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04/07/2019 | FRANCE | N°18-13553

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 04 juillet 2019, 18-13553


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 544 et 646 du code civil, ensemble l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 19 décembre 2017), que Mme O... et Mme L... sont propriétaires de deux parcelles contiguës issues de la division d'une parcelle intervenue selon un plan de morcellement dressé en 1998 et 1999 ; que, se plaignant d'un déplacement de bornes et d'un empiétement sur sa parcelle, Mme L... a assigné Mme O... en suppression de l'emp

iétement et en dommages et intérêts ; que Mme O... a invoqué, à titre reconve...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 544 et 646 du code civil, ensemble l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 19 décembre 2017), que Mme O... et Mme L... sont propriétaires de deux parcelles contiguës issues de la division d'une parcelle intervenue selon un plan de morcellement dressé en 1998 et 1999 ; que, se plaignant d'un déplacement de bornes et d'un empiétement sur sa parcelle, Mme L... a assigné Mme O... en suppression de l'empiétement et en dommages et intérêts ; que Mme O... a invoqué, à titre reconventionnel, la prescription acquisitive de la bande de terrain litigieuse ;

Attendu que, pour accueillir la demande de Mme L..., l'arrêt retient que la clôture invoquée par Mme O... n'a pas été entérinée lors du bornage effectué antérieurement aux ventes, que la prescription acquisitive sur tout ou partie de la parcelle vendue à Mme L... aurait dû être opposée lors de la division des deux parcelles et que Mme O... échoue ainsi totalement à démontrer sa propriété sur la bande de terre objet du litige ;

Qu'en statuant ainsi, en se fondant exclusivement sur un procès-verbal de bornage, lequel ne constitue pas un acte translatif de propriété, et sans répondre aux conclusions de Mme O... qui soutenait que ses auteurs avaient acquis, avant la division des parcelles, la propriété de la bande de terrain litigieuse par prescription trentenaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre ;

Condamne Mme L... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme L... et la condamne à payer à Mme O... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme O...

Il est reproché à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné, sous astreinte, Mme H... O... épouse J... à supprimer l'empiètement sur le fonds de Mme R... L... et à remettre les lieux en l'état, à ses frais exclusifs, d'une part en supprimant la clôt et ure actuelle en place et d'autre part en replaçant sous l'égide de l'expert Mme N... P..., une borne B du plan figurant à l'annexe 1 du rapport d'expertise et si elle ne se confond pas avec la borne OGE R2, une borne au point A de ce même plan et de l'avoir condamnée à payer à Mme R... L... une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour privation de jouissance,

Aux motifs propres que « par acte notarié du 17 mai 2000, Mme L... a acquis de Mme B... E... C... la parcelle cadastrée [...] d'une contenance de cinq ares et quarante-neuf centiares ; que, par acte notarié du 28 août 2002, Mme J... a acquis de la même personne la parcelle cadastrée [...] d'une contenance de huit ares ; qu'il est démontré que ces parcelles ont été ainsi divisées par Mme E... C... , antérieurement aux deux ventes, puisqu'elles proviennent d'un terrain dont elle a hérité suite à tirage au sort des lots nés du partage en nature de l'Habitation Sans Soucis ; que les deux actes de vente reprennent exactement cette origine de propriété ; que, dès lors, comme souligné par l'expert judiciaire commis en référé et repris par le tribunal dans sa décision querellée, la clôture invoquée par Mme J... n'a pas été entérinée lors du bornage effectué antérieurement aux ventes ; que les premiers juges ont donc considéré, à juste titre, que la prescription acquisitive du père de l'appelante sur toute ou partie de la parcelle vendue à Mme L... aurait dû être opposée lors de la division des deux parcelles ; que Mme J... échoue ainsi totalement à démontrer sa propriété sur la bande de terre objet du litige ; que sa voisine justifie au contraire pleinement de l'empiétement opérée par l'appelante ; que cette dernière ne conteste pas le montant de la somme allouée par les premiers juges à Mme L... en réparation du préjudice né de l'empiétement ; que le jugement querellé doit, en conséquence, être confirmé en toutes ses dispositions » ;

