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05/06/2019 | FRANCE | N°17-28346

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 juin 2019, 17-28346


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article R. 1455-7 du code du travail ;

Attendu, selon ce texte, que dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu en référé, que M. Y... a été engagé par la société Boccard en qualité de dessinateur-projeteur à domicile statut agent de ma

îtrise, suivant contrat de travail à durée indéterminée du 4 mars 1997 ; qu'il a été promu c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article R. 1455-7 du code du travail ;

Attendu, selon ce texte, que dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu en référé, que M. Y... a été engagé par la société Boccard en qualité de dessinateur-projeteur à domicile statut agent de maîtrise, suivant contrat de travail à durée indéterminée du 4 mars 1997 ; qu'il a été promu cadre dessinateur, position I, indice 86 par avenant du 1er janvier 2001, prévoyant en son article 4 que pour tout ce qui n'était pas prévu par lui la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie était applicable ; que contestant l'évolution de sa rémunération non conforme selon lui à la convention collective, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de salaires ;

Attendu que pour ordonner à l'employeur d'appliquer au salarié l'évolution automatique de sa classification, telle que prévue par les articles 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, lui ordonner de lui attribuer les classifications position Il coefficient 114 depuis le 1er juin 2011 et jusqu'au 31 décembre 2012, position II coefficient 120 entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2015, position II coefficient 125 à partir du 1er janvier 2016, et, en conséquence, le condamner au paiement d'une provision sur rappel de salaire sur la période du 1er juin 2011 au 30 novembre 2016 et les congés payés afférents et d'une provision à valoir sur des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, l'arrêt retient que le contrat de travail, tel qu'il a été modifié par un avenant à effet au 1er janvier 2001, stipule que le salarié dispose du statut de cadre position I, coefficient 86, qu'il ressort de cette clause claire et précise que le salarié s'est vu reconnaître le statut de cadre position I, alors même qu'il n'était pas titulaire des diplômes exigés ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'avenant attribuait à l'intéressé l'indice 86, applicable aux seuls salariés dont le statut de cadre est reconnu par application de l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie, et que les cadres relevant de cette catégorie ne peuvent bénéficier du mécanisme de progression automatique triennal prévu par les articles 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, la cour d'appel, qui aurait dû en déduire l'existence d'une contestation sérieuse, a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit n'y avoir lieu à référé concernant la demande de M. Y... au titre de l'indemnité d'occupation, l'arrêt rendu le 27 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit n'y avoir lieu à référé ;

Condamne M. Y... aux dépens incluant ceux exposés devant les juges statuant en référé en première instance et en appel ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Boccard

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné à la société Boccard d'appliquer au salarié l'évolution automatique de sa classification, telle que prévue par les articles 21 et 22 de la Convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, d'AVOIR ordonné à la société Boccard de lui attribuer les classifications : - Position Il coefficient 114 depuis le l er juin 201l et jusqu'au 31 décembre 2012, - Position II coefficient 120 entre le l er janvier 2013 et le 31 décembre 2015, - Position II coefficient 125 à partir du 1 er janvier 2016, et d'AVOIR en conséquence condamné la société Boccard à lui verser les sommes de 12.817,99 euros à titre de provision sur les rappels de salaire du 1er juin 2011 au 30 novembre 2016 outre la somme de 1.281,79 euros à titre de provision sur congés payés, les intérêts au taux légal sur la somme de 14.099,78 euros, à compter du 14 juin 2016 à titre de provision sur dommages et intérêts, pour exécution déloyale du contrat de travail, ainsi qu'une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Monsieur Y... soutient que la société BOCCARD a omis de procéder à l'évolution automatique de classification prévue par la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, ce qui a directement impacté son salaire.
Il sollicite les rappels suivants:
- année 2011: 180,50 euros
- année 2012: 554,40 euros
- année 2013 : 3.245,04 euros
- année 2014: 3.106,80 euros
- année 2015 : 3.240 euros
- année 2016 : 2.514,25 euros (janvier à novembre) soit 12.840,99 euros outre 1.284,10 euros de congés payés afférents.
Il fait valoir que par avenant du 1er janvier 2001, il a été promu « cadre dessinateur » avec référence claire et non équivoque à la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie. Il revendique donc l'application des articles 21 A et 22 de cette convention qui prévoient une évolution automatique de position et de coefficient tous les trois ans et il considère ainsi qu'il aurait dû être placé au 1 er janvier 2004, en position Il coefficient 100, pour relever au jour de ses écritures, de la position Il coefficient 125. Or, l'employeur lui a fait une application aléatoire et discrétionnaire de la classification et non automatique comme il aurait dû le faire.
Il fait valoir en substance que la question de l'application du mécanisme d'avancement automatique triennal aux nouveaux salariés cadres issus de la reclassification intervenue par l'accord national de transposition du 29 janvier 2000, est sans portée dès lors que son statut de cadre est indiscutable et qu'il ne peut être considéré comme un cadre "transposé" ou "maîtrise".
La société BOCCARD réplique que c'est en application de l'accord national du 29 janvier 2000, qu'il a été proposé à Monsieur Y... de devenir cadre et d'être soumis à la convention de forfait jour et qu'un avenant a été régularisé le 1er janvier 2001, le classant à l'emploi de "cadre-maîtrise" indice 86, sans que ses fonctions ne soient changées.
Elle soutient que les règles de promotion automatique prévues à l'article 21 de la convention collective sont réservées aux jeunes diplômés et non aux "cadres maîtrise" tel Monsieur Y... qui ne dispose pas des diplômes conditionnant l'application de l'article 21A et, qu'en outre, l'évolution automatique à la position Il est réservée par ailleurs (article 21 B) aux ingénieurs et cadres confirmés, par "promotion pour les non-diplômés". Dès lors Monsieur Y... ne pouvait prétendre à une évolution automatique puisque ne satisfaisant pas aux dispositions conventionnelles. Elle ajoute que l'accord du 29 janvier 2000 avait pour objet de créer une catégorie nouvelle de cadres permettant la promotion d'agents de maîtrise au statut cadre sans que ceux-ci soit nécessairement intégrés à la position Il comme le prévoit la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie. L'article 3 de cet accord exclut toute référence à l'âge ou à l'ancienneté, contrairement à ce que revendique Monsieur Y..., mais une promotion selon le seul pouvoir de direction de l'employeur.
Elle prétend qu'ainsi, l'application de l'accord du 29 janvier 2000 a soulevé de véritables difficultés, comme en témoigne la jurisprudence qui jusqu'à un arrêt du 6 juillet 2016 de la Cour de Cassation, présentait des divergences d'interprétation. Ainsi, les premiers juges auraient dû constater l'existence d'une contestation sérieuse. Aucune situation d'urgence n'est établie par ailleurs par Monsieur Y... et il n'y a donc pas lieu à référé selon elle, à titre subsidiaire.

