LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. B... a été engagé en qualité de conducteur receveur par la société Autocars Thys suivant contrat de travail à durée déterminée du 8 avril 2014, qui s'est poursuivi à durée indéterminée par avenant du 31 août 2014 ; que le salarié a démissionné par lettre du 15 juin 2015 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes salariales et indemnitaires ;
Sur les troisième et quatrième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles 4., 7.2. et 7.3.2.c de l'accord aménagement et réduction du temps de travail (ARTT) du 18 avril 2002, étendu par arrêté du 22 décembre 2003, attaché à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 ;
Attendu que selon le premier de ces textes, le temps de travail effectif des conducteurs comprend les temps de conduite, les temps de travaux annexes et les temps à disposition ; qu'aux termes du second, les coupures n'entrent pas dans le décompte du temps de travail effectif ; que suivant le troisième, dans le cas particulier où le salarié bénéficie d'une rémunération effective fixée sur la base d'un horaire théorique déterminé, cette rémunération effective comprend tous les éléments de rémunération y compris les sommes versées au titre de l'indemnisation des coupures et, sous réserve d'un accord d'entreprise ou d'établissement, les sommes versées au titre de l'indemnisation de l'amplitude jusqu'à concurrence de la rémunération correspondant à cet horaire théorique de référence ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'un rappel de salaire, l'arrêt retient que l'article 5 du contrat de travail conclu entre les parties stipule qu'en contrepartie de ses fonctions et comme prévu par l'accord de branche du 18 avril 2002, le salarié bénéficiera d'une rémunération effective fixée sur la base d'un horaire théorique de 151,67 heures, que cette rémunération effective comprend tous les éléments de rémunération y compris les sommes versées au titre de l'indemnisation des coupures et les sommes versées au titre de l'indemnisation de l'amplitude, jusqu'à concurrence de la rémunération correspondant à cet horaire théorique de référence, que pour un horaire théorique de 151,67 heures, le salaire est de 1 524,28 euros, qu'à cette rémunération peuvent notamment s'ajouter les indemnisations des amplitudes et des coupures selon les modalités prévues par l'accord du 18 avril 2002, qu'il en ressort qu'à défaut de toute mention contractuelle prévoyant un temps de travail partiel, le salarié a été embauché à temps complet, moyennant un salaire brut de 1 524,28 euros, auquel peuvent s'ajouter les indemnisations d'amplitude et de coupures, l'horaire théorique de référence devant en conséquence être supérieur à celui correspondant au temps plein, pour lequel l'employeur est tenu de lui fournir un travail, qu'il s'ensuit qu'en déduisant du salaire à temps plein de l'intéressé une partie des heures de coupures en « régularisation TTE» , en compensation des heures de travail effectif non réalisées par défaut de fourniture de travail, l'employeur a procédé à des retenues de salaire irrégulières ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que le contrat de travail, qui se référait aux dispositions de l'accord ARTT du 18 avril 2002, fixait la rémunération du salarié sur la base d'un horaire théorique de 151,67 heures et stipulait que la rémunération effective comprenait tous les éléments de rémunération y compris les sommes versées au titre de l'indemnisation des coupures jusqu'à concurrence de la rémunération correspondant à cet horaire théorique de référence, ce dont il résultait que les sommes versées au titre des coupures étaient incluses dans la rémunération effective du salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation sur le premier moyen entraîne la cassation des dispositions de l'arrêt ayant requalifié la démission du salarié en prise d'acte de la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné en conséquence la société Autocars Thys au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité compensatrice de préavis avec congés payés afférents et d'une indemnité de licenciement, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il requalifie la démission de M. B... en prise d'acte de la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il condamne la société Autocars Thys au paiement des sommes de 3 544,50 euros à titre de rappel de salaire, 354,45 euros à titre de congés payés afférents, 4 800 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1 679,85 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 167,98 euros à titre de congés payés afférents et 412,33 euros à titre d'indemnité de licenciement, l'arrêt rendu le 29 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne M. B... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Autocars Thys
