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19/06/2019 | FRANCE | N°18-11343

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 juin 2019, 18-11343


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Soc., 30 novembre 2016, pourvoi n° 15-25.066), que MM. U..., K... et M... exerçant les fonctions de voyageur, représentant, placier (VRP) au sein de la société K par K, ont été licenciés respectivement les 5 mars et 3 mai 2012 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de fait

et de preuve dont elle a, sans méconnaître les règles spécifiques de preuve et exerç...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Soc., 30 novembre 2016, pourvoi n° 15-25.066), que MM. U..., K... et M... exerçant les fonctions de voyageur, représentant, placier (VRP) au sein de la société K par K, ont été licenciés respectivement les 5 mars et 3 mai 2012 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de fait et de preuve dont elle a, sans méconnaître les règles spécifiques de preuve et exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1154-1 du code du travail, déduit que les salariés établissaient des faits précis et concordants qui pris dans leur ensemble permettaient de présumer l'existence d'un harcèlement moral et que l'employeur ne démontrait pas que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le moyen, qui en sa troisième branche se heurte au pouvoir souverain d'appréciation par les juges du fond de l'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci, n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu les articles 624, 625 et 638 du code de procédure civile ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que la cassation qui atteint un chef de dispositif n'en laisse rien subsister, quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation ; que par l'effet de la cassation partielle intervenue, aucun des motifs de fait ou de droit ayant justifié la disposition annulée ne subsiste, de sorte que la cause et les parties sont remises de ce chef dans l'état où elles se trouvaient avant la décision censurée et peuvent invoquer de nouveaux moyens à l'appui de leurs prétentions, l'affaire étant à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation ;

Attendu que pour limiter sa saisine à l'examen de l'assiette de calcul des heures supplémentaires, l'arrêt énonce que la cour d'appel, dans son arrêt du 9 juillet 2015, a dit qu'elle tirait la conviction pour chaque salarié qu'il avait accompli les heures supplémentaires dont il réclamait le paiement pour la période considérée, validant ainsi le nombre d'heures concernées par les rappels de salaires, que c'est seulement le mode de calcul utilisé par la cour d'appel prenant pour base le taux horaire déterminé à partir de la rémunération fixe mensuelle qui a été censuré par la cour de cassation laquelle a en revanche répondu au premier moyen du pourvoi principal de l'employeur qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve produits devant elle, la cour d'appel, qui avait retenu que les vendeurs, nonobstant leur statut de voyageur, représentant, placier ne disposaient d'aucune autonomie dans leur organisation et que l'employeur leur imposait un horaire et le contrôlait, avait, répondant aux conclusions, légalement justifié sa décision ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, par l'effet de l'annulation intervenue du chef du dispositif concernant les heures supplémentaires, la cause et les parties avaient été remises, dudit chef tout entier, dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt cassé, de sorte qu'il lui appartenait d'examiner l'ensemble des moyens et prétentions des parties relatifs aux heures supplémentaires, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société K par K à payer à M. K... la somme de 37 611,98 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires et la somme de 3 761,19 euros bruts à titre d'indemnité de congés payés afférents, condamne la société K par K à payer à M. U... la somme de 256 047,91 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires et la somme de 25 604,79 euros bruts à titre d'indemnité de congés payés afférents, condamne la société K par K à payer à M. M... la somme de 54 992,50 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires et la somme de 5 499,25 euros bruts à titre d'indemnité de congés payés afférents, l'arrêt rendu le 29 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne MM. U..., K... et M... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société K par K

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société K par K à payer à M. K... la somme de 37 611,98 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires outre la somme de 3 761,19 euros bruts à titre d'indemnité de congés payés afférents, à payer à M. U... la somme de 256 047,91 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires outre la somme de 25 604,79 euros bruts à titre d'indemnité de congés payés afférents et à payer à M. M... la somme de 54 992,50 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires outre la somme de 5 499,25 euros bruts à titre d'indemnité de congés payés afférents, d'AVOIR condamné la société K par K à payer aux salariés la somme de 1 000 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel en sus de la somme allouée à ce titre par l'arrêt cassé et aux dépens d'appel comprenant ceux de l'arrêt cassé ;

