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26/06/2019 | FRANCE | N°18-11323

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 juin 2019, 18-11323


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. N... a été engagé le 18 avril 1983 par la société Commercialisation équipement construction (CEC) en qualité de commercial ; que le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre recommandée avec avis de réception du 5 décembre 2015 ;

Sur les premier, deuxième et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de na

ture à entraîner la cassation ;

Mais sur le quatrième moyen :

Vu l'article 1134 du c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. N... a été engagé le 18 avril 1983 par la société Commercialisation équipement construction (CEC) en qualité de commercial ; que le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre recommandée avec avis de réception du 5 décembre 2015 ;

Sur les premier, deuxième et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le quatrième moyen :

Vu l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause, ensemble les articles L. 1234-5 et L. 1237-1 du code du travail ;

Attendu que, pour rejeter les demandes du salarié relatives à l'indemnité compensatrice de préavis, l'arrêt retient que la prise d'acte de la rupture par le salarié le 5 décembre 2015 doit produire les effets d'une démission et que l'intéressé devra être débouté de ses demandes de rappels de salaire sur préavis ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors que l'exécution du préavis constitue pour le salarié à la fois une obligation et un droit, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le salarié avait proposé de l'exécuter et si l'employeur l'en avait dispensé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. N... de ses demandes de rappels de salaire au titre du préavis, de l'indemnité compensatrice de congés payés afférente, de remise d'un bulletin de paie relatif au préavis et de dommages-intérêts afférents, l'arrêt rendu le 28 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;

Condamne la société Diffusion équipements loisirs aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Diffusion équipements loisirs à payer à M. N... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

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Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. N....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. N... de sa demande indemnitaire au titre de la discrimination et, en conséquence, d'AVOIR dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission et débouté le salarié de ses demandes de rappel de salaire sur préavis et d'indemnités au titre d'un licenciement ;