***

Suivant l'article R 1455-5 du Code du travail: "Dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend."
L'article R 1455-7 énonce que: "Dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire".
Il est constant que l'absence de contestation sérieuse implique l'évidence de la solution qu'appelle le point contesté.

Aux termes de l'article 21 de la convention collective, il est prévu que:
"- Classification
A - ANNÉES DE DÉBUT
Position 1
Les titulaires des diplômes actuellement définis à l'article 1 de la présente convention, qui débutent comme ingénieurs ou cadres administratifs ou commerciaux, bénéficient à leur entrée dans l'entreprise d'un taux minimum garanti.
Le coefficient qui résulte de l'article 22 ci-après est majoré pour chaque année d'expérience acquise par les intéressés au-delà de 23 ans jusqu'au moment où ils accèdent aux fonctions de la position II et de la position III où sont classés les ingénieurs et cadres confirmés.
Le calcul des années d'expérience se fait sur les bases suivantes:
- toute année de travail effectuée comme ingénieur ou cadre dans l'entreprise liée par le présent accord ou dans une activité en rapport avec la fonction envisagée est comptée comme une année d'expérience.
-les études à plein temps postérieures au premier diplôme et ayant conduit à l'obtention d'un deuxième diplôme parmi ceux actuellement définis à l'article 1 de la présente convention, et utilisable éventuellement par l'entreprise à la condition que ces études aient une durée supérieure ou égale à un an, sont comptées comme une année d'expérience.
Dans le cas où les titulaires de diplômes ainsi définis à l'article 1 de la présente convention débutent comme ingénieurs ou cadres administratifs ou commerciaux avant 23 ans, ils bénéficient d'un taux d'engagement minimum fonction de leur âge ; leurs appointements minima doivent être augmentés par la suite de façon que ces appointements correspondent, lorsque les intéressés atteignent 23 ans, au taux minimum garanti d'embauche des ingénieurs et cadres âgés de 23 ans.
Les ingénieurs et cadres débutants accèdent au classement de la position" et de la position 11/ prévues pour les ingénieurs et cadres confirmés dès que leurs fonctions le justifient. Ce passage a un caractère obligatoire lorsqu'ils ont accompli une période de trois ans en position l, dont une année au moins de travail effectif dans l'entreprise, et atteint l'âge de 27 ans. Les études à plein temps, telles que définies à l'alinéa 3 ci-dessus, équivalent à une période d'un an d'ancienneté en position 1.
Les taux minima d'engagement dans l'entreprise et la majoration de coefficient par année d'expérience sont fixés dans le barème annexé.
B. - INGENIEURS ET CADRES CONFIRMES (indépendamment de la possession d'un diplôme)
Les ingénieurs et cadres confirmés soit par leur période probatoire en position I, soit par promotion pour les non-diplômés, sont classés dans la position II et la position III ( ...).
Position Il
(. . .)
Les salariés classés au troisième échelon du niveau V de la classification instituée par l'accord national du 21 juillet 1975 ( .. .) Seront placés en position" au sens du présent article à la condition que leur délégation de responsabilité implique une autonomie suffisante. Ils auront la garantie de l'indice hiérarchique 108 déterminé par l'article 22 ci-dessous.
(. .. ) »
L'article 22 est ainsi rédigé:
« Indices hiérarchiques
La situation relative des différentes positions, compte tenu éventuellement pour certaines d'entre elles de l'âge ou de l'ancienneté, est déterminée comme suit:
Position 1 (années de début) :
- 21 ans : 60
- 22 ans :...................................... 68
- 23 ans et au-delà :........... 76
- Majoration par année d'expérience acquise au-delà de 23 ans dans les conditions prévues à l'article 20 : 8
Position II :....................................100
- Après 3 ans en position" dans l'entreprise : 108
- Après une nouvelle période de 3 ans : 114
- Après une nouvelle période de 3 ans : 120
- Après une nouvelle période de 3 ans : 125
- Après une nouvelle période de 3 ans : 130
- Après une nouvelle période de 3 ans : 135
Position repère III A : 135
Position repère III B : 180
Position repère III C : 240
Et l'article 6 alinéa 4 de la convention collective prévoit qu'en cas de promotion d'un membre du personnel à une situation d'ingénieur ou cadre dans l'entreprise, « il lui est adressé une lettre de notification de ses nouvelles conditions d'emploi établie conformément aux dispositions de l'article 4 (. . .) et de l'article 21-B de la présente convention collective ».
Suivant l'Article 3 de l'accord du 29 janvier 2000 :
" Classification
Aux articles 1er, 21 et 22 de la Convention Collective Nationale des Ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 modifiée, il est ajouté, parallèlement à la position 1 et sans condition d'âge ou d'ancienneté, les six coefficients de classements suivants: 60, 68, 76, 80, 86,92.
Article 4 - Grille de transposition
Il est institué, à partir de l'an 2000 et à titre transitoire, une grille de transposition permettant, pour les salariés qui remplissent les conditions définies à l'article 2 (conditions pour conclure une convention de forfait en heures ou en jours sur l'année), de bénéficier de la qualité de cadre au sens des conventions collectives de branche de la métallurgie, et de déterminer le coefficient de classement résultant de la Convention Collective Nationale des Ingénieurs et Cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 modifiée, correspondant au coefficient de même niveau résultant de l'accord national du 21 juillet 1975 modifié sur la classification ».