AUX MOTIFS QUE «La cour statue dans les limites de sa saisine, compte-tenu des dispositions du premier arrêt qui ont été cassées par la cour de cassation, les autres dispositions étant revêtues de l'autorité de la chose jugée, et dans les limites des demandes qui lui sont présentées par les trois salariés, demandeurs à la déclaration de saisine, lesquelles concernent la réparation du préjudice causé par le harcèlement moral invoqué et les rappels de salaires pour heures supplémentaires.
(
)
Sur les demandes de rappel de salaires pour heures supplémentaires
La cour de cassation a dit :
- que les éléments de rémunération dont les modalités de fixation permettent leur rattachement direct à l'activité personnelle du salarié doivent être intégrés dans la base de calcul des majorations pour heures supplémentaires
- que, pour évaluer le montant des sommes dûes aux salariés au titre des heures supplémentaires, l'arrêt retient que le taux horaire à retenir est celui résultant de la rémunération fixe, le calcul des commissions étant totalement déconnecté de l'horaire de travail
- qu'en statuant ainsi, alors qu'elle retenait que le montant des commissions avait pour seule base les résultats obtenus par les salariés, la cour d'appel a violé l'article L3121-22 du code du travail.
M. RA... K...
La société K par K soutient qu'elle a parfaitement respecté les dispositions contractuelles applicables et les dispositions légales afférentes au statut de VRP de M. K... à compter du 1er octobre 1999, que, sur la base, non pas d'horaires effectivement réalisés par lui mais de documents qui décriraient l'organisation de son activité commerciale et en prenant en considération les horaires issus d'un planning type, il prétend qu'il était soumis à un horaire déterminé de travail et fait état d'heures supplémentaires qui auraient été prétendument réalisées en limitant paradoxalement sa demande à l'année 2011, que, si les missions sont clairement délimitées, il appartient au vendeur de les exécuter comme il le souhaite, que M. K... bénéficiait d'une autonomie dans l'exercice de son activité commerciale et que, l'activité devant s'exercer dans les conditions définies par elle, cela n'empêchait pas M. K... de s'organiser comme il le voulait dans certaines activités, que certaines activités sont contraignantes pour les vendeurs, tout particulièrement les activités matinales, mais que les activités de l'après-midi peuvent être organisées dans un cadre moins rigide, qu'il est paradoxal de constater que M. K... précise qu'il bénéficiait d'une particulière autonomie dans ses fonctions d'octobre 1999 au 31 décembre 2010 et que son autonomie aurait été soudainement limitée à compter du 1er janvier 2011 alors qu'il était toujours affecté au même magasin, avait le même supérieur hiérarchique, que le magasin était toujours placé sous la responsabilité de M. S..., directeur régional des ventes supervisant les magasins rattaché au département du Rhône et du même directeur à la tête de la direction régionale sud-est, M. C....
La cour d'appel, dans son arrêt du 9 juillet 2015, a dit qu'elle tirait la conviction que M. K... avait accompli les heures supplémentaires dont il réclamait le paiement pour la période du 1er janvier 2011 au 3 janvier 2012, validant ainsi le nombre d'heures concernées par les rappels de salaires.
C'est seulement le mode de calcul utilisé par la cour d'appel prenant pour base le taux horaire déterminé à partir de la rémunération fixe mensuelle qui a été censuré par la cour de cassation laquelle a en revanche répondu au premier moyen du pourvoi principal de l'employeur qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve produits devant elle, la cour d'appel, qui avait retenu que les vendeurs, nonobstant leur statut de voyageur, représentant, placier ne disposaient d'aucune autonomie dans leur organisation et que l'employeur leur imposait un horaire et le contrôlait, avait, répondant aux conclusions, légalement justifié sa décision.
Dans ces conditions, il convient, sur la base du nombre d'heures supplémentaires retenu par la cour d'appel dans son premier arrêt, de condamner la société K par K à payer à M. K..., conformément au calcul qu'il présente, compte-tenu de son salaire moyen de 4.500 euros bruts pour 151,67 heures, la somme de 37.611,98 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires pour 900,50 heures supplémentaires accomplies pendant l'année 2011, dont 334 majorées à 25 % (12.391,40 euros) et 566,50 majorées à 50 % (25.220,58 euros), outre la somme de 3 761,19 euros bruts à titre d'indemnité de congés payés afférents.
M. YG... U...
La société K par K soutient qu'elle a parfaitement respecté les dispositions contractuelles applicables et les dispositions légales afférentes au statut de VRP de M. U..., que, sur la base non pas d'horaires effectivement réalisés par lui mais de documents qui décriraient l'organisation de son activité commerciale et en prenant en considération les horaires issus d'un planning type, il prétend qu'il était soumis à un horaire déterminé de travail et fait état d'un décompte d'heures supplémentaires qui auraient été prétendument réalisées par lui de 2007 à 2011, que, si les missions sont clairement délimitées, il appartient au vendeur de les exécuter comme il le souhaite, que M. U... bénéficiait d'une autonomie dans l'exercice de son activité commerciale, que, l'activité devant s'exercer dans les conditions définies par elle, cela n'empêchait pas M. U... de s'organiser comme il le voulait dans certaines activités, que certaines activités sont contraignantes pour les vendeurs, tout particulièrement les activités matinales, mais que les activités de l'après-midi peuvent être organisées dans un cadre moins rigide.
La cour d'appel, dans son arrêt du 9 juillet 2015, a dit qu'elle tirait la conviction que M. U... avait accompli les heures supplémentaires dont il réclamait le paiement pour la période du 1er avril 2007 au 30 mars 2012, validant ainsi le nombre d'heures concernées par les rappels de salaires.
C'est seulement le mode de calcul utilisé par la cour d'appel prenant pour base le taux horaire déterminé à partir de la rémunération fixe mensuelle qui a été censuré par la cour de cassation laquelle a en revanche répondu au premier moyen du pourvoi principal de l'employeur qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve produits devant elle, la cour d'appel, qui avait retenu que les vendeurs, nonobstant leur statut de voyageur, représentant, placier ne disposaient d'aucune autonomie dans leur organisation et que l'employeur leur imposait un horaire et le contrôlait, avait, répondant aux conclusions, légalement justifié sa décision.
Dans ces conditions, il convient, sur la base du nombre d'heures supplémentaires retenu par la cour d'appel dans son premier arrêt, soit 25 heures par semaine au cours de la période du 1er avril 2007 au 30 mars 2012, de condamner la société K par K à payer à M. U..., conformément au calcul qu'il présente pour chacune des années considérées, les sommes suivantes :
- 2007 : 775 heures supplémentaires dont 248 heures majorées au taux de 25 % et 527 heures majorées au taux de 50 %, soit la somme de 58 443,06 euros outre la somme de 5.844,30 euros au titre de l'indemnité de congés payés afférents
- 2008 : 1 125 heures supplémentaires dont 360 heures majorées au taux de 25 % et 765 heures majorées au taux de 50 %, soit la somme de 73.718,10 euros outre la somme de 7.371,81 euros au titre de l'indemnité de congés payés afférents
- 2009 : 1 000 heures supplémentaires dont 320 heures majorées au taux de 25 % et 680 heures majorées au taux de 50 %, soit la somme de 54.641,60 euros outre la somme de 5.464,16 euros au titre de l'indemnité de congés payés afférents
- 2010 : 1 025 heures supplémentaires dont 328 heures majorées au taux de 25 % et 697 heures majorées au taux de 50 %, soit la somme de 43.093,05 euros outre la somme de 4 309,30 euros au titre de l'indemnité de congés payés afférents
- 2011 : 650 heures supplémentaires dont 208 heures majorées au taux de 25 % et 442 heures majorées au taux de 50 %, soit la somme de 26.152,10 euros outre la somme de 2 615, 21 euros au titre de l'indemnité de congés payés afférents
total du rappel d'heures supplémentaires : 256 047,91 euros bruts total de l'indemnité de congés payés afférents : 25 604,79 euros bruts
M. PH... M...
La société K par K soutient qu'elle a parfaitement respecté les dispositions contractuelles applicables et les dispositions légales afférentes au statut de VRP de M. M..., que, sur la base non pas d'horaires effectivement réalisés par lui mais de documents qui décriraient l'organisation de son activité commerciale et en prenant en considération les horaires issus d'un planning type, il prétend qu'il était soumis à un horaire déterminé de travail et fait état d'un décompte d'heures supplémentaires qui auraient été prétendument réalisées par lui en 2010 et 2011,
que, si les missions sont clairement délimitées, il appartient au vendeur de les exécuter comme il le souhaite, que M. M... bénéficiait d'une autonomie dans l'exercice de son activité commerciale, que, l'activité devant s'exercer dans les conditions définies par elle, cela n'empêchait pas M. M... de s'organiser comme il le voulait dans certaines activités, que certaines activités sont contraignantes pour les vendeurs, tout particulièrement les activités matinales, mais que les activités de l'après-midi peuvent être organisées dans un cadre moins rigide, qu'il pouvait notamment parfaitement s'organiser pour soigner ses difficultés médicales lorsque la nature de celles-ci le justifiait.
La cour d'appel, dans son arrêt du 9 juillet 2015, a dit qu'elle tirait la conviction que M. M... avait accompli les heures supplémentaires dont il réclamait le paiement pour toute la période travaillée, validant ainsi le nombre d'heures concernées par les rappels de salaires.
C'est seulement le mode de calcul utilisé par la cour d'appel prenant pour base le taux horaire déterminé à partir de la rémunération fixe mensuelle qui a été censuré par la cour de cassation laquelle a en revanche répondu au premier moyen du pourvoi principal de l'employeur qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve produits devant elle, la cour d'appel, qui avait retenu que les vendeurs, nonobstant leur statut de voyageur, représentant, placier ne disposaient d'aucune autonomie dans leur organisation et que l'employeur leur imposait un horaire et le contrôlait, avait, répondant aux conclusions, légalement justifié sa décision.
Dans ces conditions, il convient, sur la base du nombre d'heures supplémentaires retenu par la cour d'appel dans son premier arrêt, de condamner la société K par K à payer à M. M..., conformément au calcul qu'il présente pour les années 2010 et 2011, les sommes suivantes :

