La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/04/2019 | FRANCE | N°18-12227

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 10 avril 2019, 18-12227


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 9 janvier 2008), que, selon acte authentique du 25 juillet 2008, la société Banque populaire de l'Ouest, devenue Banque populaire grand Ouest (la banque) a consenti à la société civile immobilière Cape Cod (l'emprunteur) un prêt professionnel d'un montant de 3 450 000 euros au taux de 4,95 %, remboursable en cent-quatre-vingts mois ; que, le 30 avril 2013, un avenant a reporté en fin de prêt l'échéance impayée du 24 octobre 2012 ; qu'à la suite d'échéances

impayées, la banque a délivré à l'emprunteur, le 19 mai 2015, un comman...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 9 janvier 2008), que, selon acte authentique du 25 juillet 2008, la société Banque populaire de l'Ouest, devenue Banque populaire grand Ouest (la banque) a consenti à la société civile immobilière Cape Cod (l'emprunteur) un prêt professionnel d'un montant de 3 450 000 euros au taux de 4,95 %, remboursable en cent-quatre-vingts mois ; que, le 30 avril 2013, un avenant a reporté en fin de prêt l'échéance impayée du 24 octobre 2012 ; qu'à la suite d'échéances impayées, la banque a délivré à l'emprunteur, le 19 mai 2015, un commandement de payer valant saisie immobilière et, le 8 septembre suivant, l'a assigné devant le juge de l'exécution ; que l'emprunteur a soulevé la nullité du prêt pour défaut de cause et dol, ainsi que la nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel en raison de l'irrégularité du taux effectif global ; que la société David-U... est intervenue à la procédure, en sa qualité de mandataire au redressement judiciaire de l'emprunteur ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que l'emprunteur fait grief à l'arrêt de fixer la créance de la banque à la somme de 2 078 722,33 euros, selon décompte du 15 avril 2015, outre les intérêts postérieurs ;

Attendu que la prescription quinquennale de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel exercée par un emprunteur qui a obtenu un concours financier pour les besoins de son activité professionnelle court, s'agissant d'un prêt, de la date de la convention ; que l'arrêt relève que le contrat de prêt professionnel a été conclu le 25 juillet 2008 et que la banque a engagé l'action en paiement le 19 mai 2015 ; qu'il s'en déduit que la nullité de la stipulation relative à l'intérêt ne pouvait plus être soulevée ; que, par ce motif de pur droit, substitué, dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile, à ceux critiqués par le moyen, la décision se trouve légalement justifiée ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Cape Cod, assistée de la société David-U..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Cape Cod et la société David-U..., ès qualités,

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande en nullité du prêt du 25 juillet 2008 pour défaut de cause et dol,