Cet article est suivi d'une "grille transitoire (qui) permet une translation directe et Immédiate des anciens niveaux de classification aux nouveaux", à partir de quatre colonnes reprenant:
- la "classification de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de 1972 faisant apparaître l'ensemble des coefficients de classement (de 60 à 240), y compris les nouveaux coefficients (de 60 à 92) résultant de l'article 3 de l'Accord ;
- la "classification résultant de l'Accord National du 21 juillet 1975" (de 140 à 395) ;
- les indices de "classification actuelle" ;
- les niveaux dans la "grille de transposition".
Il ressort de ces dispositions qu'aucun renvoi n'est fait de la disposition sur le passage automatique à la Position Il dont se prévaut le salarié, à la condition de diplôme de l'alinéa 1 de l'article 21 A.
Si l'alinéa 1, comme d'autres alinéas de l'article 21 A, évoquent "les titulaires de diplômes", l'alinéa sur le passage automatique à la Position Il évoque "les ingénieurs et cadres débutants ( ... )" qui ont occupé la position l, et cet alinéa ne comprend aucun renvoi à la condition de diplômé de l'alinéa 1.
L'alinéa 1 ne vise qu'à faire bénéficier ces titulaires de diplômes à leur entrée dans l'entreprise d'un taux minimum garanti.
Dès lors, à supposer même que la disposition de la convention collective dont se prévaut le salarié pour obtenir son passage automatique en Position Il, renvoie à l'alinéa 1 du même article 21 A en ce qu'il vise les titulaires de diplômes, celui-ci est en droit d'obtenir son passage automatique en position Il, dès lors que son contrat de travail tel qu'il a été modifié par un avenant du 20 décembre 2000 stipule qu' "A effet du 1er janvier 2001", Monsieur Y... dispose du statut de "cadre position l, coefficient 86".
Il ressort donc de cette clause claire et précise, que le salarié s'est vu reconnaître le statut de cadre position l, alors même qu'il n'était pas titulaire des diplômes exigés.
Dès lors il pouvait, sur le fondement de cette clause en ce qu'elle visait le statut de "cadre Position 1", se prévaloir de l'ensemble de l'article 21A de la convention collective "Année de début" qui concernait précisément la Position 1 et autrement dit, il pouvait également revendiquer l'application les dispositions de cet article 21 A de la convention collective qui étaient réservées aux diplômés, dès lors que l'avenant à son contrat, en visant le statut de cadre position l, avait eu précisément pour objet et pour effet de l'assimiler à ces diplômés.
Il est constant au surplus qu'il est loisible à un employeur de "surclasser" ou "surqualifier" un salarié par rapport aux fonctions effectivement exercées, en lui attribuant une qualification professionnelle conventionnellement supérieure à sa qualification personnelle, et que par conséquent il ne peut refuser de tirer les conséquences du "surclassement contractuel" qu'il a consenti. Le salarié doit donc bénéficier de la qualification qu'il lui a volontairement été reconnue et est donc fondé à prétendre à la rémunération correspondant à cette qualification par la seule application de son contrat de travail.
Il importe peu alors que le salarié ne remplisse pas les conditions prévues par la convention collective pour l'exercice de cet emploi.
Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de faire droit au moyen fondé sur la contestation sérieuse et la condition de l'urgence n'est pas exigée comme condition de l'application de l'article R 1455-7 du Code du travail précité. Il sera alloué à Monsieur Y... la somme de 12.817,99 euros à titre de provision sur les rappels de salaire du 1er juin 2011 au 30 novembre 2016 outre la somme de 1.281,79 euros au titre des congés payés afférents.
L'ordonnance sera infirmée sur le montant retenu.
Il n'y a pas lieu d'ordonner sous astreinte le paiement du rappel de salaire et des congés payés afférents étant observé qu'en vertu des dispositions des articles 500 et 539 du Code de procédure civile, la décision de la cour d'appel n'étant susceptible que d'une voie de recours extraordinaire, dont l'une des caractéristiques est de n'être point suspensive hormis les cas limitativement énumérés par la loi, le présent arrêt est exécutoire de droit et peut être mis à exécution dès sa notification »