- 27 359,20 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires et 2 735,92 euros au titre de l'indemnité de congés payés afférents pour l'année 2010 - 27 633,30 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires et 2 763,30 euros au titre de l'indemnité de congés payés afférents pour l'année 2011 total de rappel d'heures supplémentaires : 54 992,50 euros bruts
total de l'indemnité de congés payés afférents : 5 499,25 euros bruts L'équité commande de condamner la société K par K à payer à MM. K..., U... et M... la somme de 1 000 euros chacun au titre de leurs frais irrépétibles d'appel en sus de la somme allouée à ce titre par l'arrêt cassé.
M. S... sera débouté de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel » ;

1°) ALORS QUE la cassation qui atteint un chef de dispositif n'en laisse rien subsister, quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation ; qu'il en résulte que la cour de renvoi doit apprécier sa saisine au regard du dispositif de l'arrêt de cassation et non au regard du moyen sur lequel la cassation a été prononcée ; qu'en l'espèce, par ses arrêts en date des 30 novembre 2016 et 29 mars 2017, la Cour de cassation a censuré l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 9 juillet 2015 « en ce qu'il [avait] condamn[é] la société K par K à payer [aux salariés des] somme[s] au titre des heures supplémentaires [assorties] des congés payés afférents » ; qu'en conséquence, la juridiction de renvoi était saisie de l'entier litige relatif à ces heures supplémentaires, tant dans leur principe que, le cas échéant, dans leur nombre et leur mode de calcul, peu important que le moyen critiquant les éléments retenus pour étayer cette demande ait été rejeté et que le moyen ayant déterminé la censure ait porté sur le mode de calcul utilisé par la cour d'appel ; que, dès lors, en relevant que seul le mode de calcul des heures supplémentaires avait été censuré pour s'estimer tenue par la position adoptée par la première cour d'appel tant sur la réalisation que sur le nombre d'heures supplémentaires, et pour limiter en conséquence le litige qu'elle était appelée à connaitre à la question de l'assiette de calcul à retenir, la cour d'appel a violé les articles 623, 625 et 638 du code de procédure civile ;

2°) ALORS subsidiairement QUE seuls les éléments de rémunération dont les modalités de fixation permettent leur rattachement direct à l'activité personnelle du salarié doivent être intégrés dans la base de calcul des majorations pour heures supplémentaires ; qu'espèce, il était constant que les rappels d'heures supplémentaire sollicités par les salariés étaient calculés sur la base d'un taux horaire intégrant notamment, outre le salaire de base servis aux intéressés, les commissions dont ils avaient bénéficié sur la période litigieuse ; qu'en condamnant la société K par K à payer aux salariés des rappels d'heures supplémentaires calculées « conformément au calcul qu'[ils] présent[aient] » sans faire ressortir en quoi la base de calcul retenue n'intégrait que des éléments de rémunération dont les modalités de fixation permettaient leur rattachement direct à l'activité personnelle des salariés en cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.3121-22, L. 3121-24 et suivant du code du travail, ensemble les articles L. 3121-26 et L. 3121-31 du même code dans leur rédaction applicable.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a condamné la société K par K à payer à MM. K..., M. U... et M. M... la somme de 000 euros chacun à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, d'AVOIR condamné la société K par K à payer à payer aux salariés la somme de 1 000 euros chacun, en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel en sus de la somme allouée à ce titre par l'arrêt cassé et aux dépens d'appel comprenant ceux de l'arrêt cassé ;

AUX MOTIFS QUE « Sur les demandes au titre du harcèlement moral formées contre la société K par K
La cour de cassation relève que, pour débouter les salariés de leurs demandes, l'arrêt retient qu'il résulte de la confrontation des éléments d'une part produits par les salariés, d'autre part, par l'employeur, que les intéressés n'ont pas subi de harcèlement moral et dit qu'en statuant ainsi sans examiner si les faits établis par les salariés permettaient de présumer un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L1152-1 et L1154-1 du code du travail.
En vertu de l'article L1152-1du code du travail, « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».
L'article L1154-1 dispose que « lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L1152-1 à L1152-3 et L1153-1 à L1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ».
En vertu de ce dernier texte, il pèse sur le salarié l'obligation de rapporter la preuve d'éléments précis et concordants; ce n'est qu'à cette condition que le prétendu auteur du harcèlement doit s'expliquer sur les faits qui lui sont reprochés et prouver que les agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement.