AUX MOTIFS QUE, sur la prise d'acte : il résulte de la combinaison des articles L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement de l'employeur suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; que cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; que le salarié qui a pris l'initiative de la rupture au travers d'une prise d'acte doit supporter la charge de la preuve des manquements de l'employeur qu'il invoque ; que selon les termes de son courrier du 5 décembre 2015, M. N... a pris acte de la rupture de son contrat de travail compte tenu du défaut de paiement de sa prime d'objectif, des modifications de son secteur géographique, de l'absence de proposition d'avenant à son contrat de travail ; que le salarié invoque les modifications substantielles ainsi apportées à son contrat de travail par l'employeur touchant notamment à la redéfinition de ses fonctions imposée sans formation adéquate et en portant atteinte à sa sécurité, le harcèlement moral et la discrimination dont il a été victime ; que la lecture de l'avenant soumis à la signature de M. N... en fin d'année 2014 révèle une modification profonde du contrat de travail puisqu'il s'agissait d'opérer la mutation du salarié auprès d'un nouvel employeur, la société FPB, de modifier la structure de sa rémunération, de préciser la nature et l'étendue de ses obligations professionnelles, de restreindre son secteur géographique d'activité, de modifier les conditions matérielles de prise en charge de ses frais professionnels, de lui fixer des objectifs chiffrés et de mettre à sa charge une obligation de non concurrence ; que le seul fait pour l'employeur d'envisager la modification du contrat de travail d'un salarié dans le cadre de la réorganisation par fusion de l'ensemble des services commerciaux des sociétés CEC, DEL et CLASS, tel que présentée lors de la réunion commerciale du 1er décembre 2014, ne peut constituer un manquement à ses obligations contractuelles dès lors que cette modification découle d'orientations stratégiques relevant de son pouvoir de direction et qu'en toute hypothèse, une telle modification suppose l'accord du salarié ; que M. N... ayant refusé ces modifications comme il était en droit de le faire, seules les stipulations de l'avenant du 22 novembre 2010 pouvaient continuer de régir la relation de travail ; que le salarié reproche à la société CEC de lui avoir néanmoins imposé plusieurs modifications substantielles de ce contrat ; que le contrat de travail stipule que le secteur commercial attribué à M. N... est composé des onze départements suivants : 10, 12, 15, 19, 34, 41, 45, 46, 73, 74 et 89, mais qu'il est susceptible de modification « en fonction des objectifs' économiques de l'entreprise » ; qu'il prévoit une rémunération forfaitaire sous forme de salaire fixe mensuel et qu'« en fonction de la performance de l'entreprise et du salarié, des primes diverses peuvent être allouées » primes qualifiées d'exceptionnelles et d'aléatoires, dont les critères d'attribution relèvent du pouvoir de décision de l'entreprise ; que le contrat de travail précise que le salarié a pour mission notamment de développer les parts de marché d'un portefeuille existant, d'assurer une activité régulière de prospection et d'appliquer la politique commerciale dans le cadre de la stratégie du Groupe FIJA, qu'il est placé sous l'autorité de la Direction Générale et de la Direction Commerciale, qu'il doit en outre respecter les objectifs débattus entre lui-même et l'employeur ; qu'il résulte des productions que le secteur géographique confié à M. N... a été réduit au début de l'année 2015 pour ne plus comprendre que cinq départements : 34, 73, 74, 23 et 87 ; que si le salarié soutient qu'à l'occasion d'une réunion au début du mois de novembre 2015, une nouvelle réduction de son secteur d'activité aux seuls départements (73, 74 et 23) lui a été annoncée, il n'en apporte aucune preuve ; que dans le cadre de la mutualisation des forces de vente des trois filiales (CEC, DEL, CLASS), la modification du secteur géographique s'est accompagnée d'une diversification de la gamme des produits commercialisés et les données chiffrées d'évolution des ventes sur le secteur attribué à M. N... produites par l'employeur font apparaître une érosion marginale du chiffre d'affaires de -2% en 2014 et de -1% en 2015 ; que l'examen de ces chiffres révèle que le chiffre d'affaires de l'ancien secteur (3.435.176 euros en 2014 et 3.534.100 euros en 2015) est en réalité inférieur à celui du nouveau (3.706.637 euros en 2014 et 3.665.803 euros en 2015) ; que cette réalité est au demeurant admise par M. N... qui reconnaît (p. 12 de ses conclusions) que l'adjonction du chiffre d'affaires réalisé sur les produits DEL et CLASS, malgré la perte de six départements, avait fait progresser les résultats de son secteur de 48,73 % ; que compte tenu de la nouvelle politique commerciale adoptée par l'employeur dès le début de l'année 2015 et des résultats enregistrés par le salarié sur cette même année, il n'est pas établi que la modification du secteur géographique confié à M. N... ait été de nature à obérer ses résultats ; que les incidences de cette modification sur la rémunération du salarié ne sont pas non plus démontrées alors que le contrat de travail de M. N... prévoit une rémunération forfaitaire, sans part variable contractualisée assise sur la réalisation d'objectifs ; que si M. N... s'est vu attribuer de manière continue depuis 2011 une prime sur objectifs versée au mois d'octobre, l'examen de ses bulletins de salaire montre que le montant de cette prime a varié à la baisse comme à la hausse (3.213 €, 641 €, 933 €, 1.632 €) au cours des quatre années précédant la rupture ; que si ces fluctuations sont inhérentes aux bases de calcul évoquées dans le contrat de travail, il résulte par ailleurs des explications de M. N..., comme du tableau de son calcul pour 2015 versé par la société DEL, que cette prime procède de la répartition d'une enveloppe déterminée par l'employeur entre tous les commerciaux, à raison de la réalisation de leurs objectifs personnels, mais également de leur participation à un objectif collectif ; que, bien que non contractualisée, les caractères de constance, de généralité et de fixité dans le mode de calcul sont réunis pour conférer à cette prime la nature d'un usage obligeant l'employeur ; que si en 2015, la réorganisation du service commercial par fusion des trois sociétés CEC, DEL, CLASS a conduit à accroître le nombre de salariés concernés par la répartition de l'enveloppe de prime, cette augmentation n'a eu aucune incidence sur le mode de calcul de la prime et ne peut constituer une violation des obligations contractuelles de l'employeur ; que de surcroît, il s'agit d'une prime annuelle ne représentant qu'une part modeste (2,77% en 2014) de la rémunération annuelle de M. N... ; qu'il sera observé en outre que si cette prime n'a pas été versée au salarié au mois d'octobre, comme habituellement, M. N... n'a élevé aucune réclamation à ce titre et le versement de cette prime a été opéré au mois de décembre dans le cadre du solde de tout compte ; que le salarié ne caractérise pas au titre de la prime d'objectifs un manquement de la société DEL suffisamment grave pour empêcher la poursuite de la relation de travail ; que les objectifs du projet « FIJ'UP », la nouvelle stratégie commerciale du Groupe FIJA et la réorganisation du service commercial ont été présentés aux salariés lors des réunions commerciales de décembre 2014, des 8 et 9 octobre 2015, ainsi que dans le cadre des réunions des délégués du personnel au cours de l'année 2015 ; qu'il est patent que la préparation du projet de fusion s'est traduit par la mutualisation des équipes commerciales et la modification des missions jusque-là exercées par les salariés de la société CEC ; que M. N... justifie par la production d'échanges de courriels qu'il a été amené à intervenir au titre du Service Après-Vente, que de nouvelles méthodes de promotion commerciale (show road) lui ont été imposées ; que néanmoins, son contrat de travail lui faisait obligation de mettre en oeuvre la stratégie commerciale du Groupe FIJA et d'appliquer les méthodes qui lui seraient indiquées ; qu'il résulte en outre des éléments produits aux débats que si les commerciaux de la société CEC se sont vus confier des missions relevant du service après-vente, notamment concernant des produits fabriqués par DEL et CLASS, ces interventions étaient réalisées soit en binôme avec un technicien de ces sociétés, soit avec son support ; qu'il n'est en outre pas démontré que l'intervention de M. N... ait dépassé un cadre purement commercial et que le salarié ait été amené à réaliser des gestes techniques nécessitant une formation spécifique, voire une habilitation électrique comme il l'allègue, qui l'auraient exposé à un risque pour sa santé ou son intégrité physique ; que par ailleurs, si les salariés de CEC se sont trouvés placés à compter de janvier 2015 sous les directives du directeur des ventes de DEL, cette situation n'a pas créé pour eux de soumission à un degré hiérarchique supplémentaire, mais à une direction commerciale dyarchique ; que contrairement aux affirmations de M. N..., la société DEL/CEC justifie de l'organisation de formations dispensées aux commerciaux dès le mois d'octobre 2014 par la société DEL sur les produits de fabrication, ainsi que le 17 novembre 2014 sur les nouveautés 2015 ; que les termes du courriel de M. J... du 16 novembre 2015 permettent de comprendre qu'une autre session de formation était d'ores et déjà prévue pour la fin de l'année 2015 avant que M. N... ne notifie sa prise d'acte, quand bien même la date effective de cette formation lui est postérieure en raison d'un changement de dates ; que de plus, les extraits de catalogues de la société CEC permettent de constater que M. N... commercialisait des produits de même nature que ceux des sociétés DEL et CLASS et possédait déjà à ce titre une connaissance technique de ces produits ; que par ailleurs, le salarié ne justifie d'aucune demande particulière d'utilisation de ses droits au DIF ; que M. N... allègue de méthodes managériales et de pressions psychologiques exercées sur lui pour le contraindre à accepter la modification de son contrat de travail ou à quitter l'entreprise, de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre ; que pour ce qui est des pressions alléguées, le salarié n'en rapporte aucune preuve ; qu'après le refus par M. N... de signer l'avenant de son contrat de travail proposé par la société CEC, l'employeur ne démontre pas avoir formalisé d'autres propositions contractuelles auprès de son salarié ; qu'en effet si ce dernier a été informé de nouvelles propositions lors d'une réunion le 2 mars 2015 et bien que de nouveaux projets d'avenants aient été rédigés, il n'est pas démontré qu'ils ont bien été transmis à l'intéressé ; que pour autant, les échanges de courriel permettent de se convaincre de l'existence de négociations entre les conseils des parties ; que s'il indique que l'employeur s'est systématiquement soustrait à ses demandes d'entrevue et à ses sollicitations au sujet de son avenir au sein de l'entreprise, M. N... ne justifie d'aucune démarche auprès de sa direction avant le 30 novembre 2015, date à laquelle il a contacté la directrice des ressources humaines pour envisager les modalités de son départ, l'employeur procédant alors à des simulations de calcul des indemnités de rupture ; que la situation de délaissement et d'incertitude décrite par le salarié n'est pas corroborée par les éléments de fait et ces derniers ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement ; que le salarié met en avant le fait qu'à la différence de ses collègues ayant régularisé l'avenant à leur contrat de travail, il n'a pas perçu la prime liée au critère de satisfaction de la clientèle (SAT CLI) alors qu'il a été soumis à la même évaluation et qu'il a dû partager avec ces derniers l'enveloppe de la prime d'objectif ; que cependant, à défaut d'avoir accepté la modification de son contrat de travail, incluant la détermination de sa rémunération, le salarié ne peut valablement revendiquer le versement d'une prime non prévue par son contrat de travail ; que par ailleurs, il décrit lui-même des situations contractuelles différentes qui ne peuvent conduire à retenir la violation d'un principe d'égalité, tout autant qu'une discrimination à son encontre ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. N... échoue à établir la preuve de manquements de son employeur suffisamment graves pour empêcher la poursuite de la relation de travail et justifier qu'il prenne l'initiative de la rupture ; qu'ils font apparaître qu'en réalité, le salarié s'est trouvé en désaccord avec le projet de fusion des trois sociétés CEC, DEL et CLASS décidé par le Groupe FIJA et la modification de la stratégie et des méthodes commerciales qu'il impliquait ; qu'en conséquence, la prise d'acte de la rupture par le salarié le 5 décembre 2015 doit produire les effets d'une démission ; que le jugement du conseil de prud'hommes sera partiellement infirmé en ce sens et M. N... devra être débouté de ses demandes de rappels de salaires sur préavis, d'indemnités au titre d'un licenciement ; que la décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle déboute M. N... de ses demandes indemnitaires au titre du harcèlement moral, de l'obligation de formation, de la non-délivrance des bulletins de paie relatifs à un préavis ; qu'il résulte de ce qui précède que M. N... ne peut prétendre à se voir indemnisé de faits de discrimination et de manquement à l'obligation de loyauté ; qu'il sera débouté de ces demandes nouvelles en appel ;

