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18/09/2019 | FRANCE | N°18-12639

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 septembre 2019, 18-12639


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, qu'un juge des libertés et de la détention a, sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, autorisé les agents de l'administration des impôts à procéder à des visites avec saisies dans des locaux et dépendances situés à Montreuil (93), susceptibles d'être occupés notamment par les sociétés de droit français Vivauto, Vivauto PL, Sakar, afin de rechercher la preuve d'une soustraction de

la société de droit chypriote Nerima Enterprises Company Limited (la so...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, qu'un juge des libertés et de la détention a, sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, autorisé les agents de l'administration des impôts à procéder à des visites avec saisies dans des locaux et dépendances situés à Montreuil (93), susceptibles d'être occupés notamment par les sociétés de droit français Vivauto, Vivauto PL, Sakar, afin de rechercher la preuve d'une soustraction de la société de droit chypriote Nerima Enterprises Company Limited (la société Nerima) à l'établissement et au paiement de l'impôt sur le bénéfice et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que la société Vivauto a relevé appel de l'ordonnance d'autorisation et exercé un recours contre le déroulement des opérations de visite ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Attendu que la société Vivauto fait grief à l'ordonnance de rejeter ses demandes alors, selon le moyen, que la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation à intervenir de l'ordonnance ayant rejeté l'appel formé par la société Nerima contre l'ordonnance ayant autorisé la visite domiciliaire des locaux de la société Vivauto entraînera, par voie de conséquence, l'annulation de l'ordonnance attaquée, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire, en application de l'article 625 du code de procédure civile ;

Mais attendu que le pourvoi n° 18-12.641, formé par la société Nerima, ayant été rejeté par un arrêt de la chambre commerciale, financière et économique du 19 juin 2019, le moyen est sans portée ;
Mais sur le moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ;

Attendu que pour déclarer la société Vivauto non fondée à contester l'ordonnance d'autorisation de visite, le premier président a retenu que seules les personnes faisant l'objet de présomptions de fraude peuvent critiquer l'insuffisance d'une telle ordonnance et que la société Vivauto est une personne tierce par rapport à la société Nerima visée par les présomptions ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'occupant des lieux dans lesquels l'administration fiscale a été autorisée, par une ordonnance du juge des libertés et de la détention, à procéder à une visite domiciliaire est en droit de contester l'ensemble des motifs fondant cette autorisation, même en l'absence de présomption de fraude invoquée contre lui, le premier président a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 7 février 2018, entre les parties, par le délégué du premier président de la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Paris ;

Condamne le directeur général des finances publiques aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la société Vivauto la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé en l'audience publique du dix-huit septembre deux mille dix-neuf et signé par M. Guérin, conseiller qui en a délilbéré, en remplacement de Mme Orsini.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Vivauto

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée D'AVOIR déclaré la société Vivauto non fondée à critiquer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Bobigny du 28 novembre 2016, D'AVOIR rejeté l'appel formé contre cette ordonnance, D'AVOIR confirmé cette ordonnance et D'AVOIR déclaré régulières les opérations de visite et de saisie effectuées le 1er décembre 2016 ;

AUX MOTIFS QUE la société Vivauto n'est pas fondée à invoquer une insuffisance de présomptions à l'encontre de la société de droit chypriote Nerima ; qu'il est constant que l'ordonnance du 28 novembre 2016 du juge des libertés et de la détention de Bobigny ne vise comme auteur présumé des agissements de fraude que la seule société de droit chypriote Nerima ; qu'il est établi que l'autorisation de visite et de saisie du juge des libertés et de la détention, prise sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, concerne tout local susceptible de contenir des éléments relatifs à la fraude présumée ; qu'ainsi, peuvent être visités tous locaux, même privés, susceptibles de contenir tout document en rapport avec les agissements prohibés présumés, des éléments comptables de personnes physiques ou morales pouvant être en relation d'affaires avec la société suspectée de fraude, des documents appartenant à des sociétés de groupe, des pièces pour partie utiles à la preuve des agissements présumés, des documents même personnels d'un dirigeant et associé, qui ne sont pas sans rapport avec la présomption de fraude révélée ; que, dès lors, la société Vivauto, personne morale, est une personne tierce par rapport à la société visée par des présomptions d'agissements frauduleux et ainsi n'est pas fondée à critiquer les présomptions d'agissements frauduleux concernant la société de droit chypriote Nerima ; que, par conséquent, en application du principe dégagé de manière constante par la jurisprudence de la haute juridiction, seules les personnes faisant l'objet des présomptions de fraude peuvent en critiquer l'insuffisance ; que les personnes morales et physiques dont les locaux ont été visités peuvent, par contre, former un recours contre les opérations de visite et de saisie ; que, dès lors, la société Vivauto, n'étant pas fondée à critiquer les présomptions de l'ordonnance contestée, sera déboutée de son appel ; qu'il n'y a pas lieu d'examiner les autres moyens soulevés qui ne viennent pas contrebattre à la fois l'article L. 16 B I in fine du livre des procédures fiscales et le principe général dégagé par la Haute Cour ;

ALORS, 1°), QUE le tiers dont les locaux ont fait l'objet d'une visite domiciliaire, qui subit un préjudice personnel du fait des opérations ainsi menées, a le droit d'interjeter appel de l'ordonnance par laquelle le juge des libertés et de la détention a autorisé cette visite ; qu'au soutien d'un tel recours, il est fondé à contester le bien-fondé de cette autorisation et, en particulier, à se prévaloir d'une insuffisance de présomptions de fraude à l'encontre de la société qui en est suspectée ; qu'en considérant que la société Vivauto n'était pas fondée à invoquer une insuffisance de présomptions à l'encontre de la société Nerima dès lors que seule cette dernière était suspectée de la fraude, le premier président a violé les articles L. 16 B du livre des procédures fiscales et 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS, 2°) et subsidiairement, QUE le tiers dont les locaux ont fait l'objet d'une visite domiciliaire, qui subit un préjudice personnel du fait des opérations ainsi menées, a le droit d'interjeter appel de l'ordonnance par laquelle le juge des libertés et de la détention a autorisé cette visite ; qu'au soutien d'un tel recours, il est recevable à invoquer tous les moyens qui ne sont pas propres à la personne suspectée de la fraude ; qu'à l'appui de son appel, la société Vivauto faisait valoir que l'ordonnance ayant autorisé la saisie était irrégulière à défaut de préciser les modalités et les moyens de contacter le juge des libertés et de la détention au cours des opérations de visite et de saisie ; qu'en considérant qu'il n'y avait pas lieu d'examiner ce moyen, pourtant relatif à la régularité de l'ordonnance ayant autorisé la saisie, le premier président a violé les articles L. 16 B du livre des procédures fiscales et 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS, 3°) et en tout état de cause, QUE la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation à intervenir de l'ordonnance ayant rejeté l'appel formé par la société Nerima contre l'ordonnance ayant autorisé la visite domiciliaire des locaux de la société Vivauto entraînera, par voie de conséquence, l'annulation de l'ordonnance attaquée, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire, en application de l'article 625 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18-12639
Date de la décision : 18/09/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 février 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 sep. 2019, pourvoi n°18-12639


Composition du Tribunal
Président : Mme Orsini (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.12639
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