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12/06/2019 | FRANCE | N°18-11957;18-12730

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 juin 2019, 18-11957 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° U 18-11.957 et J 18-12.730 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 15 décembre 2017), que M. O... a été engagé le 1er octobre 1972 par la société Crédit immobilier du Morbihan en qualité de comptable ; qu'il occupait en dernier lieu les fonctions de directeur administratif et financier au sein de la société Crédit immobilier de France Bretagne atlantique, aux droits de laquelle vient la société Crédit immobilier de France développement ; qu'il a été lic

encié pour faute grave le 23 juillet 2001 ;

Sur la recevabilité du pourvoi n° J ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° U 18-11.957 et J 18-12.730 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 15 décembre 2017), que M. O... a été engagé le 1er octobre 1972 par la société Crédit immobilier du Morbihan en qualité de comptable ; qu'il occupait en dernier lieu les fonctions de directeur administratif et financier au sein de la société Crédit immobilier de France Bretagne atlantique, aux droits de laquelle vient la société Crédit immobilier de France développement ; qu'il a été licencié pour faute grave le 23 juillet 2001 ;

Sur la recevabilité du pourvoi n° J 18-12.730, examinée d'office, après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu le principe « pourvoi sur pourvoi ne vaut » ;

Attendu que, par application de ce principe, le pourvoi formé le 26 février 2018 par M. O... sous le n° J 18-12.730, qui succède au pourvoi n° U 18-11.957 formé par lui le 9 février 2018 contre la même décision, n'est pas recevable ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° U 18-11.957 :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen unique du pourvoi ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi n° J 18-12.730 ;

REJETTE le pourvoi n° U 18-11.957 ;

Condamne M. O... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juin deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi n° U 18-11.957 par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. O...

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de M. O... a une de cause réelle et sérieuse et de l'AVOIR débouté de sa demande en condamnation de la société CRÉDIT IMMOBILIER DE FRANCE DÉVELOPPEMENT au paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué,

« Sur la prescription

Conformément à l'article L. 1332-4 du code du travail, l'employeur dispose d'un délai de deux mois pour engager des poursuites disciplinaires. Le point de départ du délai est le jour où il a connaissance du fait fautif, plus précisément, le jour où il a une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés au salarié.
En l'espèce, le rapport d'inspection n'est pas daté et n'est revêtu d'aucun cachet permettant d'étayer la date du 14 mai 2001 à laquelle l'employeur dit l'avoir reçu. La date d'octobre 2000 ne peut non plus être retenue car il s'agit de la date du contrôle sur site.
Quoi qu'il en soit, l'employeur est fondé à soutenir qu'avant de prendre sa décision définitive, il était en droit d'entreprendre des investigations plus poussées pour connaître le rôle exact de M. O... dans l'octroi des prêts consentis à M. Q... sur lesquels l'inspection avait émis des interrogations, investigations qui auraient pu permettre de constater qu'elles étaient dénuées de fondement. La saisine de la société Ouest Conseils Audit (ci-après le commissaire aux comptes) n'avait donc pas un objet distinct, contrairement à ce qui est soutenu. Il est indifférent que les éléments recueillis à cette occasion ait amené ultérieurement au dépôt d'une plainte pénale dès lors que le rapport du commissaire aux comptes est expressément visé dans la lettre de licenciement.
M. O... prétend que les faits contenus dans les rapports figuraient déjà dans celui du commissaire aux comptes de février 2000 (sa pièce 15). Cela est inexact, celui-ci se contentant de décrire le fonctionnement du service contentieux et de formuler plusieurs préconisations.
Le rapport du commissaire aux comptes étant daté du 28 mai 2001, c'est à cette date que le Crédit immobilier a été en possession de l'ensemble des éléments lui permettant de connaître la réalité, la nature et l'ampleur des faits reprochés à M. O....
Les faits n'étaient donc nullement prescrits lorsque ce dernier a été convoqué à l'entretien préalable du 27 juin 2001. Le jugement sera infirmé.

