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05/06/2019 | FRANCE | N°17-28507

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 juin 2019, 17-28507


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. C... a été engagé par la société Transports Tézenas, à compter du 26 octobre 2009, en qualité de chauffeur livreur ; que par lettre du 7 septembre 2012, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail et a saisi, le 3 décembre suivant, la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le deuxième moyen pris en sa seconde branche et le troisième moyen, ci après-annexés :

Attendu que sous le couvert d'un grief non fondé de dénaturatio

n, les moyens ne tendent qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par la cou...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. C... a été engagé par la société Transports Tézenas, à compter du 26 octobre 2009, en qualité de chauffeur livreur ; que par lettre du 7 septembre 2012, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail et a saisi, le 3 décembre suivant, la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le deuxième moyen pris en sa seconde branche et le troisième moyen, ci après-annexés :

Attendu que sous le couvert d'un grief non fondé de dénaturation, les moyens ne tendent qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Attendu que pour condamner l'employeur à payer au salarié certaines sommes au titre d'heures supplémentaires et de congés payés afférents, l'arrêt retient, pour la période du 26 octobre 2009 au 12 février 2012, que le salarié fait valoir que les feuilles de route mentionnent une prise de service à 6 heures 45 quand il faisait une tournée du matin sur Falaise, qu'or c'est la même heure de prise de service qui figure pour ces tournées après février 2012 alors qu'il prenait son service au lieu de chargement à Cormelles, qu'il est à noter que ces tournées finissaient en outre à la même heure (17 heures 45), que la société Transports Tezenas n'explique pas comment cette tournée a pu conserver les mêmes horaires (6 heures 45/17 heures 45) avec ou sans le temps de trajet Rabodanges/Cormelles, qui est évalué par le salarié de manière non contestée à 1h20 aller/retour ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait des feuilles de route versées aux débats que, pour la période du 26 octobre 2009 au 12 février 2012, les horaires des tournées du salarié sur Falaise étaient variables, qu'ils avaient été partiellement modifiés postérieurement au 13 février 2012 et que le salarié n'avait jamais terminé ses tournées à 17 heures 45, ni réalisé l'amplitude horaire 6 heures 45-17 heures 45, la cour d'appel, qui a dénaturé ces documents clairs et précis, a violé le principe susvisé ;

Et attendu que la cassation à intervenir sur le moyen pris en sa première branche ne s'étend pas au chef de dispositif, critiqué par la première branche du deuxième moyen, condamnant l'employeur à verser au salarié des frais de déplacement, mais entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif critiqués par le quatrième moyen relatifs à la prise d'acte de la rupture du contrat de travail et aux condamnations subséquentes ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres branches du premier moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société Transports Tézenas à verser à M. C... les sommes de 3 110,18 euros au titre des frais de déplacement et 1 042,92 euros au titre des indemnités de repas et de casse-croûte, l'arrêt rendu le 29 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, sur les points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne M. C... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Transports Tézenas

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société TRANSPORTS TEZENAS à payer à M. C... une somme à titre d'heures supplémentaires et des congés payés y afférents