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt du 29 septembre 2017 tel quel rectifié par l'arrêt du 22 décembre 2017 d'AVOIR condamné la SARL Autocars Thys à payer à Monsieur B... les sommes de 3.544,50 € au titre du rappel de salaire, 354,45 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés, d'AVOIR ordonné à la SARL Autocars Thys de délivrer une attestation destinée à POLE EMPLOI conforme au dispositif de sa décision concernant un bulletin de paie pour les rappels de salaire, d'AVOIR fixé le salaire moyen Monsieur B... à la somme de 2.729,95 €, soit avril, mai, juin, et d'AVOIR condamné l'exposante à payer à Monsieur B... la somme globale de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « suivant l'article 4 de l'accord de branche sur l'aménagement, l'organisation et la réduction du temps de travail et sur la rémunération du personnel des entreprises de transport routier de voyageurs, étendu par arrêté du 22 décembre 2003, le temps de travail effectif des conducteurs comprend les temps de conduite, les temps de travaux annexes et les temps à disposition. L'article 7.2 indique que les temps non considérés dans cette disposition inclus dans l'amplitude de la journée de travail constituent des coupures qui n'entrent pas dans le décompte du temps de travail effectif, indemnisées en fonction du lieu et suivant plusieurs modalités. L'article 7.3 prévoit que dans le cas particulier où le salarié bénéficie d'une rémunération effective fixée sur la base d'un horaire théorique déterminé, cette rémunération effective comprend tous les éléments de rémunération y compris les sommes versées au titre de l'indemnisation des coupures visées ci-dessus, jusqu'à concurrence de la rémunération correspondant à cet horaire théorique de référence. En l'espèce, l'article 5 du contrat de travail conclu entre les parties stipule : « En contrepartie de ses fonctions et comme prévu par l'accord de branche du 18 avril 2012, M. V... B... bénéficiera d'une rémunération effective fixée sur la base d'un horaire théorique de 151,67 heures. Cette rémunération effective comprend tous les éléments de rémunération y compris les sommes versées au titre de l'indemnisation des coupures et les sommes versées au titre de l'indemnisation de l'amplitude, jusqu'à concurrence de la rémunération correspondant à cet horaire théorique de référence. Le taux horaire sera de 10,05 euros brut, soit pour un horaire théorique de 151h 67, un salaire de 1.524,28 euros. A cette rémunération peuvent notamment s'ajouter les indemnisations des amplitudes et des coupures selon les modalités prévues par l'accord de branche précité du 18 avril 2002 ». Il ressort de cette disposition, à défaut de toute mention contractuelle prévoyant un temps de travail partiel, que M. B... a été embauché à temps complet, moyennant, comme précisé ci-dessus, un salaire brut de 1.524,28 euros, auquel peuvent s'ajoutent les indemnisations d'amplitude et de coupures, l'horaire théorique de référence devant en conséquence être supérieur à celui correspondant au temps plein, pour lequel l'employeur est tenu de lui fournir un travail. Il s'ensuit qu'en déduisant du salaire à temps plein de M. B... une partie des heures de coupures en "régularisation TTE", en compensation des heures de travail effectif non réalisées par défaut de fourniture de travail, et ce, malgré les demandes réitérées du contrôleur du travail d'y remédier, l'employeur a procédé à des retenues de salaire irrégulières. Le jugement condamnant l'employeur à verser à M. B... la somme correspondante de 3.544,50 euros, outre les congés payés s'y rapportant sera donc confirmé »