Aux motifs propres que « sur la chronologie des faits, le 7 avril 2008, la BPO a consenti aux époux C... un découvert en compte de 2 730 047 euros, « afin de régler le rachat des parts de la SCI La Vallée immobilier, dans l'attente des pièces nécessaires à la constitution du dossier de financement moyen terme » (attestation BPO du 10 octobre 2008) ; que, le 8 avril 2008, par acte sous seing privé, la société Manoir de la vallée, dénommée La vallée immobilier, représentée par Mme C..., a cédé à la SCI Cape Cod, représentée par M. C..., 48 001 parts sociales pour le prix de 2 730 047 euros, M. et Mme C... restant chacun propriétaire d'une part ; que, le 14 mai 2008, la BPO a fait parvenir une étude réalisée par ses soins comportant deux solutions de financement pour le rachat des parts de la SCI La vallée immobilier ; que la première proposition était un financement à hauteur de 2 800 000 euros sur 15 ans au taux de 4,95%, la deuxième était un financement à hauteur de 3 450 000 euros sur 15 ans au taux de 5% ; que, le 25 juillet 2008, la BPO et la SCI Cape Cod ont régularisé par acte authentique un prêt professionnel de 3 450 000 euros au taux de 4,95% sur 180, mois avec pour objet le « financement des parts sociales La vallée [...] » ; que, le 30 avril 2013, la SCI Cape Cod, M. et Mme C... et la SCI La vallée immobilier ont signé un avenant par acte sous seing privé aux fins de reporter en fin de prêt l'échéance impayée du 24 octobre 2012 ; [
] ; qu'en ce qui concerne le dol, la SCI Cape Cod soutient que la banque a dissimulé le véritable TEG de 5,84% en mentionnant un TEG de 4,95%, il résulte des dispositions de l'article L. 313-2 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date du litige que le taux effectif global, déterminé comme il est dit à l'article L. 313-1, doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt, de sorte que l'acte constatant un prêt à finalité professionnelle est soumis à cette obligation légale ; qu'aux termes de l'article L. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige que « Dans tous les cas, pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels. Toutefois, pour l'application des articles L. 312-4 à L. 312-8, les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d'officiers ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus, lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat. » ; que la SCI Cape Cod soutient qu'elle a découvert l'existence de la sous-estimation du TEG le 17 avril 2015, lorsqu'elle a reçu le rapport de mission qu'elle avait confiée à Mme S... ; qu'il ressort de ce rapport que le TEG est en réalité de 5,84 % et qu'il aurait dû intégrer : 1 000 euros de frais de dossier bancaire, 58 916,32 euros d'intérêts liés au découvert bancaire (période du 7 avril au 24 juillet 2008), 5 000 euros d'honoraires de conseil de la BPO, 18 000 euros de frais de notaire (prise de garantie), 2 004 euros Solevia Capi (garantie) ; que le contrat du 25 juillet 2008 mentionne que le TEG de 4,95 % a été calculé « hors cotisation d'assurance et hors frais de sûretés réelles » ; qu'il mentionne également les frais de dossier à hauteur de 1 000 euros, prélevés lors du déblocage des fonds ; que la circonstance que les époux C... soient gérants de plusieurs sociétés ne leur confère pas automatiquement la qualité de spécialistes en matière d'emprunt bancaire ; que la BPO ne justifie pas que ses clients détenaient en la matière une expertise qui leur permettait de prendre connaissance, dès la réalisation du contrat que la facture d'étude de la BPO et les intérêts liés au découvert bancaire n'avaient pas été pris en compte ; que, dès lors que rien ne vient établir que la société Cape Cod, par le biais de ses associés, a eu connaissance de cette omission antérieurement au 17 avril 2015, c'est à compter de cette date que le délai quinquennal de prescription commence de courir ; qu'il en résulte que le moyen soulevé par voie d'exception antérieurement au 17 avril 2020 est recevable ; que le jugement sera confirmé sur ce point ; que, sur l'existence d'un dol, la SCI Cape Cod soutient que la BPO a dissimulé intentionnellement le coût réel du crédit qui comprenait les agios du découvert bancaire et des frais ; qu'en premier lieu, il ressort de l'attestation de la BPO produite par la SCI Cape Cod (pièce n° 12), que le découvert en compte du 7 avril 2008 est une opération qui a été consentie à titre personnel aux époux C... dans l'attente d'un autre financement, qui était déjà envisagé ; qu'ainsi, et contrairement à ce que soutient la SCI Cape Cod, ce n'est pas cette avance qui a conduit au prêt consenti à la SCI Cape Cod ; que, dès lors, la BPO n'était pas tenu d'intégrer le montant des intérêts de ce découvert dans le coût du crédit du 25 juillet 2008 ; qu'en second lieu, le contrat de prêt mentionne expressément, que le TEG de 4,95% a été calculé « hors cotisation d'assurance et hors frais de sûretés réelles », des frais de dossier à hauteur de 1 000 euros, ont été prélevés lors du déblocage des fonds, l'existence de nantissements dont celui du contrat « Solevia Capi » à souscrire par les époux C... et caution hypothécaire, l'assurance à souscrire par Mme C... auprès de la compagnie Swiss Life ; que, dès lors, et même en l'absence de remise du tableau d'amortissement lors de la contraction du crédit et la remise lors de l'avenant d'un tableau n'intégrant pas ces frais dans le TEG, la société Cape Cod avait connaissance des éléments lui permettant de savoir que le coût du crédit était supérieur à 4,95% ; qu'il n'est pas rapporté la preuve d'une manoeuvre aux fins de dissimulation de ces frais ; qu'en troisième lieu, l'étude faite par la BPO qui a conduit la banque à proposer deux solutions dont le prêt finalement souscrit a été facturée par la banque à hauteur de 5 000 euros ; que, dès lors que la BPO est intervenue comme conseil préalablement au prêt souscrit et que son étude a directement contribué à la réalisation de ce prêt, la facture de 5 000 euros aurait dû, en application des dispositions de l'article L. 313-1 précitée, être prise en compte dans le calcul du TEG ; que, néanmoins, la SCI Cape Cod ne rapporte pas la preuve que cette omission résulte de manoeuvres dolosives de la banque ; que, surabondamment, la société Cape Cod, qui a accepté de contracter sur la base d'une étude qui indiquait un taux de 5 %, n'établit pas qu'elle n'aurait pas contracté si le TEG indiqué au contrat avait été compris entre 5 et 6 % ; qu'il résulte de tout ceci que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la SCI Cape Cod de sa demande de nullité du contrat au titre du dol » ;

