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09/05/2019 | FRANCE | N°18-13470

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 09 mai 2019, 18-13470


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 1134 et 1184 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu que, si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier en l'absence de délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, préci

sant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ;

Attendu, selon l'arrêt ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 1134 et 1184 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu que, si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier en l'absence de délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, suivant offre acceptée le 16 août 2008, la société Sofinco département Viaxel, devenue la société CA Consumer Finance (la banque), a consenti à Mme Y... (l'emprunteur) un crédit d'un montant de 22 000 euros, destiné au financement de l'acquisition d'un véhicule automobile ; qu'à la suite de la défaillance de l'emprunteur, la banque l'a assigné en paiement du solde du prêt ;

Attendu que, pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que, si la banque ne peut se prévaloir de la déchéance du terme sans mise en demeure préalable, la lettre reçue par l'emprunteur le 11 juillet 2014, par laquelle la banque l'a mis en demeure de payer sans délai la totalité des sommes dues, vaut mise en demeure préalable à la déchéance du terme dont elle s'est valablement prévalue en délivrant l'assignation ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt n° RG : 16/01873 rendu le 11 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Condamne la société CA Consumer Finance aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à Mme Y... la somme de 2 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Mme Y... à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 4.421,23 €, avec intérêts au taux contractuel de 6,2 % à compter du 20 novembre 2014, ainsi que la somme de 50 € au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur le caractère abusif de la déchéance du terme, aux termes de l'article 1134 du code civil, les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que par ailleurs, l'article L. 311-30 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 1er juillet 2010 mais applicable en la cause dispose qu'en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés ; qu'en l'espèce, le contrat liant les parties dispose notamment que : « le non-paiement d'une seule échéance ainsi que toute déclaration fausse ou inexacte de l'un des emprunteurs, relative à son état civil, à sa situation financière, pourra entraîner la déchéance du terme. Cette dernière est acquise de plein droit au prêteur, si bon lui semble, huit jours après la constatation de l'inexécution. En cas de défaillance de votre part dans les remboursements, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés » ; que par ailleurs, aucune disposition du contrat ne prévoit que le prêteur est tenu d'accéder à la demande de diminution ou de report des mensualités présentée par l'emprunteur ; qu'il en résulte que Mme Y... ne peut invoquer que l'application de la déchéance du terme serait abusive au motif que la Sa CA Consumer Finance aurait refusé d'accéder à ses demandes de diminution ou de report des mensualités et ce, nonobstant les courriers publicitaires qu'elle a pu recevoir en ce sens, qui n'ont pas un caractère contractuel ; qu'en outre, si la déchéance du terme suppose une mise en demeure préalable et que c'est manifestement à tort que par lettre de mise en demeure réceptionnée le 11 juillet 2014, la Sa CA Consumer Finance a indiqué à Mme Y... qu'elle entendait se prévaloir de la déchéance du terme alors que cette lettre du 11 juillet 2014 n'avait pas été précédée d'une mise en demeure, cela ne rend pas pour autant, en l'espèce, abusive la déchéance du terme ; qu'en effet, la lettre de mise en demeure réceptionnée le 11 juillet 2014 doit être considérée comme constituant une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme dont la société CA Consumer Finance s'est légitimement prévalue par l'assignation délivrée le 20 novembre 2014 à Mme Y..., où en réclamant paiement des sommes dus en raison de la déchéance du terme, elle indique clairement qu'elle entend se prévaloir de cette déchéance ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a estimé que la Sa CA Consumer Finance était fondée à se prévaloir de la déchéance du terme à l'encontre de Mme Y... par application de l'article L. 311-30 du code de la consommation ; que sur la demande