Les éléments fournis par le salarié doivent être appréciés dans leur ensemble et non séparément.
M. K..., M. U... et M. M... versent aux débats des attestations d'autres salariés de l'entreprise, des documents et des courriels qui, certes, dénoncent un comportement général de l'employeur et des méthodes de management à l'égard de plusieurs salariés, mais qui permettent d'établir que ce comportement et ces méthodes se sont également appliqués à eux trois. Ils sont du reste cités dans certaines attestations.
Les auteurs des attestations versées aux débats font état des faits suivants :
- les horaires étaient lourds, du lundi au vendredi de 9 heures à 20heures30-21 heures et le samedi de 9 heures à 17 heures (attestations de M. OA..., M. F..., M. Y..., M. L..., M. Q..., M. O..., M. P..., Mme E..., M. W..., M. X...); le midi,après retour de prospection, OW... S... nous oblige à manger au magasin rapidement pour faire une prospection téléphonique derrière; arrivés au magasin, nous devons tout de suite nous mettre au téléphone sans prendre le temps de manger (attestations de M. Y... et M. L...); lorsqu'il n'y avait pas de contact, il nous empêchait de manger le midi pendant notre pause déjeuner(attestation de M. P...); nous devions téléphoner et manger en même temps (attestations de M. B... et Mme E...)
- du 1er avril 2009 au 31 août 2010, les contacts étaient distribués de manière équitable et les vendeurs avaient accès aux informations, le directeur régional des ventes fournissait des documents pré-imprimés et nominatifs, M. K... a toujours été cité en exemple pour les jeunes vendeurs (attestation de M. V...)
- M. S... met une pression malsaine à l'égard de M. U..., il a à plusieurs reprises poussé à la démission M. U... et d'autres collègues (attestation de M. Y...)
- il y avait des menaces, porte à porte obligatoire pour tout le monde jusqu'à la première prise de rendez-vous pour mériter de rentrer manger sur le pouce, des menaces, injures et pressions psychologiques au quotidien sur la personne de M. U.... M. S... mettait tout en oeuvre pour nous pousser à démissionner (attestation de M. O...) On nous mettait une pression considérable avec menaces et injures pour nous obliger à démissionner par tous les moyens (attestation de M. P...) Il y avait une pression malsaine. Afin de vérifier nos faits et gestes, ils appelaient en plein milieu des rendez-vous pour être sûrs qu'on y soit et savoir si on vendait (attestation de Mme E...) Il existait des pressions morales tous les jours. M. S... et M. C... semblaient profiter de leur position pour exercer des harcèlements psychologiques sur tous les vendeurs (attestation de M. R...)
- M. S... m'a contacté plus de 15 fois le même jour pour savoir où je me trouvais alors que mon planning est affiché tous les jours (attestation de M. Y...) ; M. S... mettait au quotidien une pression psychologique importante (attestation de M. L...)
- M. S... tenait des propos injurieux et proférait des menaces à l'égard des salariés, il mettait tout en oeuvre pour nous pousser à démissionner (attestation de M. O...) M. S... s'en prenait ouvertement à M. U... et à l'époque à moi-même : injures, harcèlement et propos toujours limites voire choquants, il a réussi à me faire craquer (attestation de M. A...)
- durant ma période chez K par K, j'ai eu droit à un défilé de commerciaux (11) qui ont dû démissionner ou abandonner leur poste tant les conditions étaient insupportables sur la région Rhône-Alpes, lors du briefing, le responsable nous interdisait de rentrer à l'agence tant qu'il n'y avait pas au moins un contact par personne, il arrivait régulièrement que M. OW... S... passe au magasin et profère des insultes et menace ses vendeurs, diverses menaces étaient faites sur M. U... et moi-même (attestation de M. Q...).
M. SP... X... qui a travaillé au magasin Vitton du 19 janvier 2011 au 15 novembre 2012 atteste qu'il a été témoin à plusieurs reprises du harcèlement qu'ont subi MM. Y..., M. U..., M. M... et M. K... lors des briefings effectués par la direction alors que les objectifs étaient atteints et que MM. U... et M. K... ont toujours été donnés en exemple. Il déclare qu'il n'y avait aucune raison de leur supprimer les outils de travail (mailings attendus plusieurs mois, messagerie supprimée). Il précise dans son attestation qu'ayant effectué le remplacement de responsable des ventes, il a été harcelé de coups de téléphone de M. S... pour lui demander où étaient M. K... et M. U... (une vingtaine de coups de fil par jour).
Les salariés produisent le courrier que M. X... avait adressé au directeur France, M. G..., pour signaler que, le 27 juin 2012, M. S... lui avait demandé de rédiger de façon manuscrite une demande de mutation sur un autre secteur ce qu'il avait fait sous le contrôle et la dictée de M. S..., mais qu'il n'était demandeur d'aucune mutation.
M. KK... I..., ancien salarié de l'entreprise, atteste que face à une héirarchie dont le comportement mettait en péril le bon fonctionnement des équipes ou du magasin, car il avait constaté des comportements jouant l'humiliation, la menace arbitraire, le harcèlement, voire les insultes, il avait vu M. K... faire entendre la voix de la raison.
Deux courriels émanant de M. S... et un courriel de M. C... envoyés à tous les magasins contiennent des menaces de sanction en cas de non-respect de certaines consignes.
M. U... et M. M... ont déposé devant les services de police de Villeurbanne une plainte contre M. S... pour harcèlement moral, l'un le 13 et le 20 septembre 2011, le second le 21 septembre et le 6 octobre 2011, dénonçant des pressions, des insultes et des menaces de la part de leur responsable, indiquant qu'il les rabaisse et les humilie.
D'autres documents versés aux débats permettent d'établir :
- qu'à compter du mois de juin 2011, les vendeurs n'ont plus eu accès à la messagerie du magasin (courriels de M. S... et de M. C... en date du 29 juin 2011, attestation de M. Y...), que le responsable du magasin était chargé de redistribuer les « passifs », que les contacts « passif » attribués à M. K... après la suppression de l'accès à la messagerie ont diminué, M. NM..., ancien responsable des ventes au magasin Lyon Vitton d'octobre 2005 à fin mars 2009 expliquant dans son attestation que, lorsqu'il était en fonction dans l'entreprise, les contacts « actifs » étaient gérés afin que le prospecteur puisse obtenir le fruit de son travail et les autres contacts « passifs » étaient redistribués équitablement à l'ensemble des forces de vente et précisant qu'il n'était pas surpris d'apprendre que la hiérarchie K par K(M. C... et M. S...) changeait les règles d'un jour à l'autre simplement dans le but de déstabiliser un ou plusieurs individus et qu'il n'était lui-même plus en phase avec ces méthodes de management archaïques
- que le responsable du magasin Vitton a demandé à M. S..., le 30 août 2011, de fournir des mailings à M. U..., M. K..., M. M... et trois autres personnes, qu'ils ont été promis le 12 octobre 2011 par M. S... pour « dans quinze jours » mais n'ont été reçus qu'au début de l'année 2012 (courriel de M. C...), soit quatre mois plus tard, alors que ces mailings personnalisés permettent d'obtenir des clients et de générer du chiffre d'affaires
- que le secteur du magasin Lyon Vitton a été réduit en juin 2011 et que la direction a interdit aux vendeurs de recontacter leurs anciens clients à la suite de la modification (tableau des communes, attestations de M. IL... et de M. NM...)
- que de nombreux clients ont écrit en 2011 pour signaler leur mécontentement à la suite de malfaçons, défauts de pose, problèmes techniques, rendez-vous non honorés.
Le procès-verbal de réunion du comité d'entreprise en date du 20 avril 2011 fait apparaître sur 799 « sorties » 292 démissions et 99 fins de période d'essai à l'intitiative du salarié en 2010 et le procès-verbal du 25 mai 2011 mentionne qu'en ce qui concerne les causes des démissions 2010 et 1er trimestre 2011, le principal motif de départ évoqué porte sur les méthodes de management.
Par ordonnance rendue en la forme des référés en date du 9 novembre 2012, le président du tribunal de grande instance de Bobigny a constaté que la décision du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail avait évoqué l'existence d'un risque grave dans l'établissement, que le comité avait expressément fait référence au site de Lyon et que par lettre en date du 15 mars 2012, l'inspection du travail invitait la société K par K à donner suite de façon sérieuse à l'alerte liée aux risques psychosociaux adressée par le médecin du travail au mois de décembre précédent et estimait que les méthodes de management devraient être évaluées par une personne ayant une expertise dans le domaine des risques psychosociaux, et qu'une nouvelle lettre de ce service en date du 26 mars suivant demandait encore une évaluation de ces risques au sein de l'entreprise.