1°) ALORS QUE, pour débouter M. N... de sa demande au titre de la discrimination, la cour d'appel a énoncé que « le salarié met en avant le fait qu'à la différence de ses collègues ayant régularisé l'avenant à leur contrat de travail, il n'a pas perçu la prime liée aux critères de satisfaction de la clientèle (SATCLI) alors qu'il était soumis à la même évaluation et qu'il a dû partager avec ces derniers l'enveloppe de la prime d'objectif » et en a déduit qu'« à défaut d'avoir accepté la modification de son contrat de travail, incluant la détermination de sa rémunération, le salarié ne peut valablement revendiquer le versement d'une prime non prévue par son contrat de travail » ; qu'en statuant ainsi, quand M. N... soutenait que les commerciaux dont la situation avait été régularisée - en suite du refus de la modification du contrat de travail initialement proposée, par la signature d'un nouvel avenant - avaient seuls pu bénéficier de primes sur la vente des produits DEL et CEC, et que les salariés n'ayant pas reçu de proposition de régularisation de leur situation en suite de leur refus initial - auxquels il appartenait - étaient les plus âgés (cf. conclusions d'appel pages 48 et 49), la cour d'appel a dénaturé ses écritures en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'il appartient au juge du fond, saisi d'un litige relatif à la violation du principe de non-discrimination, d'examiner l'ensemble des éléments de fait présentés par le salarié comme laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; qu'en s'abstenant dès lors de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'absence de proposition d'un nouvel avenant au contrat de travail aux seuls salariés les plus âgés, ayant eu pour effet de les priver du paiement de la prime SATCLI, laissait supposer l'existence d'une discrimination à raison de l'âge, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail ;