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué,

«1) Sur l'exécution du contrat de travail
1-1) Sur les demandes relatives aux heures supplémentaires et frais et indemnités de déplacement
Le contrat de travail de M. C... prévoyait que "le lieu d'embauche est situé [...] ". Par lettre du 13/2/2012, la SARL Transports Tézenas a informé M. C... que "suite à la création et à l'ouverture d'un établissement secondaire en date du 2/1/2012 au [...] (
) le lieu d'embauche est dorénavant situé à l'établissement secondaire".
En indiquant dans le contrat de travail le lieu d'embauche, la SARL Transports Tézenas a fixé, à cet endroit, le lieu où M. C... devait se présenter pour débuter son travail mais non son lieu de travail. En effet, M. C... indique lui-même que son chargement se faisait dès l'origine à Cormelles et que ses tournées ont, dès novembre 2009, été effectuées pour partie sur la Seine Maritime. Lorsque la SARL Transports Tézenas amodifié le lieu d'embauche (en le déplaçant de 47,6 km), n'ont été modifiés ni le lieu de chargement ni les tournées à effectuer et donc ni le lieu de travail en lui-même, ni la n ature du travail, M. C... ayant, avant et après modification les mêmes trajets à effectuer. En conséquence, cette modification, contrairement à ce qu'indique M. C..., n'affecte pas le contrat de travail lui-même et pouvait valablement être unilatéralement décidée par l'employeur.
En revanche, les trajets effectués par M. C... ne s'analysent pas de la même manière avant et après cette modification.
1-1-1) Entre le 26/10/2009 et le 12/2/2012
1-1-1-1) Sur les heures supplémentaires
M. C... décompose sa demande en deux réclamations : l'une porte sur le nombre d'heures figurant sur les feuilles de route établies par la SARL Transports Tézenas qui, selon lui n'auraient pas été correctement reprises dans certains bulletins de paie, l'autre porte sur des heures de trajet sui, soutient-il, auraient dû être intégrées dans ses heures de travail.
(
)
Le lieu d'embauche étant à Rabodanges, la SARL Transports Tézenas est tenue de rémunérer M. C... à compter de son arrivée sur ce site, ce que la SARL Transports Tézenas reconnaît et soutient d'ailleurs avoir fait puisqu'elle indique dans ses conclusions que, jusqu'à ce qu'elle crée son établissement secondaire à Cormelles, "M. C... prenait son camion à Rabodanges et son temps de travail était décompté à compter de ce lieu".
M. C... affirme, quant à lui, n'avoir été rémunéré qu'à compter de son arrivée sur le site de Cormelles et demande paiement du temps de trajet entre Rabodanges et Cormelles. Il produit divers éléments au soutien de sa thèse. Il fait ainsi valoir que les feuilles de route mentionnent une prise de service à 6H45 quand il faisait une tournée du matin sur Falaise. Or, c'est la même heure de prise de service qui figure pour ces tournées après février 2012 alors qu'il prenait son service au lieu de chargement à Cormelles. Il est à noter que ces tournées finissaient en outre à la même heure (17H45). La SARL Transports Tézenas n'explique pas comment il se fait que cette tournée a pu conserver les mêmes horaires (6H45/17H45) avec ou sans le temps de trajet Rabodanges/Cormelles que l'évaluation non contestée de M. C... chiffre à 1H20 aller/retour.
M. C... produit également l'attestation d'un collègue, M. G... qui indique que pour les différentes tournées "la dispatch et le chargement des colis s'effectuaient au dépôt de Cormelles le Royal à 6,5 et midi". Il produit les feuilles de route de deux autres collègues, MM. V... et R... qui, pour des tournées différentes (sur St Pierre et Carpiquet) indiquent aussi une prise de service à 6H45.
La SARL Transports Tézenas n'apporte aucun élément venant contredire ceux apportés par M. C.... Il sera en conséquence retenu que les heures de trajet entre Rabodanges et Cormelles n'ont pas été payées à M. C.... Celui-ci est donc bien fondé à réclamer un rappel à ce titre. Le calcul qu'il a effectué et qui est détaillé dans son tableau côté 21 sera donc retenu pour la période antérieure au 13/2/2012, date à laquelle la modification de son lieu d'embauche lui a été notifié. La somme due est de 4100,91 €.» ;

ALORS, en premier lieu, QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que, pour retenir que le salarié était tenu d'effectuer un trajet entre Rabodanges, lieu de son embauche avant février 2012, et Cormelles le Royal, que sa prise de service à 6h45 correspondait non pas à son arrivée à l'établissement de Rabodanges mais à Cormelles le Royal et ainsi que le temps de trajet effectué entre ces deux communes devait être rémunéré comme du temps de travail effectif, à titre d'heures supplémentaires, la cour d'appel a relevé, d'une part, que la société TRANSPORTS TEZENAS devait, comme elle l'a reconnu, décompter le temps de travail de M. C... à compter de son arrivée sur son lieu d'embauche, à Rabodanges, et, d'autre part, que les feuilles de route mentionnaient une prise de service à 6h45 quand le salarié faisait une tournée du matin sur Falaise, que c'est la même heure de prise de service qui figurait pour ces tournées après février 2012 alors qu'il prenait son service au lieu de chargement à Cormelles, étant à noter que ces tournées finissaient à la même heure (17h45) et que la société n'explique pas comment il se fait que cette tournée avait pu conserver les mêmes horaires (6h45/17h45) avec ou sans le temps de trajet Rabodanges/Cormelles que l'évaluation non contestée du salarié chiffre à 1h20 aller/retour (arrêt, p. 5) ; que cette constatation est incompatible avec les feuilles de routes visées par la cour d'appel, d'où il ressort que les horaires d'embauche et de fin de tournée diffère avant et après le changement de lieu d'embauche en février 2012 ; qu'ainsi, la cour d'appel a dénaturé ces documents ;