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Selon l'article R 1455-5 du Code du travail qui stipule que « Dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend. »
L'article R 1455-6 du Code du travail dispose que « La formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite. »
L'article R 1455-7 du même code prévoit enfin que « Dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. »
En application de ce dernier article R 1455-7, la Cour de cassation a jugé que « la formation de référé du conseil de prud'hommes, statuant sur le fondement de l'article R. 516-31 du Code du travail [soit l'article R 1455-7 selon la codification aujourd'hui en vigueur], est compétente pour interpréter une convention ou un accord collectif » (Cour de Cassation, chambre sociale, 15 janvier 2002, pourvoi N° 00-41117).
En l'espèce, il est constant que l'urgence ne peut être invoquée, le conflit prenant naissance au 1er janvier 2004 selon les demandes du salarié, et celui-ci ne pouvant pas faire état de demande écrite antérieure à janvier 2016. La compétence de la formation des référés ne peut donc être admise qu'en l'absence de toute contestation sérieuse du l'interprétation de la convention collective soutenue par le demandeur.
Le refus d'application d'un droit évident caractérise en outre un trouble manifestement illicite, qu'il appartient à la formation de référé de faire cesser.
Selon le 5 ème alinéa du A de l'article 21 de la Convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, les cadres débutants qui ont accompli une période de trois ans en position 1 et qui ont plus de 27 ans accèdent au classement de la position II. Selon le B du même article de la convention collective, « Les ingénieurs et cadres confirmés soit par leur période probatoire en position 1, soit par promotion pour les non-diplômés, sont classés dans la position II et la position III».
Il n'est pas contesté que Monsieur W... Y... n'a pas le diplôme d'ingénieur, mais il n'est pas sérieusement contestable:
- Qu'il a débuté comme cadre au 1 er janvier 2001,
- Qu'il est âgé de plus de 27 ans.
- Qu'il aurait dû en conséquence accéder au classement de la position II trois ans plus tard, soit le 1 er janvier 2004, cette position II étant (de même que la position III) très explicitement ouverte aux cadres non-diplômés.
L'article 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie prévoit une progression automatique des appointements minima tous les trois ans, qui est celle dont le demandeur réclame l'application.
En outre, le demandeur produit un arrêt de la Cour de cassation (chambre sociale, 31 octobre 2012, pourvoi N°11-20986) qui casse un arrêt de la Cour d'Appel de Lyon qui avait débouté un salarié dans une affaire en tout point semblable au présent litige.
La lecture de l'arrêt de renvoi rendu par la Cour d'Appel de Lyon autrement composée, qui fait droit aux demandes du salarié conformément à l'interprétation de la convention collective arrêtée par la Cour de cassation, permet notamment de constater que le salarié en cause était un ETAM jusqu'à l'avenant qu'il avait signé en application des mêmes textes conventionnels que ceux qui ont permis la progression de Monsieur W... Y..., et que ce salarié n'était pas davantage diplômé que Monsieur W... Y....
Ainsi, même si la rédaction complexe de l'article 21 de la convention collective a pu un temps favoriser des interprétations erronées, le débat a été tranché par la décision de la Cour de cassation du 31 octobre 2012, dont la portée est limitée au champ d'application de la Convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, mais dont les employeurs relevant de cette convention ne peuvent s'exonérer.
Une contestation de l'évidence, même véhémente, n'est pas une contestation sérieuse ni de bonne foi, et la formation de référé du Conseil de prud'hommes de Lyon se dira en conséquence compétente pour statuer sur les demandes soumises à son appréciation.
Ayant constaté l'absence de contestation sérieuse, la formation de référé du Conseil de prud'hommes de Lyon a aussi constaté le bien-fondé des demandes de Monsieur W... Y... pour que lui soient attribuées les classifications prévues par la convention collective, et pour que lui soient payés les rappels de salaires et d'indemnité de congés payés afférents.
La formation de référé du Conseil de prud'hommes de Lyon se doit en conséquence d'apprécier l'argument de la prescription soulevé par le défendeur »