3°) ET ALORS QUE lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'après avoir rappelé que « le salarié qui a pris l'initiative de la rupture au travers d'une prise d'acte doit supporter la charge de la preuve des manquements qu'il invoque », la cour d'appel a retenu que « M. N... échoue à établir la preuve de manquements de son employeur suffisamment graves pour empêcher la poursuite de la relation de travail et justifier qu'il prenne l'initiative de la rupture » ; qu'en statuant ainsi, quand il lui appartenait de rechercher si les éléments établis par le salarié, envisagés dans leur ensemble, ne laissaient pas supposer l'existence d'une discrimination, et, dans l'affirmative, si l'employeur justifiait ses décisions par des éléments objectifs, étrangers à toute discrimination, la cour d'appel, qui s'en est abstenue, a violé les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. N... de sa demande indemnitaire au titre du harcèlement moral et, en conséquence, d'AVOIR dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. N... produit les effets d'une démission et débouté le salarié de ses demandes de rappel de salaire sur préavis et d'indemnités au titre d'un licenciement ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur la prise d'acte : il résulte de la combinaison des articles L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement de l'employeur suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; que cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; que le salarié qui a pris l'initiative de la rupture au travers d'une prise d'acte doit supporter la charge de la preuve des manquements de l'employeur qu'il invoque ; que selon les termes de son courrier du 5 décembre 2015, M. N... a pris acte de la rupture de son contrat de travail compte tenu du défaut de paiement de sa prime d'objectif, des modifications de son secteur géographique, de l'absence de proposition d'avenant à son contrat de travail ; que le salarié invoque les modifications substantielles ainsi apportées à son contrat de travail par l'employeur touchant notamment à la redéfinition de ses fonctions imposée sans formation adéquate et en portant atteinte à sa sécurité, le harcèlement moral et la discrimination dont il a été victime ; que la lecture de l'avenant soumis à la signature de M. N... en fin d'année 2014 révèle une modification profonde du contrat de travail puisqu'il s'agissait d'opérer la mutation du salarié auprès d'un nouvel employeur, la société FPB, de modifier la structure de sa rémunération, de préciser la nature et l'étendue de ses obligations professionnelles, de restreindre son secteur géographique d'activité, de modifier les conditions matérielles de prise en charge de ses frais professionnels, de lui fixer des objectifs chiffrés et de mettre à sa charge une obligation de non concurrence ; que le seul fait pour l'employeur d'envisager la modification du contrat de travail d'un salarié dans le cadre de la réorganisation par fusion de l'ensemble des services commerciaux des sociétés CEC, DEL et CLASS, tel que présentée lors de la réunion commerciale du 1er décembre 2014, ne peut constituer un manquement à ses obligations contractuelles dès lors que cette modification découle d'orientations stratégiques relevant de son pouvoir de direction et qu'en toute hypothèse, une telle modification suppose l'accord du salarié ; que M. N... ayant refusé ces modifications comme il était en droit de le faire, seules les stipulations de l'avenant du 22 novembre 2010 pouvaient continuer de régir la relation de travail ; que le salarié reproche à la société CEC de lui avoir néanmoins imposé plusieurs modifications substantielles de ce contrat ; que le contrat de travail stipule que le secteur commercial attribué à M. N... est composé des onze départements suivants : 10, 12, 15, 19, 34, 41, 45, 46, 73, 74 et 89, mais qu'il est susceptible de modification « en fonction des objectifs' économiques de l'entreprise » ; qu'il prévoit une rémunération forfaitaire sous forme de salaire fixe mensuel et qu'« en fonction de la performance de l'entreprise et du salarié, des primes diverses peuvent être allouées » primes qualifiées d'exceptionnelles et d'aléatoires, dont les critères d'attribution relèvent du pouvoir de décision de l'entreprise ; que le contrat de travail précise que le salarié a pour mission notamment de développer les parts de marché d'un portefeuille existant, d'assurer une activité régulière de prospection et d'appliquer la politique commerciale dans le cadre de la stratégie du Groupe FIJA, qu'il est placé sous l'autorité de la Direction Générale et de la Direction Commerciale, qu'il doit en outre respecter les objectifs débattus entre lui-même et l'employeur ; qu'il résulte des productions que le secteur géographique confié à M. N... a été réduit au début de l'année 2015 pour ne plus comprendre que cinq départements : 34, 73, 74, 23 et 87 ; que si le salarié soutient qu'à l'occasion d'une réunion au début du mois de novembre 2015, une nouvelle réduction de son secteur d'activité aux seuls départements (73, 74 et 23) lui a été annoncée, il n'en apporte aucune preuve ; que dans le cadre de la mutualisation des forces de vente des trois filiales (CEC, DEL, CLASS), la modification du secteur géographique s'est accompagnée d'une diversification de la gamme des produits commercialisés et les données chiffrées d'évolution des ventes sur le secteur attribué à M. N... produites par l'employeur font apparaître une érosion marginale du chiffre d'affaires de -2% en 2014 et de -1% en 2015 ; que l'examen de ces chiffres révèle que le chiffre d'affaires de l'ancien secteur (3.435.176 euros en 2014 et 3.534.100 euros en 2015) est en réalité inférieur à celui du nouveau (3.706.637 euros en 2014 et 3.665.803 euros en 2015) ; que cette réalité est au demeurant admise par M. N... qui reconnaît (p. 12 de ses conclusions) que l'adjonction du chiffre d'affaires réalisé sur les produits DEL et CLASS, malgré la perte de six départements, avait fait progresser les résultats de son secteur de 48,73 % ; que compte tenu de la nouvelle politique commerciale adoptée par l'employeur dès le début de l'année 2015 et des résultats enregistrés par le salarié sur cette même année, il n'est pas établi que la modification du secteur géographique confié à M. N... ait été de nature à obérer ses résultats ; que les incidences de cette modification sur la rémunération du salarié ne sont pas non plus démontrées alors que le contrat de travail de M. N... prévoit une rémunération forfaitaire, sans part variable contractualisée assise sur la réalisation d'objectifs ; que si M. N... s'est vu attribuer de manière continue depuis 2011 une prime sur objectifs versée au mois d'octobre, l'examen de ses bulletins de salaire montre que le montant de cette prime a varié à la baisse comme à la hausse (3.213 €, 641 €, 933 €, 1.632 €) au cours des quatre années précédant la rupture ; que si ces fluctuations sont inhérentes aux bases de calcul évoquées dans le contrat de travail, il résulte par ailleurs des explications de M. N..., comme du tableau de son calcul pour 2015 versé par la société DEL, que cette prime procède de la répartition d'une enveloppe déterminée par l'employeur entre tous les commerciaux, à raison de la réalisation de leurs objectifs personnels, mais également de leur participation à un objectif collectif ; que, bien que non contractualisée, les caractères de constance, de généralité et de fixité dans le mode de calcul sont réunis pour conférer à cette prime la nature d'un usage obligeant l'employeur ; que si en 2015, la réorganisation du service commercial par fusion des trois sociétés CEC, DEL, CLASS a conduit à accroître le nombre de salariés concernés par la répartition de l'enveloppe de prime, cette augmentation n'a eu aucune incidence sur le mode de calcul de la prime et ne peut constituer une violation des obligations contractuelles de l'employeur ; que de surcroît, il s'agit d'une prime annuelle ne représentant qu'une part modeste (2,77% en 2014) de la rémunération annuelle de M. N... ; qu'il sera observé en outre que si cette prime n'a pas été versée au salarié au mois d'octobre, comme habituellement, M. N... n'a élevé aucune réclamation à ce titre et le versement de cette prime a été opéré au mois de décembre dans le cadre du solde de tout compte ; que le salarié ne caractérise pas au titre de la prime d'objectifs un manquement de la société DEL suffisamment grave pour empêcher la poursuite de la relation de travail ; que les objectifs du projet « FIJ'UP », la nouvelle stratégie commerciale du Groupe FIJA et la réorganisation du service commercial ont été présentés aux salariés lors des réunions commerciales de décembre 2014, des 8 et 9 octobre 2015, ainsi que dans le cadre des réunions des délégués du personnel au cours de l'année 2015 ; qu'il est patent que la préparation du projet de fusion s'est traduit par la mutualisation des équipes commerciales et la modification des missions jusque-là exercées par les salariés de la société CEC ; que M. N... justifie par la production d'échanges de courriels qu'il a été amené à intervenir au titre du Service Après-Vente, que de nouvelles méthodes de promotion commerciale (show road) lui ont été imposées ; que néanmoins, son contrat de travail lui faisait obligation de mettre en oeuvre la stratégie commerciale du Groupe FIJA et d'appliquer les méthodes qui lui seraient indiquées ; qu'il résulte en outre des éléments produits aux débats que si les commerciaux de la société CEC se sont vus confier des missions relevant du service après-vente, notamment concernant des produits fabriqués par DEL et CLASS, ces interventions étaient réalisées soit en binôme avec un technicien de ces sociétés, soit avec son support ; qu'il n'est en outre pas démontré que l'intervention de M. N... ait dépassé un cadre purement commercial et que le salarié ait été amené à réaliser des gestes techniques nécessitant une formation spécifique, voire une habilitation électrique comme il l'allègue, qui l'auraient exposé à un risque pour sa santé ou son intégrité physique ; que par ailleurs, si les salariés de CEC se sont trouvés placés à compter de janvier 2015 sous les directives du directeur des ventes de DEL, cette situation n'a pas créé pour eux de soumission à un degré hiérarchique supplémentaire, mais à une direction commerciale dyarchique ; que contrairement aux affirmations de M. N..., la société DEL/CEC justifie de l'organisation de formations dispensées aux commerciaux dès le mois d'octobre 2014 par la société DEL sur les produits de fabrication, ainsi que le 17 novembre 2014 sur les nouveautés 2015 ; que les termes du courriel de M. J... du 16 novembre 2015 permettent de comprendre qu'une autre session de formation était d'ores et déjà prévue pour la fin de l'année 2015 avant que M. N... ne notifie sa prise d'acte, quand bien même la date effective de cette formation lui est postérieure en raison d'un changement de dates ; que de plus, les extraits de catalogues de la société CEC permettent de constater que M. N... commercialisait des produits de même nature que ceux des sociétés DEL et CLASS et possédait déjà à ce titre une connaissance technique de ces produits ; que par ailleurs, le salarié ne justifie d'aucune demande particulière d'utilisation de ses droits au DIF ; que M. N... allègue de méthodes managériales et de pressions psychologiques exercées sur lui pour le contraindre à accepter la modification de son contrat de travail ou à quitter l'entreprise, de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre ; que pour ce qui est des pressions alléguées, le salarié n'en rapporte aucune preuve ; qu'après le refus par M. N... de signer l'avenant de son contrat de travail proposé par la société CEC, l'employeur ne démontre pas avoir formalisé d'autres propositions contractuelles auprès de son salarié ; qu'en effet si ce dernier a été informé de nouvelles propositions lors d'une réunion le 2 mars 2015 et bien que de nouveaux projets d'avenants aient été rédigés, il n'est pas démontré qu'ils ont bien été transmis à l'intéressé ; que pour autant, les échanges de courriel permettent de se convaincre de l'existence de négociations entre les conseils des parties ; que s'il indique que l'employeur s'est systématiquement soustrait à ses demandes d'entrevue et à ses sollicitations au sujet de son avenir au sein de l'entreprise, M. N... ne justifie d'aucune démarche auprès de sa direction avant le 30 novembre 2015, date à laquelle il a contacté la directrice des ressources humaines pour envisager les modalités de son départ, l'employeur procédant alors à des simulations de calcul des indemnités de rupture ; que la situation de délaissement et d'incertitude décrite par le salarié n'est pas corroborée par les éléments de fait et ces derniers ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement ; que le salarié met en avant le fait qu'à la différence de ses collègues ayant régularisé l'avenant à leur contrat de travail, il n'a pas perçu la prime liée au critère de satisfaction de la clientèle (SAT CLI) alors qu'il a été soumis à la même évaluation et qu'il a dû partager avec ces derniers l'enveloppe de la prime d'objectif ; que cependant, à défaut d'avoir accepté la modification de son contrat de travail, incluant la détermination de sa rémunération, le salarié ne peut valablement revendiquer le versement d'une prime non prévue par son contrat de travail ; que par ailleurs, il décrit lui-même des situations contractuelles différentes qui ne peuvent conduire à retenir la violation d'un principe d'égalité, tout autant qu'une discrimination à son encontre ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. N... échoue à établir la preuve de manquements de son employeur suffisamment graves pour empêcher la poursuite de la relation de travail et justifier qu'il prenne l'initiative de la rupture ; qu'ils font apparaître qu'en réalité, le salarié s'est trouvé en désaccord avec le projet de fusion des trois sociétés CEC, DEL et CLASS décidé par le Groupe FIJA et la modification de la stratégie et des méthodes commerciales qu'il impliquait ; qu'en conséquence, la prise d'acte de la rupture par le salarié le 5 décembre 2015 doit produire les effets d'une démission ; que le jugement du conseil de prud'hommes sera partiellement infirmé en ce sens et M. N... devra être débouté de ses demandes de rappels de salaires sur préavis, d'indemnités au titre d'un licenciement ; que la décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle déboute M. N... de ses demandes indemnitaires au titre du harcèlement moral, de l'obligation de formation, de la non-délivrance des bulletins de paie relatifs à un préavis ; qu'il résulte de ce qui précède que M. N... ne peut prétendre à se voir indemnisé de faits de discrimination et de manquement à l'obligation de loyauté ; qu'il sera débouté de ces demandes nouvelles en appel ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'en l'espèce, le salarié n'apporte pas suffisamment d'éléments qui attestent d'un harcèlement ; qu'en conséquence le conseil ne fera pas droit à la demande ;

