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11/07/2019 | FRANCE | N°18-17419

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 juillet 2019, 18-17419


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Reçoit l'intervention de l'Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article R. 222-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Attendu qu'à peine d'irrecevabilité, la requête du préfet est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles et qu'il ne peut être suppléé à l'absence du dépôt de ces pièces, sauf s'il est justifié de l'impossibilité de les joindre à la requête, par leur se

ule communication à l'audience ;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier pr...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Reçoit l'intervention de l'Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article R. 222-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Attendu qu'à peine d'irrecevabilité, la requête du préfet est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles et qu'il ne peut être suppléé à l'absence du dépôt de ces pièces, sauf s'il est justifié de l'impossibilité de les joindre à la requête, par leur seule communication à l'audience ;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, et les pièces de la procédure, que, le 21 mars 2018, quatre-vingt-seize passagers d'un bateau à destination des îles de l'archipel des Comores ont été renvoyés vers l'île de Mayotte en application d'un arrêté du ministre de l'intérieur de l'Union des Comores interdisant aux compagnies maritimes et aériennes un tel transport des personnes de nationalité comorienne, sans leur consentement ; que le 22 mars 2018, la police aux frontières leur a notifié les décisions de refus d'entrée, et les a placés en zone d'attente ; que le 24 mars suivant, le préfet de Mayotte a saisi le juge des libertés et de la détention de soixante-douze requêtes afin que la prolongation du maintien en zone d'attente soit prononcée, l'une de ces requêtes concernant M. Z... F..., de nationalité comorienne ;

Attendu que, pour déclarer la requête du préfet recevable, l'ordonnance relève que la production d'une copie du registre prévu à l'article L. 221-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est de nature à permettre une régularisation de la situation à l'audience ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la copie du registre constitue une pièce justificative utile au sens de l'article R. 222-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le premier président a violé les textes susvisés ;

Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle accorde le bénéfice de l'aide juridictionnelle, l'ordonnance rendue le 27 mars 2018, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille dix-neuf et signé par lui et par Mme Randouin, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. Z... F...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'ordonnance attaquée d'avoir infirmé l'ordonnance déférée, d'avoir écarté le moyen tiré de l'irrecevabilité de la requête initiale et d'avoir autorisé le maintien en zone d'attente de Monsieur F... pour une durée ne pouvant être supérieure à huit jours, à compter de l'expiration du délai initial de quatre jours ;

Aux motifs que « il résulte des dispositions de l'article R 222-1 du CESEDA qu'à peine d'irrecevabilité la requête tendant à l'autorisation de maintien en zone d'attente au -delà de quatre jours, est motivée, datée et signée, et accompagnée notamment d'une copie du registre prévu à l'article L 221-3 du CESEDA.

Il est constant que la copie de ce registre n'accompagnait pas la requête initiale.

Cependant, en application des dispositions de l'article 126 du code de procédure civile, dans le cas où la situation donnant lieu à la fin de non recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue.

Dans le cadre de la présente procédure, la production d'une copie de ce registre étant l'un des éléments permettant au juge de vérifier l'exercice effectif des droits reconnus à l'étranger, cette production pendant le cours de l'instance initiale ou de l'instance d'appel est de nature à permettre une régularisation de la situation donnant lieu à fin de non recevoir.

Or, le directeur départemental de la police aux frontières a produit, devant la cour, la copie du registre prévu à l'article L 221-3 en sa partie concernant M. Z... F....

Ce registre porte les mentions prévues par l'article précité.