Le président du tribunal, dans son ordonnance, a ainsi rejeté la contestation élevée par la société K par K en ce qui concerne l'expertise qui avait été décidée par le CHSCT.
Cette expertise a donc eu lieu mais la société K par K n'en communique pas les conclusions dans le cadre de la présente instance bien que M. K... le lui ait demandé par courrier recommandé avec accusé de réception.
M. K... justifie de ses difficultés de santé qui paraissent en lien avec son activité professionnelle, en produisant une lettre du médecin traitant adressée au médecin du travail le 8 décembre 2011, selon laquelle il présente une souffrance sévère au travail ce qui l'a amené à lui prescrire des somnifères et des anti-dépresseurs, les avis du médecin du travail (RAS le 25 mai 2010 - rumination sur le travail, perte de poids, sentiment d'humiliation, perte de la confiance dans son entreprise, souffrance morale, lors d'un rendez-vous à sa demande le 14 décembre 2011) et une attestation d'accompagnement psychologique en date du mars 2012.
Il avait reçu un avertissement le 15 février 2011, une mise en garde le 10 octobre 2011 et une mise en garde le 17 novembre 2011 auxquels il a répondu par des courriers, contestant le bien-fondé des reproches formulés à son endroit, reprenant les difficultés relatives au secteur géographique, aux problèmes techniques rencontrés par les clients, aux mailings reçus avec quatre mois de retard, à la suppression de l'accès à la messagerie du magasin, invoquant le mépris avec lequel ses demandes sont traitées, contestant avoir cassé une porte qui ne tenait plus sur ses gonds et rappelant qu'à lui seul, il fait 30 % du chiffre d'affaires du magasin.
M. U... justifie de difficultés de santé indépendantes de la maladie dont il est atteint et qui est connue de l'employeur, en produisant un certificat de son médecin traitant en date du 8 septembre 2009 dont il ressort qu'il souffre d'un état anxio-dépressif réactionnel caractérisé avec asthénie nerveuse justifiant arrêt de travail, repos et traitement médical, un certificat médical en date du 6 octobre 2011 indiquant que son état de santé justifie une ITT de sept semaines à compter du 8 septembre 2011, un courrier du médecin du travail en date du 19 décembre 2011 alertant son confrère sur son état psychique et la nécessité de le faire prendre en charge par un psychiatre bien qu'il soit vu par un psychologue, une attestation d'accompagnement psychologique en date du 14 mars 2012, ainsi que les avis du médecin du travail du 2 novembre 2011, du 21 novembre 2011 et du 19 décembre 2011 qui décrivent une souffrance morale, un état dépressif avéré, des troubles du sommeil, le dernier avis concluant à l'inaptitude en une visite pour danger immédiat.
Le contrôle médical effectué à la demande de l'employeur le 3 octobre 2011 a conclu que l'arrêt de M. U... était médicalement justifié.
M. U... avait reçu une mise en garde le 6 mai 2011 lui reprochant d'avoir effectué un chiffre d'affaires inférieur à celui requis contractuellement sur les quatre semaines du mois d'avril 2011 et lui demandant de se ressaisir.

