séquestration de M. Y... , l'arrêt attaqué relève notamment que les échanges téléphoniques, l'ADN des prévenus retrouvés dans les véhicules utilisés, les descriptions physiques données par la victime, les documents et armes retrouvés dans les véhicules établissent suffisamment la participation pleine et entière des deux prévenus, et en toute connaissance de cause, à l'enlèvement et la séquestration de la victime ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié les faits et leurs circonstances, ainsi que les éléments de preuve contradictoirement débattus, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Mais sur le second moyen de cassation, proposé pour M. R... C... pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 130-1, 132-1, 132-19 du code pénal, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a condamné M. R... C... à la peine de cinq ans d'emprisonnement dont un an assorti du sursis ;
"alors que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère inadéquat de toute autre sanction ; qu'en prononçant une peine de cinq ans d'emprisonnement dont un assorti du sursis, sans s'expliquer sur les éléments de la personnalité du prévenu qu'elle a pris en compte pour fonder sa décision et sur le caractère inadéquat de toute autre sanction, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 132-19 du Code pénal, ensemble les articles 130-1 et 132-1 du Code pénal;

Et sur le second moyen de cassation, proposé pour M. M... C... pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 130-1, 132-1, 132-19 du code pénal, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a condamné M. M... C... à la peine de quatre ans d'emprisonnement ;

"alors que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère inadéquat de toute autre sanction ; qu'en se bornant à affirmer que la peine de quatre ans d'emprisonnement ferme qu'elle prononçait se justifiait par l'implication particulière du prévenu dans la commission des faits, sans s'expliquer sur les éléments de la personnalité de celui-ci qu'elle a pris en compte pour fonder sa décision et sur le caractère inadéquat de toute autre sanction, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 132-19 du code pénal, ensemble les articles 130-1 et 132-1 du code pénal" ;

Les moyens étant réunis ;

Vu l' article 132-19 du code pénal ;

Attendu qu'il résulte de ce texte qu'en matière correctionnelle, le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction ;

Attendu que pour condamner M. R... C... à cinq ans d'emprisonnement dont un an avec sursis et M. M... C... à quatre ans d'emprisonnement, l'arrêt retient que la particulière gravité de l'infraction d'enlèvement et de séquestration est établie par les circonstances de sa commission, les prévenus revêtus de gilets pare-balle, lourdement armés ayant exercé des violences sur la victime, dans un contexte de trafic international de cannabis entre le Maroc, l'Espagne et la région bisontine, en lien avec un litige portant sur la restitution de trois tonnes de cannabis ; que M. R... C..., qui a été condamné par le tribunal correctionnel de Besançon pour infractions à la législation sur les stupéfiants, a eu un rôle prépondérant dans les faits d'enlèvement et séquestration lié à un vaste trafic ; que M. M... C... a eu une implication particulière dans la commission de l'infraction ; que toute autre peine est manifestement inadéquate ;

Mais attendu qu'en prononçant par ces seuls motifs, sans s'expliquer autrement sur les éléments de la personnalité de M. R... C... et sur ceux de M. M... C... qu'elle a pris en considération pour fonder sa décision, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle sera limitée aux peines prononcées à l'encontre de MM. R... et M... C... dès lors que les déclarations de culpabilité n'encourent pas la censure ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nancy, en date du 7 juin 2018, mais en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées à l'égard de MM. R... C... et de M... C..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nancy autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nancy et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-huit septembre deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 18-85396
Date de la décision : 18/09/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 07 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 18 sep. 2019, pourvoi n°18-85396


Composition du Tribunal
Président : M. Castel (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.85396
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