ALORS, en second lieu, QUE, si, en cas de litige, la preuve de l'existence et du nombre des heures de travail accomplies n'incombe spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient à ce dernier d'étayer préalablement sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, pour faire droit à la demande du salarié en paiement d'heures supplémentaires, la cour d'appel constate que le salarié a produit divers éléments au soutien de sa thèse, qu'il fait valoir qu'il ressort des feuilles de route qu'après le changement de lieu d'embauche, les horaires pour la tournée sur Falaise restent identiques, que l'employeur n'explique pas comment cette tournée a pu conserver les mêmes horaires avec ou sans un temps de trajet entre Rabodanges et Cormelles le Royal évalué à 1h20 aller/retour, que le salarié produit également l'attestation d'un collègue et les feuilles de route de deux autres salariés d'où il ressortirait que le chargement des colis s'effectuait au dépôt de Cormelles le Royal à 6h45 et que l'employeur n'apporte aucun élément venant contredire ceux apportés par le salarié ; qu'en statuant ainsi, sans relever que le salarié avait préalablement étayé sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

ALORS, en troisième lieu et en toute hypothèse, QUE, si, en cas de litige, la preuve de l'existence et du nombre des heures de travail accomplies n'incombe spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient à ce dernier d'étayer préalablement sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, pour faire droit à la demande du salarié en paiement d'heures supplémentaires, la cour d'appel constate que le salarié a produit divers éléments au soutien de sa thèse, qu'il fait valoir qu'il ressort des feuilles de route établies par l'employeur qu'après le changement de lieu d'embauche, les horaires pour la tournée sur Falaise restent identiques, que l'employeur n'explique pas comment cette tournée a pu conserver les mêmes horaires avec ou sans un temps de trajet entre Rabodanges et Cormelles le Royal évalué à 1h20 aller/retour, que le salarié produit également l'attestation d'un collègue et les feuilles de route de deux autres salariés d'où il ressortirait que le chargement des colis s'effectuait au dépôt de Cormelles le Royal à 6h45 et que l'employeur n'apporte aucun élément venant contredire ceux apportés par le salarié ; qu'en statuant ainsi, alors que les éléments ont été relevés afin d'établir un lieu et une heure de chargement des colis et ne permettaient donc pas d'étayer, avec précision, la demande du salarié quant aux horaires effectivement réalisés par lui, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

ALORS, en quatrième lieu, QUE, si, en cas de litige, la preuve de l'existence et du nombre des heures de travail accomplies n'incombe spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient à ce dernier d'étayer préalablement sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, pour faire droit à la demande du salarié en paiement d'heures supplémentaires, la cour d'appel constate que le salarié a produit divers éléments au soutien de sa thèse, qu'il fait valoir qu'il ressort des feuilles de route établies par l'employeur qu'après le changement de lieu d'embauche, les horaires pour la tournée sur Falaise restent identiques, que l'employeur n'explique pas comment cette tournée a pu conserver les mêmes horaires avec ou sans un temps de trajet entre Rabodanges et Cormelles le Royal évalué à 1h20 aller/retour, que le salarié produit également l'attestation d'un collègue et les feuilles de route de deux autres salariés d'où il ressortirait que le chargement des colis s'effectuait au dépôt de Cormelles le Royal à 6h45 et que l'employeur n'apporte aucun élément venant contredire ceux apportés par le salarié ; qu'en statuant ainsi, alors qu'ayant été établies par l'employeur et lui ayant permis d'établir le salaire perçu par le salarié malgré des erreurs minimes constatées par l'arrêt attaqué, les feuilles de route ne pouvaient, dans le même temps, étayer avec précision une demande en paiement d'heures supplémentaires qui supposent en elles-mêmes l'existence d'un horaire ou d'un nombre d'heures différent, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