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « sur les retenues abusives sur les salaires ; Attendu que Monsieur B... V... sollicite la somme de 3 544,50 € de rappel de salaire outre l'indemnité compensatrice de congés payés afférente de 344,45 €. Attendu que Monsieur B... V... conteste les retenues opérées sur ses bulletins de salaire durant la période du mois d'avril 2014 au mois de mars 2015 (pièces n°5 à 16 de la partie demanderesse). Attendu que la Société Autocars Thys a mentionné sur les bulletins de salaire une ligne (n°26) dite "coupures régules TTE" constituant en une retenue de salaire appliquée aux conducteurs à temps plein lorsque leur temps de travail du mois considéré est inférieur à 151.67 heures. Attendu que selon les pièces n°2 et 3 de la partie demanderesse, Monsieur B... V... a été engagé à temps plein (article 5 de son contrat de travail) soit 151,67 à 10,05 € brut pour un salaire mensuel de 1.524,28 €. Attendu que selon l'arrêt du 23 octobre 2013 n° du pourvoi 12-14237 : précise que l'employeur ne peut se dédouaner de cette obligation qui entraîne le paiement d'un temps plein, que s'il prouve que le salarié avait refusé d'exécuter son travail ou ne s'était pas tenu à sa disposition. Attendu que cette règle a été rappelée par l'inspecteur du travail à la Société Autocars Thys selon pièce n°4 de la partie demanderesse et pièce n°8 de la partie défenderesse. Attendu que selon l'article 5 "rémunération" du contrat de travail de Monsieur B... V... (pièce 2.4 de la partie demanderesse), il est également précisé : A cette rémunération (151,67 soit 1.524,28 € brut) peuvent notamment s'ajouter les indemnisations des amplitudes et des coupures les modalités prévues par l'accord de branche précité du 18 avril 2002. Attendu que l'employeur ne peut procéder à la déduction des heures non effectuées, prévues au contrat, il sera accordé à Monsieur B... V... la somme de 3.544,50 € brute déduite sur chaque bulletin de paie (selon les pièces 5 à 16 de la partie demanderesse) outre les congés payés y afférents soit 354,45€ brut » ;
1. ALORS QUE l'article 7.3 de l'accord de réduction du temps de travail du 18 avril 2002 attaché à la convention nationale des transports routiers et activités auxiliaires de transport du 21 décembre 1950 dipose que « dans le cas particulier où le salarié bénéficie d'une rémunération effective fixée sur la base d'un horaire théorique déterminé, cette rémunération effective comprend tous les éléments de rémunération, y compris les sommes versées au titre de l'indemnisation des coupures jusqu'à concurrence de la rémunération correspondant à cet horaire théorique de référence » ; que le contrat de travail de Monsieur B... stipulait « qu'en contrepartie de ses fonctions et comme prévu par l'accord de branche du 18 avril 2002, Monsieur B... bénéficiera d'une rémunération effective fixée sur la base d'un horaire théorique de 151 heures 67 ; cette rémunération effective comprend tous les éléments de rémunération y compris les sommes versées au titre de l'indemnisation des coupures (
) jusqu'à concurrence de cet horaire théorique de référence » ; que, pour condamner l'exposante au paiement d'un rappel de salaire et congés payés afférents et fixer le salaire de référence de Monsieur B..., la cour d'appel, après avoir rappelé les dispositions conventionnelles et contractuelles précitées, a retenu qu'« à défaut de toute mention contractuelle prévoyant un temps de travail partiel, Monsieur B... a été embauché à temps complet, moyennant un salaire brut de 1.524,28 euros, auquel peuvent s'ajouter les indemnisations d'amplitude et de coupures, l'horaire théorique de référence devant (
) être supérieur à celui correspondant au temps plein, pour lequel l'employeur est tenu de fournir un travail [et] qu'en déduisant du salaire à temps plein de Monsieur B... une partie des heures de coupures en "régularisation TTE", en compensation des heures de travail effectif non réalisées par défaut de fourniture de travail (
) l'employeur a procédé à des retenues de salaire irrégulières » ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'aux termes de l'article 7.3 de l'accord de réduction du temps de travail du 18 avril 2002, la rémunération de Monsieur B..., fixée sur la base d'un horaire théorique, incluait les coupures, la cour d'appel a violé ce texte ;
2. ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que le contrat de travail de Monsieur B... prévoyait une rémunération fondée sur un horaire théorique de 151,67 heures mensuelles et que les sommes versées au titre des coupures non travaillées étaient incluses dans cette rémunération jusqu'à concurrence de la rémunération correspondant à l'horaire théorique ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a dénaturé le contrat de Monsieur B..., et a violé l'article 1103, anciennement 1134 du code civil ;