Il a expliqué, lors de sa plainte déposée le 13 septembre 2011, qu'il avait subi une mutation forcée en janvier 2011 entraînant une grosse perte de commission sur ses clients de Villefranche.
M. M... justifie des difficultés de santé qu'il a rencontrées paraissant en lien avec ses conditions de travail en produisant :
- un certificat d'un médecin psychiatre en date du 9 décembre 2011 qui conclut à l'existence d'un syndrome psychotraumatique qui paraît directement consécutif aux pressions psychologiques qu'il décrit dans son entreprise et qui indique qu'il présente les symptômes caractéristiques du psychotraumatisme induit par un stress chronique et des manipulations mentales, qu'il a développé une forte culpabilité par rapport à son travail arrivant difficilement à mettre en cause la façon de traiter les gens dont il a été victime, ainsi qu' une anorexie avec une perte de poids de 6 kilos et que son syndrome s'est compliqué de dépression justifiant le traitement antidépresseur
- deux certificats de son médecin traitant en date du 27 septembre 2011et du 8 novembre 2011, le premier décrivant une aboulie avec perte des motivations et anxiété phobique en lien avec des situations, lieux, personnes et événements évoquant le travail
- un contrôle médical à la demande de l'employeur, en date du 17 novembre 2011, concluant que l'arrêt de travail est médicalement justifié
- l'attestation de sa mère selon laquelle depuis quelque temps, il accumule les passages chez le médecin alors qu'il n'était jamais malade étant enfant.
M. M... avait reçu une mise en garde le 6 mai 2011 lui reprochant un manque d'activité au motif qu'il n'avait réalisé que deux ventes en avril 2011 pour quatre semaines d'activité et lui demandant de se ressaisir. Par courriel en date du 27 juin 2011, M. S... rappelle au responsable de magasin que « son rôle est de mettre à M. M... un coup de boost en particulier le samedi, car il n'a pas à aller directement en clientèle mais doit passer par le magasin, le briefing étant obligatoire pour tout le monde ».
Ces éléments précis et concordants, pris dans leur ensemble, laissent présumer pour chacun des trois salariés, M. K..., M. U... et M. M... des faits de harcèlement moral commis par l'employeur à leur préjudice.
De son côté, la société K par K verse aux débats :
- deux mailings personnalisés au nom de M. K... et un mailing au nom de M. U..., dont on ne connaît pas la date d'édition
- des attestions rédigées par huit salariés (MM. XM... et DL... exerçant dans les magasins Gailleton et Jean Jaures, M. WD... exerçant à Villefranche, MM. FY..., NQ..., VK..., GM..., TW... sans précision sur leur lieu de travail) qui certifient qu'ils n'ont jamais été harcelés par M. S...
- une attestation émanant de M. DL... qui déclare avoir entendu M. W... à son insu en discussion téléphonique avec M. U..., ce dernier conseillant au premier de se mettre en maladie et en dépression pour harcèlement moral de la part de M. S... dans le but de nuire à M. S... et une attestation émanant de NQ... dont il ressort qu'il a appris le 2 décembre 2012 que M. W... ne reviendrait pas de sa maladie et « qu'il est très bien conseillé par M. U... qui veut absolument faire tomber M. S... »
- un courrier du contrôleur du travail en date du 15 mars 2012 qui lui signale l'existence d'une plainte de M. U... lequel met en cause « les pressions incessantes de la part de M. S..., directeur régional » et reprend les déclarations de M. C... selon lesquelles il a entendu les trois personnes actuellement présentes cours Vitton qui ne lui ont fait remonter aucun souci dans leur rapport hiérarchique de sorte qu'il en a conclu qu'il n'y avait pas de problème de souffrance au travail lié aux méthodes de management dans le magasin de [...]
- un courrier qu'elle a adressé à la DIRECCTE Rhône-Alpes le 29 mars 2012 aux termes duquel elle expose que M. U... n'avait jamais envoyé d'alerte préalable à la direction quant aux éventuelles difficultés qu'il pouvait rencontrer, qu'il était libre de gérer son temps de travail pour lui permettre la bonne exécution de son contrat de travail, et que,
M. S... ayant été entendu par la gendarmerie dans le cadre de l'enquête de police, elle n'avait pas diligenté d'enquête approfondie et qu'elle n'avait jamais été saisie directement par M. U... ou les représentants du personnel sur les faits dénoncés.
Le CHSCT a été réuni le 30 mars 2012 sur un ordre du jour comprenant un ‘point de prévention concernant certains salariés de la société qui pourraient se trouver dans un état de fragilité psychologique', une formation sur la mise en oeuvre de la prévention du stress au travail d'une journée a été organisée le 23 mai 2013 et proposée à M. C..., directeur de la société, et la société K par K a répondu par courrier du 18 mars 2013 (un an après les faits) au médecin du travail que, concernant le magasin Vitton, elle ne disposait pas d'éléments pouvant caractériser une situation de harcèlement et que l'enquête pénale avait été classée sans suite.
Cependant, l'employeur ne justifie pas, au moyen de ces éléments, qu'il n'a pas commis de faits caractérisant un harcèlement moral à l'égard de chacun des trois salariés.
En effet, dans son courrier ci-dessus, le contrôleur du travail, qui déclare qu'il a pris connaissance de l'alerte envoyée le 22 décembre 2011 par le médecin du travail, le docteur ID..., concernant les risques psycho sociaux, estime que les conclusions de la direction après une enquête interne menée par un supérieur hiérarchique sur un échantillonnage restreint de salariés ayant une ancienneté réduite, laquelle ne peut être considérée comme suffisante, ne sont pas de nature à éluder une analyse des méthodes de management des commerciaux et qu'il convient de donner suite et de façon sérieuse à l'alerte liée aux risques pyscho sociaux émise par le docteur ID....
Les attestations des salariés témoignant de l'absence de tout harcèlement de la part de leur employeur sont rédigées en des termes généraux, tandis que M. Q..., dans une attestation produite par la société K par K, datée du 26 mars 2015, indique tardivement qu'il souhaite revenir sur les propos contenus dans ses deux attestations rédigées à la demande de M. U... en 2011, expliquant « qu'ils sont plusieurs à avoir été influencés par M. U... qui leur avait demandé afin de tirer un profit personnel de dénigrer le management de M. S... » et que M. S... était certes exigeant mais qu'il ne les a jamais harcelés.
Or, il apparaît que M. Q..., qui réfute ses propres attestations, est toujours salarié de K par K « dans de bonnes conditions ». Un autre salarié, M. OA..., affirme, aux termes d'une attestation en date du 16 mai 2015, qu'il a reçu un appel de M. C... qui lui a demandé de se rétracter de son attestation du 16 août 2012, que celui-ci était insistant et voulait qu'il fasse une fausse attestation pour annuler la première et a invoqué les motifs financiers qui étaient en jeu, mais qu'il maintient formellement les déclarations qu'il a faites.
Au regard de ces circonstances, les attestations des salariés versées aux débats par la société K par K ne permettent pas de contredire les faits décrits dans les attestations produites par MM. K..., M. U... et M. M.... L'existence de nombreuses heures supplémentaires confirme par ailleurs la réalité de la lourdeur de la charge de travail imposée aux salariés.
Si M. C..., le directeur régional, a écrit à M. K... le 1er décembre 2011, en réponse à ses courriers des 14 octobre et 15 novembre 2011 et à la suite de leur entretien du 28 novembre 2011 qu'il ne remettait pas en cause le travail qu'il avait accompli depuis de nombreuses années et qu'il avait demandé à son manager de contrôler tous les passifs avant de les affecter afin que les passifs qui sont le fruit de son travail lui soient attribués et que, pour les autres, il avait rappelé le principe de l'attribution au mérite, à savoir qu'il devait y avoir une corrélation entre l'attribution des passifs et la prise de contacts actifs et qu'il lui proposait de refaire le point avec son responsable de ventes et avec lui fin décembre, il n'apparaît pas que le point proposé ait été effectué et suivi d'effet.
L'avis d'inaptitude est intervenu deux mois plus tard.
Enfin, il est démontré que les trois salariés ont connu des difficultés de santé dont le médecin du travail a estimé qu'elles avaient un lien avec le travail.
La preuve d'agissements commis par l'employeur à l'égard de MM. K..., M. U... et M. M... constitutifs de harcèlement est en conséquence rapportée.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société K par K à payer à chacun d'entre eux la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi de ce chef » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur le harcèlement moral :
Que article L1152-1 du code du Travail dispose qu' « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou morale ou de compromettre son avenir professionnel » ;

