LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 2327-15, L. 2323-12, L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail alors applicables ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par délibération du 4 mai 2017, le comité d'établissement de l'établissement Toulouse Wilson a désigné un expert comptable en vue d'être assisté dans la consultation sur la situation économique et financière de l'établissement pour l'année 2016 et le prévisionnel 2017 ;
Attendu que, pour annuler cette délibération, l'arrêt retient que le chef d'établissement FNAC Toulouse Wilson exécute la politique budgétaire et sociale définie par l'entreprise, uniformément au niveau national et que la preuve n'est pas rapportée d'une autonomie de l'établissement, de sorte que l'expertise demandée excédant les pouvoirs du chef d'établissement, le comité d'établissement n'était pas fondé à demander l'assistance d'un expert-comptable pour l'aider à analyser la situation économique, financière et sociale spécifique de l'établissement dans les prévisions de l'article L. 2325-35 du code du travail ;
Attendu cependant, d'abord, qu'aux termes de l'article L. 2327-15 du code du travail alors applicable, les comités d'établissement ont les mêmes attributions que les comités d'entreprise dans la limite des pouvoirs confiés au chef d'établissement ; que la mise en place d'un tel comité suppose que l'établissement dispose d'une autonomie suffisante en matière de gestion du personnel et de conduite de l'activité économique de l'établissement ;
Et attendu, ensuite, qu'en application des articles L. 2323-12, L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail alors applicables, le droit du comité central d'entreprise d'être assisté pour l'examen annuel de la situation économique et financière de l'entreprise ne prive pas le comité d'établissement du droit d'être assisté par un expert comptable afin de lui permettre de connaître la situation économique, sociale et financière de l'établissement dans l'ensemble de l'entreprise et par rapport aux autres établissements avec lesquels il doit pouvoir se comparer ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile , après avis donné aux parties ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 avril 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Rejette la demande formée par la société relais Fnac aux fins d'annulation de la délibération du comité d'établissement FNAC Toulouse Wilson du 4 mai 2017 désignant le cabinet Apex pour l'assister en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'établissement Toulouse Wilson pour l'année 2016 et le prévisionnel 2017 ;
Condamne la société Relais FNAC aux dépens devant la Cour de cassation et les juges du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Relais FNAC à payer, au comité d'entreprise relais FNAC Toulouse Wilson, la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze septembre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour le comité d'entreprise relais FNAC Toulouse Wilson.
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR annulé la délibération du comité d'établissement du 4 mai 2017 par laquelle avait été désigné un expert dans le cadre de la consultation sur la situation économique et financière pour l'année 2016 et le prévisionnel 2017 sur le fondement de l'article L.2327-35 du code du travail, et d'AVOIR en conséquence débouté le comité d'établissement de sa demande de reprise de la procédure d'assistance.
AUX MOTIFS QUE la SAS Relais Fnac a saisi le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés sur le fondement des articles L.2325-38, L.2325-40 et R.2325-7 du code du travail ; que l'article L.2325-38 dispose que : « Dans les entreprises d'au moins trois cents salariés, le comité d'entreprise peut recourir à un expert technique à l'occasion de tout projet important dans les cas énumérés aux articles L.2323-13 et L. 2323-14... » ; qu'aux termes du procès-verbal de réunion du comité d'établissement Fnac Wilson contesté du 4 mai 2017, il apparaît que la désignation d'un expert-comptable était sollicitée sur le fondement de l'article L.2325-35 et non l'article L.2325-38 du code du travail « pour l'assister au cours de l'année 2016 sur la consultation récurrente (art L.2323-6) : situation économique et financière de l'entreprise, la politique de recherche et de développement technologique et l'utilisation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (L 2323-12) » ; que l'article L 2325-3 I dispose que : « Le comité d'entreprise peut se faire assister d'un expert-comptable de son choix : 1° En vue de l'examen annuel des comptes prévu aux articles L. 2323-8 et L. 2323-9 ; 1° bis En vue de l'examen des orientations stratégiques de l'entreprise prévu à l'article L. 2323-7-1 ; 2° En vue de l'examen des documents mentionnés à l'article L. 2323-10, dans la limite de deux fois par exercice ; 3° Dans les conditions prévues à l'article L. 2323-20, relatif aux opérations de concentration ; 4° Dans les conditions prévues aux articles L. 2323-78 et suivants, relatifs à l'exercice du droit d'alerte économique ; 5° Lorsque la procédure de consultation pour licenciement économique d'au moins dix salariés dans une même période de trente jours, prévue à l'article L. 1233-30, est mise en oeuvre ; 6° Dans les conditions prévues aux articles L. 2323-21 à L. 2323-26-1 A, relatifs aux offres publiques d'acquisition ; que l'article L 2327-2 organise les attributions du CCE et du Comité d'établissement en ces termes: « Le comité central d'entreprise exerce les attributions économiques qui concernent la marche générale de l'entreprise et qui excèdent les limites des pouvoirs des chefs d'établissement ». Et l'article L 2327-15 dispose que « Le comité d'établissement a les mêmes attributions que le comité d'entreprise, dans la limite des pouvoirs confiés au ( chef de cet établissement. Le comité d'établissement est consulté sur les mesures d'adaptation des projets décidés au niveau de l'entreprise spécifiques à l'établissement et qui relèvent de la compétence du chef de cet établissement. Lorsqu'il y a lieu de consulter à la fois le comité central d'entreprise et un ou plusieurs comités d'établissement, l'avis