3. ALORS QUE les dispositions conventionnelles et contractuelles peuvent prévoir une rémunération valant pour un horaire « théorique » et incluant la rémunération des temps non travaillés ; qu'en considérant que dès lors que le contrat devait être considéré comme à temps plein, l'employeur était tenu de fournir du travail sur l'intégralité du temps plein, l'horaire théorique de travail ne pouvant qu'être supérieur à celui correspondant à un temps plein et les coupures non travaillées ne pouvant que s'ajouter à la rémunération du salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 1231-1 du code du travail, ensemble article 7.3 de l'accord de réduction du temps de travail du 18 avril 2002 attaché à la convention nationale des transports routiers et activités auxiliaires de transport du 21 décembre 1950, ainsi que l'article 1103, anciennement 1134 du code civil ;
4. ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les documents de la cause ; qu'il résultait des fiches de paie de Monsieur B... qu'elles mentionnaient une ligne « salaire horaire » correspondant à l'horaire théorique de 151,67 heures et à la rémunération effective de 1.524,28 €, une ligne « coupures régul TTE » correspondant aux heures de coupure et à leur indemnisation, et une ligne « heures payées non effectuées » lorsque cela était nécessaire du fait de l'absence de l'atteinte la rémunération garantie ; que les fiches de paie faisaient également ressortir que la rémunération brute de Monsieur B... avait toujours excédé la rémunération effective qui lui était garantie ; qu'ainsi, il ressortait des fiches de paie que l'exposante s'était bornée, conformément aux dispositions conventionnelles et contractuelles, à inclure les coupures non travaillées dans la rémunération effective jusqu'à concurrence de cette dernière ; qu'en déduisant des fiches de paie de Monsieur B... que l'exposante aurait procédé à des « retenues sur salaire » au titre des coupures, la cour d'appel a dénaturé lesdites fiches de paie, en méconnaissance du principe sus énoncé.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt du 29 septembre 2017 tel quel rectifié par l'arrêt du 22 décembre 2017, infirmatif de ce chef, d'AVOIR requalifié la démission de Monsieur B... en prise d'acte prenant les effets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse, et d'AVOIR condamné en conséquence condamné la SARL Autocars Thys à payer à Monsieur B... les sommes de 4.800 € à titre de licenciement sans cause réelle ni sérieuse, 1.679,85 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 169,98 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis afférente, 412,33 € au titre de l'indemnité de licenciement, et 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « (
) par lettre du 15 juin 2015, Monsieur B... a démissionné de son poste en indiquant que son préavis prendrait fin le 30 juin 2015 (
) ; Monsieur V... B... a saisi le conseil des prud'hommes de Dunkerque le 18 août 2015 d'une demande de requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une requalification de ce contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et de diverses demandes d'indemnisation (
) la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail. Lorsque le salarié remet en cause sa démission en raison de faits ou manquements imputables à son employeur et s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'elle était équivoque à la date à laquelle elle a été donnée, le juge doit l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission. Il y a lieu d'observer que si la lettre de démission de M. B... ne contient aucune indication sur les motifs de cette rupture du contrat de travail, elle fait suite à diverses lettres adressées par le contrôleur du travail à l'employeur lui rappelant son obligation de verser l'intégralité du salaire dû. Il résulte en effet de ce qui précède que l'employeur a continué à retenir de manière injustifiée une partie non négligeable de son salaire, soit environ 400 euros brut par mois, et a ainsi manqué à son obligation principale de payer l'intégralité du salaire. Dans ces circonstances, la démission litigieuse, qui est ainsi équivoque, doit s'analyser en une prise d'acte de la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Par la perte de son emploi dans ces circonstances, M. B..., dont l'ancienneté était de 14 mois, a subi un préjudice qui, au regard de son âge (34 ans) et de sa situation personnelle, sera indemnisée par le versement d'une somme de 4.800 euros. Il lui sera également accordé une indemnité compensatrice de préavis d'un mois de salaire, suivant l'article 13 de la convention collective ainsi que les congés payés y afférents. Il sera également fait droit à sa demande d'indemnité de licenciement » ;