1°) ALORS QUE, pour débouter M. N... de sa demande au titre du harcèlement moral, la cour d'appel a énoncé que « le salarié met en avant le fait qu'à la différence de ses collègues ayant régularisé l'avenant à leur contrat de travail, il n'a pas perçu la prime liée aux critères de satisfaction de la clientèle (SATCLI) alors qu'il était soumis à la même évaluation et qu'il a dû partager avec ces derniers l'enveloppe de la prime d'objectif » et en a déduit qu'« à défaut d'avoir accepté la modification de son contrat de travail, incluant la détermination de sa rémunération, le salarié ne peut valablement revendiquer le versement d'une prime non prévue par son contrat de travail » ; qu'en statuant ainsi, quand M. N... soutenait que les commerciaux dont la situation avait été régularisée - en suite du refus de la modification du contrat de travail initialement proposée, par la signature d'un nouvel avenant - avaient seuls pu bénéficier de primes sur la vente des produits DEL et CEC, et que les salariés n'ayant pas reçu de proposition de régularisation de leur situation en suite de leur refus initial - auxquels il appartenait - étaient les plus âgés (cf. conclusions d'appel pages 48 et 49), la cour d'appel a dénaturé ses écritures en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, à charge pour l'employeur, le cas échéant, de prouver que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, M. N... soutenait que l'employeur avait unilatéralement restreint son secteur de prospection de onze à cinq, puis trois départements, l'avait contraint de travailler pour les sociétés DEL et CLASS en méconnaissance de la nature de ses fonctions et des stipulations du contrat de travail et qu'aucun avenant ne lui avait été proposé afin de régulariser sa situation à la différence de plusieurs de ses collègues (cf. conclusions d'appel page 48 à 50) ; qu'en s'abstenant de rechercher si ces faits laissaient présumer le harcèlement moral invoqué, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