ALORS, en cinquième lieu, QUE si, en cas de litige, la preuve de l'existence et du nombre des heures de travail accomplies n'incombe spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient à ce dernier d'étayer préalablement sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, qu'en l'espèce, pour faire droit à la demande du salarié en paiement d'heures supplémentaires, la cour d'appel constate que le salarié a produit divers éléments au soutien de sa thèse, qu'il fait valoir qu'il ressort des feuilles de route qu'après le changement de lieu d'embauche, les horaires pour la tournée sur Falaise restent identiques, que le salarié produit également l'attestation d'un collègue et les feuilles de route de deux autres salariés d'où il ressortirait que le chargement des colis s'effectuait au dépôt de Cormelles le Royal à 6h45 et que l'employeur n'apporte aucun élément venant contredire ceux apportés par le salarié ; qu'en statuant ainsi, alors que l'attestation produite et les feuilles de routes d'autres salariés ne pouvaient à eux seuls et en eux-mêmes constituer des éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés par le salarié, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société TRANSPORTS TEZENAS à payer à M. C... une somme à titre de frais de déplacements

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué,

«1) Sur l'exécution du contrat de travail
1-1) Sur les demandes relatives aux heures supplémentaires et frais et indemnités de déplacement
Le contrat de travail de M. C... prévoyait que "le lieu d'embauche est situé [...] ". Par lettre du 13/2/2012, la SARL Transports Tézenas a informé M. C... que "suite à la création et à l'ouverture d'un établissement secondaire en date du 2/1/2012 au [...] (
) le lieu d'embauche est dorénavant situé à l'établissement secondaire".
En indiquant dans le contrat de travail le lieu d'embauche, la SARL Transports Tézenas a fixé, à cet endroit, le lieu où M. C... devait se présenter pour débuter son travail mais non son lieu de travail. En effet, M. C... indique lui-même que son chargement se faisait dès l'origine à Cormelles et que ses tournées ont, dès novembre 2009, été effectuées pour partie sur la Seine Maritime. Lorsque la SARL Transports Tézenas amodifié le lieu d'embauche (en le déplaçant de 47,6 km), n'ont été modifiés ni le lieu de chargement ni les tournées à effectuer et donc ni le lieu de travail en lui-même, ni la n ature du travail, M. C... ayant, avant et après modification les mêmes trajets à effectuer. En conséquence, cette modification, contrairement à ce qu'indique M. C..., n'affecte pas le contrat de travail lui-même et pouvait valablement être unilatéralement décidée par l'employeur.
En revanche, les trajets effectués par M. C... ne s'analysent pas de la même manière avant et après cette modification.
1-1-1) Entre le 26/10/2009 et le 12/2/2012
(
)
1-1-1-2) Sur les indemnités et frais de déplacements
(
)
M. C... réclame également le remboursement des frais de déplacement engagés pour se rendre à Cormelles le Royal. Les feuilles de route produites par la SARL Transports Tézenas (cotes 16-1 et suivants) mentionnent la manière dont M. C... s'y est rendu. Il en ressort qu'il a effectué entre le 1/11/2009 et le 12/2/2012 au total 60 allers/retours avec son véhicule personnel. La société n'apporte pas d'éléments qui contrediraient ces feuilles de route.
La SARL Transports Tézenas est tenue de prendre en charge ces déplacements effectués entre le lieu d'embauche et un autre établissement de l'entreprise pendant les heures de travail. Elle soutient avoir remboursé à M. C... deux factures de gasoil. Ce point est contesté par M. C... et la SARL Transports Tézenas n'apporte aucun justificatif d'un tel règlement qui, au demeurant n'aurait pas été de nature à compenser les frais générés par ces déplacements.
En retenant le barème fiscal proposé par M. C... (soit 0,561 €/km), compte tenu du kilométrage d'un aller-retour Rabodanges/Cormelles (92,4 km), la somme due est de 3110,18 €.» ;

ALORS, en premier lieu, QUE la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; que la cassation s'étend également à l'ensemble des dispositions de la décision cassée ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'ainsi, la cassation à intervenir sur le chef de dispositif relatif à l'accomplissement d'heures supplémentaires entraînera la cassation du chef de dispositif relatif à la demande en paiement d'une somme au titre des frais de déplacements ;

