LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu les articles L. 722-2 et L. 722-4 du code de la consommation ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Crédit immobilier de France Centre Ouest, aux droits de laquelle vient la société Crédit immobilier de France développement (la banque), a fait délivrer un commandement de payer valant saisie immobilière à M. F... et Mme M... puis les a fait assigner à comparaître à une audience d'orientation ; qu'une commission de surendettement ayant déclaré recevable, par décision du 11 décembre 2014, la demande de Mme M... tendant au traitement de sa situation financière, un juge de l'exécution a constaté la suspension de la procédure de saisie immobilière pour une durée de deux ans à compter de cette date et dit que la procédure pourra être reprise à la demande de la partie la plus diligente ; que par conclusions déposées au greffe le 12 avril 2017 et signifiées le 13 avril 2017 à M. F..., la banque a demandé au juge de l'exécution de constater la caducité du plan de surendettement de Mme M... et d'ordonner la vente forcée ; que par décision du 13 avril 2017, une commission de surendettement a déclaré recevable la demande de M. F... tendant au traitement de sa situation financière ; qu'un jugement d'orientation, réputé contradictoire, du 6 juillet 2017, a ordonné la vente forcée ;
Attendu que pour confirmer le jugement en toutes ses dispositions, l'arrêt relève que M. F... a déposé une demande de surendettement le 2 février 2017, au moment même où était prononcée la caducité du plan de surendettement de son épouse, alors qu'il n'a formé aucune offre de paiement à la banque et continue d'occuper sans frais l'immeuble financé par ce créancier, qu'il ne s'est pas présenté à l'audience pour faire part au juge de l'existence de cette demande et retient qu'il ne peut valablement prétendre que la banque aurait dissimulé au juge la réelle situation du dossier pour obtenir un jugement, puisqu'il lui incombait de faire valoir son argumentation ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte des productions que M. F... se prévalait, en cause d'appel, de la décision de recevabilité, qu'il produisait, rendue le 13 avril 2017 par une commission de surendettement, avant que la vente forcée ne fût ordonnée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Condamne la société Crédit immobilier de France développement aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à M. F... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé et prononcé en l'audience publique du cinq septembre deux mille dix-neuf par Mme Brouard-Gallet, conseiller doyen, non empêchée, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile et par Mme Rosette, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour M. F....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement ayant ordonné la reprise des poursuites, fixé la créance à 132.751,13 euros à la date du 20 août 2014, ordonné qu'il soit procédé à la vente des biens et droits immobiliers des consorts F... sur la mise à prix de 65.000 euros, fixé l'adjudication au 19 octobre 2017 et autorisé le Crédit Immobilier de France Développement à opérer les formalités requises ;
Aux motifs propres que Z... M... , divorcée F..., s'est fait représenter à l'audience et n'a déposé aucune écriture, de sorte que son appel est non soutenu ; que Q... F... ne peut valablement se plaindre de ce que le jugement du 21 mai 2015, qui avait été rendu en la faveur des débiteurs et qui ne lui faisait aucun grief, ne lui aurait pas été signifié ; qu'il est d'autant moins recevable à invoquer cette absence de signification, puisqu'il en a invoqué les termes en prétendant que le délai qui lui avait été laissé pour vendre le bien n'était pas expiré ; que Q... F... avait été destinataire d'une assignation à l'audience d'orientation devant le juge de l'exécution, qui lui décrivait les possibilités qui lui étaient offertes ; que l'article R.311-6 du code des procédures civiles d'exécution dispose que toute contestation ou demande incidente est formée par le dépôt au greffe de conclusions signées d'un avocat, que la communication des conclusions et des pièces entre avocats est faite dans les conditions prévues à l'article 815 du code de procédure civile, et que la communication des conclusions est faite par signification au débiteur qui n'a pas constitué avocat ; que la signification faite le 13 avril 2017 contient les pièces visées et l'indication du jour et de l'heure de