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21/08/2019 | FRANCE | N°19-84890

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 août 2019, 19-84890


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. W... P...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de TOULOUSE, en date du 12 juillet 2019, qui a autorisé sa remise aux autorités judiciaires belges en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 3 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 593, 695-24, 2°, 695-38, et 728-31 du code de procédure pénale ;
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. W... P...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de TOULOUSE, en date du 12 juillet 2019, qui a autorisé sa remise aux autorités judiciaires belges en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 3 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 593, 695-24, 2°, 695-38, et 728-31 du code de procédure pénale ;

“en ce que l'arrêt a ordonné la mise à exécution du mandat d'arrêt européen décerné le 8 mai 2019 par le parquet fédéral de Belgique à l'encontre de M. P... aux fins d'arrestation et de remise aux autorités du Royaume de Belgique dans le cadre de l'exécution de la condamnation prononcée le 24 octobre 2018 par la 14ème chambre de la cour d'appel de Bruxelles, le condamnant à une peine de cinq ans d'emprisonnement, et sa remise aux autorités requérantes,

“1°) alors que la remise d'une personne aux autorités judiciaires d'un Etat, en exécution d'un mandat d'arrêt européen, doit être refusée si elle porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ; qu'après avoir constaté que M. P... était mère de six enfants dont quatre mineurs, tous domiciliés au domicile familial, la chambre de l'instruction ne pouvait, sans méconnaître le texte conventionnel précité, ou mieux s'expliquer notamment sur le fait que Mme V..., son épouse et mère des enfants, était elle aussi sous le coup d'un mandat d'arrêt européen, retenir que la remise aux autorités belges ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

“2°) alors que lorsque la personne recherchée sur mandat d'arrêt européen pour l'exécution d'une peine privative de liberté justifie qu'elle est de nationalité française ou réside régulièrement de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans sur le territoire national et fait valoir, pour s'opposer à sa remise, que la décision est exécutoire sur le territoire français en application du deuxième de ces articles, la chambre de l'instruction doit vérifier si l'Etat requérant envisage de formuler une demande aux fins de reconnaissance et d'exécution de la condamnation sur le territoire français ou si le procureur de la République entend susciter une telle demande en application de l'article 728-34 du code de procédure pénale ; qu'en affirmant, bien qu'elle ait été saisie d'une demande en ce sens, qu'il n'y a pas lieu de procéder à cette vérification, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée des textes précités ;

“3°) alors que faute d'avoir recherché s'il n'existait pas de raisons humanitaires sérieuses justifiant qu'il soit temporairement sursis à la remise de M. P..., invalide à plus de 80 % pour avoir été victime d'un infarctus du myocarde en 2011, d'un AVC en 2013 et d'un nouvel AVC le 25 mai 2019, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ; ”

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles 593, 695-24 et 728-31 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il se déduit du deuxième de ces textes que, lorsque la personne recherchée sur mandat d'arrêt européen pour l'exécution d'une peine privative de liberté justifie qu'elle est de nationalité française ou réside régulièrement de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans sur le territoire national et fait valoir, pour s'opposer à sa remise, que la décision est exécutoire sur le territoire français en application du troisième de ces articles, la chambre de l'instruction doit vérifier si l'Etat requérant envisage de formuler une demande aux fins de reconnaissance et d'exécution de la condamnation sur le territoire français ou si le procureur de la République entend susciter une telle demande en application de l'article 728-34 du code de procédure pénale ;

Qu'aux termes du premier texte, tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. P..., de nationalité française et domicilié en France, condamné le 24 octobre 2018 par la cour d'appel de Bruxelles à la peine de cinq ans d'emprisonnement pour escroquerie, faux et usage de faux, abus de biens sociaux et vol, a fait l'objet d'un mandat d'arrêt européen délivré le 8 mai 2019 par les autorités judiciaires belges aux fins d'exécution du reliquat de la peine résultant de cette décision ; que ce mandat a été notifié le 1er juillet 2019 par le procureur général près la cour d'appel de Toulouse à M.P..., lequel, ayant comparu devant la chambre de l'instruction de ladite cour, a sollicité l'exécution en France de la condamnation étrangère prononcée, en application de l'article 695-24 2° du code de procédure pénale ;

Que pour, rejeter cette demande et ordonner la remise de l'intéressé aux autorités judiciaires belges, la chambre de l'instruction retient que l'ingérence dans la vie privée et familiale de M. P..., du fait de l'exécution du mandat d'arrêt, est proportionnée au but légitime recherché et qu'il n'y a pas lieu de vérifier si l'Etat requérant envisage de formuler une demande aux fins de reconnaissance et d'exécution de la condamnation sur le territoire français ou si le procureur de la République entend solliciter une telle demande en application de l'article 728-34 du même code ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, après avoir constaté que M. P... était de nationalité française et qu'il sollicitait devant elle l'exécution en France de la condamnation prononcée, la chambre de l'instruction, sans rechercher auprès des autorités belges si elles souhaitaient que le reliquat de peine soit exécuté sur leur territoire ou en France, n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Toulouse, en date du 12 juillet 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Toulouse, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Toulouse et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Castel, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Stephan, conseiller rapporteur, M. Bellenger, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Guichard ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 19-84890
Date de la décision : 21/08/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Toulouse, 12 juillet 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 21 aoû. 2019, pourvoi n°19-84890


Composition du Tribunal
Président : M. Castel (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Zribi et Texier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:19.84890
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