ALORS QUE le juge des référés ne peut allouer une provision sur dommages et intérêts ou ordonner l'exécution d'une obligation de faire que si la créance du salarié ne se heurte à aucune contestation sérieuse ; qu'en l'espèce, la demande de M. Y... tendant à voir réévaluer sa classification conventionnelle et se voir allouer une provision sur rappel de salaires pour non-respect par l'employeur des dispositions des articles 21 et 22 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie prévoyant au bénéfice des cadres un avancement automatique tous les trois ans se heurtait à la contestation sérieuse de l'employeur tenant à l'inapplication de ces dispositions conventionnelles aux salariés ayant bénéficié de la qualification de cadre par application de l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications ainsi que l'a jugé la Cour de cassation le 6 juillet 2016, ce qui était le cas de M. Y... devenu cadre sans changer de fonctions par avenant du 1er janvier 2001 pour permettre à son temps de travail d'être décompté dans le cadre d'un forfait en jours sur l'année ; qu'en ordonnant à la société Boccard de repositionner le salarié dans la classification conventionnelle et en la condamnant au paiement d'une provision à valoir sur des rappels de salaires en application des articles 21 et 22 de la convention collective, en dépit de cette contestation sérieuse, la cour d'appel a violé l'article R 1455-7 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné à la société Boccard d'appliquer au salarié l'évolution automatique de sa classification, telle que prévue par les articles 21 et 22 de la Convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, d'AVOIR ordonné à la société Boccard de lui attribuer les classifications : - Position Il coefficient 114 depuis le l er juin 201l et jusqu'au 31 décembre 2012, - Position II coefficient 120 entre le l er janvier 2013 et le 31 décembre 2015, - Position II coefficient 125 à partir du 1 er janvier 2016, et d'AVOIR en conséquence condamné la société Boccard à lui verser les sommes de 12.817,99 euros à titre de provision sur les rappels de salaire du 1er juin 2011 au 30 novembre 2016 outre la somme de 1.281,79 euros à titre de provision sur congés payés, les intérêts au taux légal sur la somme de 14.099,78 euros, à compter du 14 juin 2016 à titre de provision sur dommages et intérêts, pour exécution déloyale du contrat de travail, ainsi qu'une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Monsieur Y... soutient que la société BOCCARD a omis de procéder à l'évolution automatique de classification prévue par la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, ce qui a directement impacté son salaire.
Il sollicite les rappels suivants:
- année 2011: 180,50 euros
- année 2012: 554,40 euros
- année 2013 : 3.245,04 euros
- année 2014: 3.106,80 euros
- année 2015 : 3.240 euros
- année 2016 : 2.514,25 euros (janvier à novembre) soit 12.840,99 euros outre 1.284,10 euros de congés payés afférents.
Il fait valoir que par avenant du 1er janvier 2001, il a été promu « cadre dessinateur » avec référence claire et non équivoque à la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie. Il revendique donc l'application des articles 21 A et 22 de cette convention qui prévoient une évolution automatique de position et de coefficient tous les trois ans et il considère ainsi qu'il aurait dû être placé au 1 er janvier 2004, en position Il coefficient 100, pour relever au jour de ses écritures, de la position Il coefficient 125. Or, l'employeur lui a fait une application aléatoire et discrétionnaire de la classification et non automatique comme il aurait dû le faire.
Il fait valoir en substance que la question de l'application du mécanisme d'avancement automatique triennal aux nouveaux salariés cadres issus de la reclassification intervenue par l'accord national de transposition du 29 janvier 2000, est sans portée dès lors que son statut de cadre est indiscutable et qu'il ne peut être considéré comme un cadre "transposé" ou "maîtrise".
La société BOCCARD réplique que c'est en application de l'accord national du 29 janvier 2000, qu'il a été proposé à Monsieur Y... de devenir cadre et d'être soumis à la convention de forfait jour et qu'un avenant a été régularisé le 1er janvier 2001, le classant à l'emploi de "cadre-maîtrise" indice 86, sans que ses fonctions ne soient changées.
Elle soutient que les règles de promotion automatique prévues à l'article 21 de la convention collective sont réservées aux jeunes diplômés et non aux "cadres maîtrise" tel Monsieur Y... qui ne dispose pas des diplômes conditionnant l'application de l'article 21A et, qu'en outre, l'évolution automatique à la position Il est réservée par ailleurs (article 21 B) aux ingénieurs et cadres confirmés, par "promotion pour les non-diplômés". Dès lors Monsieur Y... ne pouvait prétendre à une évolution automatique puisque ne satisfaisant pas aux dispositions conventionnelles. Elle ajoute que l'accord du 29 janvier 2000 avait pour objet de créer une catégorie nouvelle de cadres permettant la promotion d'agents de maîtrise au statut cadre sans que ceux-ci soit nécessairement intégrés à la position Il comme le prévoit la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie. L'article 3 de cet accord exclut toute référence à l'âge ou à l'ancienneté, contrairement à ce que revendique Monsieur Y..., mais une promotion selon le seul pouvoir de direction de l'employeur.
Elle prétend qu'ainsi, l'application de l'accord du 29 janvier 2000 a soulevé de véritables difficultés, comme en témoigne la jurisprudence qui jusqu'à un arrêt du 6 juillet 2016 de la Cour de Cassation, présentait des divergences d'interprétation. Ainsi, les premiers juges auraient dû constater l'existence d'une contestation sérieuse. Aucune situation d'urgence n'est établie par ailleurs par Monsieur Y... et il n'y a donc pas lieu à référé selon elle, à titre subsidiaire.

