La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/05/2019 | FRANCE | N°18-16455

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 22 mai 2019, 18-16455


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 12 décembre 2017), que, suivant acte notarié du 17 août 2009 reçu par M. U... et M. S..., notaires, la société ADM (le vendeur) a cédé à la société Livio un fonds de commerce moyennant le prix de 110 000 euros, l'acte prévoyant la mise sous séquestre de cette somme entre les mains du notaire assistant de l'étude ; qu'à la date de la cession, la Société générale (la banque) bénéficiait de l'inscription d'un privilège de na

ntissement sur le fonds de commerce ; qu'un arrêt du 21 janvier 2015 a condamné M. G....

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 12 décembre 2017), que, suivant acte notarié du 17 août 2009 reçu par M. U... et M. S..., notaires, la société ADM (le vendeur) a cédé à la société Livio un fonds de commerce moyennant le prix de 110 000 euros, l'acte prévoyant la mise sous séquestre de cette somme entre les mains du notaire assistant de l'étude ; qu'à la date de la cession, la Société générale (la banque) bénéficiait de l'inscription d'un privilège de nantissement sur le fonds de commerce ; qu'un arrêt du 21 janvier 2015 a condamné M. G..., en qualité de caution du vendeur, à payer à la banque la somme de 33 800 euros ; que, reprochant à la société civile professionnelle I... S..., V... S... et K... F... (le séquestre) un manquement à ses obligations de conseil, d'information et de diligence au titre des opérations de répartition du prix de vente du fonds, M. G... l'a assignée en responsabilité et indemnisation ;

Attendu que M. G... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que tout tiers détenteur du prix d'acquisition d'un fonds de commerce doit en faire la répartition dans les trois mois de la date de l'acte de vente ; que cette obligation s'impose mêmement à un séquestre qu'il soit désigné judiciairement ou de manière amiable ; que commet une faute de nature à engager sa responsabilité civile le séquestre qui n'a pas satisfait à cette obligation ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de M. G... tendant à voir déclarer le séquestre civilement responsable du dommage subi par ce dernier, que l'article L. 143-21 du code de commerce, dans sa rédaction applicable à la cause, « n'[était] pas applicable dans le cas où, comme en l'espèce, le prix de vente du fonds a été remise à un séquestre chargé de la répartition du prix », la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article L. 143-21 du code de commerce dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

2°/ qu'en toute hypothèse, le notaire, auquel une mission de séquestre, répartiteur du prix de vente, a été confiée, doit exécuter sa mission dans un délai raisonnable ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever, pour rejeter les demandes de M. G..., que l'article L. 143-21 du code de commerce, dans sa rédaction applicable à la cause, n'était pas applicable au cas d'espèce, sans rechercher si le notaire n'avait pas failli à son obligation de procéder à la répartition du prix dans un délai raisonnable, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

3°/ que le séquestre est tenu d'un mandat irrévocable d'effectuer le paiement ; que tout mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution ; qu'en estimant que le séquestre avait valablement subordonné le règlement de la créance de la banque à l'accord de M. G... « sur le montant de la créance », quand l'acte de vente donnait mission au notaire de procéder à ce paiement sans le subordonner à l'accord préalable de l'une des parties à l'acte ou de la caution, la cour d'appel a violé l'article 1991 du code civil ;

4°/ qu'en toute hypothèse, en rejetant les demandes de M. G..., sans répondre à ses conclusions qui faisaient valoir que le notaire avait manqué à son obligation d'information et de conseil en ne prévenant pas M. G... des difficultés rencontrées dans l'exécution de sa mission et en ne l'alertant pas sur les risques d'un retard de paiement quant à l'accroissement du montant de la dette et sa mise en cause en qualité de caution, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir constaté que le montant de la créance alléguée par la banque, augmenté des oppositions reçues, était supérieur au prix de vente du fonds, l'arrêt retient, d'abord, par une interprétation souveraine de la commune intention des parties, qu'il résulte de l'acte de cession que le séquestre devait régler le prix de vente du fonds au vendeur après répartition entre les créanciers inscrits sur le fonds ou ayant formé opposition au paiement du prix ; qu'il relève, ensuite, qu'ayant écrit à deux reprises à M. G... pour l'informer qu'il attendait son accord pour payer la banque, le séquestre l'a effectivement payée dès que celui-ci lui a donné son consentement ; que la cour d'appel a pu en déduire, sans être tenue de répondre à des conclusions inopérantes, qu'aucun manquement ne pouvait être reproché au séquestre ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. G... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la SCP I... S..., V... S... et K... F... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mai deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour M. G....