Que l'article L1154-1 du code du travail dispose qu'en la matière, le salarié établit des faits qui peuvent laisser présumer un harcèlement moral et que l'employeur démontre que tel n'est pas le cas ;
Que de plus la Cour de Cassation précise qu'une méthode de gestion délétère des salariés peut constituer un harcèlement moral ;
Que Messieurs RA... K.... YG... U... et PH... M... décrivent, tous trois, une méthode de gestion agressive et humiliante mise en place par M. OW... S... ;
Que, pour étayer leurs dires, les trois salariés produisent de nombreuses attestations décrivant notamment:
- Les insultes proférées par M. OW... S..., traitant les salariés de «nazes»
l'attestation de M. O... - pièce 3.6), de «merdes», de «bons à rien» (attestation de M. Q... - piéce 3.7) ou de «nuls» (attestation de Mme E... - pièce 3.11) ;
- Les menaces que M. OW... S... adressait aux salariés, avec des paroles rapportées dans les attestations:
«ceux qui ne sont pas contents, je leur enverrai une équipe» (attestation de M. Y... -piéce 3.3)
«je mets un jean et on va s'expliquer derrière» (attestation de M. O... - pièce 3.6)
«vous êtes mauvais, je vais nettoyer ce magasin» (attestation de M. Q... - piéce 3.7) ;
- Le fait que les salariés n'étaient pas autorisés à rentrer de leur prospection du matin, pour déjeuner, tant qu'ils n'avaient pas finalisé un contact (attestation de M. P... -pièce 3.8. de Mme E... - pièce 3.11) ;
- L'habitude de M. OW... S... de tendre une feuille blanche aux salariés pour les inciter à rédiger une lettre de démission lorsqu'ils exprimaient leur mécontentement (attestation de M. W... - piéce 3.14a) ;
Que toutes les attestations produites imputent clairement les faits décrits à M. OW... S... ;
Que le nombre important d'attestations et leur concordance dans les faits décrits laissent présumer que ces derniers sont établis et qu'ils peuvent constituer un harcèlement moral de la part de M. OW... S... ;
Qu'en réponse, la société K par K produit également des attestations louant les qualités managériales de M. OW... S... ; que le Conseil constate que toutes ces attestations émanent de salariés de la société et sous la responsabilité hiérarchique de M. OW... S... et qu'elles ne suffisent donc pas à démontrer que les insultes et les menaces n'ont pas existé ;
Que par ailleurs, M. OW... S..., personnellement mis en cause, fournit également deux attestations, l'une de M. NT... qui ne travaillait ni dans le magasin de Villefranche, ni dans celui de Vitton où se sont passés les faits décrits, l'autre de M. RE... qui se contente de décrire ses propres relations avec M. OW... S... ; que les pièces apportées par M. OW... S... ne démontrent en rien que les insultes et les menaces n'ont pas existé ;