Sur le bien fondé du licenciement

La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. La charge de la preuve incombe à l'employeur.
La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est libellée ainsi :
"Cette décision est motivée par votre implication grave et fautive dans les fautes relevées dans le rapport définitif établi par les services de l'inspection générale, confirmées par le rapport des Commissaires aux Comptes, desquels il résulte un non-respect de votre part des procédures requises en matière de recouvrement dans la gestion des dossiers contentieux et de contrôle dans l'octroi des prêts, et qui ont été source de dysfonctionnements avérés :
- non-respect du règlement intérieur concernant la proportion des prêts investisseurs dans l'encours ;
- non-respect des règles dans certains prêts relais mis en place par l'agence de VANNES lesquels sont de nature suspecte quant à leur objet, certains d'entre eux s'apparentant à des crédits de trésorerie en blanc ;
- mauvaise utilisation et absence de garanties suffisantes pour les prêts relais et autres prêts promoteurs ;
- mauvaise gestion des créances impayées et douteuses ;
- laxisme évident dans la mise en place des crédits outre le non-respect des règles du réseau en matière d'objet de crédit.
S'il s'avère que tous ces faits ne vous sont pas totalement et entièrement imputables, il n'en dmeure pas moins que vous avez activmeent participé à leur réalisation en ne respectant pas les procédures que vous avez en charge d'appliquer et en évitant de surcroît, malgré votre qualité de technicien expérimenté, d'aviser votre direction."
Le crédit immobilier expose que le CIFBA avait été constitué en 1993 par trois sociétés dont le Crédit immobilier du Morbihan mais n'avait pas de moyen propre et que son siège social étant à Vannes, M. O... était à la fois le directeur financier et administratif du CIM et du CIFBA. En 1998 et 1999, il a également été désigné comme contrôleur interne, fonction qui le chargeait notamment du contrôle des dossiers de crédit et de la vérification du respect des statuts.

Sur le non-respect du règlement intérieur concernant la proportion de prêts investisseurs dans l'encours
Il est précisé à l'article 3.2.2. du règlement intérieur du Crédit immobilier de France que l'encours des prêts investisseurs doit être au plus égal à 15 % de l'encours total de la société. Le rapport d'inspecteur conclut à un taux de 22 % en juin 2000.
Cependant, M. O... objecte justement que cette règle était récente. Le règlement intérieur comporte, en effet, l'indication de sa dernière modification (les 29 et 30 juin 2000), date qui est rappelée en page 14 du rapport d'inspection. Il ne peut être reproché à M. O... de ne pas avoir respecté un taux de 15 % qui n'était pas encore entré en vigueur à la date du constat.
Ce dysfonctionnement ne sera donc pas retenu.

Sur le non-respect des règles concernant certains prêts-relais mis en place par l'agence de Vannes et s'apparentant à des crédits en blanc
L'appelant rappelle que, dans le secteur bancaire, il est d'usage de subordonner l'octroi d'un prêt à la production de justificatifs et le déblocage des fonds à la preuve de l'achat ou de la réalisation de travaux. Il cite dans ses conclusions plusieurs affaires mises en évidence par le rapport d'inspection et celui du commissaire aux comptes montrant que ces règles ont été délibérément ignorées par M. O.... La cour retiendra les trois affaires ci-après.
Société MTI : dans cette affaire, il est reproché à M. O... d'avoir débloqué 1,5 M.F le 10 juillet 1998 sans aucun justificatif de travaux, sans aucun titre de propriété et en prenant des garanties ne permettant pas le déclenchement d'une saisie immobilière. Il est précisé, en outre, que 500 000 francs seulement ont été remboursés à l'échéance en juillet 2000 et qu'un déplacement sur site a révélé que l'immeuble était très vétuste et qu'aucuns travaux n'avaient été réalisés à l'exception de l'étayage de la toiture. L'inspection concluait que la créance était fortement compromise et évoquait "la position délicate de M. O..." dans ce dossier.
SCI Villa du Bois : le commissaire aux comptes indique qu'un prêt-relais d'une durée de deux ans d'un montant de 1,5 M.F a été octroyé en février 1999 dont 886 000 francs ont été débloqués immédiatement sans aucun justificatif, qu'il avait été instruit par mme O..., épouse de M. O..., en réalité par ce dernier d'après les mentions manuscrites figurant dans le dossier. Il précise que les prélèvements ont été rejetés systématiquement en 1999 et en 2000 et que M. Q... avait également un impayé de 1 M.F en avril 1999 au titre de la SCI La Ferme. Malgré l'existence d'une procuration irrévocable, M. O... n'a conservé qu'une petite partie du produit de la vente de trois lots intervenue courant 2000 pour rembourser le prêt. Le commissaire aux comptes précisait que le débit s'élevait à 1 219 000 francs en mars 2001 et qu'aucune des garanties souscrites n'avait été actionnée.
SCI La Ferme : ce prêt-relais de 1 045 467 francs a été consenti à la SCI La Ferme gérée par M. Q... en juillet 1999 pour une durée de six mois. Il a été "alloué unilatéralement par M. O... sans respecter la procédure interne en matière d'engagement" et ce, au lieu d'actionner les garanties pour recouvrer le prêt demeure impayé à son échéance.
Le commissaire aux comptes ajoutait que M. Q..., la SCI de la Ferme, la SCI Villa du Bois, la société SN Batiment et la société G Bat étaient inscrits au fichier des incidents de la Banque de France de sorte que les prêts accordés et les versements effectués dans les conditions qui viennent d'être exposées l'avvaient été à des interdits bancaires.
Enfin, l'appelant indique que l'analyse des dossiers des prêts consentis qu'il a consentis à M. O... fait apparaître que des justificatifs avaient té présentés dans un seul dossier.
Ces faits constituent des manquements graves aux obligations professionnelles de M. O....
Ce dernier se retranche derrière les services ayant instruit les dossiers.
Cependant, M. B..., conseiller technique, a déclaré aux services de police que "M. O... s'occupait de tout" en ce qui concernait les dossiers de M. Q... et que cela l'arrangeait car ils étaient compliqués. Mme L... , responsable du contentieux, a confirmé ces propos, indiquant que M. O... avait "toutes les casquettes".
Sur le fait de ne pas avoir conservé les fonds qui revenaient à l'organisme bancaire, M. O... fait valoir qu'il privilégiait l'achèvement des travaux pour permettre la vente des lots. Cette argumentation est cependant mal venue s'agissant de prêts à des promoteurs formellement interdits précisément en raison des risques encourus.
Il insiste sur le fait que sa délégation de signature ne portait que sur les prêts d'un montant inférieur à 600 000 francs, ceux d'un montant supérieur étant accordé par le directoire. Or, il vient d'être vu qu'il avait enfreint cette règle.
M. O... prétend que M. J... lui avait demandé de "faire au mieux des intérêts de la société" avec les prêts de M. Q... , mais il déforme les propos tenus par l'ancien président qui indiquait seulement que M. O... reconnaissait qu'il aurait dû le mettre au courant et qu'il lui en avait parlé alors que le contentieux était déjà né, "le mal était déjà fait". La tolérance dont fait état M. J... ne signifiait nullement que les salariés étaient invités à violer les règles internes au détriment des intérêts de la société.
Le dysfonctionnement sera retenu.