l'audience, dont Q... F... ne peut contester qu'il en a eu connaissance puisqu'il avait sollicité un renvoi de l'audience qui lui a été refusé ; qu'il ne s'est pas présenté à l'audience pour faire part au juge de l'existence d'une demande de surendettement, qui devait faire suite à la procédure de surendettement, devenue caduque, de son épouse ; que le Crédit Immobilier de France Développement avait pourtant mentionné dans ses écritures que Z... F... n'avait pas respecté ses engagements ; que le Crédit Immobilier de France avait indiqué, d'abord par un courrier qui n'a pas été retiré, puis par voie d'huissier, qu'il était reproché à Z... F... de ne pas respecter son plan en ne réglant pas les primes d'assurance mensuelles du prêt ; que le créancier avait ensuite demandé à Z... F... de justifier de la mise en vente du bien, ce qu'elle n'a pas fait, pas plus qu'elle n'a régularisé son retard de paiement ; que Q... F... a déposé une demande de surendettement le 2 février 2017, au moment même où était prononcée la caducité du plan de surendettement de son épouse, alors qu'il n'a formé aucune offre de paiement au Crédit Immobilier de France Développement et continue d'occuper sans frais l'immeuble financé par le créancier ; que Q... F... sollicite aujourd'hui l'autorisation de procéder à la vente amiable de son bien, alors qu'il n'avait pas formulé cette demande devant le premier juge ; qu'il ne peut vraisemblablement prétendre que le Crédit Immobilier de France Développement aurait dissimulé au juge la réelle situation du dossier pour obtenir un jugement, puisque c'était à lui de faire valoir son argumentation et non à son adversaire ; que le premier juge a relevé précisément qu'il n'était saisi d'aucune demande de vente amiable, et observait que les débiteurs ne démontraient pas avoir respecté les prévisions du plan de surendettement et en a conclu à bon droit que le Crédit Immobilier de France Développement pouvait valablement se prévaloir de la caducité du plan de surendettement et reprendre les poursuites ; qu'il y a lieu de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
Et aux motifs adoptés qu'à titre liminaire, il y a lieu de préciser qu'il ne peut pas être fait droit à la demande de renvoi formé par monsieur F... suivant courrier reçu le 20 avril 2017 ; qu'en effet, à ce stade de la procédure, les débiteurs devaient justifier de mandats de vente du bien immobilier conformément aux prévisions du plan de surendettement ; qu'un tel document n'est pas annexé au courrier de Monsieur F... ; que madame M... , épouse F..., une nouvelle fois, n'a pas tenu ses engagements ; que le Crédit Immobilier de France Développement, venant aux droits du Crédit Immobilier Centre Ouest, a demandé à reprendre les poursuites ; que la demande paraît justifiée ; qu'il y sera fait droit ; qu'aux termes de l'article R.322-15 du code des procédures civiles d'exécution « (
) le juge de l'exécution (
) vérifie que les conditions des articles L.311-2, L.311-4, L.311-6 du code des procédures civiles d'exécution sont réunies, statue sur les éventuelles contestations (
) » ; que l'article L.311-2 du code des procédures civiles d'exécution énonce que « tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière dans les conditions fixées par le présent livre et par les dispositions qui ne lui sont pas contraires du livre 1er » ; que l'article L.311-4 du code des procédures civiles d'exécution dispose que « lorsque la poursuite est engagée en vertu d'une décision de justice exécutoire par provision, la vente forcée ne peut intervenir qu'après une décision définitive passée en force de chose jugée (
) » ; qu'en l'espèce, le Crédit Immobilier de France Développement, venant aux droits du Crédit Immobilier Centre Ouest, agit en vertu d'un commandement de payer valant saisie immobilière du 12 septembre 2014 régulièrement publié au sevice de la publicité foncière de Montargis le 10 octobre 2014, volume 2014, numéro 44 ; que le titre exécutoire sur lequel est poursuivie la saisie est un acte notarié reçu par Maître D..., notaire à Montargis, du 29 avril 2005 revêtu de la formule exécutoire ; que la créance en elle-même n'est pas contestée par les débiteurs ; que par ailleurs, l'ordonnance rendue le 15 juin 2016 par le tribunal d'instance de Montargis prévoit qu'à défaut de paiement d'une seule échéance, le plan de surendettement sera caduc 15 jours après une mise en demeure restée infructueuse ; que ledit plan prévoyait le paiement à échéance des primes d'assurance ; qu'il ressort du courrier de mise en demeure adressé le 8 décembre 2016 à la défenderesse que la dette s'élevait à hauteur de 237,20 euros au titre des primes mensuelles ; que conformément au second alinéa de l'article 1315 dans sa rédaction applicable au présent litige, il revenait à madame F... de justifier de la régularisation de la situation dans le délai imparti ; qu'à défaut, il convient de constater la caducité du plan de surendettement ; que les mesures d'exécution peuvent donc reprendre à l'égard de madame F... ; qu'aux termes de l'article R.322-15 du code susmentionné, « le juge de l'exécution (
