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13/06/2019 | FRANCE | N°18-10243

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 juin 2019, 18-10243


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. N... a été engagé par la société Laboratoires Merck Sharp et Dohme Chibret (la société) le 1er mai 1981 selon contrat à durée indéterminée en qualité de technicien de maintenance ; qu'il a été désigné représentant syndical CFE CGC au comité d'entreprise en mars 2011 et représentant syndical au comité central d'entreprise CFE CGC en novembre 2012 ; qu'il a signé le 31 mars 2014 un avenant à son contrat de travail formalisant son adhésion à un départ volonta

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. N... a été engagé par la société Laboratoires Merck Sharp et Dohme Chibret (la société) le 1er mai 1981 selon contrat à durée indéterminée en qualité de technicien de maintenance ; qu'il a été désigné représentant syndical CFE CGC au comité d'entreprise en mars 2011 et représentant syndical au comité central d'entreprise CFE CGC en novembre 2012 ; qu'il a signé le 31 mars 2014 un avenant à son contrat de travail formalisant son adhésion à un départ volontaire en application d'un plan de cession d'activité anticipée et a bénéficié de ce plan à compter du 1er avril 2014 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale le 2 septembre 2014, faisant valoir qu'il avait été victime de discrimination syndicale s'étant notamment traduite par une diminution de sa prime de performance et sollicitant en conséquence des rappels de salaire en lien avec cette prime d'objectifs outre des dommages-intérêts ; que le syndicat lyonnais du personnel d'encadrement de la chimie est intervenu volontairement à l'instance en indemnisation du préjudice subi du fait de l'atteinte portée à l'intérêt collectif de la profession ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en ses troisième et quatrième branches :

Vu les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail, dans leur version applicable en la cause ;

Attendu qu'après avoir relevé que le salarié, représentant syndical au comité d'entreprise depuis 2011 et au comité central d'entreprise depuis 2012, avait subi une diminution de sa prime de performance au titre de l'année 2013, la cour d'appel rejette la demande formée au titre de la discrimination syndicale aux motifs que le salarié ne parvient pas à établir un lien entre cette diminution de la prime et son activité syndicale ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié présentait des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination en raison des activités syndicales résidant dans la diminution importante de la prime de performance après ses désignations syndicales et que la cour d'appel a constaté par ailleurs que l'employeur ne rapportait pas la preuve des éléments ayant conduit à la détermination de la prime et que, si des difficultés ont été relevées s'agissant de la réalisation du projet en cause, il n'est pas démontré en quoi le salarié serait à l'origine de celles-ci, ce dont il résultait que l'employeur ne démontrait pas que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation sur le premier moyen du pourvoi principal entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs du dispositif visés par le second moyen du pourvoi principal et par le moyen unique du pourvoi incident ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne la société Laboratoires Merck Sharp et Dohme Chibret aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Laboratoires Merck Sharp et Dohme Chibret à payer à M. N... et au syndicat lyonnais du personnel d'encadrement de la chimie CFE CGC chimie Lyon la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. N... et le syndicat lyonnais du personnel d'encadrement de la chimie CFE CGC chimie Lyon.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que M. N... n'a pas été victime de discrimination syndicale et, en conséquence, débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts ;

