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03/04/2019 | FRANCE | N°18-13957

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 03 avril 2019, 18-13957


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 décembre 2017), que M. J... et Mme O..., qui vivaient en concubinage, ont acquis en indivision, par moitié chacun, une maison d'habitation ayant servi de logement familial, puis un terrain à bâtir y attenant ; que des difficultés sont survenues lors des opérations de partage de l'indivision ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. J... fait grief à l'arrêt d'ordonner la licitation des biens immobiliers indivis, alors, selon le moyen :

1°/ q

ue le partage en nature est la règle, la licitation ne devant être ordonnée que si l...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 décembre 2017), que M. J... et Mme O..., qui vivaient en concubinage, ont acquis en indivision, par moitié chacun, une maison d'habitation ayant servi de logement familial, puis un terrain à bâtir y attenant ; que des difficultés sont survenues lors des opérations de partage de l'indivision ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. J... fait grief à l'arrêt d'ordonner la licitation des biens immobiliers indivis, alors, selon le moyen :

1°/ que le partage en nature est la règle, la licitation ne devant être ordonnée que si les immeubles ne peuvent être commodément partagés ; qu'il appartient à l'indivisaire qui sollicite la licitation de rapporter la preuve que les biens ne sont pas commodément partageables ; qu'en retenant, pour ordonner la licitation, par motifs propres que M. J... ni ne prouve, ni même n'allègue que les biens situés [...] , sont facilement partageables s'agissant d'une maison individuelle et d'un terrain de valeur bien différente et, par motifs réputés adoptés du jugement que s'il prétend qu'un partage en nature est possible avec une soulte, il n'effectue aucune proposition à cet égard, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation des articles 826 et 1686 du code civil et de l'article 1377 du code de procédure civile ;

2°/ que le partage en nature est la règle, la licitation ne devant être ordonnée que si les immeubles ne peuvent être commodément partagés ; qu'à supposer qu'elle ait estimé que les biens en cause n'étaient pas commodément partageables, en se bornant à relever le fait qu'il s'agissait d'une maison individuelle et d'un terrain d'une valeur bien différente, motif impropre à expliquer en quoi cette consistance aurait rendu incommode un partage en nature, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 826 et 1686 du code civil et de l'article 1377 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir relevé qu'il était produit, par Mme O..., des estimations de la maison entre 220 000 et 230 000 euros et du terrain entre 60 000 et 65 000 euros et, par M. J..., des estimations respectives de 170 000 et 45 000 euros, ce dont il ressortait que la valeur du premier bien était plus de trois fois supérieure à celle du second, c'est sans inverser la charge de la preuve et dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a estimé que les biens immobiliers appartenant en indivision aux parties n'étaient pas facilement partageables au regard de leur différence significative de valeur ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. J... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois avril deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. J....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné, sauf meilleur accord des parties, qui pourront conclure une vente amiable, ou convenir d'une attribution amiable, la licitation aux enchères publiques, à la barre du tribunal de grande instance de Sens sur le cahier des charges et des conditions de vente qui sera dressé par Maître Jean-Jacques X..., de l'immeuble sis [...] cadastré section [...] et [...] pour une contenance totale de 14 ares et 62 centiares sur la mise à prix de 150 000 euros et de l'immeuble sis [...] cadastré section [...] pour une contenance de 14 ares et 62 centiares sur la mise à prix de 40 000 euros ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE

« Sur la licitation du bien :

Considérant que M. J... demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a ordonné la vente sur licitation de l'immeuble en arguant de l'article 826 du code civil qui dispose que « si la consistance de la masse ne permet pas de former des lots d'égale valeur, leur inégalité se compense par une soulte » ;

qu'il expose qu'il serait particulièrement inéquitable de le contraindre à procéder à la vente des immeubles qu'il souhaite conserver, notamment en considération du fait que les enfants du couple y sont particulièrement attachés, et alors même que sa contribution financière à la constitution dudit patrimoine a été considérable, qu'il doit être tenu compte de la « récompense » qui lui est due, eu égard à sa contribution à l'acquisition de l'immeuble, tant par l'apport personnel qu'il a fait, que par le remboursement sur ses deniers propres des concours financiers consentis par le Crédit Agricole aux parties pour l'acquisition et les travaux dans l'immeuble ; que dans ces circonstances, il apparaît essentiel de demander au notaire liquidateur de procéder à l'estimation de la soulte éventuellement due par lui au regard de sa contribution à la constitution du patrimoine indivis ;

considérant que Mme O... conteste tout droit de créance de M. J... sur l'indivision à ce titre ;

qu'elle expose qu'aux termes de ses conclusions de première instance, elle avait demandé au premier juge de dire que M. J... n'était titulaire d'aucune créance envers l'indivision au titre de sa participation au financement de l'acquisition et des travaux des deux biens immobiliers indivis et que bien qu'ayant fait droit à cette demande dans le corps de sa décision, le premier juge n'a pas repris ce point dans son dispositif et qu'elle demande en conséquence à la cour de rectifier cette erreur matérielle ; qu'à supposer qu'il y ait eu un financement inégalitaire des biens immobiliers (acquisition et travaux), c'est à juste titre que le premier juge a retenu l'implication de Mme O... dans la prise en charge de la quasi-totalité des dépenses de la vie commune, et estimé que M. J... n'avait droit à aucune récompense au titre du financement de l'acquisition et des travaux des biens immobiliers indivis, cette solution s'inscrivant d'ailleurs dans le droit fil de la jurisprudence la plus récente de la Cour de cassation ; qu'à titre subsidiaire, la cour devra retenir l'intention libérale de M. J... à l'égard de sa concubine justifiant l'application de l'acte notarié et un partage d'indivision par moitié ;