ALORS, en second lieu, QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que, pour accueillir la demande du salarié en condamnation de la société TRANSPORTS TEZENAS à lui payer une somme à titre de remboursement de frais de déplacements, la cour d'appel a affirmé que les feuilles de route produites par l'employeur (cotes 16-1 et suivants) mentionnent la manière dont M. C... s'est rendu à Cormelles le Royal (arrêt, p. 6) ; que cette constatation est incompatible avec les feuilles de route visées, où il n'est fait mention ni du lieu de départ ni de celui d'arrivée et que la société, qui les a produites au soutien de son argumentation, a présenté dans ses écritures d'appel comme établissant le moyen de transport utilisé par le salarié pour se rendre avant février 2012 à l'établissement situé à Rabodanges ; qu'ainsi, la cour d'appel a dénaturé ces documents.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société TRANSPORTS TEZENAS à payer à M. C... une somme à titre d'indemnités de repas

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué,

«1-2) Sur les demandes relatives aux indemnités de repas et de casse-croûtes
1-2-1) Indemnités de repas
M. C... conteste, d'une part, le nombre d'indemnités décomptées par la SARL Transports Tézenas, d'autre part, le fait que celle-ci ait substitué à l'indemnité de repas l'indemnité spéciale
Aux termes de la convention collective des transports, cette dernière indemnité est due quand l'ouvrier, dont l'amplitude de la journée de travail couvre entièrement la période comprise entre 11H et 14H30, peut manger sur son lieu de travail.
L'indemnité de repas est due quand l'ouvrier, dont l'amplitude de la journée de travail couvre entièrement la période comprise entre 11H et 14H15, ne peut pas manger sur son lieu de travail.
La SARL Transports Tézenas soutient que M. C... disposait à Cormelles le Royal d'une salle équipée qui lui permettait de se restaurer et qu'il pouvait s'y rendre en fin de service quand il effectuait la tournée du matin ou en milieu de service quand il faisait la tournée de Falaise dans la mesure où il bénéficiait d'une coupure de 12H30 à 13H.
Toutefois, au vu des feuilles de route les tournées du matin se finissaient soit avant 11H (tournée de 6H à 9H ou de 4H30 à 8H15) et n'étaient pas concernées par les dispositions concernant l'indemnité de repas, soit se finissaient après 14H30 (9H15 à 14H45) et ne permettaient donc pas à M. C... de se restaurer en fin de service. Quant aux tournées de la journée, sur Falaise (6H45 à 18H20), la SARL Transports Tézenas ne justifie pas qu'elles étaient organisées de telle manière que M. C... se trouve à Cormelles le Royal ou à proximité immédiate et puisse ainsi prendre son repas dans la salle aménagée à cet effet pendant la durée de sa "coupure" d'une demi-heure (initialement de 10H30 à 11H puis de 12H30 à 13H). En conséquence, M. C... est bien fondé à obtenir paiement d'une indemnité de repas -et non d'une indemnité spéciale- quand les conditions d'horaire posées par la convention collective nationale étaient remplies et a droit à un rappel à ce titre.
M. C... réclame au total 178 indemnités de repas dont 20 au mois de mars sur la base de 12,44 € et 162 d'avril 201 à juin 2012 sur la base de 12,59 €.
Après vérification des feuilles de route, il s'avère que 19 (et non 20) indemnités sont dues pour le mois de mars 2011 ouvrant droit à 236,36 €. Quelques ereurs apparaissent au cours des mois suivants. Ainsi, 2 indemnités (et non 1) sont dues en février 2012, 8 indemnités (et non 12) en avril 2012, 8 indemnités (et non 9) en mai 2012. Au total ce sont donc 158 indemnités qui sont dues sur cette période ouvrant droit à une indemnité globale de 1989,22 €.
Au total, les indemnités de repas dues s'élèvent à 2225,58 € (236,36 € pour le mois de mars et 1989,22 € pour les autres mois). La SARL Transports Tézenas a versé à ce titre 63 € pour le mois de mars et 1116,60 € pour les autres mois selon le tableau (cote 24) établi par M. C... et non contesté par la SARL Transports Tézenas. Restent donc dus 1045,98 €.» ;

ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que, pour faire droit aux demandes du salarié en paiement d'indemnités de repas, la cour d'appel a relevé que, relativement aux tournées de la journée sur Falaise (6h45 à 18h20), la société TRANSPORTS TEZENAS ne justifiait pas qu'elles étaient organisées de telle manière que M. C... se trouvait à Cormelles le Royal ou à proximité immédiate et puisse ainsi prendre son repas dans la salle aménagée à cet effet pendant la durée de sa coupure d'une demi-heure (initialement de 10h30 à 11h puis de 12h30 à 13h) [arrêt, p. 8] ; que cette constatation est incompatible avec une des pièces produites, d'où il ressort que le salarié se trouvait au cours de la tournée sur Falaise à l'établissement de Cormelles le Royal lors de la pause aménagée de 12h30 à 13h ; qu'ainsi, la cour d'appel a dénaturé ce document.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société TRANSPORTS TEZENAS à payer à M. C... des sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, et les congés payés y afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué,

«2) Sur la prise d'acte
Au soutien de sa demande tendant à ce que sa prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. C... fait valoir que toutes ses heures de travail n'ont pas été payées, que son contrat de travail a été unilatéralement modifié, que ses frais anormaux de déplacement n'ont pas été pris en compte, que les dispositions de la convention collective nationale relatives aux indemnités de repas et de casse-croûte ont été contournées, qu'enfin, à son retour de congés au mois d'août, il a constaté qu'il avait été remplacé.
Les manquements avérés déjà analysés (non paiement de toutes les heures de travail, non application des dispositions de la convention collective nationale relatives aux repas) graves et qui ont perduré pour certains jusqu'à la prise d'acte justifieraient la rupture du contrat de travail sans qu'il soit besoin de se pencher sur le grief supplémentaire évoqué. Cette prise d'acte produira donc les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
M. C... est fondé à obtenir des indemnités de rupture. Les sommes réclamées à ce titre n'étant pas contestées dans leur montant, ne serait-ce qu'à titre subsidiaire, seront retenues.
M. C... peut également prétendre à des dommages et intérêts. M. C... soutient que l'entreprise comptait plus de 10 salariés, la SARL Transports Tézenas conteste ce point. L'analyse du registre d'entrée et de sortie du personnel produit par la SARL Transports Tézenas fait apparaître que l'entreprise employait moins de 10 salariés au 31/12/2010 (7 salariés), elle en employait 10 au 31/12/2011 et 11 et 31/12/2012. Il ne saurait dès lors être retenu qu'au moment du licenciement, elle employait habituellement au moins 11 salariés ; en conséquence, les dommages et intérêts s'apprécient en fonction du préjudice subi sans minimum applicable.
M. C... justifie avoir effectué une mission d'intérim le 10/9/2012, avoir été employé en contrat à durée déterminée du 18/9 au 21/12/2012 et avoir perçu des allocations de chômage de janvier à août 2013.
Compte tenu de ces renseignements, des autres éléments connus : son âge (31 ans), son ancienneté (2 ans et 10 mois), son salaire (1765,81 € en moyenne au cours des 12 derniers mois après réintégration des rappels de salaire afférents à cette période), au moment du licenciement il y a lieu de lui allouer 10000 € de dommages et intérêts.» ;

ALORS, en premier lieu, QUE la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; que la cassation s'étend également à l'ensemble des dispositions de la décision cassée ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'ainsi, la cassation à intervenir des chefs de dispositif relatifs aux heures supplémentaires et aux indemnités de repas entraînera la cassation du chef de dispositif relatif à la prise d'acte de la rupture du contrat de travail et aux condamnations subséquentes ;

ALORS, en second lieu et subsidiairement, QUE la prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse lorsque l'employeur a commis un manquement suffisamment grave empêchant la poursuite du contrat de travail ; que, pour décider, en l'espèce, que la prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a relevé que deux manquements étaient avérés, à savoir le non-paiement de toutes les heures de travail et la non-application des stipulations de la convention collective nationale des transports routiers relatives aux indemnités de repas, qu'elle a estimé graves et qui ont perduré pour certains jusqu'à la prise d'acte ; qu'en statuant ainsi, alors que ces manquements, pour certains anciens, représentent des sommes modiques, voire minimes si elles sont rapportées à leur durée, et, en l'absence de toute constatation par l'arrêt de réclamations de la part du salarié et compte tenu de leur durée, n'ont pas effectivement rendus impossible la poursuite de la relation de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 1231-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-28507
Date de la décision : 05/06/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 29 septembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 jui. 2019, pourvoi n°17-28507


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.28507
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