Et aux motifs adoptés que « Cape Cod rappelle que la BPO est intervenue comme conseil dans le montage de l'opération, comme le prouvent ses documents des 14 et 21 mai 2008. Elle lui reproche non seulement d'avoir faussement calculé le TEG, mais en outre de l'avoir fait volontairement, pour cacher à la SCI, à chaque étape, le véritable coût de l'opération ; que son consentement aurait donc été vicié par cette manoeuvre ou au moins cette réticence volontaire et fautive, de lapait d'un professionnel du crédit ; que c'aurait continué jusque lors de l'avenant de 2013, où le tableau d'amortissement rectifié reprenait les fausses bases antérieures ; que Cape Cod n'aurait pris connaissance de ces faits et de la réalité des coûts exposés que lors des premières poursuites de la banque et précisément le jour du dépôt de l'étude S... le 17 avril 2015 ; que, sur ce moyen, la prescription de cinq ans ne saurait à son sens être opposée, puisqu'elle ne part que de la découverte du fait caché ; que la BPO oppose cependant ici encore la prescription quinquennale, rappelant que l'acte en cause reste celui de 2008, et qu'il comportait à son sens tous les éléments requis, ce que soutient Cape Cod aujourd'hui étant sans fondement ; que la BPO ne peut confondre la recevabilité de la demande et son examen ; qu'ici, CAPE COD invoque un dol qu'elle n'aurait découvert que le 17 avril 2015 ; que sa demande n'est donc pas prescrite et est recevable en elle-même ; qu'au fond en revanche, Cape Cod, si elle conteste le calcul du coût réel de l'affaire, ne fait pas la preuve de manoeuvres ou de réticences dolosives, c'est à dire intentionnelles ou par un manquement inexcusable à ses obligations, de la part de la banque, dont les frais et les intérêts ont toujours été facturés et payés, et étaient donc parfaitement connus de la SCI, l'étude S... n'étant que la mise en forme ad hoc de ce que celle-ci savait avant ; que la demande sera donc encore rejetée » ;

