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19/06/2019 | FRANCE | N°18-16827

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 19 juin 2019, 18-16827


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'alléguant l'existence de créances par elle détenues sur la SCI Arlotea (la SCI), la société D... distribution, mise en redressement judiciaire par jugement du 30 septembre 2013 et représentée par son administrateur judiciaire, M. V..., l'a assignée en paiement ; que M. I..., désigné par décision du 10 février 2014 en qualité de liquidateur judiciaire de la société D... distribution, est intervenu volontairement à l'instance ;

Sur le moyen unique, pris e

n sa première branche :

Vu l'article 1315, devenu 1353 du code civil ;

Attend...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'alléguant l'existence de créances par elle détenues sur la SCI Arlotea (la SCI), la société D... distribution, mise en redressement judiciaire par jugement du 30 septembre 2013 et représentée par son administrateur judiciaire, M. V..., l'a assignée en paiement ; que M. I..., désigné par décision du 10 février 2014 en qualité de liquidateur judiciaire de la société D... distribution, est intervenu volontairement à l'instance ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1315, devenu 1353 du code civil ;

Attendu que, pour condamner la SCI à payer à M. I..., ès qualités, la somme de 909 000 euros, dont 389 000 euros au titre du prêt que lui avait consenti en 2002 la société D... distribution, l'arrêt retient que les pièces produites par la SCI afin d'établir qu'elle s'est acquittée de tout ou partie du remboursement de ce prêt et du paiement de ses intérêts ne constituent pas des « documents probants », dès lors qu'elles ne sont pas certifiées par un commissaire aux comptes ni même par un expert-comptable ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la preuve des paiements effectués par la SCI pouvait être apportée par tous moyens, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur la troisième branche du moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour statuer comme il le fait, l'arrêt retient que la SCI ne justifie pas de créances recevables sans déclaration de créance postérieurement à l'ouverture de la procédure collective ;

Qu'en statuant ainsi, sans examiner l'extrait de l'état des "situations en cours - créances nées après le jugement d'ouverture" versé par la SCI et établi par M. I..., ès qualités, mentionnant une créance privilégiée de la société de 197 727,97 euros enregistrée le 23 juin 2015 et une créance de 6 805,57 euros enregistrée le 16 juin 2015 à titre chirographaire, la cour d‘appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la fin de non-recevoir tiré du défaut de qualité à agir de M. V..., ès qualités, ainsi que la demande de sursis à statuer, l'arrêt rendu le 30 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne M. I..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société D... distribution, aux droits duquel vient la société I... et associés, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la société Arlotea.

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la SCI Arlotea à payer à Me I..., ès qualité de liquidateur de la SAS D... Distribution, la somme de 909 000 € avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ;

Aux motifs que « Me I... es qualités sollicite la condamnation de la SCI Arlotea à lui verser le montant de deux créances retenues par le commissaire aux comptes de la SAS D... distribution selon rapport spécial du commissaire aux comptes sur les comptes clos au 31 décembre 2012 en date du 6 juin 2013 soit 389 000 € au titre de la convention de prêt consentie à la SCI Arlotea le 30 mai 2002 avec intérêt au taux de 3% et la somme de 520 000 € au titre d'un virement bancaire intervenu en mars 2012, hors convention de prêt soit un total de 909 000 € (= 389 000 +520 000). Pour en justifier, il produit aussi le grand livre des comptes au 31 décembre 2012 de la SCI Arlotea avec au compte 45510 le compte courant de la société D... Distribution créditeur de 909 000 €.
La SCI Arlotea oppose que le prêt, non contesté, a été remboursé à concurrence de 366 398,04 € les 17 septembre 2002 et 22 décembre 2011 (pièce 48), que les intérêts dus ont été réglés à l'aide de deux virements de 30 000 € dans le courant de l'année 2012 (pièce 47) et divers virements pour 72 000 € en 2013 (pièce 47). Elle ne conteste pas le virement à son profit de 520 000 € en 2012 mais elle oppose compensation d'un certain nombre de créances notamment de loyers et charges dus (loyers d'avril 2014 à février 2015 et charges pour les années 2013 et 2014) et des erreurs comptables notamment dans les comptes sociaux de la SAS D... distribution et de la SCI Arlotea. La cour constate comme le premier juge que les pièces produites par la SCI Arlotea ne sont pas certifiées par un commissaire aux comptes ni même par un expert-comptable et constituent des documents non probants. Sur les erreurs comptables alléguées, elle n'en justifie pas davantage. Par ailleurs, il convient de rappeler que la compensation de créances connexes ne peut être invoquée alors que la SCI Arlotea ne produit aucune déclaration de créance au passif de la SAS D... Distribution pour les créances antérieures à l'ouverture de la procédure collective et ne justifie pas de créances recevables, sans déclaration de créance, postérieurement à l'ouverture de la procédure collective. Dès lors il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SCI Arlotea à payer à Me I... es qualités la somme de 909 000 €. La SCI Arlotea est déboutée de ses demandes de compensation de créances » ;