AUX MOTIFS QU'en l'espèce M. N... fait valoir : - une diminution de sa prime AIP (Programme Annuel de Primes Exceptionnelles) pour l'année 2014 ; - le non-respect par l'employeur des dispositions de l'article 15 de la convention collective de l'industrie pharmaceutique du 6 avril 1956 qui prévoient que les entreprises doivent veiller à ce que l'exercice d'un mandat syndical ou représentatif n'entraîne pas de conséquences négatives en matière d'évolution professionnelle et de rémunération ; que le non-respect par l'employeur des dispositions de l'article 15 de la convention collective de l'industrie ne résulte d'aucun élément produit par l'appelant et, au contraire, la société MSD produit une attestation de Mme D... , Responsable des Ressources Humaines, qui indique que « dans le cadre de notre politique salariale nous vérifions chaque année que l'évolution de la rémunération individuelle des salariés de l'entreprise et plus particulièrement celle des membres de nos organisations syndicales ne présente pas à compétences égales d'anomalie de traitement » ; que ces propos ne sont démentis par aucun élément notamment par des attestations de salariés qui auraient à se plaindre du non-respect de ces dispositions pas plus que par d'autres salariés exerçant des activités syndicales ; qu'au demeurant M. N... reconnaît dans ses écritures qu'il a connu un parcours professionnel méritoire pour avoir occupé successivement les postes de responsable des services généraux, de responsable d'unité Packaging, puis de responsable de projet ; qu'il ne caractérise aucun incident de parcours depuis son accession à des fonctions représentatives du personnel ; que ce premier grief ne peut donc être retenu au débit de l'employeur pour caractériser l'existence d'une discrimination syndicale ; que concernant l'attribution de primes de performance, il convient déjà de relever que seule l'année 2014 est concernée, alors que M. N... exerce une activité syndicale depuis 2011 ; qu'il ne démontre pas que d'autres salariés placés dans la même situation que lui mais n'exerçant pas des activités syndicales auraient été avantagés pas plus qu'il ne démontre que seuls les salariés exerçant des activités syndicales auraient été lésés ; que M. N... soutient sans nullement l'établir que cette « nette diminution correspond à une période où [il] a occupé des fonctions syndicales sur 50% de son temps de travail sur l'année 2013 » ; que concernant les modalités d'attribution de cette prime, les explications fournies par la société MSD sont pour le moins absconses pour être rapportées ainsi (sic) : « chaque année, des objectifs de performance spécifiques sont établis pour la société et suivis dans la grille d'évaluation de la société. A la fin de l'exercice, la performance de l'entreprise est mesurée par rapport aux objectifs du tableau de bord pour déterminer les fonds disponibles pour payer les primes AIP. Le résultat total de la grille d'évaluation de la société doit atteindre un minimum de 50 % pour qu'une prime AIP soit versée. Base sur le résultat global de la société, le financement potentiel de la part société dans l'AIP cible est compris entre 50 % et 200 %. L'AIP cible est quant à elle exprimée en pourcentage du salaire donnant droit à l'AIP. Après l'établissement des résultats définitifs de la grille d'évaluation de la société, le pourcentage pondéré du budget sera alors appliqué à l'AIP cible de la personne concernée (7 % pour un salarié de Band 300, comme l'était M. N...). Tandis que la performance selon la grille d'évaluation de la société détermine le budget de l'AIP et le budget de l'AIP cible, la prime de l‘AIP finale est calculée sur la performance individuelle par rapport aux collègues de travail. Généralement, les proportions de la performance individuelle varient de 0 % à 150 % du financement de l'AIP cible » ; que si certains tableaux produits aux débats reprennent effectivement les barbarismes utilisés par la société employeur pour n'être compris que des initiés, l'intimée ne fournit aucun élément de nature à justifier le calcul permettant d'aboutir à une prime réduite de 50 % à M. N... ; qu'ainsi, la cour cherchera en vain les « objectifs de performance spécifiques », les « objectifs du tableau de bord », le montant des « fonds disponibles pour payer les primes AIP », le « résultat total de la grille d'évaluation », le « résultat global de la société », le « financement potentiel de la part société dans l'AIP cible », le « pourcentage pondéré du budget », et aucune pièce explicative ou de nature à étayer les chiffres utilisés pour le calcul de la prime de M. N... n'est produite ; que la société MSD ajoute que, pour apprécier la performance individuelle, « sur le projet le plus important de son activité, à savoir l'intégration d'une étiqueteuse et d'un dépileur de barquettes sur la ligne de conditionnement 13, M. N... n'avait pas anticipé ni orchestré les délais de livraison fournisseurs, disponibilités de la ligne. Le projet qui devait se terminer en début d'année 2013, n'a été livré qu'après les congés d'été, alors que ses deux autres collègues situés en Band 300 ont atteint leurs objectifs dans les délais et en qualité » ; qu'or aucun élément produit aux débats ne vient étayer ces explications ; qu'ainsi, si M. N... ne parvient pas à établir un lien entre la diminution de sa prime et son activité syndicale, l'employeur ne rapporte pas davantage les éléments ayant conduit à la détermination de cette prime d'autant que le « performance plan » fait état d'une atteinte des objectifs ; que ce même document se conclut pour situer M. N... dans la tranche 5 % à 10 % par ces observations (sic) « le projet de réaménagement de la ligne 13 va se terminer en 2013. Suite à des problèmes de délais fournisseurs puis des indisponibilités de la ligne, l'installation et la qualification ont été décalées en semaine 30 pendant le shutdown. Il aurait fallu plus de vigilance et d'anticipations vis-à-vis de nos fournisseurs ainsi que de nos processus internes. Les systèmes sont fonctionnels » ; qu'or il n'est pas démontré en quoi M. N... serait à l'origine de ces difficultés ; que l'appelant est en droit de prétendre au paiement des sommes suivantes qui viennent compenser la perte de salaire et la perte d'indemnité dues à la diminution injustifiée de sa prime AIP : - rappel de salaire sur prime AIP (prime d'objectifs) sur l'évaluation 2013 faite en 2014 : 1.299,52 euros ; - congés payés afférents : 129,95 euros ; rappel de salaire sur prime de départ à la retraite : 649,76 euros ; - rappel de salaire sur indemnité mensuelle de dispense d'activité en lien avec la prime d'objectifs : 2.198,36 euros ; - congés payés afférents : 219,83 euros ; qu'aux termes de l'article 1231-6 du code civil, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance ; que le seul fait que le salarié n'a pas pu revendiquer en temps et en heure le règlement de l'intégralité des salaires auxquels il pourrait prétendre ne suffit pas à caractériser l'existence, pour le salarié, d'un préjudice distinct du retard de paiement par l'employeur et causé par la mauvaise foi de celui-ci ; qu'aucun préjudice distinct n'est donc établi ; que l'existence d'une discrimination de nature syndicale n'étant pas retenue, les demandes du syndicat lyonnais du personnel d'encadrement de la chimie sont en voie de rejet ;