Il convient donc d'écarter ce moyen d'irrecevabilité. » ;

Alors qu'à peine d'irrecevabilité, la requête de l'autorité administrative en prolongation du maintien en zone d'attente de l'étranger est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, dont notamment un registre mentionnant l'état civil de l'intéressé et la date et l'heure auxquelles la décision de maintien en zone d'attente lui a été notifiée, sur lesquelles le greffier est tenu d'apposer un timbre indiquant la date et l'heure de la réception ; que la requête et les pièces qui y sont jointes sont, dès leur arrivée au greffe, mises à la disposition de l'avocat de l'étranger, et peuvent être également consultées, avant l'ouverture des débats, par l'étranger lui-même, assisté, le cas échéant, par un interprète s'il ne connait pas suffisamment la langue française ; qu'en constatant que la copie du registre prévu à l'article L. 221-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'accompagnait pas la requête initiale, tout en jugeant que celle-ci était recevable, le conseiller délégué a violé les articles R. 222-2 et R. 552-7 du même code.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'ordonnance attaquée d'avoir infirmé l'ordonnance déférée et d'avoir autorisé le maintien en zone d'attente de Monsieur F... pour une durée ne pouvant être supérieure à huit jours, à compter de l'expiration du délai initial de quatre jours ;

Aux motifs que « aux termes des dispositions de l'article L 222-1 du CESEDA, le maintien en zone d'attente au-delà de quatre jours à compter de la décision initiale peut être autorisé, par le juge des libertés et de la détention, statuant sur l'exercice effectif des droits reconnus à l'étranger, pour une durée qui ne peut être supérieure à huit jours.

Il résulte de ces dispositions qu'il incombe au juge des libertés et de la détention de vérifier que la personne maintenue en zone d'attente est mise en mesure d'exercer effectivement les droits qui lui sont reconnus, le maintien dans cette zone ne pouvant intervenir que si tel est le cas.

En l'espèce, pour rejeter la demande d'autorisation de maintien en zone d'attente, le premier juge a relevé que M. Z... F... n'a pas été informé du droit à l'assistance d'un interprète, ni de celui de pouvoir consulter un médecin et n'avait donc as été mis en mesure d'exercer ces droits.

Cependant, il résulte des explications apportées à l'audience par le directeur départemental de la police aux frontières et du document produit par celui-ci, qu'est présenté à chaque étranger en zone d'attente un avis des droits en français, shimaoré et malgache, mentionnant que la personne peut être assistée d'un conseil, d'un interprétariat, d'un médecin, communiquer avec toute personne de son choix et quitter à tout moment la zone d'attente pour toute destination située hors du territoire de la république française ; qu'une fois que la personne a pris connaissance de ce document dans la langue qu'elle comprend, elle signe sur le registre en avoir été informée et pris connaissance ; que la copie du registre produite aux débats mentionne effectivement qu'il a été procédé à cette notification, même si en l'espèce, M. Z... F... a refusé de signer ; s'il est vrai qu'il aurait été plus simple de faire signer directement le document contenant notification des droits en en laissant copie à l'intéressé, il n'empêche que ces éléments démontrent suffisamment que les droits susvisés ont été notifiés à M. Z... F....

Enfin, si le document susvisé ne mentionne pas que M. Z... F... a été informé des droits qu'il est susceptible d'exercer en matière de demande d'asile, il convient de rappeler qu'aux termes des dispositions de l'article L 222-8 du CESEDA, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de maintien en zone d'attente que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.

En l'espèce, il n'est ni justifié, ni même allégué que cette omission aurait porté atteinte aux droits de M. Z... F....

Il convient ainsi d'infirmer la décision déférée, sauf en ce qu'elle a accordé l'aide juridictionnelle à M. Z... F..., et statuant à nouveau, d'autoriser le maintien en zone d'attente de celui-ci pour une durée ne pouvant être supérieure à huit jours, à compter de l'expiration du délai initial de quatre jours » ;

Alors que les droits de l'étranger maintenu en zone d'attente lui sont notifiés dans les meilleurs délais ; qu'à défaut, l'étranger doit être remis en liberté ; qu'en retenant que Monsieur F... avait reçu notification de ses droits, sans rechercher, comme il y était invité, si cette notification avait eu lieu dans les meilleurs délais, pour autoriser son maintien en zone d'attente, le conseiller délégué a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 221-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-17419
Date de la décision : 11/07/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Chambre d'appel de la CA de St Denis de la Réunion à Mamoudzou, 27 mars 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 jui. 2019, pourvoi n°18-17419


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.17419
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