Et aux motifs adoptés que « l'article 1315 du code civil dispose que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de l'obligation. En l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats par Me I..., à savoir le grand livre des comptes de la SCI Arlotea sur la période du 1er janvier 2012 au 21 décembre 2012 (pièce n°5) et le rapport du commissaire aux comptes sur l'exercice clos de la SCI Arlotea au 31 décembre 2012 (pièce n° 12) que la SCI Arlotea est débitrice de la somme de 909 0000 € au profit de la SAS D... Distribution, déduction faite des deux virements de 30 000 € effectués par la SCI Arlotea dans le courant de l'année 2012. Force est de constater par ailleurs que la SCI Arlotea ne produit aucune pièce attestant d'un versement à hauteur de 72 000 € au profit de la SAS D... Distribution qui viendrait réduire sa créance. De même, il est établi par la pièce n° 11 du requérant que le règlement des loyers dus par la SAS D... Distribution à la SCI Arlotea n'a pas été validé dans l'attente du règlement de la créance de 909 000 €. Enfin, le requérant ayant fait assigner la SCI Arletoa en paiement par acte d'huissier en date du 14 février 2014, il y a lieu de considérer que cette assignation vaut préavis et que Me I..., ès qualité de liquidateur judiciaire de la SA D... Distribution est recevable à exiger le remboursement de sa créance. La SCI Arlotea, pris en la personne de son représentant légal, sera donc condamné à payer à Maître I..., ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS D... Distribution, la somme de 909 000 € au titre d sa créance et ce avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision » ;

Alors, premièrement, que la preuve du paiement peut être apportée par tous moyens ; que pour condamner la SCI Arlotea à payer à Me I..., ès qualité, la somme de 909 000 €, dont 389 000 € au titre du prêt que lui avait consenti en 2002 la SAS D... Distribution, l'arrêt attaqué retient que les pièces produites par la SCI Arlotea afin d'établir qu'elle s'était acquittée de tout ou partie du remboursement de ce prêt et du paiement de ses intérêts ne constituaient pas des « documents probants » dès lors qu'elles n'étaient pas « certifiées par un commissaire aux comptes ni même par un expert-comptable » ; qu'en statuant ainsi, quand la preuve des paiements effectués par la SCI Arlotea pouvait être apportée par tous moyens, y compris par des écrits qui n'avaient pas été certifiés par un commissaire aux comptes ou un expert-comptable, la cour d'appel a limité les modes de preuve admissibles du paiement et violé l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016;

Alors, deuxièmement, et subsidiairement, que la preuve du paiement peut être apportée par tous moyens ; qu'en se déterminant par les mêmes motifs, quand l'absence de certification par un commissaire aux comptes ou un expert-comptable ne la dispensait pas d'analyser de façon au moins sommaire les pièces produites par la SCI Arlotea visant à établir que le prêt de 2002 avait été en tout ou partie remboursé, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors, enfin, que dans ses écritures (p. 23, § 9), la SCI Arlotea produisait aux débats un extrait de l'état des « situations en cours - créances nées après le jugement d'ouverture » établi par Me I..., ès qualité, mentionnant une créance privilégiée de la SCI Arlotea de 197 727, 97 € enregistrée le 23 juin 2015 et une créance de 6 805, 57 € enregistrée le 16 juin 2015 à titre chirographaire ; qu'en retenant que la SCI Aroltea ne justifiait pas de « créances recevables sans déclaration de créance postérieurement à l'ouverture de la procédure collective », sans examiner cette offre de preuve, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-16827
Date de la décision : 19/06/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 30 janvier 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 19 jui. 2019, pourvoi n°18-16827


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.16827
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