Alors 1°) que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ; que, dans ses écritures d'appel (concl., p. 17), la SCI Cape Cod a fait valoir que le découvert en compte consenti à M. et Mme C... en avril 2008 et l'acte de prêt notarié formaient un « tout indissociable », dès lors que le second prêt n'avait été souscrit, sur engagement de la banque, que pour procéder au remboursement du premier ; que la cour d'appel a elle-même relevé que, le 7 avril 2008, la BPO a consenti aux époux C... un découvert en compte de 2 730 047 euros, « afin de régler le rachat des parts de la SCI La Vallée immobilier, dans l'attente des pièces nécessaires à la constitution du dossier de financement moyen terme » (attestation BPO du 10 octobre 2008), et que le prêt notarié litigieux du 25 juillet 2008, souscrit après la réalisation par la BPO d'une étude du 14 mai 2008 comportant deux solutions de financement pour le rachat des parts de la SCI La vallée immobilier, avait pour objet le « financement des parts sociales La vallée [...] » ; que, pour écarter le dol imputé à la banque, la cour d'appel a énoncé que le découvert en compte du 7 avril 2008 était une opération qui avait été consentie à titre personnel aux époux C... dans l'attente d'un autre financement et que ce n'était pas cette avance qui avait conduit au prêt consenti à la SCI Cape Cod, de sorte la BPO n'était pas tenue d'intégrer le montant des intérêts de ce découvert dans le coût du crédit du 25 juillet 2008 ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il résultait de ses propres constatations que l'avance et le prêt notarié avaient le même objet et étaient donc indivisibles, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Alors 2°) que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ; que, dans ses écritures d'appel (concl., p. 16), la SCI Cape Cod a fait valoir que la réticence dolosive de la BPO résultait de ce que les associés de la SCI Cape Cod s'étaient adjoints les services de la BPO pour obtenir ses conseils, lesquels ont d'ailleurs été prodigués et facturés, sur la faisabilité financière de leur projet au regard de son coût réel et notamment du véritable TEG applicable et qu'ils n'avaient pu soupçonner que la moindre erreur ait pu être commise à ce titre par un professionnel du crédit ; que la cour d'appel a elle-même constaté que le TEG mentionné à l'acte de prêt notarié n'intégrait pas l'ensemble des frais ; qu'en énonçant cependant qu'il n'était pas rapporté la preuve d'une manoeuvre aux fins de dissimulation de ces frais, sans se prononcer sur l'incidence de l'étude réalisée par la banque, « intervenue comme conseil », suivant ses propres constatations, de nature à établir une manoeuvre dolosive de la banque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Alors 3°) que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ; que la banque, qui omet d'intégrer dans le TEG ses propres frais, pour le minorer, commet nécessairement une manoeuvre dolosive ; que la cour d'appel a relevé que la banque avait omis d'intégrer dans le TEG les frais de sa propre étude, à hauteur de la somme de 5 000 euros, en méconnaissance des exigences de l'article L. 313-1 (ancien) du code de la consommation ; qu'en énonçant que la SCI Cape Cod ne rapportait pas la preuve que cette omission résultait de manoeuvres dolosives de la banque, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ; ;

Alors 4°) que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ; que le taux effectif global doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt, la méconnaissance de cette règle d'ordre public entachant la clause de stipulation d'intérêts conventionnels d'une nullité à laquelle l'emprunteur ne peut renoncer dans l'acte de prêt ; que l'erreur sur le TEG est donc, nécessairement, déterminante du consentement de l'emprunteur ; qu'en énonçant cependant que la SCI Cape Cod n'établissait pas qu'elle n'aurait pas contracté si le TEG indiqué au contrat avait été compris entre 5 et 6 %, la cour d'appel a violé l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article L. 313-2 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige ;

Alors 5) et en toute hypothèse que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt que le TEG mentionné à l'acte de prêt notarié était erroné ; que, dans ses écritures d'appel (concl., p. 16), la SCI Cape Cod a fait valoir que, de ce fait, son consentement avait nécessairement été surpris par dol dans la mesure où si elle avait connu le coût final et réel de l'opération, elle n'aurait pas contracté à ces conditions et aurait, a minima, fait appel à d'autres établissements bancaires ; qu'en énonçant cependant que la SCI Cape Cod n'établissait pas qu'elle n'aurait pas contracté si le TEG indiqué au contrat avait été compris entre 5 et 6 %, sans se prononcer sur les éléments invoqués par la SCI Cape Cod, établissant le contraire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est reproché à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir fixé la créance dont le recouvrement est poursuivi par la Banque populaire de l'Ouest sur la SCI Cape Cod à la somme totale de 2 078 722,33 euros selon décompte du 15 avril 2015 et outre les intérêts postérieurs,