en paiement, aux termes des articles L. 311-30 et D. 311-1 du code de la consommation, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majorés des intérêts échus mais non payés, avec les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt ainsi qu'une indemnité de 8 % du capital restant dû ; qu'en l'espèce, il est notamment versé aux débats : - le contrat de crédit signé le 16 août 2008, - le tableau d'amortissement, - - l'historique du compte, - la mise en demeure du 11 juillet 2014 ; qu'en application des conventions liant les parties, et des dispositions des articles précités du code de la consommation, la créance s'établit comme suit : - 4.816,99 € au titre du capital restant dû au jour de la déchéance du terme, - 171,24 € au titre des intérêts échus impayés et de l'indemnité légale, soit au total 4.988,23 € dont il convient de déduire la somme de 567 € reçue au titre des acomptes reçus, reste 4.421,23 € ; que cette somme doit porter intérêt au taux contractuel de 6,2 % l'an à compter du 20 novembre 2014, date de l'assignation par laquelle la société CA Consumer Finance s'est légitimement prévalue de la déchéance du terme ; qu'en outre, la Sa CA Consumer Finance est fondée à réclamer une indemnité de résiliation qui s'analyse en une clause pénale pouvant être réduite par application de l'article 1152 du code civil qui, au regard du taux élevé des intérêts conventionnels, présente un caractère manifestement excessif au regard du préjudice subi par la Sa CA Consumer Finance et doit être réduite à 50 € ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné Mme Y... à payer à la Sa CA Consumer Finance la somme de 4.421,23 € au titre du remboursement du prêt et celle de 50 € au titre de l'indemnité de résiliation ; qu'en revanche, le jugement sera infirmé en ce qu'il a dit que les sommes restant dues au titre du prêt porteront intérêt au taux contractuel de 6,2 % à compter du 11 juillet 2014 et Mme Y... doit être condamnée à payer les sommes restant dues au titre du prêt avec intérêt au taux contractuel de 6,2 % à compter du 20 novembre 2014, date de l'assignation ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur la validité de la déchéance du terme, il résulte de l'article L. 311-30 du code de la consommation que : « en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés » ; que la déchéance du terme peut donc être prononcée sur la seule initiative du prêteur, dès lors que l'emprunteur est défaillant ; que la défaillance est caractérisée par le non-paiement, même partiel, d'une seule échéance ; qu'en l'espèce, Mme Y... reconnaît sa défaillance dans le remboursement de ses mensualités ; qu'elle indique en effet dans ses écritures qu'elle n'a payé que 189,73 € par mois au lieu de 379,45 € ; qu'elle ne justifie pas avoir obtenu l'accord de la Sa CA Consumer Finance pour diviser par deux les mensualités ; que cette division a été faite de sa propre initiative et le fait d'en informer a posteriori la société de crédit ne la rend pas contractuelle pour autant ; qu'ainsi la Sa CA Consumer Finance était en droit de prononcer la déchéance du terme ; qu'en conséquence, Mme Y... sera déboutée de sa demande de maintien des conditions initiales du contrat ; que sa demande de révision du contrat, outre son caractère illégal du fait de la force du contrat, est sans objet en raison de la déchéance du terme valablement prononcée ; que sur la demande principale en paiement, conformément aux dispositions d'ordre public des articles L. 311-30, D. 311-11 et L. 311-32 du code de la consommation reprises dans l'offre préalable de prêt dont il est demandé exécution, en l'absence de toute contestation par la débitrice sur les montants versés, et en vertu des pièces versées aux débats, il apparaît que la créance de la société de crédit se décompose comme suit : - capital restant dû à la date de la défaillance : 4.816,99 €, - intérêts échus impayés : 171,24 €, - déduction faite des acomptes reçus postérieurement à la déchéance du terme : 567 €, soit un total de 4.421,23 € (
) ; que sur l'indemnité de résiliation, le contrat de crédit prévoir également qu'une indemnité de 8 % du capital dû est exigible en cas de défaillance du débiteur ; qu'il apparaît, notamment au regard du taux élevé des intérêts conventionnels, que l'application cumulative de l'indemnité conventionnelle de 8 % prévue au contrat en cas de défaillance du débiteur avec les intérêts de retard au taux du contrat présente un caractère manifestement excessif au regard du préjudice subi par le créancier ; qu'il y a lieu en conséquence, par application de l'article 1152 du code civil, de la réduire à la somme de 50 € (
) ;