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. G... de sa demande tendant à voir déclarer la SCP I... S..., Benoit S... et K... F... civilement responsable du dommage subi par M. A... G..., et d'avoir en conséquence débouté celui-ci de sa demande tendant à voir condamner la SCP I... S..., Benoit S... et K... F... à lui payer la somme de 37 000 euros au titre de son préjudice matériel et la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral ;

AUX MOTIFS QUE les dispositions de l'article L.143-21 du code de commerce en leur rédaction antérieure au 25 mars 2012 prévoient que « tout tiers détenteur du prix d'acquisition d'un fonds de commerce chez lequel domicile a été élu doit faire la répartition du prix dans les trois mois de la date de l'acte de vente. A l'expiration de ce délai, la partie la plus diligente peut se pourvoir en référé devant la juridiction compétente du lieu de l'élection du domicile, qui ordonne soit le dépôt à la Caisse des dépôts et consignations, soit la nomination d'un séquestre répartiteur » ; que ce texte n'est pas applicable dans le cas où, comme en l'espèce, le prix de vente du fonds a été remise à un séquestre chargé de la répartition du prix ; que l'acte du 10 août 2009 stipule que la somme séquestrée « demeurera affectée à titre de gage et nantissement au profit du cessionnaire pour lui garantir le rapport des mainlevées et radiations de toutes inscriptions, oppositions et autres empêchements quelconques. Le séquestre ne pourra remettre ladite somme au cédant que sur justification qu'il n'existe aucune inscription grevant le fonds cédé et qu'il n'est survenu, dans le délai légal, aucune opposition et autres empêchements quelconques. S'il survient des oppositions sur le prix ou s'il existe des créanciers sur le fonds, le séquestre pourra employer la somme détenue par lui au paiement des sommes dues et à celui de tous frais et accessoires. Tous pouvoirs nécessaires lui sont dès maintenant donnés à cet effet. Il pourra également, en cas de difficultés, déposer à la Caisse des dépôts et consignation les sommes et valeurs se trouvant entre ses mains, comme tiers nanti conformément à l'article 2076 du code civil, à la charge des inscriptions et oppositions qui auront été révélés par l'accomplissement des formalités légales » ; qu'il résulte de cette disposition que le séquestre devait régler le prix de vente du fonds au vendeur après répartition entre les créanciers inscrits sur le fonds ou ayant formé opposition au paiement du prix ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que le séquestre, qui avait reçu mandat de la société ADM de régler les créanciers opposant ou inscrits sur le fonds, a écrit à M. G... le 21 avril 2010 qu'elle réglera la créance de la Société Générale dès qu'elle aura obtenu son « accord sur le montant de la créance » ; que le 16 mars 2012, il a adressé une lettre de relance à M. G..., lui demandant si le litige avec la Société générale avait été résolu ; que le séquestre a ensuite adressé à la Société générale un chèque d'un montant de 104 434,45 euros en règlement de sa créance ; qu'il apparaît ainsi qu'aucun manquement ne peut être reproché au séquestre qui a réglé la Société générale dès qu'il avait obtenu l'accord de M. G..., que celle-ci doit être débouté de sa demande ;

1) ALORS QUE tout tiers détenteur du prix d'acquisition d'un fonds de commerce doit en faire la répartition dans les trois mois de la date de l'acte de vente ; que cette obligation s'impose mêmement à un séquestre qu'il soit désigné judiciairement ou de manière amiable ; que commet une faute de nature à engager sa responsabilité civile le séquestre qui n'a pas satisfait à cette obligation; qu'en retenant, pour rejeter la demande de M. G... tendant à voir déclarer la SCP S... civilement responsable du dommage subi par ce dernier, que l'article L.143-21 du code de commerce, dans sa rédaction applicable à la cause, « n'[était] pas applicable dans le cas où, comme en l'espèce, le prix de vente du fonds a été remise à un séquestre chargé de la répartition du prix », la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article L.143-21 du code de commerce dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

2) ALORS QU'en toute hypothèse, le notaire, auquel une mission de séquestre, répartiteur du prix de vente, a été confiée, doit exécuter sa mission dans un délai raisonnable ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever, pour rejeter les demandes de M.Audinot, que l'article L.143-21 du code de commerce, dans sa rédaction applicable à la cause, n'était pas applicable au cas d'espèce, sans rechercher si le notaire n'avait pas failli à son obligation de procéder à la répartition du prix dans un délai raisonnable, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

3) ALORS QUE le séquestre est tenu d'un mandat irrévocable d'effectuer le paiement ; que tout mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé et répond des dommages et intérêts qui pourraient résulter de son inexécution ; qu'en estimant que le séquestre avait valablement subordonné le règlement de la créance de la Société Générale à l'accord de M. G... « sur le montant de la créance », quand l'acte de vente donnait mission au notaire de procéder à ce paiement sans le subordonner à l'accord préalable de l'une des parties à l'acte ou de la caution, la cour d'appel a violé l'article 1991 du code civil ;

4) ALORS QU' en toute hypothèse, en rejetant les demandes de M. G..., sans répondre à ses conclusions qui faisaient valoir que le notaire avait manqué à son obligation d'information et de conseil en ne prévenant pas M. G... des difficultés rencontrées dans l'exécution de sa mission et en ne l'alertant pas sur les risques d'un retard de paiement quant à l'accroissement du montant de la dette et sa mise en cause en qualité de caution (conclusions M. G... p.11, alinéa 11 et p.14 alinéa 4), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-16455
Date de la décision : 22/05/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 12 décembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 22 mai. 2019, pourvoi n°18-16455


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Claire Leduc et Solange Vigand

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.16455
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award