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05/09/2019 | FRANCE | N°18-13364

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 05 septembre 2019, 18-13364


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 853 du code de procédure civile ;

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que Mme M..., représentée par le GIE Civis, assureur de protection juridique, a fait délivrer une assignation à comparaître devant un tribunal de commerce à la société EOLH et au mandataire liquidateur nommé suite à la liquidation judiciaire de celle-ci, aux fins d'obtenir paiement d'une certaine somme en principal, outre le paiem

ent de dommages-intérêts, et de voir fixer sa créance au passif de la société ;...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 853 du code de procédure civile ;

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que Mme M..., représentée par le GIE Civis, assureur de protection juridique, a fait délivrer une assignation à comparaître devant un tribunal de commerce à la société EOLH et au mandataire liquidateur nommé suite à la liquidation judiciaire de celle-ci, aux fins d'obtenir paiement d'une certaine somme en principal, outre le paiement de dommages-intérêts, et de voir fixer sa créance au passif de la société ;

Attendu que, pour déclarer nulle l'assignation, le tribunal de commerce a relevé que le mandat confié au GIE Civis était un mandat ad litem au vu des termes de l'assignation, des mandats spéciaux et des déclarations de M. E..., salarié du GIE Civis, que l'article L. 127-1 du code des assurances ne dérogeait pas à l'article 4 de la loi du 31 décembre 1971 et qu'il en résultait que le mandat ad litem inclus dans l'acte introductif avait été donné en violation de la loi applicable ;

Qu'en statuant ainsi, alors que Mme M... avait donné un pouvoir spécial aux fins de la représenter devant le tribunal de commerce à M. E..., peu important qu'il soit salarié du GIE Civis, le tribunal de commerce a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 16 janvier 2018, entre les parties, par le tribunal de commerce de Bobigny ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de commerce de Créteil ;

Condamne M. N..., en qualité de mandataire liquidateur de la société EOLH, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme M... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé et prononcé en l'audience publique du cinq septembre deux mille dix-neuf par Mme Brouard-Gallet, conseiller doyen, non empêchée, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile et par Mme Rosette, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour Mme M...

Le moyen reproche à la décision attaquée d'avoir : déclaré nulle l'assignation introductive de l'instance