Aux motifs propres que « sur la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, la SCI Cape Cod soutient que la présence d'un TEG erroné dans l'acte de prêt notarié expose la banque à se voir déchue de son droit aux intérêts ; que l'action en déchéance se prescrit par cinq ans à compter de la date à laquelle l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur allégué ; qu'en l'espèce, dès la souscription du crédit, la SCI Cape Cod pouvait constater que le taux de 4,95% ne correspondait pas au coût réel du crédit et que l'échéancier d'amortissement ne lui a pas été remis ; que l'avenant du 30 avril 2013, qui n'avait pour objet que de reporter l'exigibilité d'une échéance impayée, n'a pas eu pour effet d'ouvrir un nouveau délai de prescription pour former une contestation qu'elle pouvait élever dès le 25 juillet 2008 ; qu'ainsi, même si l'absence de prise en compte d'une somme de 5 000 euros n'a été découverte qu'en 2015, le point de départ du délai quinquennal est la date de signature de l'acte authentique ; qu'il en résulte que la société Cape Cod devait exercer son action avant le 26 juillet 2013 ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a retenu que la demande était prescrite ; que, par suite, la demande tendant à enjoindre à la BPO de produire des tableaux d'amortissement comportant le taux de l'intérêt légal et en procédant à l'imputation des paiements en priorité sur le capital emprunté est sans objet » ;

Et aux motifs adoptés que « le litige est suffisamment instruit et il n'est nul besoin ici de nouvelle communication de documents ni d' expertise ; que la SCI Cape Cod est par nature une société transparente, ici constituée des seuls époux C..., qui ont organisé toute l'opération, et font apparaître la SCI Cape Cod dans le "groupe C... " ; qu'elle a donc la qualité d'emprunteur averti ; que l'avance en compte a été faite à M. et Mme C... qui ont à leur tour avancé les fonds à la SCI pour lui permettre d'acquérir les parts avant d'obtenir le financement définitif de toute l'opération. Les frais correspondant ont été facturés et supportés par M. et Mme C... et ne concernent pas la SCI ; qu'ils n'avaient donc à être pris en compte dans les frais du prêt fait à la SCI ; que les honoraires payés à la BPO avaient trait à une prestation de service fournie par la banque à M. et Mme C... pour l'étude d'un plan de montage de l'opération globale au sein de leur groupe ; qu'elle aboutissait à deux propositions ; que le fait que l'une d'elle ait abouti au prêt n'imposait pas d'en inclure le coût (5 000 euros) dans le TEG de ce prêt ; que l'étude de Mme S... n'apporte rien de plus ici, n'étant en effet qu'une mise en forme des arguments de la SCI ; que le seul point sérieusement discutable est de savoir si le TEG devait comprendre le coût des garanties imposées pour l'octroi du prêt ; qu'il s'agit ici de : - frais de prises des garanties hypothécaires 19 907,14 - frais de garantie Solevia CAJPI (0,2 % de 1002 K euros) 2004 - frais d'assurance vie de M. et Mme C... mém ; que ces frais, en particulier ceux de garantie hypothécaires devaient être pris en compte dans le calcul du TEG, puisqu'étant une condition pour l'octroi du prêt et donc un coût intrinsèque du crédit octroyé ; que leur omission dans la calcul du TEG fait apparaître celui-ci faux ; qu'ayant été relevé que Cape Cod avait la qualité d'emprunteur averti, elle a connu ou devait avoir connu ce point dès le prêt de 2008, ayant payé alors tous ces frais ; que sa demande est donc prescrite là, et sera donc rejetée »