***
Suivant l'article R 1455-5 du Code du travail: "Dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend."
L'article R 1455-7 énonce que: "Dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire".
Il est constant que l'absence de contestation sérieuse implique l'évidence de la solution qu'appelle le point contesté.
Aux termes de l'article 21 de la convention collective, il est prévu que:
"- Classification
A - ANNÉES DE DÉBUT
Position 1
Les titulaires des diplômes actuellement définis à l'article 1 de la présente convention, qui débutent comme ingénieurs ou cadres administratifs ou commerciaux, bénéficient à leur entrée dans l'entreprise d'un taux minimum garanti.
Le coefficient qui résulte de l'article 22 ci-après est majoré pour chaque année d'expérience acquise par les intéressés au-delà de 23 ans jusqu'au moment où ils accèdent aux fonctions de la position II et de la position III où sont classés les ingénieurs et cadres confirmés.
Le calcul des années d'expérience se fait sur les bases suivantes:
- toute année de travail effectuée comme ingénieur ou cadre dans l'entreprise liée par le présent accord ou dans une activité en rapport avec la fonction envisagée est comptée comme une année d'expérience.
-les études à plein temps postérieures au premier diplôme et ayant conduit à l'obtention d'un deuxième diplôme parmi ceux actuellement définis à l'article 1 de la présente convention, et utilisable éventuellement par l'entreprise à la condition que ces études aient une durée supérieure ou égale à un an, sont comptées comme une année d'expérience.
Dans le cas où les titulaires de diplômes ainsi définis à l'article 1 de la présente convention débutent comme ingénieurs ou cadres administratifs ou commerciaux avant 23 ans, ils bénéficient d'un taux d'engagement minimum fonction de leur âge ; leurs appointements minima doivent être augmentés par la suite de façon que ces appointements correspondent, lorsque les intéressés atteignent 23 ans, au taux minimum garanti d'embauche des ingénieurs et cadres âgés de 23 ans.
Les ingénieurs et cadres débutants accèdent au classement de la position" et de la position 11/ prévues pour les ingénieurs et cadres confirmés dès que leurs fonctions le justifient. Ce passage a un caractère obligatoire lorsqu'ils ont accompli une période de trois ans en position l, dont une année au moins de travail effectif dans l'entreprise, et atteint l'âge de 27 ans. Les études à plein temps, telles que définies à l'alinéa 3 ci-dessus, équivalent à une période d'un an d'ancienneté en position 1.
Les taux minima d'engagement dans l'entreprise et la majoration de coefficient par année d'expérience sont fixés dans le barème annexé.
B. - INGENIEURS ET CADRES CONFIRMES (indépendamment de la possession d'un diplôme)
Les ingénieurs et cadres confirmés soit par leur période probatoire en position I, soit par promotion pour les non-diplômés, sont classés dans la position II et la position III ( ...).
Position Il
(. . .)
Les salariés classés au troisième échelon du niveau V de la classification instituée par l'accord national du 21 juillet 1975 ( .. .) Seront placés en position" au sens du présent article à la condition que leur délégation de responsabilité implique une autonomie suffisante. Ils auront la garantie de l'indice hiérarchique 108 déterminé par l'article 22 ci-dessous.
(. .. ) »
L'article 22 est ainsi rédigé:
« Indices hiérarchiques
La situation relative des différentes positions, compte tenu éventuellement pour certaines d'entre elles de l'âge ou de l'ancienneté, est déterminée comme suit:
Position 1 (années de début) :
- 21 ans : 60
- 22 ans :....................................... 68
- 23 ans et au-delà :........... 76
- Majoration par année d'expérience acquise au-delà de 23 ans dans les conditions prévues à l'article 20 : 8
Position II :.................................... 100
- Après 3 ans en position" dans l'entreprise : 108
- Après une nouvelle période de 3 ans : 114
- Après une nouvelle période de 3 ans : 120
- Après une nouvelle période de 3 ans : 125
- Après une nouvelle période de 3 ans : 130
- Après une nouvelle période de 3 ans : 135
Position repère III A : 135
Position repère III B : 180
Position repère III C : 240
Et l'article 6 alinéa 4 de la convention collective prévoit qu'en cas de promotion d'un membre du personnel à une situation d'ingénieur ou cadre dans l'entreprise, « il lui est adressé une lettre de notification de ses nouvelles conditions d'emploi établie conformément aux dispositions de l'article 4 (. . .) et de l'article 21-B de la présente convention collective ».
Suivant l'Article 3 de l'accord du 29 janvier 2000 :
" Classification
Aux articles 1er, 21 et 22 de la Convention Collective Nationale des Ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 modifiée, il est ajouté, parallèlement à la position 1 et sans condition d'âge ou d'ancienneté, les six coefficients de classements suivants: 60, 68, 76, 80, 86, 92.
Article 4 - Grille de transposition
Il est institué, à partir de l'an 2000 et à titre transitoire, une grille de transposition permettant, pour les salariés qui remplissent les conditions définies à l'article 2 (conditions pour conclure une convention de forfait en heures ou en jours sur l'année), de bénéficier de la qualité de cadre au sens des conventions collectives de branche de la métallurgie, et de déterminer le coefficient de classement résultant de la Convention Collective Nationale des Ingénieurs et Cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 modifiée, correspondant au coefficient de même niveau résultant de l'accord national du 21 juillet 1975 modifié sur la classification ».
Cet article est suivi d'une "grille transitoire (qui) permet une translation directe et Immédiate des anciens niveaux de classification aux nouveaux", à partir de quatre colonnes reprenant:
- la "classification de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de 1972 faisant apparaître l'ensemble des coefficients de classement (de 60 à 240), y compris les nouveaux coefficients (de 60 à 92) résultant de l'article 3 de l'Accord ;
- la "classification résultant de l'Accord National du 21 juillet 1975" (de 140 à 395) ;
- les indices de "classification actuelle" ;
- les niveaux dans la "grille de transposition".
Il ressort de ces dispositions qu'aucun renvoi n'est fait de la disposition sur le passage automatique à la Position Il dont se prévaut le salarié, à la condition de diplôme de l'alinéa 1 de l'article 21 A.
Si l'alinéa 1, comme d'autres alinéas de l'article 21 A, évoquent "les titulaires de diplômes", l'alinéa sur le passage automatique à la Position Il évoque "les ingénieurs et cadres débutants ( ... )" qui ont occupé la position l, et cet alinéa ne comprend aucun renvoi à la condition de diplômé de l'alinéa 1.
L'alinéa 1 ne vise qu'à faire bénéficier ces titulaires de diplômes à leur entrée dans l'entreprise d'un taux minimum garanti.
Dès lors, à supposer même que la disposition de la convention collective dont se prévaut le salarié pour obtenir son passage automatique en Position Il, renvoie à l'alinéa 1 du même article 21 A en ce qu'il vise les titulaires de diplômes, celui-ci est en droit d'obtenir son passage automatique en position Il, dès lors que son contrat de travail tel qu'il a été modifié par un avenant du 20 décembre 2000 stipule qu' "A effet du. 1 er janvier 2001", Monsieur Y... dispose du statut de "cadre position l, coefficient 86".
Il ressort donc de cette clause claire et précise, que le salarié s'est vu reconnaître le statut de cadre position l, alors même qu'il n'était pas titulaire des diplômes exigés.
Dès lors il pouvait, sur le fondement de cette clause en ce qu'elle visait le statut de "cadre Position 1", se prévaloir de l'ensemble de l'article 21A de la convention collective "Année de début" qui concernait précisément la Position 1 et autrement dit, il pouvait également revendiquer l'application les dispositions de cet article 21 A de la convention collective qui étaient réservées aux diplômés, dès lors que l'avenant à son contrat, en visant le statut de cadre position l, avait eu précisément pour objet et pour effet de l'assimiler à ces diplômés.
Il est constant au surplus qu'il est loisible à un employeur de "surclasser" ou "surqualifier" un salarié par rapport aux fonctions effectivement exercées, en lui attribuant une qualification professionnelle conventionnellement supérieure à sa qualification personnelle, et que par conséquent il ne peut refuser de tirer les conséquences du "surclassement contractuel" qu'il a consenti. Le salarié doit donc bénéficier de la qualification qu'il lui a volontairement été reconnue et est donc fondé à prétendre à la rémunération correspondant à cette qualification par la seule application de son contrat de travail.
Il importe peu alors que le salarié ne remplisse pas les conditions prévues par la convention collective pour l'exercice de cet emploi.
Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de faire droit au moyen fondé sur la contestation sérieuse et la condition de l'urgence n'est pas exigée comme condition de l'application de l'article R 1455-7 du Code du travail précité. Il sera alloué à Monsieur Y... la somme de 12.817,99 euros à titre de provision sur les rappels de salaire du 1er juin 2011 au 30 novembre 2016 outre la somme de 1.281,79 euros au titre des congés payés afférents.
L'ordonnance sera infirmée sur le montant retenu.
Il n'y a pas lieu d'ordonner sous astreinte le paiement du rappel de salaire et des congés payés afférents étant observé qu'en vertu des dispositions des articles 500 et 539 du Code de procédure civile, la décision de la cour d'appel n'étant susceptible que d'une voie de recours extraordinaire, dont l'une des caractéristiques est de n'être point suspensive hormis les cas limitativement énumérés par la loi, le présent arrêt est exécutoire de droit et peut être mis à exécution dès sa notification »