Sur la mauvaise utilisation et l'absence de garanties suffisantes pour les prêts-relais et autres prêts promoteurs
Il est indiqué en pages 23 et 24 du rapport d'inspection que le recours aux crédits sous seing privé avec des garanties faibles était une pratique habituelle de l'agence de Vannes alors qu'elle aurait dû être réservée aux prêts de faible montant. En outre, celle-ci avait fait appel à une société ICD pour les assurances décès invalidité et le cautionnement qui s'était révélée défaillante (120 dossiers représentant 42 M.F).
M. O..., directeur administratif et financier du Crédit immobilier du Morbihan de 1990 à décembre 2000, ne peut sérieusement soutenir qu'il n'avait aucune responsabilité dans cette situation alors qu'en cette qualité, il supervisait l'ensemble des services concernés, notamment mme L... et M. M... derrière lesquels il se retranche, lesquels travaillaient sous ses ordres.
Il invoque l'erreur d'appréciation en ce qui concerne la société ICD passant sous silence la critique du rapport d'inspection sur "la faiblesse des analyses de l'époque qui n'a pas permis de déceler des pièges grossiers" (son gérant était un apporteur d'affaires).

Sur la mauvaise gestion des créances impayées et douteuses
L'appelant, s'appuyant sur sa pièce 17, indique que onze prêts ont été prorogés et réaffectés à des opérations différentes sous la houlette de M. O... et ce pour échapper à l'analyse collective des dossiers à fort montant et éviter d'avoir à les soumettre au comité d'engagement qui avait été mis en place pour répondre à certaines critiques du premier rapport d'inspection.
M. O... ne fournit aucun élément de contradiction précis concernant ces faits.