1°) ALORS QUE l'existence d'une discrimination n'implique pas nécessairement une comparaison avec d'autres salariés ; qu'en retenant, pour dire que M. N... n'a pas été victime de discrimination syndicale, qu'« il ne démontre pas que d'autres salariés placés dans la même situation que lui mais n'exerçant pas des activités syndicales auraient été avantagés pas plus qu'il ne démontre que seuls les salariés exerçant des activités syndicales auraient été lésés », la cour d'appel a subordonné la reconnaissance de la discrimination syndicale à la démonstration d'une disparité de traitement entre salariés syndiqués et non-syndiqués, violant les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail.

2°) ALORS QUE la seule circonstance que la situation discriminatoire invoquée par le salarié n'ait pas commencé ou ne se soit pas aggravée à compter de l'exercice de ses fonctions représentatives ou syndicales n'est pas de nature à justifier objectivement l'absence de toute discrimination ; qu'en relevant que « concernant l'attribution de primes de performance, il convient déjà de relever que seule l'année 2014 est concernée, alors que M. N... exerce une activité syndicale depuis 2011 », quand la circonstance que la décision de l'employeur soit intervenue plusieurs années après le début d'exercice par le salarié de ses mandats syndicaux n'était pas de nature à réfuter tout lien entre le manquement de l'employeur et ceux-ci, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail.

3°) ALORS QUE lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en déboutant M. N... de sa demande de dommages et intérêts pour discrimination, motif pris qu'il « ne parvient pas à établir un lien entre la diminution de sa prime et son activité syndicale », quand il incombait à l'employeur de rapporter la preuve que la minoration de la prime AIP versée au salarié était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, violant les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail ;