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Selon l'article R 1455-5 du Code du travail qui stipule que « Dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend. »
L'article R 1455-6 du Code du travail dispose que « La formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite. »
L'article R 1455-7 du même code prévoit enfin que « Dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. »
En application de ce dernier article R 1455-7, la Cour de cassation a jugé que « la formation de référé du conseil de prud'hommes, statuant sur le fondement de l'article R. 516-31 du Code du travail [soit l'article R 1455-7 selon la codification aujourd'hui en vigueur], est compétente pour interpréter une convention ou un accord collectif » (Cour de Cassation, chambre sociale, 15 janvier 2002, pourvoi N° 00-41117).
En l'espèce, il est constant que l'urgence ne peut être invoquée, le conflit prenant naissance au 1er janvier 2004 selon les demandes du salarié, et celui-ci ne pouvant pas faire état de demande écrite antérieure à janvier 2016. La compétence de la formation des référés ne peut donc être admise qu'en l'absence de toute contestation sérieuse du l'interprétation de la convention collective soutenue par le demandeur.
Le refus d'application d'un droit évident caractérise en outre un trouble manifestement illicite, qu'il appartient à la formation de référé de faire cesser.
Selon le 5 ème alinéa du A de l'article 21 de la Convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, les cadres débutants qui ont accompli une période de trois ans en position 1 et qui ont plus de 27 ans accèdent au classement de la position II. Selon le B du même article de la convention collective, « Les ingénieurs et cadres confirmés soit par leur période probatoire en position 1, soit par promotion pour les non-diplômés, sont classés dans la position II et la position III».
Il n'est pas contesté que Monsieur W... Y... n'a pas le diplôme d'ingénieur, mais il n'est pas sérieusement contestable:
- Qu'il a débuté comme cadre au 1 er janvier 2001,
- Qu'il est âgé de plus de 27 ans.
- Qu'il aurait dû en conséquence accéder au classement de la position II trois ans plus tard, soit le 1 er janvier 2004, cette position II étant (de même que la position III) très explicitement ouverte aux cadres non-diplômés.
L'article 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie prévoit une progression automatique des appointements minima tous les trois ans, qui est celle dont le demandeur réclame l'application.
En outre, le demandeur produit un arrêt de la Cour de cassation (chambre sociale, 31 octobre 2012, pourvoi N°11-20986) qui casse un arrêt de la Cour d'Appel de Lyon qui avait débouté un salarié dans une affaire en tout point semblable au présent litige.

