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19/06/2019 | FRANCE | N°18-83659

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 juin 2019, 18-83659


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

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M. N... P...,
M. Y... X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBÉRY, chambre correctionnelle, en date du 9 mai 2018, qui, les a condamnés chacun à sept ans d'emprisonnement, à cinq ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation et a ordonné une mesure de confiscation, le premier pour tentative d'évasion aggravée et association de malfaiteurs, et le second pour complicité de tentative d'évasion aggravée, destr

uction du bien d'autrui par un moyen dangereux, vol aggravé, recel et association de malf...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

-
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M. N... P...,
M. Y... X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBÉRY, chambre correctionnelle, en date du 9 mai 2018, qui, les a condamnés chacun à sept ans d'emprisonnement, à cinq ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation et a ordonné une mesure de confiscation, le premier pour tentative d'évasion aggravée et association de malfaiteurs, et le second pour complicité de tentative d'évasion aggravée, destruction du bien d'autrui par un moyen dangereux, vol aggravé, recel et association de malfaiteurs ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 22 mai 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Stephan, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Guichard ;

Sur le rapport de M. le conseiller Stephan, les observations de la société civile professionnelle NICOLAŸ, DE LANOUVELLE et HANNOTIN, de la société civile professionnelle SEVAUX et MATHONNET, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général MORACCHINI ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 9 mai 2012, un détenu, M. P..., a été transféré vers un centre hospitalier à la suite d'une tentative de suicide, laquelle devait ensuite se révéler simulée ; que le véhicule des services de secours a été bloqué, sur l'autoroute, par un véhicule utilitaire volé ; que le détenu est parvenu à s'extraire de l'ambulance mais a été immédiatement repris et qu'un comparse, M. X..., a été identifié puis interpellé pour avoir participé à cette opération ; que, renvoyés devant le tribunal correctionnel par ordonnance du juge d'instruction en date du 23 février 2017, les deux prévenus ont été déclarés coupables, le premier de tentative d'évasion avec port d'arme et association de malfaiteurs et le second de complicité de tentative d'évasion avec port d'arme, destruction du bien d'autrui par un moyen dangereux, vol aggravé, recel et association de malfaiteurs ; qu'ils ont été condamnés à sept ans d'emprisonnement, à cinq ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation et à la confiscation des scellés ; que les prévenus et le ministère public ont interjeté appel ;

En cet état ;

Sur la recevabilité du mémoire complémentaire de la SCP Nicolaÿ, DE LANOUVELLE et HANNOTIN parvenu le 12 février 2019 à la Cour de cassation :

Attendu qu'en application de l'article 590, alinéa 3, du code de procédure pénale, ce mémoire, en ce qu'il propose un moyen additionnel pour M. P..., produit postérieurement au dépôt du rapport, le 11 février 2019, est irrecevable ;

Sur le deuxième moyen de cassation présenté pour M. X..., pris de la violation des articles 121-1, 322-6 du code pénal, 485 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré monsieur X... coupable de destruction du bien d'autrui par un moyen dangereux pour les personnes et l'a condamné à une peine de sept ans d'emprisonnement ;

"1°) alors que le délit incriminé par l'article 322-6 du code pénal suppose que le moyen employé, y compris lorsqu'il s'agit d'un incendie, soit de nature à créer un danger pour les personnes et que l'auteur ait eu conscience de ce danger ; qu'en s'abstenant de relever les circonstances de fait de nature à établir que le moyen de destruction était de nature à créer un danger pour les personnes, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision;

"2°) alors que nul n'étant responsable personnellement que de son propre fait, il appartient au juges du fond de caractériser à l'encontre des prévenus des actes matériels constitutifs de l'infraction reprochée et de s'expliquer sur leur degré respectif d'implication en qualité d'auteur ou, le cas échéant, de complice de l'action ainsi entreprise ; qu'en se bornant à constater que monsieur X... avait participé à la mise à feu du véhicule Laguna sans préciser s'il avait commis les éléments matériels de cette infraction ou s'il avait seulement aidé ou assisté l'auteur de cette infraction, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision";
Attendu que, pour déclarer M. X... coupable du délit de destruction du bien d'autrui par un moyen dangereux pour les personnes, prévu par l'article 322-6 du code pénal, l'arrêt retient que le véhicule Renault Laguna volé ayant servi à la tentative d'évasion a été détruit par le feu et que le prévenu a reconnu avoir participé au déclenchement de l'incendie, après avoir pris la fuite ;

Qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié la participation du prévenu à la commission du délit, a justifié sa décision sans encourir les griefs formulés au moyen, dès lors que l'incendie du véhicule constitue par nature un danger pour les personnes ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen de cassation présenté pour M. X..., pris de la violation du principe ne bis in idem, de l'article 4 du septième protocole additionnel à la Convention des droits de l'homme, des articles 121-4, 121-6, 121-7 alinéa 1er, 450-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que la cour d'appel a déclaré M. Y... X... coupable de complicité de tentative d'évasion aggravée et d'association de malfaiteurs, et l'a condamné à une peine de sept ans d'emprisonnement ;

"1°) alors que nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement plusieurs fois à raison des mêmes faits ; que l'aide ou l'assistance à la préparation d'une infraction ne peut être qualifiée à la fois de complicité et de participation à une association de malfaiteurs lorsque cette association a été établie en vue de cette seule infraction ; qu'en caractérisant la participation à une association de malfaiteurs au regard des échanges téléphoniques par lesquels les prévenus avaient organisé la tentative d'évasion et la réunion de moyens nécessaires à sa réalisation, et en retenant, dans le même temps, la complicité de M. X... pour avoir, par ces mêmes faits, apporté son aide à la tentative d'évasion, la cour d'appel a méconnu le principe précité ;

"2°) alors que des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le même prévenu, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elles concomitantes ; qu'en déclarant le prévenu coupable de participation à une association de malfaiteurs établie en vue de l'infraction d'évasion et de complicité d'évasion, quand il résulte de ses propres constatations que les faits de complicité se limitaient à participer à l'unique infraction en vue de laquelle l'association de malfaiteurs était établie de sorte que l'ensemble de ces faits procédaient de manière indissociable d'une action unique caractérisée par la seule intention coupable de participer à l'évasion de M. P..., la cour d'appel a méconnu le principe ne bis in idem" ;

Vu le principe "ne bis in idem" ;

Attendu que des faits qui procèdent de manière indissociable
d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le même prévenu, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elle concomitantes ;

Attendu que, pour entrer en voie de condamnation à l'encontre des deux prévenus du chef d'association de malfaiteurs, l'arrêt retient l'existence d'un trafic téléphonique important entre eux dans un temps très proche des faits, l'organisation d'une fausse tentative de suicide, et la mise à disposition de deux véhicules préalablement volés ; que les juges en concluent que ces éléments démontrent l'existence d'une entente établie en vue de la préparation du délit d'évasion avec usage d'une arme ;

Attendu que, pour déclarer M. X... coupable de complicité de tentative d'évasion avec port d'arme, l'arrêt expose que l'intéressé a fait usage d'une bombe lacrymogène et tenu des propos menaçants pour faciliter la fuite de M. P... ;

Mais attendu qu'en caractérisant l'association de malfaiteurs par des actes indissociables de la complicité de tentative d'évasion aggravée reprochée à M. X..., à savoir les appels téléphoniques à M. P... dans un temps très proche des faits et la mise à disposition de celui-ci de deux véhicules volés, la cour d'appel a méconnu le principe ci-dessus énoncé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Et sur le moyen relevé d'office pour M. P..., pris de la violation de l'article 111-3 du code pénal :

Vu ledit article ;

Attendu qu'en application du second alinéa de ce texte, nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi si l'infraction est un crime ou un délit ;

Attendu qu'après avoir déclaré M. P... coupable de tentative d'évasion avec usage d'une arme et association de malfaiteurs, l'arrêt le condamne, notamment, à l'interdiction pendant cinq ans de détenir ou porter une arme soumise à autorisation ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que cette peine n'est pas prévue en répression du délit d'évasion, ni du délit d'association de malfaiteurs, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé ;

D'où il suit que la cassation est de nouveau encourue ;

Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de cassation proposé :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Chambéry, en date du 9 mai 2018, en ses dispositions concernant la déclaration de culpabilité de M. X... ainsi que les peines prononcées à l'encontre des deux prévenus, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Chambéry, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Chambéry et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-neuf juin deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 18-83659
Date de la décision : 19/06/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 09 mai 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 jui. 2019, pourvoi n°18-83659


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.83659
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