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27/06/2019 | FRANCE | N°18-14198

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 27 juin 2019, 18-14198


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 juin 2019

Rejet

Mme FLISE, président

Arrêt n° 904 F-P+B+I

Pourvoi n° E 18-14.198

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Bretagne hydraulique, soc

iété par actions simplifiée, dont le siège est [...], contre l'arrêt rendu le 8 décembre 2017 par la cour d'appel de Rennes (2e chambre), dans le...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 juin 2019

Rejet

Mme FLISE, président

Arrêt n° 904 F-P+B+I

Pourvoi n° E 18-14.198

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Bretagne hydraulique, société par actions simplifiée, dont le siège est [...], contre l'arrêt rendu le 8 décembre 2017 par la cour d'appel de Rennes (2e chambre), dans le litige l'opposant à M. A... L..., du cabinet d'avocats L... I... NV, société de droit néerlandais, domicilié [...], pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société Boa Recycling Equipment BV, défendeur à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 29 mai 2019, où étaient présentes : Mme Flise, président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Brouard-Gallet, conseiller doyen, Mme Mainardi, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de la société Bretagne hydraulique, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. L..., ès qualités, l'avis de M. Girard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 8 décembre 2017), qu'à la requête de la société Boa Recycling Equipment BV, une ordonnance d'injonction de payer européenne du 23 septembre 2015, signifiée le 28 décembre 2015 à la société Bretagne hydraulique, a été rendue exécutoire par le tribunal de La Haye le 17 février 2016 ; que la société Boa Recycling Equipment BV a fait procéder le 12 avril 2016 à une saisie-attribution et délivrer un commandement à fins de saisie-vente ; que, contestant la régularité de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer européenne, la société Bretagne hydraulique a demandé la mainlevée des saisies au juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Quimper ; que la société Boa Recycling Equipment BV ayant été mise en liquidation judiciaire, M. L... a été désigné en qualité de liquidateur ;

Attendu que la société Bretagne hydraulique fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement du juge de l'exécution en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes de mainlevée des saisie-attribution et saisie-vente alors, selon le moyen, que le juge de l'exécution connaît des contestations élevées à l'occasion de l'exécution forcée, et donc de la régularité de la signification d'une injonction de payer européenne, peu important que celle-ci ait, postérieurement à sa notification, été déclarée exécutoire par le for d'origine ; qu'en ayant dit le juge de l'exécution incompétent pour connaître de la contestation élevée par la société Bretagne hydraulique, relativement à la régularité des actes de signification de l'injonction de payer européenne du 23 septembre 2015, qui lui avaient été délivrés les 27 octobre et 28 décembre 2015, au motif que cette ordonnance avait été, postérieurement à ces actes de signification, rendue exécutoire par le tribunal de La Haye, la cour d'appel a violé l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, ensemble l'article 21 du règlement CE) du Parlement et du Conseil du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d'injonction de payer ;

Mais attendu qu'ayant exactement rappelé que l'article 19 du règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d'injonction de payer dispose qu'une injonction de payer européenne, devenue exécutoire dans l'État membre d'origine, est reconnue et exécutée dans les autres États membres sans qu'il soit possible de contester sa reconnaissance, la cour d'appel en a déduit à bon droit que le juge de l'exécution n'était pas compétent pour connaître de la demande de nullité de l'acte de signification du 28 décembre 2015 de l'injonction de payer européenne, déclarée exécutoire par le tribunal de La Haye le 17 février 2016 à défaut d'opposition formée par la société Bretagne hydraulique dans les conditions prévues par l'article 18 du règlement, qui tendait à remettre en cause la régularité de ce titre déclaré exécutoire par la juridiction de l'Etat membre d'origine, de sorte que la société Bretagne hydraulique devait être déboutée des demandes de mainlevée des saisies ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen unique annexé, pris en sa seconde branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Bretagne hydraulique aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. L..., en qualité de liquidateur de la société Boa Recycling Equipment BV, la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour la société Bretagne hydraulique

IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait débouté la société Bretagne Hydraulique de ses demandes de mainlevée des saisie-attribution et saisie-vente pratiquées à son détriment, les 12 et 29 avril 2016, sur le fondement d'une ordonnance d'injonction de payer européenne, à l'initiative de la société Boa Recycling Equipement BV, représentée par son liquidateur judiciaire, Me L... ;

AUX MOTIFS QUE le 23 septembre 2015, le Tribunal de La Haye a rendu, sur requête de la société Boa Recycling Equipment BV, une ordonnance d'injonction de payer européenne condamnant la société Bretagne Hydraulique au paiement de la somme totale de 167.238,50 euros. Cette ordonnance a été signifiée une première fois le 27 octobre 2015 puis une seconde fois par acte extrajudiciaire du 28 décembre 2015, et le 17 février 2016, l'ordonnance a été rendue exécutoire par le Tribunal de La Haye. C'est sur la foi de cette ordonnance rendue exécutoire par la juridiction néerlandaise que la société Boa Recycling Equipment BV a fait pratiquer la saisie-attribution querellée et a fait délivrer le commandement aux fins de saisie-vente. La société Bretagne Hydraulique conteste les conditions de signification de l'ordonnance par actes des 27 octobre 2015 et 28 décembre 2015 soutenant que ces significations sont affectées d'une irrégularité de fond. La société Bretagne Hydraulique fait grief au premier juge de s'être déclaré incompétent pour connaître de sa contestation en faisant valoir que l'exécution des titres exécutoires conformément aux dispositions de l'article 503 du code de procédure civile est subordonnée à leur notification et que le contentieux de l'exécution est indissociable de celui de la régularité de la notification sans laquelle aucune voie d'exécution ne peut être effectuée. Mais il convient de constater que la société Bretagne Hydraulique entend contester la signification qui lui a été faite les 27 octobre et 28 décembre 2015, soit avant que le titre soit déclaré exécutoire par la juridiction néerlandaise le 17 février 2016. Ce faisant, l'appelante n'entend pas contester la signification du titre exécutoire mais bien remettre en cause les conditions dans lesquelles ce titre a été rendu exécutoire par le tribunal de La Haye (NL). C'est en conséquence par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge a rappelé que le juge de l'exécution n'a pas compétence pour connaître des demandes qui tendent à la remise en cause d'un titre exécutoire et qu'il ne peut trancher la contestation portant sur les conditions dans lesquelles cette ordonnance a été rendue exécutoire à défaut d'opposition formée par le défendeur à l'injonction. Il sera rappelé que par application des dispositions de l'article 17 du règlement 1896/2006 du 12 décembre 2006, si une opposition est formée, elle se poursuit devant les juridictions compétentes de l'Etat d'origine. Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il s'est déclaré incompétent pour connaître des contestations soulevées qui échappent aux pouvoirs du juge de l'exécution et relèvent de la compétence d'une juridiction étrangère. En l'état conformément aux dispositions de l'article 19 du règlement susvisé, une injonction de payer européenne devenue exécutoire dans l'Etat membre d'origine est reconnue et exécutée dans les autres Etats membres sans qu'une déclaration constatant la force exécutoire soit nécessaire et sans qu'il soit possible de contester sa reconnaissance ; que par application des dispositions de l'article 21 de ce règlement, les procédures d'exécution sont régies par le droit de l'Etat membre d'exécution. Ainsi, la société Boa Recycling Equipment BV qui dispose d'un titre exécutoire en France pouvait aux fins de recouvrement procéder par voie de saisie-attribution et délivrer un commandement aux fins de saisie-vente. Le jugement sera confirmé en ce qu'il débouté la société Bretagne Hydraulique de ses demandes de mainlevée. S'agissant de la saisie-attribution il est constant qu'elle a été pratiquée alors que le compte présentait un solde était débiteur ; que s'il apparaît sans effet, il n'en résulte pas de caducité ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte des articles L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire et R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution que le juge de l'exécution n'a pas compétence pour connaître des demandes tendant à remettre en cause un titre exécutoire dans son principe et qu'il doit soulever d'office son incompétence ; qu'en l'espèce, l'exception de nullité soulevée concerne la signification de l'ordonnance d'injonction de payer européenne rendue le 23 septembre 2015 par le tribunal de La Haye ; quelle que soit la nature de la nullité soulevée, de forme ou de fond, il n'est pas contesté que, postérieurement à cette signification, soit le 17 février 2016, et en l'absence de contestation dans le délai édicté à l'article 8 du règlement CE n° 1393/2007 du 13 novembre 2007, le tribunal de La Haye a déclaré l'injonction exécutoire ; qu'ainsi, se prononcer sur la validité du ou des actes de signification de l'ordonnance d'injonction de payer européenne reviendrait à trancher une contestation du débiteur portant sur les conditions dans lesquelles cette ordonnance avait été déclarée exécutoire ; qu'il convient en conséquence de relever d'office l'incompétence du juge de l'exécution pour se prononcer sur l'exception de nullité soulevée par la défenderesse qui sera en conséquence déboutée de sa demande en mainlevée des saisies pratiquées à son encontre ;