4°) ET ALORS QU'en jugeant que M. N... n'établissait pas de faits présumant une discrimination syndicale, quand elle constatait que le salarié, qui exerçait divers mandats syndicaux, démontrait avoir perçu une prime AIP à un taux minoré que l'employeur ne justifiait par aucun élément objectif, ce qui laissait supposer la situation discriminatoire alléguée par le salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le syndicat lyonnais du personnel d'encadrement de la chimie CFE-CGC Chimie Lyon de sa demande de dommages-intérêts au titre de l'atteinte portée à l'intérêt collectif de la profession ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'en l'espèce M. N... fait valoir : - une diminution de sa prime AIP (Programme Annuel de Primes Exceptionnelles) pour l'année 2014 ; - le non-respect par l'employeur des dispositions de l'article 15 de la convention collective de l'industrie pharmaceutique du 6 avril 1956 qui prévoient que les entreprises doivent veiller à ce que l'exercice d'un mandat syndical ou représentatif n'entraîne pas de conséquences négatives en matière d'évolution professionnelle et de rémunération ; que le non-respect par l'employeur des dispositions de l'article 15 de la convention collective de l'industrie ne résulte d'aucun élément produit par l'appelant et, au contraire, la société MSD produit une attestation de Mme D... , Responsable des Ressources Humaines, qui indique que « dans le cadre de notre politique salariale nous vérifions chaque année que l'évolution de la rémunération individuelle des salariés de l'entreprise et plus particulièrement celle des membres de nos organisations syndicales ne présente pas à compétences égales d'anomalie de traitement » ; que ces propos ne sont démentis par aucun élément notamment par des attestations de salariés qui auraient à se plaindre du non-respect de ces dispositions pas plus que par d'autres salariés exerçant des activités syndicales ; qu'au demeurant M. N... reconnaît dans ses écritures qu'il a connu un parcours professionnel méritoire pour avoir occupé successivement les postes de responsable des services généraux, de responsable d'unité Packaging, puis de responsable de projet ; qu'il ne caractérise aucun incident de parcours depuis son accession à des fonctions représentatives du personnel ; que ce premier grief ne peut donc être retenu au débit de l'employeur pour caractériser l'existence d'une discrimination syndicale ; que concernant l'attribution de primes de performance, il convient déjà de relever que seule l'année 2014 est concernée, alors que M. N... exerce une activité syndicale depuis 2011 ; qu'l ne démontre pas que d'autres salariés placés dans la même situation que lui mais n'exerçant pas des activités syndicales auraient été avantagés pas plus qu'il ne démontre que seuls les salariés exerçant des activités syndicales auraient été lésés ; que M. N... soutient sans nullement l'établir que cette « nette diminution correspond à une période où [il] a occupé des fonctions syndicales sur 50% de son temps de travail sur l'année 2013 » ; que concernant les modalités d'attribution de cette prime, les explications fournies par la société MSD sont pour le moins absconses pour être rapportées ainsi (sic) : « chaque année, des objectifs de performance spécifiques sont établis pour la société et suivis dans la grille d'évaluation de la société. A la fin de l'exercice, la performance de l'entreprise est mesurée par rapport aux objectifs du tableau de bord pour déterminer les fonds disponibles pour payer les primes AIP. Le résultat total de la grille d'évaluation de la société doit atteindre un minimum de 50 % pour qu'une prime AIP soit versée. Base sur le résultat global de la société, le financement potentiel de la part société dans l'AIP cible est compris entre 50 % et 200 %. L'AIP cible est quant à elle exprimée en pourcentage du salaire donnant droit à l'AIP. Après l'établissement des résultats définitifs de la grille d'évaluation de la société, le pourcentage pondéré du budget sera alors appliqué à l'AIP cible de la personne concernée (7 % pour un salarié de Band 300, comme l'était M. N...). Tandis