1. ALORS QUE la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou de manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou, dans le cas contraire, d'une démission ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Monsieur B... avait démissionné par lettre du 15 juin 2015 en indiquant que son préavis prendrait fin le 30 juin 2015 et qu'il avait saisi le conseil de prud'hommes le 18 août 2015 d'une demande de requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que, pour dire que la démission Monsieur B... était équivoque et devait s'analyser en une prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse, la cour d'appel a retenu que « si la lettre de démission de M. B... ne contient aucune indication sur les motifs de cette rupture du contrat de travail, elle fait suite à diverses lettres adressées par le contrôleur du travail à l'employeur lui rappelant son obligation de verser l'intégralité du salaire dû ; il résulte en effet de ce qui précède que l'employeur a continué à retenir de manière injustifiée une partie non négligeable de son salaire, soit environ 400 euros brut par mois, et a ainsi manqué à son obligation principale de payer l'intégralité du salaire » ; qu'en statuant ainsi, quand il ne résultait pas de ses constatations que la lettre de démission comportait une réserve ou que le salarié justifiait d'un différend avec son employeur antérieur ou contemporain de celle-ci, étant précisé que les lettres du contrôleur du travail reprochaient à l'employeur de procéder à des retenues sur salaire injustifiées sans aucunement viser Monsieur B... ni révéler de différend entre ce dernier et son employeur, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé le caractère équivoque de la démission, a violé les article L. 1231-1 et L. 1237-1 du code du travail ;
2. ET ALORS subsidiairement QUE la cour d'appel s'étant fondée, pour dire que la démission s'analysait en une prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse, sur le manquement de l'employeur tenant au non-paiement des « coupures », la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen de cassation entraînera celle du chef de dispositif attaqué, par application de l'article 624 du code de procédure civile ;
3. ET ALORS plus subsidiairement QUE la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail ; qu'en retenant, pour dire que la démission s'analysait en une prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle, que l'employeur avait manqué à son obligation principale de payer l'intégralité du salaire, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si ce manquement avait fait obstacle à la poursuite du contrat de travail, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1231-1 du code du travail ;
4. ET ALORS plus subsidiairement encore QUE le salarié ayant exécuté une partie de son préavis n'est fondé à demander le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis qu'à hauteur de la durée de préavis qu'il n'a pas exécutée, peu important la requalification de sa démission en prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, Monsieur B..., qui avait précisé dans sa lettre de démission du 15 juin 2013 qu'il effectuerait son préavis jusqu'au 30 juin suivant, avait effectivement quitté l'entreprise à cette date ; que, pour condamner l'exposante au paiement d'une indemnité compensatrice correspondant à un mois de salaire ainsi qu'aux congés payés afférents, la cour d'appel a considéré que la démission devant s'analyser en une prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse, le salarié pouvait prétendre à une indemnité compensatrice de préavis d'un mois de salaire conformément aux dispositions de l'article 13 de la convention collective ; qu'en statuant ainsi, quand le salarié avait effectué une partie de son préavis et que seul le solde du préavis non exécuté demeurait dû, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1234-1 du code du travail, ensemble l'article 13 de l'annexe II de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt du 29 septembre 2017 tel quel rectifié par l'arrêt du 22 décembre 2017, infirmatif de ce chef, d'AVOIR requalifié le contrat de travail à durée déterminée du 8 avril 2014 en contrat à durée indéterminée et d'AVOIR condamné en conséquence la SARL Autocars Thys à verser à Monsieur B... la somme de 1.679,85 € à titre d'indemnité de requalification ;