Et aux motifs adoptés que « Mmes L... et J... ont acquis leurs parcelles du même auteur, Mme E..., veuve C... qui en était propriétaire depuis l'attribution qui lui en avait été faite par tirage au sort le 31 janvier 1977 ; que Mme E..., veuve C..., a fait réaliser un plan de morcellement des terres dont elle avait hérité, sans que quiconque lui ait opposé, à quelque moment que ce soit et notamment lors des opérations de liquidation partage de la succession de M. Léon Emmanuel T..., avoir acquis par possession trentenaire une partie du lot lui revenant ; que Mme J... est donc mal fondée à soutenir qu'avant d'avoir acheté à Mme E..., veuve C..., la parcelle section [...] , son père qui en était l'occupant, on ne sait à quel titre, aurait acquis une partie de cette parcelle ; que sa prétention est en outre dénuée de toute logique dès lors que si son père a possédé en qualité de propriétaire la parcelle pendant plus de trente ans, de façon paisible, publique et non équivoque, il en serait devenu propriétaire de la totalité et non d'une bande triangulaire de 25 m2 comme elle le revendique ; que Mme E..., veuve C..., propriétaire du terrain englobant les deux parcelles concernées était libre de les morceler sans respecter les clôtures anciennement édifiées ; que l'expert judiciaire, Mme P..., est parfaitement claire sur ce point : la délimitation des parcelles actuelles est issue du plan de morcellement dressé par M. G... qui n'entérine pas la délimitation des terres résultant de la clôture invoquée par Mme J... ; qu'il y a donc lieu de faire droit à la demande de Mme L..., sans qu'il y ait besoin d'homologuer le rapport d'expertise, et de condamner Mme J... à supprimer l'empiétement résultant du maintien de l'ancienne clôture et à rétablir les bornes selon les préconisations de l'expert ; que l'exécution provisoire sera ordonnée de ce chef pour faire cesser un empiétement qui dure depuis plusieurs années ; que l'empiétement de 25 m2 résultant du maintien de la clôture ancienne est relativement important eu égard à la petite taille de la parcelle de Mme L... (549 m2) ; que sa privation cause un préjudice de jouissance certain à Mme L... qui se confond avec les troubles dans les conditions d'existence invoqué au soutien de la demande indemnitaire ; que ce préjudice sera suffisamment réparé par l'allocation d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts » ;

Alors 1°) que, aux termes de l'article 2258 du code civil, la prescription acquisitive est un moyen d'acquérir un bien par l'effet de la possession ; que, pour trancher la question de la propriété, les juges du fond ne peuvent se fonder exclusivement sur un procès-verbal de bornage qui ne constitue pas un acte translatif de propriété ; qu'en énonçant, pour dénier à Mme J... la propriété de la bande de terre litigieuse, que la clôture invoquée par elle n'a pas été entérinée lors du bornage effectué antérieurement aux ventes, de sorte que les premiers juges ont considéré à juste titre que la prescription acquisitive de son père sur tout ou partie de la parcelle vendue à Mme L... aurait dû être opposée lors de la division des deux parcelles, cependant que le bornage amiable, sans incidence sur la propriété, ne pouvait tenir en échec l'acquisition par prescription lui était antérieure, la cour d'appel a violé la disposition susvisée, ensemble l'article 544 du code civil ;

Alors 2°) et en toute hypothèse que, aux termes de l'article 2261 du code civil, pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique et non équivoque, et à titre de propriétaire ; que, dans ses écritures d'appel (concl., p. 6 s.), Mme J... a invoqué l'acquisition, par prescription, de la portion de terrain revendiquée par sa voisine, Mme L... ; qu'elle faisait valoir que sa parcelle avait pour limite la clôture, existant depuis plus de 70 années, et séparant les fonds antérieurement occupés par D... O... (son père) et sa soeur, K... O... (mère de Mme L...) ; qu'elle invoquait, à cet égard, le courrier du 28 avril 1998 de M. G..., géomètre-expert, entérinant les modalités de cette occupation ainsi que onze attestations (p. 7 s.), d'où il résultait qu'était établie l'existence de la clôture depuis 70 années et, partant, la preuve (concl., p. 10) d'une possession continue de la bande de terre litigieuse au vu et su de Mme L..., de sorte que la prescription acquisitive trentenaire était acquise pour cette bande de terre au profit de D... O..., son père, et d'elle-même ; qu'elle invoquait encore (concl., p. 12) le plan du géomètre Adami, datant de 1995, contredisant le plan de bornage de M. G... ; qu'elle ajoutait encore (concl., p. 13) que les habitants des différentes parcelles, dont Mme L... se considéraient comme propriétaires bien avant la régularisation de leur situation par les ventes ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans se prononcer sur l'ensemble de ces éléments et pièces venant à leur appui, pour trancher la question de propriété qui lui était soumise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la disposition susvisée, ensemble l'article 544 du code civil.

Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-13553
Date de la décision : 04/07/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort-de-France, 19 décembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 04 jui. 2019, pourvoi n°18-13553


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.13553
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