que la performance selon la grille d'évaluation de la société détermine le budget de l'AIP et le budget de l'AIP cible, la prime de l‘AIP finale est calculée sur la performance individuelle par rapport aux collègues de travail. Généralement, les proportions de la performance individuelle varient de 0 % à 150 % du financement de l'AIP cible » ; que si certains tableaux produits aux débats reprennent effectivement les barbarismes utilisés par la société employeur pour n'être compris que des initiés, l'intimée ne fournit aucun élément de nature à justifier le calcul permettant d'aboutir à une prime réduite de 50 % à M. N... ; qu'ainsi, la cour cherchera en vain les « objectifs de performance spécifiques », les « objectifs du tableau de bord », le montant des « fonds disponibles pour payer les primes AIP », le « résultat total de la grille d'évaluation », le « résultat global de la société », le « financement potentiel de la part société dans l'AIP cible », le « pourcentage pondéré du budget », et aucune pièce explicative ou de nature à étayer les chiffres utilisés pour le calcul de la prime de M. N... n'est produite ; que la société MSD ajoute que, pour apprécier la performance individuelle, « sur le projet le plus important de son activité, à savoir l'intégration d'une étiqueteuse et d'un dépileur de barquettes sur la ligne de conditionnement 13, M. N... n'avait pas anticipé ni orchestré les délais de livraison fournisseurs, disponibilités de la ligne. Le projet qui devait se terminer en début d'année 2013, n'a été livré qu'après les congés d'été, alors que ses deux autres collègues situés en Band 300 ont atteint leurs objectifs dans les délais et en qualité » ; qu'or aucun élément produit aux débats ne vient étayer ces explications ; qu'ainsi, si M. N... ne parvient pas à établir un lien entre la diminution de sa prime et son activité syndicale, l'employeur ne rapporte pas davantage les éléments ayant conduit à la détermination de cette prime d'autant que le « performance plan » fait état d'une atteinte des objectifs ; que ce même document se conclut pour situer M. N... dans la tranche 5 % à 10 % par ces observations (sic) « le projet de réaménagement de la ligne 13 va se terminer en 2013. Suite à des problèmes de délais fournisseurs puis des indisponibilités de la ligne, l'installation et la qualification ont été décalées en semaine 30 pendant le shutdown. Il aurait fallu plus de vigilance et d'anticipations vis-à-vis de nos fournisseurs ainsi que de nos processus internes. Les systèmes sont fonctionnels » ; qu'or il n'est pas démontré en quoi M. N... serait à l'origine de ces difficultés ; que l'appelant est en droit de prétendre au paiement des sommes suivantes qui viennent compenser la perte de salaire et la perte d'indemnité dues à la diminution injustifiée de sa prime AIP : - rappel de salaire sur prime AIP (prime d'objectifs) sur l'évaluation 2013 faite en 2014 : 1.299,52 euros ; - congés payés afférents : 129,95 euros ; rappel de salaire sur prime de départ à la retraite : 649,76 euros ; - rappel de salaire sur indemnité mensuelle de dispense d'activité en lien avec la prime d'objectifs : 2.198,36 euros ; - congés payés afférents : 219,83 euros ; qu'aux termes de l'article 1231-6 du code civil, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance ; que le seul fait que le salarié n'a pas pu revendiquer en temps et en heure le règlement de l'intégralité des salaires auxquels il pourrait prétendre ne suffit pas à caractériser l'existence, pour le salarié, d'un préjudice distinct du retard de paiement par l'employeur et causé par la mauvaise foi de celui-ci ; qu'aucun préjudice distinct n'est donc établi ; que l'existence d'une discrimination de nature syndicale n'étant pas retenue, les demandes du syndicat lyonnais du personnel d'encadrement de la chimie sont en voie de rejet ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, sur l'action du syndicat lyonnais du personnel de l'encadrement de la chimie : les demandes de M. N... n'étant pas retenues au titre de la discrimination syndicale, l'atteinte aux intérêts collectifs de la profession n'est pas établie ;