AUX MOTIFS QUE « sur la requalification du contrat à durée déterminée:
aux termes de l'article L1242-2 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas qui y sont limitativement énumérés, dont l'accroissement temporaire d'activité. L'article L1245-1 ajoute qu'est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance notamment des dispositions des articles L1242-1 à L1242-4.En l'espèce, le contrat à durée déterminée du 8 avril 2014, qui confie à M. B... la tâche de la conduite d'autocar en service de ligne régulière, de transport scolaire, de transport de personnel et en service occasionnel (tourisme, périscolaire etc..), est motivé par un accroissement temporaire " de l'activité de fin d'année scolaire". Si la société Thys justifie avoir été attributaire de deux lots du marché de prestations de transport d'enfants et de personnes par la commune de [...] pour une durée d'un an avec prise d'effet au 26 août 2013, comprenant des transports d'enfants dans le cadre du périscolaire et des sorties, elle n'apporte aucun élément comparatif établissant que ce marché a entraîné un accroissement temporaire d'activité pour la période d'avril à août 2014 au regard de son activité habituelle de transport. Dès lors, il sera fait droit à la demande de requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée à compter du 8 avril 2014 ainsi qu'à sa demande d'indemnité de requalification prévue à l'article L1245-2 du code du travail d'un montant de 1.679,85 euros » ;
ALORS QUE l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise peut résulter de variations de production, sans qu'il soit nécessaire qu'il présente un caractère exceptionnel ; que, pour procéder à la requalification du contrat à durée déterminée du 8 avril 2014, lequel avait été motivé par un « accroissement temporaire de l'activité de fin d'année scolaire », la cour d'appel a retenu que si la société Autocars Thys justifiait avoir été attributaire de deux lots de marché par la commune de [...] pour une durée d'un an avec prise d'effet au 26 août 2013 comprenant des transports d'enfants dans le cadre du périscolaire et des sorties, elle n'apportait aucun élément comparatif établissant que ce marché avait entraîné un accroissement temporaire d'activité pour la période d'avril à août 2014 par rapport à son activité habituelle de transport ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants tirés de l'activité habituelle de l'entreprise, quand le marché conclu impliquait le transport d'enfants en classe de mer ou centre de vacances durant les vacances d'avril et d'été, entraînant une augmentation nécessaire de l'activité de l'exposante durant cette période, la cour d'appel a violé l'article L. 1242-2 du Code du travail, dans sa rédaction alors applicable, les articles L. 1245-1 et L. 1245-2 du même code.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt du 29 septembre 2017 tel quel rectifié par l'arrêt du 22 décembre 2017, d'AVOIR condamné la SARL Autocars Thys à verser à Monsieur B... la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts pour non respect des dispositions conventionnelles ;
AUX MOTIFS QUE « suivant l'article 8 n°6 du règlement CE 561/2006 relatif à l'harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, au cours de deux semaines consécutives, un conducteur prend au moins deux temps de repos hebdomadaire normaux ou un temps de repos hebdomadaire normal et un temps hebdomadaire réduit de 24 heures. Toutefois, la réduction est compensée par une période de repos équivalente prise en bloc avant la fin de la troisième semaine suivant la semaine en question"