1) ALORS QUE si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que l'offre de prêt du 16 août 2008 précisait que « le non-paiement d'une seule échéance ainsi que toute déclaration fausse ou inexacte de l'un des emprunteurs, relative à son état civil, à sa situation financière, pourra entraîner la déchéance du terme. Cette dernière est acquise de plein droit au prêteur, si bon lui semble, huit jours après la constatation de l'inexécution. En cas de défaillance de votre part dans les remboursements, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés », mais que « nonobstant ces dispositions contractuelles, la société Consumer Finance ne (pouvait) se prévaloir de la déchéance du terme sans mise en demeure préalable » ; qu'elle a ensuite expressément retenu que c'était « manifestement à tort que par lettre de mise en demeure réceptionnée le 11 juillet 2014, la Sa CA Consumer Finance a indiqué à Mme Y... qu'elle entendait se prévaloir de la déchéance du terme alors que cette lettre du 11 juillet 2014 n'avait pas été précédée d'une mise en demeure » (cf. arrêt, p. 4) ; qu'il résultait nécessairement de ces constatations qu'à défaut de mise en demeure préalable, aucune déchéance du terme du prêt du 16 août 2008 n'avait pu intervenir ; qu'en décidant au contraire que la société Consumer Finance était fondée à se prévaloir de la déchéance du terme à l'encontre de Mme Y..., la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1184 du code civil, ensemble l'article L. 311-30 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable en la cause ;

2) ALORS QUE si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ; qu'en l'espèce, le courrier de la société CA Consumer Finance en date du 24 juin 2014 reçu par Mme Y... le 11 juillet suivant indiquait : « Nous constatons que vous n'avez donné aucune suite à nos différentes tentatives de recouvrement amiable. En conséquence, nous sommes dans l'obligation de rompre nos relations contractuelles et de prononcer la déchéance du terme de votre contrat. Nous vous mettons donc en demeure de nous régler immédiatement la totalité de la somme de 5.440,88 € représentant le solde de votre prêt amortissable, intérêts arrêtés à ce jour. A défaut, nous serons contraints d'engager des poursuites judiciaires » ; qu'à défaut de préciser le délai dont disposait Mme Y... pour faire obstacle à la déchéance du terme, ce courrier ne pouvait valoir mise en demeure de sorte qu'en l'absence de mise en demeure régulière, aucune déchéance du terme du prêt du 16 août 2008 n'avait pu intervenir ; qu'en décidant au contraire que la société Consumer Finance s'était valablement prévalue de la déchéance du terme à l'égard de Mme Y..., la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1184 du code civil, ensemble l'article L. 311-30 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable en la cause ;

3) ALORS QUE l'assignation n'entraîne pas, par elle-même, déchéance du terme ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément retenu que c'était « manifestement à tort que par lettre de mise en demeure réceptionnée le 11 juillet 2014, la Sa CA Consumer Finance a indiqué à Mme Y... qu'elle entendait se prévaloir de la déchéance du terme alors que cette lettre du 11 juillet 2014 n'avait pas été précédée d'une mise en demeure » (cf. arrêt, p. 4) ; qu'en décidant cependant que la société CA Consumer Finance s'était légitimement prévalue de la déchéance du terme « par l'assignation délivrée le 20 novembre 2014 à Mme Y... où en réclamant le paiement des sommes dues en raison de la déchéance du terme, elle indique clairement qu'elle entend se prévaloir de cette déchéance » (cf. arrêt, p. 5), la cour d'appel a derechef violé les articles 1134 et 1184 du code civil, ensemble l'article L. 311-30 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable en la cause.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-13470
Date de la décision : 09/05/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 11 janvier 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 09 mai. 2019, pourvoi n°18-13470


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.13470
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