Alors 1°) que le point de départ du délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels se situe au jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant le taux effectif global ; que, pour déclarer prescrite la demande en déchéance du droit aux intérêts conventionnels formée par la SCO Cape Cod, la cour d'appel a énoncé que, dès la souscription du crédit, elle pouvait constater que le taux de 4,95 % ne correspondait pas au coût réel du crédit et que l'échéancier d'amortissement ne lui a pas été remis ; qu'en statuant ainsi, tout en relevant que l'absence de prise en compte d'une somme de 5 000 euros n'a été découverte qu'en 2015, et que l'acte de prêt mentionne que le TEG a été calculé « hors cotisation d'assurance et hors frais de sûretés réelles », soit respectivement les sommes de 100 000 euros (assurance à hauteur de 50 % pour l'époux et 50 % pour l'épouse) et 5 000 euros, et, ce dont il résultait que ses mentions erronées ne pouvaient permettre à l'emprunteur, à la seule lecture de l'acte de prêt, de connaître l'erreur affectant le TEG, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 312-33 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 110-4 du code de commerce ;

Alors 2°) et en toute hypothèse que le point de départ du délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels se situe au jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant le taux effectif global ; que, dans ses écritures d'appel (concl., p. 27 s.), la SCI Cape Cod a fait valoir que le caractère erroné du TEG résultait de ce que la banque n'avait pas été intégré le montant des honoraires facturés et réglés pour l'étude et la mise en place du financement, à hauteur de 5 000 euros, les agios applicables à l'opération de crédit au titre de la période courue entre la mise à disposition des fonds sous forme de découvert, le 7 avril 2008 et l'émission de son offre le 23 mai 2008, ainsi que les frais d'acte et ceux afférents aux différentes garanties ; que, pour déclarer prescrite la demande en déchéance du droit aux intérêts conventionnels formée par la SCI Cape Cod, la cour d'appel a énoncé que, dès la souscription du crédit, elle pouvait constater que le taux de 4,95 % ne correspondait pas au coût réel du crédit et que l'échéancier d'amortissement ne lui a pas été remis ; qu'en statuant ainsi, sans se prononcer sur le moment auquel la SCI Cape Cod avait pu avoir connaissance de l'absence d'intégration au TEG des différents frais et sommes qu'elle invoquait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 312-33 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 110-4 du code de commerce ;

Alors 3°) et en toute hypothèse que la contradiction de motifs équivaut à une absence de motivation ; que, pour déclarer recevable, comme non prescrite, l'action en nullité du prêt pour dol, la cour d'appel a retenu que la banque ne justifiait pas que ses clients détenaient en la matière une expertise qui leur permettait de prendre connaissance, dès la réalisation du contrat, que la facture d'étude de la BPO et les intérêts liés au découvert bancaire n'avaient pas été pris en compte, de sorte que, dès lors que rien ne vient établir que la société Cape Cod, par le biais de ses associés, a eu connaissance de cette omission antérieurement au 17 avril 2015, c'est à compter de cette date que le délai quinquennal de prescription commence de courir ; qu'en énonçant, pour déclarer prescrite la demande en déchéance du droit aux intérêts conventionnels formée par la SCO Cape Cod, que, dès la souscription du crédit, elle pouvait constater que le taux de 4,95 % ne correspondait pas au coût réel du crédit et que l'échéancier d'amortissement ne lui a pas été remis, la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile.

Alors 4°) que, dans ses écritures d'appel (concl., p. 26), la SCI Cape Cod a fait valoir que l'avenant, mentionnant un nouveau TEG de 4,72 %, au lieu de 4,95 %, avait emporté novation du prêt et interrompu la prescription ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-12227
Date de la décision : 10/04/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 09 janvier 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 10 avr. 2019, pourvoi n°18-12227


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.12227
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award