ALORS QUE la cassation qui interviendra du chef du premier moyen relatif à la discrimination syndicale entrainera, par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile, la censure du chef de la décision ayant débouté le syndicat lyonnais du personnel d'encadrement de la chimie CFE-CGC Chimie Lyon de sa demande de dommages-intérêts au titre de l'atteinte portée à l'intérêt collectif de la profession. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Laboratoires Merck Sharp et Dohme Chibret.

Il est reproché à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR condamné la société LABORATOIRES MERCK SHARP et DOHMECHIBRET à payer à Monsieur N... 1.299,52€ à titre de rappel de salaire sur prime AIP, 129,95€ au titre des congés payés afférents, 649,76€ à titre de rappel de salaire sur prime de départ à la retraite, 2.198,36€ à titre de rappel de salaire sur indemnité mensuelle de dispense d'activité en lien avec la prime d'objectifs, 219,36€ au titre des congés payés afférents, et 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « la société MSD ajoute que, pour apprécier la performance individuelle, "sur le projet le plus important de son activité, à savoir l'intégration d'une étiqueteuse et d'un dépileur de barquettes sur la ligne de conditionnement 13, Monsieur H... N... n'avait pas anticipé ni orchestré les délais de livraison fournisseurs, disponibilités de la ligne ; que le projet qui devait se terminer en début d'année 2013, n'a été livré qu'après les congés d'été, alors que ses 2 autres collègues situés en Band 300 ont atteint leurs objectifs dans les délais et en qualité ; qu'or, aucun élément produit aux débats ne vient étayer ces explications ; qu'ainsi, si Monsieur N... ne parvient pas à établir un lien entre la diminution de sa prime et son activité syndicale, l'employeur ne rapporte pas davantage les éléments ayant conduit à la détermination de cette prime d'autant que le "performance plan" fait état d'une atteinte des objectifs ; que ce même document se conclut pour situer Monsieur N... dans la tranche 5 % à 10 % par ces observations (sic) « le projet de réaménagement de la ligne 13 va se terminer en 2013 ; que suite à des problèmes de délais fournisseurs puis des indisponibilités de la ligne, l'installation et la qualification ont été décalées en semaine 30 pendant le shutdown ; qu'il aurait fallu plus de vigilance et d'anticipations vis-à-vis de nos fournisseurs ainsi que de nos processus internes ; que les systèmes sont fonctionnels » ; qu'or, il n'est pas démontré en quoi Monsieur N... serait à l'origine de ces difficultés ; que l'appelant est en droit de prétendre au paiement des sommes suivantes qui viennent compenser la perte de salaire et la perte d'indemnité dues à la diminution injustifiée de sa prime AIP : - rappel de salaire sur prime AIP (prime d'objectifs) sur l'évaluation 2013 faite en 2014 : 1.299,52 euros ; - congés payés afférents : 129,95 euros ; - rappel de salaire sur prime de départ à la retraite : 649,76 euros ; -rappel de salaire sur indemnité mensuelle de dispense d'activité en lien avec la prime d'objectifs : 2.198,36 euros ; - congés payés afférents : 219,83 euros » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE le juge ne doit pas dénaturer les écrits produits devant lui ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué qui cite inexactement le « Performance Plan » pour l'année 2013, tel qu'il a été versé aux débats par Monsieur N... (pièce n° 5) dénature ce document, lequel n'indique aucunement que « le projet de réaménagement de la ligne 13 va se terminer en 2013 » mais, au contraire, que le déplacement de certains équipements reste « en cours et sera terminé au cours du 1er trimestre 2014 » ; que le même document qualifie encore la prestation de Monsieur N... dans la gestion des projets pour l'année 2013 par la mention « n'a pas atteint son objectif », et nullement en « faisant état d'une atteinte des objectifs » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le principe susvisé ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE n'étant pas contesté que le projet dont Monsieur N... avait la responsabilité avait subi un important retard, justifie légalement la limitation à 50 % de la « prime de performance » de ce cadre, l'employeur qui reproche à ce dernier d'avoir manqué de vigilance et d'anticipation sur les problèmes de délais évoqués par le fournisseurs ainsi que sur l'indisponibilité des installations internes de l'entreprise destinée à recevoir le projet, sans qu'il soit nécessaire de démontrer que l'intéressé était personnellement « à l'origine » des difficultés non surmontées ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé les articles L.1221-1 du code du travail, 1103 et 1108 du code civil ;

ALORS, ENFIN ET DE TOUTES FACONS, QU'en condamnant l'entreprise à verser 100 % de la prime exceptionnelle de performance AIP, sans mentionner la performance qu'aurait accomplie Monsieur N... pour atteindre ce niveau de rémunération, la cour d'appel, qui ne constate aucunement un quelconque caractère de fixité de ladite prime et qui la qualifie, au contraire, de « prime d'objectifs » (p. 8, al.1), n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des articles 1103, 1108 et 1169 du code civil, ainsi que de l'article L.1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-10243
Date de la décision : 13/06/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 07 novembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 jui. 2019, pourvoi n°18-10243


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.10243
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