) détermine les modalités de poursuite de la procédure, en autorisant la vente amiable à la demande du débiteur ou en ordonnant la vente forcée(
) » ; que l'alinéa 2 de l'article susmentionné énonce que « lorsqu'il autorise la vente amiable, le juge s'assure qu'elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur » ; que madame M... , épouse F..., monsieur Q... F... n'étant pas présents à l'audience d'orientation, ils n'ont pu solliciter la vente amiable de leur bien ; que le Crédit Immobilier de France Developpement a demandé la vente forcée de celui-ci ; que par ailleurs, les défendeurs ne démontrent pas avoir respecté les prévisions du plan de surendettement ; que le Crédit Immobilier de France peut donc valablement se prévaloir de la caducité du plan de surendettement et sollicite à bon droit la reprise des poursuites ; que compte tenu de ces éléments, il convient d'ordonner la vente forcée du bien, en fixant la date d'adjudication dans un délai compris entre deux et quatre mois ;
1°) Alors que nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ; qu'en vertu de ce principe, une partie ne peut soumettre au juge une prétention inconciliable avec la position adoptée antérieurement, à peine d'irrecevabilité de ses demandes ; que le Crédit Immobilier de France Développement ne pouvait, après avoir adressé à monsieur F... un courrier l'informant avoir mis en place un moratoire provisoire jusqu'à réception du plan définitif de surendettement, défendre la position contraire devant le juge de l'exécution en sollicitant la vente forcée du bien immobilier de monsieur F... ; qu'en ordonnant néanmoins cette vente forcée à la demande du Crédit Immobilier de France Développement, la cour d'appel a violé le principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui, ensemble les dispositions de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°) Alors que le juge est tenu de respecter et de faire respecter la loyauté des débats ; que monsieur F... avait souligné que la demande du Crédit Immobilier de France Développement tendant à la vente forcée de son bien immobilier était empreinte de déloyauté dès lors qu'avant l'audience d'orientation fixée au 4 mai 2017, la banque l'avait informé, par lettre du 27 avril 2017, qu'à la suite de la recevabilité de son dossier à la commission de surendettement des particuliers, elle avait mis en place un moratoire provisoire jusqu'à réception du plan définitif de surendettement, ce qui avait conduit monsieur F..., fort de cette information et en raison d'une blessure à la jambe, à demander un renvoi, le juge de l'exécution devant nécessairement prendre en compte la décision de recevabilité de son dossier par la commission de surendettement des particuliers ; qu'en se bornant à énoncer que monsieur F... avait déposé une demande de surendettement le 2 février 2017, au moment où était prononcée la caducité du plan de surendettement de son épouse, mais qu'il n'avait formé aucune offre de paiement à la banque sans rechercher, comme elle y était invitée (assignation à jour fixe, p. 4), si la banque avait fait preuve de déloyauté en omettant d'indiquer au juge de l'exécution l'existence de la décision de la commission de surendettement et la mise en place d'un moratoire provisoire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 10, alinéa 1er, du code civil et 3 du code de procédure civile ;
3°) Alors que le juge ne peut relever d'office un moyen sans inviter les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant, pour ordonner la vente forcée du bien immobilier, que monsieur F... sollicitait l'autorisation de procéder à la vente amiable de son bien, alors qu'il n'avait pas formulé cette demande devant le premier juge, la cour d'appel, qui a ainsi écarté la demande de la vente amiable, sans provoquer les explications des parties sur ce point, a violé l'article 16 du code de procédure civile.