3°) ET ALORS, subsidiairement, QU'en énonçant que « le salarié n'apporte pas suffisamment d'éléments qui attestent d'un harcèlement », sans autrement motiver sa décision, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. N... de sa demande indemnitaire au titre du travail dissimulé et, en conséquence, d'AVOIR dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. N... produit les effets d'une démission et débouté le salarié de ses demandes de rappel de salaire sur préavis et d'indemnités au titre d'un licenciement ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur la prise d'acte : il résulte de la combinaison des articles L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement de l'employeur suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; que cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; que le salarié qui a pris l'initiative de la rupture au travers d'une prise d'acte doit supporter la charge de la preuve des manquements de l'employeur qu'il invoque ; que selon les termes de son courrier du 5 décembre 2015, M. N... a pris acte de la rupture de son contrat de travail compte tenu du défaut de paiement de sa prime d'objectif, des modifications de son secteur géographique, de l'absence de proposition d'avenant à son contrat de travail ; que le salarié invoque les modifications substantielles ainsi apportées à son contrat de travail par l'employeur touchant notamment à la redéfinition de ses fonctions imposée sans formation adéquate et en portant atteinte à sa sécurité, le harcèlement moral et la discrimination dont il a été victime ; que la lecture de l'avenant soumis à la signature de M. N... en fin d'année 2014 révèle une modification profonde du contrat de travail puisqu'il s'agissait d'opérer la mutation du salarié auprès d'un nouvel employeur, la société FPB, de modifier la structure de sa rémunération, de préciser la nature et l'étendue de ses obligations professionnelles, de restreindre son secteur géographique d'activité, de modifier les conditions matérielles de prise en charge de ses frais professionnels, de lui fixer des objectifs chiffrés et de mettre à sa charge une obligation de non concurrence ; que le seul fait pour l'employeur d'envisager la modification du contrat de travail d'un salarié dans le cadre de la réorganisation par fusion de l'ensemble des services commerciaux des sociétés CEC, DEL et CLASS, tel que présentée lors de la réunion commerciale du 1er décembre 2014, ne peut constituer un manquement à ses obligations contractuelles dès lors que cette modification découle d'orientations stratégiques relevant de son pouvoir de direction et qu'en toute hypothèse, une telle modification suppose l'accord du salarié ; que M. N... ayant refusé ces modifications comme il était en droit de le faire, seules les stipulations de l'avenant du 22 novembre 2010 pouvaient continuer de régir la relation de travail ; que le salarié reproche à la société CEC de lui avoir néanmoins imposé plusieurs modifications substantielles de ce contrat ; que le contrat de travail stipule que le secteur commercial attribué à M. N... est composé des onze départements suivants : 10, 12, 15, 19, 34, 41, 45, 46, 73, 74 et 89, mais qu'il est susceptible de modification « en fonction des objectifs' économiques de l'entreprise » ; qu'il prévoit une rémunération forfaitaire sous forme de salaire fixe mensuel et qu'« en fonction de la performance de l'entreprise et du salarié, des primes diverses peuvent être allouées » primes qualifiées d'exceptionnelles et d'aléatoires, dont les critères d'attribution relèvent du pouvoir de décision de l'entreprise ; que le contrat de travail précise que le salarié a pour mission notamment de développer les parts de marché d'un portefeuille existant, d'assurer une activité régulière de prospection et d'appliquer la politique commerciale dans le cadre de la stratégie du Groupe FIJA, qu'il est placé sous l'autorité de la Direction Générale et de la Direction Commerciale, qu'il doit en outre respecter les objectifs débattus entre lui-même et l'employeur ; qu'il résulte des productions que le secteur géographique confié à M. N... a été réduit au début de l'année 2015 pour ne plus comprendre que cinq départements : 34, 73, 74, 23 et 87 ; que si le salarié soutient qu'à l'occasion d'une réunion au début du mois de novembre 2015, une nouvelle réduction de son secteur d'activité aux seuls départements (73, 74 et 23) lui a été annoncée, il n'en apporte aucune preuve ; que dans le cadre de la mutualisation des forces de vente des trois filiales (CEC, DEL, CLASS), la modification du secteur géographique s'est accompagnée d'une diversification de la gamme des produits commercialisés et les données chiffrées d'évolution des ventes sur le secteur attribué à M. N... produites par l'employeur font apparaître une érosion marginale du chiffre d'affaires de -2% en 2014 et de -1% en 2015 ; que l'examen de ces chiffres révèle que le chiffre d'affaires de l'ancien secteur (3.435.176 euros en 2014 et 3.534.100 euros en 2015) est en réalité inférieur à celui du nouveau (3.706.637 euros en 2014 et 3.665.803 euros en 2015) ; que cette réalité est au demeurant admise par M. N... qui reconnaît (p. 12 de ses conclusions) que l'adjonction du chiffre d'affaires réalisé sur les produits DEL et CLASS, malgré la perte de six départements, avait fait progresser les résultats de son secteur de 48,73 % ; que compte tenu de la nouvelle politique commerciale adoptée par l'employeur dès le début de l'année 2015 et des résultats enregistrés par le salarié sur cette même année, il n'est pas établi que la modification du secteur géographique confié à M. N... ait été de nature à obérer ses résultats ; que les incidences de cette modification sur la rémunération du salarié ne sont pas non plus démontrées alors que le contrat de travail de M. N... prévoit une rémunération forfaitaire, sans part variable contractualisée assise sur la réalisation d'objectifs ; que si M. N... s'est vu attribuer de manière continue depuis 2011 une prime sur objectifs versée au mois d'octobre, l'examen de ses bulletins de salaire montre que le montant de cette prime a varié à la baisse comme à la hausse (3.213 €, 641 €, 933 €, 1.632 €) au cours des quatre années précédant la rupture ; que si ces fluctuations sont inhérentes aux bases de calcul évoquées dans le contrat de travail, il résulte par ailleurs des explications de M. N..., comme du tableau de son calcul pour 2015 versé par la société DEL, que cette prime procède de la répartition d'une enveloppe déterminée par l'employeur entre tous les commerciaux, à raison de la réalisation de leurs objectifs personnels, mais également de leur participation à un objectif collectif ; que, bien que non contractualisée, les caractères de constance, de généralité et de fixité dans le mode de calcul sont réunis pour conférer à cette prime la nature d'un usage obligeant l'employeur ; que si en 2015, la réorganisation du service commercial par fusion des trois sociétés CEC, DEL, CLASS a conduit à accroître le nombre de salariés concernés par la répartition de l'enveloppe de prime, cette augmentation n'a eu aucune incidence sur le mode de calcul de la prime et ne peut constituer une violation des obligations contractuelles de l'employeur ; que de surcroît, il s'agit d'une prime annuelle ne représentant qu'une part modeste (2,77% en 2014) de la rémunération annuelle de M. N... ; qu'il sera observé en outre que si cette prime n'a pas été versée au salarié au mois d'octobre, comme habituellement, M. N... n'a élevé aucune réclamation à ce titre et le versement de cette prime a été opéré au mois de décembre dans le cadre du solde de tout compte ; que le salarié ne caractérise pas au titre de la prime d'objectifs un manquement de la société DEL suffisamment grave pour empêcher la poursuite de la relation de travail ; que les objectifs du projet « FIJ'UP », la nouvelle stratégie commerciale du Groupe FIJA et la réorganisation du service commercial ont été présentés aux salariés lors des réunions commerciales de décembre 2014, des 8 et 9 octobre 2015, ainsi que dans le cadre des réunions des délégués du personnel au cours de l'année 2015 ; qu'il est patent que la préparation du projet de fusion s'est traduit par la mutualisation des équipes commerciales et la modification des missions jusque-là exercées par les salariés de la société CEC ; que M. N... justifie par la production d'échanges de courriels qu'il a été amené à intervenir au titre du Service Après-Vente, que de nouvelles méthodes de promotion commerciale (show road) lui ont été imposées ; que néanmoins, son contrat de travail lui faisait obligation de mettre en oeuvre la stratégie commerciale du Groupe FIJA et d'appliquer les méthodes qui lui seraient indiquées ; qu'il résulte en outre des éléments produits aux débats que si les commerciaux de la société CEC se sont vus confier des missions relevant du service après-vente, notamment concernant des produits fabriqués par DEL et CLASS, ces interventions étaient réalisées soit en binôme avec un technicien de ces sociétés, soit avec son support ; qu'il n'est en outre pas démontré que l'intervention de M. N... ait dépassé un cadre purement commercial et que le salarié ait été amené à réaliser des gestes techniques nécessitant une formation spécifique, voire une habilitation électrique comme il l'allègue, qui l'auraient exposé à un risque pour sa santé ou son intégrité physique ; que par ailleurs, si les salariés de CEC se sont trouvés placés à compter de janvier 2015 sous les directives du directeur des ventes de DEL, cette situation n'a pas créé pour eux de soumission à un degré hiérarchique supplémentaire, mais à une direction commerciale dyarchique ; que contrairement aux affirmations de M. N..., la société DEL/CEC justifie de l'organisation de formations dispensées aux commerciaux dès le mois d'octobre 2014 par la société DEL sur les produits de fabrication, ainsi que le 17 novembre 2014 sur les nouveautés 2015 ; que les termes du courriel de M. J... du 16 novembre 2015 permettent de comprendre qu'une autre session de formation était d'ores et déjà prévue pour la fin de l'année 2015 avant que M. N... ne notifie sa prise d'acte, quand bien même la date effective de cette formation lui est postérieure en raison d'un changement de dates ; que de plus, les extraits de catalogues de la société CEC permettent de constater que M. N... commercialisait des produits de même nature que ceux des sociétés DEL et CLASS et possédait déjà à ce titre une connaissance technique de ces produits ; que par ailleurs, le salarié ne justifie d'aucune demande particulière d'utilisation de ses droits au DIF ; que M. N... allègue de méthodes managériales et de pressions psychologiques exercées sur lui pour le contraindre à accepter la modification de son contrat de travail ou à quitter l'entreprise, de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre ; que pour ce qui est des pressions alléguées, le salarié n'en rapporte aucune preuve ; qu'après le refus par M. N... de signer l'avenant de son contrat de travail proposé par la société CEC, l'employeur ne démontre pas avoir formalisé d'autres propositions contractuelles auprès de son salarié ; qu'en effet si ce dernier a été informé de nouvelles propositions lors d'une réunion le 2 mars 2015 et bien que de nouveaux projets d'avenants aient été rédigés, il n'est pas démontré qu'ils ont bien été transmis à l'intéressé ; que pour autant, les échanges de courriel permettent de se convaincre de l'existence de négociations entre les conseils des parties ; que s'il indique que l'employeur s'est systématiquement soustrait à ses demandes d'entrevue et à ses sollicitations au sujet de son avenir au sein de l'entreprise, M. N... ne justifie d'aucune démarche auprès de sa direction avant le 30 novembre 2015, date à laquelle il a contacté la directrice des ressources humaines pour envisager les modalités de son départ, l'employeur procédant alors à des simulations de calcul des indemnités de rupture ; que la situation de délaissement et d'incertitude décrite par le salarié n'est pas corroborée par les éléments de fait et ces derniers ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement ; que le salarié met en avant le fait qu'à la différence de ses collègues ayant régularisé l'avenant à leur contrat de travail, il n'a pas perçu la prime liée au critère de satisfaction de la clientèle (SAT CLI) alors qu'il a été soumis à la même évaluation et qu'il a dû partager avec ces derniers l'enveloppe de la prime d'objectif ; que cependant, à défaut d'avoir accepté la modification de son contrat de travail, incluant la détermination de sa rémunération, le salarié ne peut valablement revendiquer le versement d'une prime non prévue par son contrat de travail ; que par ailleurs, il décrit lui-même des situations contractuelles différentes qui ne peuvent conduire à retenir la violation d'un principe d'égalité, tout autant qu'une discrimination à son encontre ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. N... échoue à établir la preuve de manquements de son employeur suffisamment graves pour empêcher la poursuite de la relation de travail et justifier qu'il prenne l'initiative de la rupture ; qu'ils font apparaître qu'en réalité, le salarié s'est trouvé en désaccord avec le projet de fusion des trois sociétés CEC, DEL et CLASS décidé par le Groupe FIJA et la modification de la stratégie et des méthodes commerciales qu'il impliquait ; qu'en conséquence, la prise d'acte de la rupture par le salarié le 5 décembre 2015 doit produire les effets d'une démission ; que le jugement du conseil de prud'hommes sera partiellement infirmé en ce sens et M. N... devra être débouté de ses demandes de rappels de salaires sur préavis, d'indemnités au titre d'un licenciement ; que la décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle déboute M. N... de ses demandes indemnitaires au titre du harcèlement moral, de l'obligation de formation, de la non-délivrance des bulletins de paie relatifs à un préavis ; qu'il résulte de ce qui précède que M. N... ne peut prétendre à se voir indemnisé de faits de discrimination et de manquement à l'obligation de loyauté ; qu'il sera débouté de ces demandes nouvelles en appel ; que, sur le travail dissimulé : il ne peut être contesté qu'après la fusion des services commerciaux des sociétés CEC, DEL et CLASS, M. N... a été conduit à travailler avec des salariés des autres filiales et qu'il a également reçu des directives de M. J..., directeur des ventes de la société DEL ; que cependant, le contexte de fusion entre les sociétés du groupe ne permet pas de retenir l'intention frauduleuse nécessaire à la caractérisation du travail dissimulé ; que le jugement critiqué sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande indemnitaire de M. N... ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE l'article L. 8221-5 du code du travail dispose qu'« est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur : 1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ; 2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ; 3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales » ; qu'il n'est pas établi par M. N... X... que la société CEC ait eu l'intention de dissimuler son travail ; qu'en conséquence, il ne sera pas fait droit à la demande ;