rendu par chaque comité d'établissement est transmis au comité central d'entreprise dans des délais fixés par décret en Conseil d'Etat » ; qu'ainsi les Comités d'établissement ont les mêmes attributions que les Comités d'entreprise dans la limite des pouvoirs du chef d'établissement ; que la notion d'établissement suppose l'existence d'une autonomie en matière de gestion de personnel et de conduite de l'activité économique de l'établissement et dès lors que l'établissement est doté d'un comité d'établissement, cela suppose qu'il ait les moyens de fonctionner et d'exercer les attributions visées aux articles susvisés ; que toutefois, il appartient au juge de vérifier le niveau d'autonomie de l'établissement FNAC Toulouse Wilson ; que la SAS Relais Fnac soutient que l'établissement de Toulouse Wilson n'a aucune autonomie et que tout est centralisé au niveau de l'entreprise en matière financière, budgétaire et sociale (il n'existe pas de comptes annuels d'établissements mais seulement des comptes de l'entreprise tout entière, l'établissement n'a pas de comptabilité propre ; la construction du budget s'établit au niveau de la société et non pas au niveau des magasins ; le directeur d'établissement n'a donc aucun pouvoir sur l'établissement du budget et il ne peut engager seul de dépenses au-delà de 2500€, les recrutements de personnels sont tous validés au niveau national, même en matière d'intérim) et la politique de recherche et développement technique de l'entreprise ne se définit pas au niveau de l'établissement mais au niveau de l'entreprise elle-même et donc relève de la compétence du Comité Central d'Entreprise ; qu'elle justifie de cette gestion centralisée par la production de : la limite d'engagement des dépenses et investissements de M. H... [...] du magasin Fnac Wilson à Toulouse, à hauteur de 2 500 €, le courriel du 6 avril 2016 du DRH Exploitation France de l'entreprise indiquant que dorénavant en ce qui concerne le recours à l'intérim, chaque région représentée par son DRH doit faire remonter ses besoins hebdomadaires qui seront soumis à validation nationale, la note de cadrage du 17 juin 2016 visant la nécessité d'une validation nationale des recrutements en CDI ou des changements de poste ou mutations géographiques ; validation nationale des augmentations de rémunération liées à des mobilités cadre, des paiements VACA et primes exceptionnelles, le rapport du cabinet APEX expert-comptable du Comité central d'entreprise sur l'exercice 2015 qui démontre une analyse financière magasin par magasin dont celui de Toulouse Wilson ; qu'il n'est pas produit une délégation donnée au chef d'établissement qui aurait permis de mesurer l'étendue exacte des pouvoirs qui lui ont été confiés ; et il n'apparaît pas à la lecture de la décision de première instance que cette pièce ait été produite aux débats ; qu'il résulte de ces développements que le chef d'établissement Fnac Toulouse Wilson exécute la politique budgétaire et sociale définie par l'entreprise, uniformément au niveau national et que la preuve n'est pas rapportée d'une autonomie de l'établissement, de sorte que l'expertise demandée excédant les pouvoirs du chef d'établissement, le comité d'établissement n'était pas fondé à demander l'assistance d'un expert-comptable pour l'aider à analyser la situation économique, financière et sociale spécifique de l'établissement dans les prévisions de l'article L 2325-35 du code du travail.
1° ALORS d'une part QU'aux termes de l'article L.2327-15 du code du travail, les comités d'établissement ont les mêmes attributions que les comités d'entreprise dans la limite des pouvoirs confiés au chef d'établissement ; que la mise en place d'un tel comité suppose que cet établissement dispose d'une autonomie suffisante en matière de gestion du personnel et de conduite de l'activité économique de l'établissement ; que la cour d'appel a jugé que la notion d'établissement supposait l'existence d'une autonomie en matière de gestion de personnel et de conduite de l'activité économique de l'établissement, tout en ajoutant qu'il appartenait au juge de vérifier le niveau d'autonomie de l'établissement ; qu'en subordonnant le droit du comité d'établissement à l'assistance d'un expert-comptable pour l'examen annuel des comptes à l'autonomie de l'établissement distinct concerné, la cour d'appel a statué par des motifs tout aussi erronés qu'inopérants, en violation des articles L.2327-2 et L.2327-15 du code du travail.
2° ALORS en tout état de cause à cet égard QU'aux termes de l'article L.2327-15 du code du travail, les comités d'établissement ont les mêmes attributions que les comités d'entreprise dans la limite des pouvoirs confiés au chef d'établissement ; que la mise en place d'un tel comité suppose que cet établissement dispose d'une autonomie suffisante en matière de gestion du personnel et de conduite de l'activité économique de l'établissement ; qu'il appartient à l'employeur de le doter des moyens d'exercer ses attributions et le cas échéant d'en justifier ; qu'en annulant la délibération litigieuse, au motif qu'il n'était pas produit une délégation qui aurait permis de mesurer l'étendue exacte des pouvoir conférés au chef d'établissement, la cour d'appel a fait peser sur le comité d'entreprise la charge de la preuve, en violation des articles L.2327-2 et L.2327-15 du code du travail, ensemble l'article 1315 devenu 1353 du code civil.
3° ALORS d'autre part QU'en application des articles L.2325-35 et L.2325-36 du code du travail, le droit du comité central d'entreprise d'être assisté pour l'examen annuel des comptes de l'entreprise, dans les conditions prévues par l'article L. 2323-8 du code du travail, ne prive pas le comité d'établissement du droit d'être assisté par un expert-comptable chargé de lui fournir tous éléments d'ordre économique social et financier nécessaires à la compréhension des documents comptables de l'établissement et à l'appréciation de sa situation ; qu'en annulant la délibération litigieuse au vu du rapport de l'expert-comptable du comité central d'entreprise comprenant une analyse financière magasin par magasin, la cour d'appel a violé les articles L.2325-35 et L.2325-36 du code du travail.