1°) ALORS QUE le juge de l'exécution connaît des contestations élevées à l'occasion de l'exécution forcée, et donc de la régularité de la signification d'une injonction de payer européenne, peu important que celle-ci ait, postérieurement à sa notification, été déclarée exécutoire par le for d'origine ; qu'en ayant dit le juge de l'exécution incompétent pour connaître de la contestation élevée par la société Bretagne Hydraulique, relativement à la régularité des actes de signification de l'injonction de payer européenne du 23 septembre 2015, qui lui avaient été délivrés les 27 octobre et 28 décembre 2015, au motif que cette ordonnance avait été, postérieurement à ces actes de signification, rendue exécutoire par le tribunal de La Haye, la cour d'appel a violé l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, ensemble l'article 21 du règlement CE) du Parlement et du Conseil du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d'injonction de payer ;

2°) ALORS QUE le destinataire français d'une injonction de payer européenne doit pouvoir disposer d'un recours effectif devant le juge de l'exécution français, à l'effet notamment de suspendre la procédure d'exécution poursuivie ensuite de l'IPE, si la notification de celle-ci n'a pas été régulièrement effectuée ; qu'en ayant jugé le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble les articles 12, 13, 14, 21 et 23 du règlement (CE) du Parlement et du Conseil du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d'injonction de payer.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-14198
Date de la décision : 27/06/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

JUGE DE L'EXECUTION - Compétence - Contestation s'élevant à l'occasion de l'exécution forcée - Exclusion - Cas - Demande en nullité de la signification d'une injonction de payer européenne

UNION EUROPEENNE - Règlement (CE) n° 1896/2006 du 12 décembre 2006 - Injonction de payer européenne - Ordonnance déclarée exécutoire dans un Etat membre - Demande en nullité de la signification de l'ordonnance en France - Compétence du juge français - Détermination - Portée

Il résulte de l'article 19 du règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d'injonction de payer, que le juge de l'exécution n'est pas compétent pour connaître d'une demande de nullité d'un acte de signification d'une injonction de payer européenne déclarée exécutoire par une juridiction de l'Etat membre d'origine


Références :

article 19 du règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 08 décembre 2017

Sur la possibilité de contester la validité d'une signification d'ordonnance d'injonction de payer européenne, cf. : CJUE, arrêt du 22 octobre 2015, Thomas Cook Belgium NV/Thurner Hotel Gmb, C-245/14.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 27 jui. 2019, pourvoi n°18-14198, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat(s) : SCP Le Bret-Desaché, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.14198
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