1°) ALORS QU'en retenant qu'« après la fusion des services commerciaux des sociétés CEC, DEL et CLASS, M. N... a été conduit à travailler avec des salariés des autres filiales et qu'il a également reçu des directives de M. J..., directeur des ventes de la société DEL », quand, ni le salarié, ni l'employeur, n'alléguait que la fusion de ces trois entités serait intervenue à une date antérieure à la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le prêt de main-d'oeuvre à but non lucratif suppose l'accord exprès du salarié concerné ; qu'en l'espèce, M. N... soutenait qu'en dépit du refus par lui exprimé de signer l'avenant au contrat de travail qui lui avait été proposé le 3 décembre 2014, la société CEC l'avait contraint à vendre les produits des sociétés DEL et CLASS et à en assurer le service après-vente, en plus de ceux dont il assurait le négoce pour le compte de l'employeur (cf. conclusions d'appel page 36 à 39) ; qu'il ajoutait qu'en l'absence d'accord exprès de sa part, il avait été irrégulièrement mis à la disposition des sociétés DEL et CLASS, ce qui constituait un prêt illicite de main d'oeuvre à but non lucratif (cf. conclusions d'appel p. 47) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire des conclusions du salarié, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ET ALORS, subsidiairement, QUE constitue le délit de marchandage, toute opération à but lucratif de fourniture de main-d'oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu'elle concerne ou d'éluder l'application de dispositions légales ou de stipulations d'une convention ou d'un accord collectif de travail ; que M. N... faisait encore valoir qu'en le contraignant à travailler pour le compte des sociétés DEL et CLASS en dépit de son refus de signer l'avenant de mutation qui lui avait été proposé, l'employeur avait commis le délit de marchandage (cf. conclusions d'appel p. 47) ; qu'en omettant de répondre à cet autre chef des écritures du salarié, la cour d'appel a derechef violé l'article 455 du code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. N... de ses demandes de rappel de salaire sur préavis et, en conséquence, de sa demande en délivrance de bulletins de paie pour cette période ;