Aux motifs que sur la recevabilité en général : seul l'avocat en robe est dispensé de justifier de son mandat ; le tribunal de commerce est une juridiction sans représentation obligatoire ; il en découle qu'une partie peut se faire représenter à l'audience par un mandataire spécial , pour autant que ledit mandataire spécial justifie de son identité et d'un pouvoir spécial pouvoir donc établi pour l'affaire et l'instance dont s'agit et précisant qu'il est valable devant la juridiction ; la nullité d'une assignation est du seul ressort du juge et non du greffier et qu'il ne ferait donc pas sens d'exiger à peine de nullité que le pouvoir spécial soit fourni au moment du placement mais que ce dernier peut être régularisé lors de la première audience de mise en état ; le tribunal estime qu'un tel pouvoir spécial n'est pas sous-déléguable, ainsi qu'il résulte de sa jurisprudence quasi-constante refusant par exemple à un élève avocat n'ayant pas prêté serment et disposant d'un mandant donné par le cabinet ou tel avocat du cabinet de représenter ad litem une partie cliente du cabinet ; que lorsque la même personne intervient régulièrement et sans explication « en son seul nom personnel » comme mandataire spécial de diverses personnes dans des contentieux différents, le tribunal est fondé à craindre qu'il s'agisse en réalité de l'exercice à titre habituel et professionnel du mandat ad litem, et donc de l'exercice illégal de l'activité d'avocat ; que le tribunal estime que les dispositions de la loi de 1971 sont des dispositions protectrices de l'ordre public, en ce qu'elles garantissent au justiciable représenté à titre onéreux à la fois la représentation par un professionnel titulaire du CAPA, inscrit à un barreau et justifiant d'une assurance de responsabilité civile au cas où il causerait dans le cadre de ce mandat ad litem un dommage à son client ; sur la recevabilité au cas particulier ; en se plaçant dans l'hypothèse où Monsieur E... serait le dernier maillon d'une chaîne de sous délégation reliant Madame M..., (la MACSF) le GIE Civis, Monsieur I..., Monsieur R..., Monsieur E... ; que l'article 414 du code de procédure civile dispose : « une partie n'est admise à se faire représenter que par une seule des personnes, physiques ou morales habilitées par la loi » que la différence entre les deux mandats est rappelée par la Cour de cassation ( chambre civile 1 12 juin 2012, 11-14470) qui a notamment précisé : « vu les articles 1994 du code civil et 414 du code de procédure civile ; attendu que le mandat d'agir en justice distinct du mandat de représentation, permet au mandataire de se substituer un tiers lorsque la loi ou la convention n'en disposent pas autrement » ; qu'il s'agit ici d'un mandat ad litem ( à l'instance) et non d'un mandat ad agendum ( à l'action) ; qu'une personne morale est nécessairement spécialisée ; que compte-tenu de la nécessaire spécialisation du GIE CIVIS :- ou bien le mandat ad litem confié au GIE CIVIS n'entre pas dans son champ professionnel et est susceptible de nullité ; -ou bien le mandat ad litem est exercé à titre professionnel et habituel par le GIE CIVIS et contrevient donc à a loi du 1971, le texte « spécial » du code des assurances n'indiquant pas déroger à l'article 4 de la loi de 1971 dont les dérogations sont explicites et rares » en se plaçant dans l'hypothèse où Monsieur E... serait mandataire spécial à titre personnel de Madame M... ainsi qu'il résulte d'un autre des pouvoirs spéciaux fournis, que le pouvoir n'est pas stipulé au profit de Monsieur E... mais au profit de Monsieur E... salarié du GIE CIVIS ; que Monsieur E... ne cache nullement agir d'ordre et pour compte de son employeur et avec sa garantie le cas échéant ; en conséquence un tel pouvoir n'est qu'un contournement procédural de la difficulté que créerait un mandat ad litem donné au GIE CIVIS et qu'il appartient au tribunal de restituer aux faits et actes qui lui sont soumis leur véritable qualification ; en conséquence : le tribunal constatera de ce qui précède : -qu'il s'agit en réalité d'un mandat ad litem confié au GIE CIVIS ainsi qu'il résulte des termes de l'assignation, des termes des mandats spéciaux et des déclarations de Monsieur E... ; que ni le texte ni l'interprétation qui en est faite n'indiquent que le législateur a entendu, en rédigeant l'article L 127-1 du code des assurances déroger à l'article 4 de la loi 71-1130 du 31 décembre 1971 ; qu'en conséquence le mandat ad litem inclus dans l'acte introductif d'instance est donné en violation de la loi applicable ; que ce mandat encourt la nullité ; que compte tenu de l'article 853 du code de procédure civile, qui dispose : « les parties se défendent elles-mêmes ; elles ont la faculté de se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix ; le représentant s'il n'est avocat doit justifier d'un pouvoir spécial » qu'en conséquence l'acte introductif de la présente instance sera déclaré nul ;

1) Alors que la mission de l'assureur de protection juridique est définie par l'article L du code des assurances comme « une opération consistant, moyennant le paiement d'une prime ou d'une cotisation préalablement convenue à prendre en charge les frais de procédure ou à fournir des services découlant de la couverture d'assurance, en cas de différend ou de litige opposant l'assuré à un tiers, en vue notamment de défendre ou représenter en demande l'assuré dans une procédure civile, pénale administrative ou autre ou contre une réclamation dont il est l'objet ou d'obtenir réparation à l'amiable du dommage subi. » ; qu'ainsi la mission de l'assureur de protection juridique définie par la loi lui donne la possibilité de représenter ou d'assister ses assurés dans les procédures sans représentation obligatoire et notamment devant le tribunal de commerce ; qu'en décidant que ce texte ne dérogeait pas à l'article 4 de la loi 71-1130 du 31 décembre 1971 selon lequel les avocats disposent de l'exclusivité de la représentation en justice, de sorte que le mandat de représentation donné par un assuré à l'assureur de protection juridique de le représenter devant le tribunal de commerce était nul, le tribunal a violé l'article L 127-1 du code des assurances, l'article 4 de la loi du 31 décembre 1971 et l'article 853 du code de procédure civile

2) Alors que devant le tribunal de commerce les parties se défendent elles-mêmes ; elles ont la faculté de se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix ; le représentant s'il n'est avocat doit justifier d'un pouvoir spécial ; que dans ces conditions, un pouvoir spécial donné nominativement à une personne, salariée d'un assureur de protection d'assurance juridique l'autorise à assister ou représenter l'assuré de son employeur ; que le tribunal qui a énoncé que le pouvoir spécial de représentation au profit de Monsieur E... salarié du GIE Civis était un mandat ad litem confié au GIE Civis lequel était donné en violation de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1971, a violé les dispositions de l'article du code de procédure civile


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-13364
Date de la décision : 05/09/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Bobigny, 16 janvier 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 05 sep. 2019, pourvoi n°18-13364


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP de Nervo et Poupet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.13364
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