L'article 10 de l'accord du 18 avril 2002 prévoit l'attribution aux salariés concernés d'une garantie de deux jours de repos hebdomadaire en moyenne sur l'année, une de ces journées pouvant être fractionnée en deux demi-journées, qui, selon l'article 29 de l'accord doit figurer sur un décompte particulier remis au salarié afin de permettre le contrôle effectif de l'obtention de es deux jours de repos. Il ressort des plannings, rapports et attestations d'activités produites aux débats que M. B... n'a pas régulièrement bénéficié de l'intégralité des jours de repos hebdomadaire. Le manquement de l'employeur à son obligation de respecter le temps de repos du salarié, nécessaire à santé et à la sécurité des personnes transportées, a causé à ce dernier un préjudice qui sera indemnisé par le versement d'une somme de 500 euros, comme justement évalué par les premiers juges » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Monsieur B... V... affirme que son employeur a violé les dispositions conventionnelles en matière de repos hebdomadaire et d'information du salarié, ainsi que les dispositions réglementaires en matière de repos hebdomadaire. Attendu que Monsieur B... V... dépend de la Convention collective des Transports routiers et Activités auxiliaires de transport. Attendu que l'accord du 18 avril étendu, attaché à cette convention collective prévoit en son article 10 l'attribution au personnel conducteur à temps complet d'une garantie de deux jours de repos hebdomadaires en moyenne sur l'année. Une de ces journées peut être fractionnée en deux demi-journées. Pour les conducteurs, l'attribution de demi-journées suppose un accord d'entreprise en définissant les modalités pratiques. Attendu que Monsieur B... V... affirme que la Société Autocars Thys a manqué à cette obligation et produit selon les pièces n° 25 à 102 de la partie demanderesse, un pointage notifiant le non-respect des dispositions de cet accord attaché à la convention collective. Attendu que la Société Autocars Thys produit un décompte selon la pièce 11/1 de la partie défenderesse qui ne permet pas de vérifier les heures détaillées ou un décompte conforme permettant le contrôle effectif de l'obtention des deux jours de repos hebdomadaires en moyenne sur l'année. Attendu qu'il a été demandé à la Société Autocars Thys à l'audience du 25 avril 2016 de fournir le détail du rapport d'activité afin de vérifier les jours de repos. Attendu que celle-ci par retour en date du 17 mai 2016, produit non pas un complément de pièces mais l'identique des pièces déjà produites au dossier. Ce qui ne correspond pas à la demande formulée à l'audience du 25 avril 2016, durant laquelle le Conseil de la Société Autocars Thys s'était engagé. Attendu que la Société Autocars Thys reconnaît qu'il y avait des semaines où le salarié ne bénéficiait que d'un jour ou d'un jour et demi en fonction du personnel absent ; dans cette hypothèse, celle-ci précise que les semaines suivantes, il bénéficiait d'un jour voire 2 ou 3 de récupération supplémentaires ; que l'employeur ne justifie pas comme le prévoit l'article 29 de l'accord du 18 avril 2002, étendu : in fine l'obligation pour l'employeur d'établir un décompte particulier et de le remettre au salarié afin de permettre le contrôle effectif de l'obtention des deux jours de repos hebdomadaires en moyenne sur l'armée visée à l'article 10. Dès lors et selon l'article L 2262-10 du Code du Travail, il sera alloué à Monsieur B... V... la somme de 500,00 de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions conventionnelles » ;
ALORS QUE la condamnation de l'employeur au paiement de dommages et intérêts suppose la caractérisation d'une faute et d'un préjudice en résultant ; que, pour condamner l'exposante au paiement de dommages et intérêts pour non respect des dispositions conventionnelles, la cour d'appel, après avoir rappelé les dispositions de l'article 8 n°6 du règlement CE 561/2006 et celles de l'article 10 de l'accord de réduction du temps de travail du 18 avril 2002 prévoyant, pour ce dernier, l'attribution de deux jours de repos hebdomadaire en moyenne sur l'année, a retenu qu'« il ressort des plannings, rapports et attestations d'activités produites aux débats que Monsieur B... n'a pas régulièrement bénéficié de l'intégralité des jours de repos hebdomadaire », ce qui causait un préjudice au salarié privé d'un repos nécessaire à sa santé et à la sécurité des personnes transportées ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'existence d'un préjudice spécifique, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 7.3 de l'accord de réduction du temps de travail du 18 avril 2002 attaché à la convention nationale des transports routiers et activités auxiliaires de transport du 21 décembre 1950, ensemble l'article L. 1231-1, anciennement 1147, du code civil.