AUX MOTIFS QUE, sur la prise d'acte : il résulte de la combinaison des articles L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement de l'employeur suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; que cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; que le salarié qui a pris l'initiative de la rupture au travers d'une prise d'acte doit supporter la charge de la preuve des manquements de l'employeur qu'il invoque ; que selon les termes de son courrier du 5 décembre 2015, M. N... a pris acte de la rupture de son contrat de travail compte tenu du défaut de paiement de sa prime d'objectif, des modifications de son secteur géographique, de l'absence de proposition d'avenant à son contrat de travail ; que le salarié invoque les modifications substantielles ainsi apportées à son contrat de travail par l'employeur touchant notamment à la redéfinition de ses fonctions imposée sans formation adéquate et en portant atteinte à sa sécurité, le harcèlement moral et la discrimination dont il a été victime ; que la lecture de l'avenant soumis à la signature de M. N... en fin d'année 2014 révèle une modification profonde du contrat de travail puisqu'il s'agissait d'opérer la mutation du salarié auprès d'un nouvel employeur, la société FPB, de modifier la structure de sa rémunération, de préciser la nature et l'étendue de ses obligations professionnelles, de restreindre son secteur géographique d'activité, de modifier les conditions matérielles de prise en charge de ses frais professionnels, de lui fixer des objectifs chiffrés et de mettre à sa charge une obligation de non concurrence ; que le seul fait pour l'employeur d'envisager la modification du contrat de travail d'un salarié dans le cadre de la réorganisation par fusion de l'ensemble des services commerciaux des sociétés CEC, DEL et CLASS, tel que présentée lors de la réunion commerciale du 1er décembre 2014, ne peut constituer un manquement à ses obligations contractuelles dès lors que cette modification découle d'orientations stratégiques relevant de son pouvoir de direction et qu'en toute hypothèse, une telle modification suppose l'accord du salarié ; que M. N... ayant refusé ces modifications comme il était en droit de le faire, seules les stipulations de l'avenant du 22 novembre 2010 pouvaient continuer de régir la relation de travail ; que le salarié reproche à la société CEC de lui avoir néanmoins imposé plusieurs modifications substantielles de ce contrat ; que le contrat de travail stipule que le secteur commercial attribué à M. N... est composé des onze départements suivants : 10, 12, 15, 19, 34, 41, 45, 46, 73, 74 et 89, mais qu'il est susceptible de modification « en fonction des objectifs' économiques de l'entreprise » ; qu'il prévoit une rémunération forfaitaire sous forme de salaire fixe mensuel et qu'« en fonction de la performance de l'entreprise et du salarié, des primes diverses peuvent être allouées » primes qualifiées d'exceptionnelles et d'aléatoires, dont les critères d'attribution relèvent du pouvoir de décision de l'entreprise ; que le contrat de travail précise que le salarié a pour mission notamment de développer les parts de marché d'un portefeuille existant, d'assurer une activité régulière de prospection et d'appliquer la politique commerciale dans le cadre de la stratégie du Groupe FIJA, qu'il est placé sous l'autorité de la Direction Générale et de la Direction Commerciale, qu'il doit en outre respecter les objectifs débattus entre lui-même et l'employeur ; qu'il résulte des productions que le secteur géographique confié à M. N... a été réduit au début de l'année 2015 pour ne plus comprendre que cinq départements : 34, 73, 74, 23 et 87 ; que si le salarié soutient qu'à l'occasion d'une réunion au début du mois de novembre 2015, une nouvelle réduction de son secteur d'activité aux seuls départements (73, 74 et 23) lui a été annoncée, il n'en apporte aucune preuve ; que dans le cadre de la mutualisation des forces de vente des trois filiales (CEC, DEL, CLASS), la modification du secteur géographique s'est accompagnée d'une diversification de la gamme des produits commercialisés et les données chiffrées d'évolution des ventes sur le secteur attribué à M. N... produites par l'employeur font apparaître une érosion marginale du chiffre d'affaires de -2% en 2014 et de -1% en 2015 ; que l'examen de ces chiffres révèle que le chiffre d'affaires de l'ancien secteur (3.435.176 euros en 2014 et 3.534.100 euros en 2015) est en réalité inférieur à celui du nouveau (3.706.637 euros en 2014 et 3.665.803 euros en 2015) ; que cette réalité est au demeurant admise par M. N... qui reconnaît (p. 12 de ses conclusions) que l'adjonction du chiffre d'affaires réalisé sur les produits DEL et CLASS, malgré la perte de six départements, avait fait progresser les résultats de son secteur de 48,73 % ; que compte tenu de la nouvelle politique commerciale adoptée par l'employeur dès le début de l'année 2015 et des résultats enregistrés par le salarié sur cette même année, il n'est pas établi que la modification du secteur géographique confié à M. N... ait été de nature à obérer ses résultats ; que les incidences de cette modification sur la rémunération du salarié ne sont pas non plus démontrées alors que le contrat de travail de M. N... prévoit une rémunération forfaitaire, sans part variable contractualisée assise sur la réalisation d'objectifs ; que si M. N... s'est vu attribuer de manière continue depuis 2011 une prime sur objectifs versée au mois d'octobre, l'examen de ses bulletins de salaire montre que le montant de cette prime a varié à la baisse comme à la hausse (3.213 €, 641 €, 933 €, 1.632 €) au cours des quatre années précédant la rupture ; que si ces fluctuations sont inhérentes aux bases de calcul évoquées dans le contrat de travail, il résulte par ailleurs des explications de M. N..., comme du tableau de son calcul pour 2015 versé par la société DEL, que cette prime procède de la répartition d'une enveloppe déterminée par l'employeur entre tous les commerciaux, à raison de la réalisation de leurs objectifs personnels, mais également de leur participation à un objectif collectif ; que, bien que non contractualisée, les caractères de constance, de généralité et de fixité dans le mode de calcul sont réunis pour conférer à cette prime la nature d'un usage obligeant l'employeur ; que si en 2015, la réorganisation du service commercial par fusion des trois sociétés CEC, DEL, CLASS a conduit à accroître le nombre de salariés concernés par la répartition de l'enveloppe de prime, cette augmentation n'a eu aucune incidence sur le mode de calcul de la prime et ne peut constituer une violation des obligations contractuelles de l'employeur ; que de surcroît, il s'agit d'une prime annuelle ne représentant qu'une part modeste (2,77% en 2014) de la rémunération annuelle de M. N... ; qu'il sera observé en outre que si cette prime n'a pas été versée au salarié au mois d'octobre, comme habituellement, M. N... n'a élevé aucune réclamation à ce titre et le versement de cette prime a été opéré au mois de décembre dans le cadre du solde de tout compte ; que le salarié ne caractérise pas au titre de la prime d'objectifs un manquement de la société DEL suffisamment grave pour empêcher la poursuite de la relation de travail ; que les objectifs du projet « FIJ'UP », la nouvelle stratégie commerciale du Groupe FIJA et la réorganisation du service commercial ont été présentés aux salariés lors des réunions commerciales de décembre 2014, des 8 et 9 octobre 2015, ainsi que dans le cadre des réunions des délégués du personnel au cours de l'année 2015 ; qu'il est patent que la préparation du projet de fusion s'est traduit par la mutualisation des équipes commerciales et la modification des missions jusque-là exercées par les salariés de la société CEC ; que M. N... justifie par la production d'échanges de courriels qu'il a été amené à intervenir au titre du Service Après-Vente, que de nouvelles méthodes de promotion commerciale (show road) lui ont été imposées ; que néanmoins, son contrat de travail lui faisait obligation de mettre en oeuvre la stratégie commerciale du Groupe FIJA et d'appliquer les méthodes qui lui seraient indiquées ; qu'il résulte en outre des éléments produits aux débats que si les commerciaux de la société CEC se sont vus confier des missions relevant du service après-vente, notamment concernant des produits fabriqués par DEL et CLASS, ces interventions étaient réalisées soit en binôme avec un technicien de ces sociétés, soit avec son support ; qu'il n'est en outre pas démontré que l'intervention de M. N... ait dépassé un cadre purement commercial et que le salarié ait été amené à réaliser des gestes techniques nécessitant une formation spécifique, voire une habilitation électrique comme il l'allègue, qui l'auraient exposé à un risque pour sa santé ou son intégrité physique ; que par ailleurs, si les salariés de CEC se sont trouvés placés à compter de janvier 2015 sous les directives du directeur des ventes de DEL, cette situation n'a pas créé pour eux de soumission à un degré hiérarchique supplémentaire, mais à une direction commerciale dyarchique ; que contrairement aux affirmations de M. N..., la société DEL/CEC justifie de l'organisation de formations dispensées aux commerciaux dès le mois d'octobre 2014 par la société DEL sur les produits de fabrication, ainsi que le 17 novembre 2014 sur les nouveautés 2015 ; que les termes du courriel de M. J... du 16 novembre 2015 permettent de comprendre qu'une autre session de formation était d'ores et déjà prévue pour la fin de l'année 2015 avant que M. N... ne notifie sa prise d'acte, quand bien même la date effective de cette formation lui est postérieure en raison d'un changement de dates ; que de plus, les extraits de catalogues de la société CEC permettent de constater que M. N... commercialisait des produits de même nature que ceux des sociétés DEL et CLASS et possédait déjà à ce titre une connaissance technique de ces produits ; que par ailleurs, le salarié ne justifie d'aucune demande particulière d'utilisation de ses droits au DIF ; que M. N... allègue de méthodes managériales et de pressions psychologiques exercées sur lui pour le contraindre à accepter la modification de son contrat de travail ou à quitter l'entreprise, de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre ; que pour ce qui est des pressions alléguées, le salarié n'en rapporte aucune preuve ; qu'après le refus par M. N... de signer l'avenant de son contrat de travail proposé par la société CEC, l'employeur ne démontre pas avoir formalisé d'autres propositions contractuelles auprès de son salarié ; qu'en effet si ce dernier a été informé de nouvelles propositions lors d'une réunion le 2 mars 2015 et bien que de nouveaux projets d'avenants aient été rédigés, il n'est pas démontré qu'ils ont bien été transmis à l'intéressé ; que pour autant, les échanges de courriel permettent de se convaincre de l'existence de négociations entre les conseils des parties ; que s'il indique que l'employeur s'est systématiquement soustrait à ses demandes d'entrevue et à ses sollicitations au sujet de son avenir au sein de l'entreprise, M. N... ne justifie d'aucune démarche auprès de sa direction avant le 30 novembre 2015, date à laquelle il a contacté la directrice des ressources humaines pour envisager les modalités de son départ, l'employeur procédant alors à des simulations de calcul des indemnités de rupture ; que la situation de délaissement et d'incertitude décrite par le salarié n'est pas corroborée par les éléments de fait et ces derniers ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement ; que le salarié met en avant le fait qu'à la différence de ses collègues ayant régularisé l'avenant à leur contrat de travail, il n'a pas perçu la prime liée au critère de satisfaction de la clientèle (SAT CLI) alors qu'il a été soumis à la même évaluation et qu'il a dû partager avec ces derniers l'enveloppe de la prime d'objectif ; que cependant, à défaut d'avoir accepté la modification de son contrat de travail, incluant la détermination de sa rémunération, le salarié ne peut valablement revendiquer le versement d'une prime non prévue par son contrat de travail ; que par ailleurs, il décrit lui-même des situations contractuelles différentes qui ne peuvent conduire à retenir la violation d'un principe d'égalité, tout autant qu'une discrimination à son encontre ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. N... échoue à établir la preuve de manquements de son employeur suffisamment graves pour empêcher la poursuite de la relation de travail et justifier qu'il prenne l'initiative de la rupture ; qu'ils font apparaître qu'en réalité, le salarié s'est trouvé en désaccord avec le projet de fusion des trois sociétés CEC, DEL et CLASS décidé par le Groupe FIJA et la modification de la stratégie et des méthodes commerciales qu'il impliquait ; qu'en conséquence, la prise d'acte de la rupture par le salarié le 5 décembre 2015 doit produire les effets d'une démission ; que le jugement du conseil de prud'hommes sera partiellement infirmé en ce sens et M. N... devra être débouté de ses demandes de rappels de salaires sur préavis, d'indemnités au titre d'un licenciement ; que la décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle déboute M. N... de ses demandes indemnitaires au titre du harcèlement moral, de l'obligation de formation, de la non-délivrance des bulletins de paie relatifs à un préavis ;

ALORS QUE le salarié a droit au paiement du préavis qu'il a offert d'effectuer et dont l'employeur l'a expressément dispensé ; que, pour débouter M. N... de sa demande de rappel de salaire au titre du préavis, la cour d'appel s'est bornée à dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisait, en l'absence de manquement imputable à l'employeur suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail, les effets d'une démission ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (cf. conclusions d'appel de M. N... p. 52 § 10 et suiv.), si le salarié avait offert d'effectuer son préavis et si l'employeur l'avait expressément délié de l'exécution de celui-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil en sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-11323
Date de la décision : 26/06/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 28 novembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jui. 2019, pourvoi n°18-11323


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.11323
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