La lecture de l'arrêt de renvoi rendu par la Cour d'Appel de Lyon autrement composée, qui fait droit aux demandes du salarié conformément à l'interprétation de la convention collective arrêtée par la Cour de cassation, permet notamment de constater que le salarié en cause était un ETAM jusqu'à l'avenant qu'il avait signé en application des mêmes textes conventionnels que ceux qui ont permis la progression de Monsieur W... Y..., et que ce salarié n'était pas davantage diplômé que Monsieur W... Y....
Ainsi, même si la rédaction complexe de l'article 21 de la convention collective a pu un temps favoriser des interprétations erronées, le débat a été tranché par la décision de la Cour de cassation du 31 octobre 2012, dont la portée est limitée au champ d'application de la Convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, mais dont les employeurs relevant de cette convention ne peuvent s'exonérer.
Une contestation de l'évidence, même véhémente, n'est pas une contestation sérieuse ni de bonne foi, et la formation de référé du Conseil de prud'hommes de Lyon se dira en conséquence compétente pour statuer sur les demandes soumises à son appréciation.
Ayant constaté l'absence de contestation sérieuse, la formation de référé du Conseil de prud'hommes de Lyon a aussi constaté le bien-fondé des demandes de Monsieur W... Y... pour que lui soient attribuées les classifications prévues par la convention collective, et pour que lui soient payés les rappels de salaires et d'indemnité de congés payés afférents.
La formation de référé du Conseil de prud'hommes de Lyon se doit en conséquence d'apprécier l'argument de la prescription soulevé par le défendeur »

1/ ALORS QUE l'article 21 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie relatif à la « classification » définit en son paragraphe A relatif aux « Années de début » les conditions dans lesquelles la classification de cadre position 1 est accordée aux salariés et évolue en fonction de leur ancienneté et expérience ; que dans la mesure où il définit les cadres position I comme les « titulaires des diplômes actuellement définis à l'article 1er de la présente convention », ses dispositions relatives à un passage automatique triennal en position II ne sont pas applicables aux salariés qui ne remplissent pas cette condition de diplôme ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 1er et 21 A de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie ;

2/ ALORS QUE selon l'article 3 de l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie pour les ingénieurs et cadres confirmés, aux articles 1er, 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 modifiée, il a été ajouté, parallèlement à la position I et sans condition d'âge ou d'ancienneté, les six coefficients de classement suivants : 60, 68, 76, 80, 86 et 92 ; que selon l'article 4 de cet accord, il a été institué, à partir de l'an 2000 et à titre transitoire, une grille de transposition permettant, pour les salariés qui remplissent les conditions définies à l'article 2, de bénéficier de la qualité de cadre au sens des conventions collectives de branche de la métallurgie, et de déterminer le coefficient de classement résultant de cette convention collective, correspondant au coefficient de même niveau résultant de l'accord national du 21 juillet 1975 modifié sur la classification ; qu'il en résulte qu'un salarié bénéficiant de la qualité de cadre en vertu des dispositions prévues par cet accord ne peut bénéficier du mécanisme de progression automatique triennal prévu pour les ingénieurs et cadres confirmés ; qu'en l'espèce, la société Boccard faisait valoir que l'avenant au contrat de travail de M. Y... du 1er janvier 2001 en vertu duquel il s'était vu accorder la classification de cadre position 1 coefficient 86, se bornait, sans modifier ses fonctions de dessinateur, à tirer les conséquences de cet accord national de transposition pour soumettre le salarié à un forfait annuel en jours, si bien que ce dernier ne pouvait se prévaloir de l'application des articles 21 et 22 de la convention collective (conclusions d'appel de l'exposante p 13-16) ; qu'en se bornant à relever que par cet avenant, le salarié s'était vu reconnaître la classification de cadre position 1, pour en déduire qu'il devait bénéficier de tous les avantages liés à cette classification, sans rechercher comme elle y était invitée, si l'avenant du 1er janvier 2001 octroyant au salarié sans que ses fonctions soient modifiées, la classification de cadre position 1 au coefficient 86 institué par l'accord du 29 janvier 2000, et le soumettant à un forfait annuel en jours, n'avait pas été conclu en application de l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie pour les ingénieurs et cadres confirmés, ensemble les articles 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-28346
Date de la décision : 05/06/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 27 septembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 jui. 2019, pourvoi n°17-28346


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.28346
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