Le dysfonctionnement est établit

Sur le laxisme dans la mise en place des crédits et le non-respect des règles du réseau en matière d'objet de crédit
L'appelante indique que M. O... a consenti des prêts aux promoteurs ainsi que des prêts hors zone en violation du règlement intérieur.
Dans le rapport d'inspection, il est effectivement indiqué que les prêts aux professionnels de l'immobilier étaient le plus souvent accordés par l'agence de Vannes sous forme de prêts-relais, que l'interdiction avait été rappelée dans un rapport de 1998 mais qu'elle continuait cette pratique au motif qu'elle était sans risque. L'inspection a également relevé que la moitié des prêts supérieurs à 1 M.F étaient hors zone et que la procédure d'expertise obligatoire n'avait jamais été respectée.
M. O... invoque les déclarations de M. J... devant les services de police selon lesquelles il fallait "faire du chiffre". Il omet cependant d'ajouter que ce dernier complétait son propos en disant que la pratique des prêts hors zone devait être "raisonnable" et qu'elle était acceptable si elle concernait une part "anecdotique" de l'encours total. Or, il résulte du rapport d'inspection qu'à l'agence de Vannes, ils représentaient 22,75 % de sa production, sans commune mesure avec celui d'autres agences.
Il impute la responsabilité de ses manquements à une surveillance insuffisante du directoire ou à l'absence de contrôle interne indépendant, évoquant une responsabilité collective. Toutefois, en accordant des prêts sans justificatif à des interdits bancaires dans les dossiers qu'il suivait personnellement, en signant luimême des prêts d'un montant supérieur à ce qu'autorisait sa délégation, en agissant de manière à ce que certains dossiers échappent au comité d'engagement, il a manifesté la volonté de passer outre les procédures d'ores et déjà mises en place.
Il résulte de ce qui précède que les dysfonctionnements, à l'exception du premier, sont avérés, caractérisant le non-respect par l'intimé des procédures en matière de recouvrement dans la gestion des dossiers contentieux et de contrôle dans l'octroi des prêts.
Cependant, compte tenu du contexte dans lequel ils sont intervenus, admis par l'employeur dans la lettre de licenciement, ils ne rendaient pas impossible le maintien de M. O... dans la société pendant la durée du préavis. Ils constituent un motif réel et sérieux de licenciement et non une faute grave.
Le jugement sera dès lors infirmé sauf en ses dispositions relatives à l'indemnité de préavis, aux congés payés afférents, à l'indemnité conventionnelle de licenciement, aux frais irrépétibles et aux dépens.
Pôle emploi sera débouté de sa demande de remboursement des allocations chômage allouées à M. O..., les conditions prévues par l'article L. 1235-4 du code du travail n'étant pas réunies.
Chacune des parties succombant partiellement en ses prétentions conservera la charge de ses dépens d'appel de frais irrépétibles en cause d'appel. » ;

ALORS, en premier lieu, QUE le délai de prescription pour l'engagement des poursuites disciplinaires prévu par l'article L. 1332-4 du code du travail court à compter du jour où l'employeur a pu avoir une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés ; qu'en l'espèce, pour fixer au 28 mai 2001, date du rapport établi par le commissaire aux comptes, la date à laquelle l'employeur avait connaissance des faits reprochés au salarié et considérer que ceux-ci n'étaient pas prescrits lorsque le salarié a été convoqué le 27 juin 2001 à l'entretien préalable, la cour d'appel a retenu, d'une part, que le rapport rédigé par le service de l'inspection générale de la chambre syndicale du CRÉDIT IMMOBILIER DE FRANCE à la suite d'un audit effectué en octobre 2000 n'était pas daté et n'était revêtu d'aucun cachet permettant d'étayer la date du 14 mars 2001 à laquelle l'employeur dit l'avoir reçu et, d'autre part, que, quoi qu'il en soit, l'employeur est fondé à soutenir qu'avant de prendre sa décision définitive, il était en droit d'entreprendre des investigations plus poussées pour connaître le rôle exacte de M. O... dans l'octroi des prêts consentis à M. Q... sur lesquels l'inspection avait émis des interrogations, investigations qui auraient pu permettre de constater qu'elles étaient dénuées de fondement ; qu'en statuant ainsi, sans vérifier, comme elle y était invitée, si l'employeur n'avait pas dès le premier rapport de l'inspection une connaissance exacte et complète des faits reprochés au salarié ni constater que le recours à un audit supplémentaire était nécessaire pour ce faire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 1332-4 du code du travail ;

ALORS, en deuxième lieu, QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que, pour dire que le licenciement de M. O... a une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a affirmé que « M. O... invoque les déclarations de M. J... devant les services de police selon lesquelles il fallait "faire du chiffre". Il omet cependant d'ajouter que ce dernier complétait son propos en disant que la pratique des prêts hors zone devait être "raisonnable" et qu'elle était acceptable si elle concernait une part "anecdotique" de l'encours total » (arrêt, p. 8) ; qu'il ressort cependant du procès-verbal de déposition de M. J... que, contrairement à ce qu'affirme la cour d'appel, ce dernier ne faisait pas état de directives à l'adresse des salariés concernant les prêts hors zone mais d'une opinion personnelle ainsi que de la constatation d'un état de fait ; qu'en retenant une lecture incompatible avec le procès-verbal analysé, la cour d'appel a dénaturé ce document ;

ALORS, en troisième lieu, QUE tout jugement ou arrêt doit être motivé ; que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que M. O... a fait valoir dans ses écritures d'appel (conclusions d'appel, pp. 19, 20 et 22 à 26) que, compte tenu de l'absence de remarque ou avertissement antérieur, de la confiance accordée à certains organismes, de la volonté du salarié d'agir dans l'intérêt de l'entreprise et du fait d'avoir agi selon des pratiques suivies par ses propres responsables, les erreurs qui lui ont été reprochées par l'employeur ne caractérisaient pas une volonté délibérée de sa part et ne pouvaient donc en aucun cas relever d'une faute disciplinaire ; qu'en ne répondant à ces conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-11957;18-12730
Date de la décision : 12/06/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 15 décembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 jui. 2019, pourvoi n°18-11957;18-12730


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.11957
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