Qu'en conséquence, le Conseil jugera que M. OW... S... a menacé et insulté les salariés des magasins de Villefranche et de Vitton où travaillaient Messieurs RA... K..., YG... U... et PH... M...; que cette façon de faire caractérisait la gestion du personnel qu'il avait mise en place et qui reposait sur l'agressivité et la terreur ;
Qu'il est établi que ces pratiques duraient depuis plusieurs années, les faits décrits dans certaines attestations remontant parfois jusqu'en 2006 et M. YG... U... ayant déposé une main courante à ce propos dès 2010 ; que la répétition des faits est donc avérée ;
Que de plus, Messieurs RA... K..., YG... U... et PH... M... ont, tous trois, été arrêtés pour dépression réactionnelle et finalement déclarés inaptes à leur poste ; qu'il est donc incontestable que les faits perpétrés par M. OW... S... ont abouti à une dégradation de leur état de santé ;
Qu'en conséquence, le harcèlement moral de M. OW... S..., à l'encontre de MM. RA... K..., YG... U... et PH... M... est établi ;
Que, conformément à l'article L141 1-3 du code du travail, le conseil est compétent pour régler les litiges nés entre les salariés à l'occasion du travail ;
Qu'en conséquence, le Conseil condamnera M. OW... S... à verser, à chacun des trois salariés, la somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
Que par ailleurs, la société K par K était consciente de la situation puisqu'alertée par plusieurs courriers émanant notamment de M. RA... K... ou de M. Y... ; que le sujet avait été abordé au cours du comité d'entreprise du 25 mai 2011 et que la société avait explicitement relié les nombreuses démissions intervenues aux méthodes de management :
qu'en conséquence, le mode de gestion mis en place par M. OW... S... est également imputable à la société K par K ;
Que par ailleurs, Messieurs RA... K..., YG... U... et PH... M... font également valoir que l'accès à la messagerie interne, qui constituait un de leur outil de travail, leur a soudainement été interdit ; que, sur ce point, ils produisent des attestations ainsi qu'un mail de M. OW... S... du 29 juin 2011 qui rappelle, de manière péremptoire, cette nouvelle règle ;
Que l'accès à la messagerie permettait aux salariés d'être informés et d'influer sur l'attribution des contacts et que ce changement brutal de la règle a nui à la transparence du dispositif devenu discrétionnaire et laissé à la seule appréciation du responsable de magasin ;
Que la société K par K ne démontre pas que l'accès à la messagerie avait conduit à des dérives dans l'attribution des contacts et que la nouvelle règle établie était nécessaire au bon fonctionnement de ses magasins ;
Que, de plus, MM. RA... K..., YG... U... et PH... M... indiquent que la société K par K a tardé à mettre à leur disposition les mailings qui étaient indispensables à leur action de démarchage auprès des clients ; que ce fait est étayé par plusieurs mails produits par les salariés démontrant un délai de plusieurs mois entre leur demande initiale en août 2011 et la fourniture des mailings début 2012 seulement alors qu'il s'agissait là d'un outil de travail indispensable ;
Que la société K par K ne fait aucun commentaire sur la question des mailings et ne justifie en rien ce délai important ;
Qu'en outre, MM. RA... K..., YG... U... et PH... M... ajoutent qu'ils ont reçu des mises en garde sur leurs résultats, le 10 octobre 2011 pour le premier, et le 6 mai 2011 pour les deux autres ; qu'ils font valoir que ces mises en garde étaient injustifiées car elles ne tenaient pas compte de leurs résultats globalement très satisfaisants ;
Que la pièce 1.7 produite par M. RA... K... démontre clairement qu'en juillet 2011. Messieurs RA... K..., YG... U... at PH... M... étaient respectivement classés 21ème, 58ème et 119ème sur un effectif total de plus de 800 vendeurs ; qu'il est donc établi que leurs résultats étaient très satisfaisants au moment où MM. YG... U... et PH... M... ont été mis en garde et qu'ils l'étaient encore, pour M. RA... K..., au moment de sa mise en garde, puisqu'en décembre 2011, ce dernier était classé 58ème ;
Que de plus, le courrier de mise en garde, lettre-type et non personnalisée, pointe un manque d'engagement de la part des salariés et précise que la dite mise en garde sera inscrite sur leur dossier personnel ; que cette formulation est brutale et déstabilisante compte tenu des résultats globaux très satisfaisants des salariés ;
Qu'en réponse, la société indique que l'envoi de lettre-type de mise en garde relève de son pouvoir disciplinaire mais qu'elle ne démontre pas qu'il était justifié par la nécessité, pour les salariés, d'améliorer leurs résultats ou d'augmenter leur niveau d'engagement ;
Qu'en conséquence, le conseil retiendra que les salariés ont établis des faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral et que la société K par K a été défaillante à démontrer que tel n'était pas le cas : que le Conseil conclura que le harcèlement moral de la société K par K à rencontre de MM. RA... K..., YG... U... et PH... M... est établi ;
Que MM. RA... K..., YG... U... et PH... M..., qui ont vu leur état de santé dégradé puisqu'arrêtés pour dépression réactionnelle et finalement déclarés inaptes, ont subi un préjudice qu'il conviendra de réparer ;
Qu'en conséquence, le conseil condamnera la société K par K à verser, à chacun d'entre eux la somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêt » ;

1°) ALORS QUE la cassation à intervenir de l'arrêt en ce qu'il a condamné la société K par K à payer aux salariés des rappels d'heures supplémentaires s'étendra au chef de dispositif par lequel la cour d'appel a estimé que ces derniers avaient subi un harcèlement en retenant, parmi l'ensemble des éléments de fait le laissant présumer, la lourdeur de leur charge de travail révélée par les nombreuses heures supplémentaires réalisées, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE seuls des éléments de fait précis, répétés et concordants, pris dans leur ensemble, pouvant faire présumer l'existence d'un harcèlement moral, le juge ne peut retenir et indemniser un tel harcèlement, en tenant compte, serait-ce partiellement, d'éléments ne remplissant pas ces conditions ; qu'en l'espèce, pour retenir un harcèlement moral et évaluer le préjudice en résultant à une somme de 15 000 euros par salarié, la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, s'est essentiellement fondée sur des attestations visant la situation personnelle de leurs auteurs et incidemment, pour certaines d'entre elles, celle des intéressés dont il ressortait que M. S... soumettait les vendeurs à « une pression malsaine», les poussant à la démission, qu'il multipliait les « menaces, injures et pressions psychologiques au quotidien » via des briefings organisés bien que les objectifs aient été atteints, l'injonction faite au vendeur de ne rentrer d'une prospection le matin qu'après avoir finalisé un contact, des appels répétés et des menaces de sanctions en cas de non-respect de certaines consignes, situation dont l'employeur était conscient ; que constatant en outre qu'une expertise avait été sollicitée par le CHSCT et l'inspecteur du travail pour évaluer l'existence éventuelle d'un risque grave dans l'entreprise, y compris en son site de Lyon, sans que les conclusions de celle-ci soient communiquées par l'employeur, de même que l'existence d'un contexte de réduction du secteur du magasin Lyon Vitton avec interdiction pour les vendeurs de recontacter leurs anciens clients, la cour d'appel a par ailleurs relevé que l'état de santé des salariés s'était dégradé et que cette dégradation « paraiss[ait] en lien avec [leurs] conditions de travail » ; qu'en statuant ainsi, sur la base de considérations générales et imprécises notamment quant aux méthodes de management mises en oeuvre par M. S..., la cour d'appel qui ce faisant a vicié son raisonnement global, a violé l'article L. 1154-1 du code du travail ;

3°) ALORS en tout état de cause QUE le juge est tenu d'indemniser le préjudice réellement subi par la victime sans perte, ni profit ; qu'en allouant identiquement à chaque salarié une même somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral sans individualiser le préjudice personnellement subi par chacun d'eux au regard de leurs situations particulières, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction applicable, ensemble le principe de la réparation intégrale.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-11343
Date de la décision : 19/06/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 29 novembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 jui. 2019, pourvoi n°18-11343


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.11343
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