considérant que M. J... fait état de sa participation selon lui prépondérante dans la constitution du patrimoine immobilier des ex-concubins, pour voir infirmer la disposition du jugement relative à la licitation ;

considérant que toutefois nul n'étant contraint de demeurer dans l'indivision en application de l'article 815 du code civil, la vente par adjudication doit être prononcée aux termes de l'article 1377 du code civil, lorsque les biens indivis ne peuvent être facilement partagés ou attribués ;

considérant que M. J... ni ne prouve ni même n'allègue que les biens situés [...] sont facilement partageables, s'agissant d'une maison individuelle et d'un terrain de valeur bien différente et qu'aucune attribution préférentielle légale n'étant prévue dans le cadre d'une indivision conventionnelle entre ex-concubins, la décision de licitation des biens ne peut qu'être confirmée, étant précisé que les parties peuvent toujours revenir à un partage amiable si elles le souhaitent ;

considérant que M. J... ne demande nullement la fixation d'une créance à son profit, se bornant à solliciter que le notaire calcule une éventuelle soulte, tandis que Mme O... demande à la cour dire que M. J... n'est titulaire d'aucune créance envers l'indivision au titre de sa participation au financement de l'acquisition et des travaux de la maison et du terrain indivis ;

considérant que les parties qui ont acquis un bien en indivision en ont acquis la propriété dans la proportion indiquée par le titre de propriété, sans qu'il y ait lieu d'avoir égard à la façon dont cette acquisition a été financée ; qu'un des indivisaires a seulement la possibilité d'obtenir, lors du partage, le règlement d'une créance s'il prouve avoir financé l'acquisition au-delà de la proportion mentionnée au titre de propriété ;

considérant, en outre, que chacun des concubins doit, en l'absence de volonté exprimée à cet égard, supporter les dépenses de la vie courante qu'il a exposées, sans qu'il y ait lieu à l'établissement d'un compte entre eux, étant précisé que le remboursement des échéances d'un emprunt contracté pour l'acquisition d'un bien immobilier représentant le logement de concubins et de leurs enfants constituent des dépenses de la vie courante ;

considérant, en conséquence, qu'en l'absence de demande chiffrée formulée par l'appelant et eu égard aux règles précitées, il convient de dire que M. J... n'est titulaire d'aucune créance envers l'indivision au titre de sa participation au financement de l'acquisition et des travaux de la maison et du terrain indivis » ;

ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE

« Sur la licitation :

aux termes de l'article 840 du code civil, le partage est fait en justice, lorsque l'un des indivisaires refuse de consentir au partage amiable ou s'il élève des contestations sur la manière d'y (pro)céder ou de le terminer ou lorsque le partage n'a pas été autorisé ou approuvé dans l'un des cas prévu aux articles 836 et 837 ;

en l'espèce, Monsieur J... fait valoir qu'il a engagé des dépenses concernant l'acquisition des immeubles et les travaux d'amélioration ; qu'il est donc créancier de l'indivision ;

en l'espèce, il ressort de l'examen des pièces que l'acte notarié du 16 juin 1993 indique que Monsieur F... J... et Madame Z... O... ont acquis chacun pour moitié ; que l'acquéreur a effectué le paiement du prix au moyen de ses deniers personnels et au moyen d'un prêt consenti à Monsieur J... d'un montant de soixante dix mille francs par la Caisse régionale du crédit agricole de l'Yonne ; que l'acte authentique en date du 22 janvier 2005 indique que les parties sont acquéreurs à concurrence de moitié chacun ; que les parties reconnaissent dans leur écriture être en concubinage depuis 1989 ;

il résulte également des pièces que :

• Madame O... a souscrit un prêt personnel étudiant en 1991 de 50 000 francs dont Monsieur J... s'est porté caution sur une durée de 72 mois ;

• Madame O... a souscrit un prêt à la consommation en 2001 de 100 000 francs pour de l'acquisition de matériel sur une durée de 60 mois dont Monsieur J... s'est porté caution;
• Les parties effectuaient des virements entre leurs comptes respectifs mais également avec les comptes des enfants mineurs ;
• Monsieur J... a souscrit un prêt de 70 000 francs en 1993 sur une durée de 60 mois • Les parties ont souscrit quatre prêt épargne logement en 2009 et un prêt consommation véhicule en 2010;
• Les parties ont souscrit un prêt de 89 000 euros pour l'acquisition du terrain à bâtir sur une durée de 180 mois ;

il est certain que les parties ont souscrit de nombreux prêts ensemble ; que la maison d'habitation a nécessité des travaux ; que si Monsieur J... justifient de ses relevés bancaires précisant que des sommes ont servi pour l'acquisition des immeubles, il résulte de l'analyse des décomptes qu'il ne peut être écarté que certaines sommes ont été virées par Madame O..., notamment la somme de 50 000 francs ; que Madame O... justifient s'être acquittée de nombreux frais pour la famille et notamment pour les travaux ; que Monsieur J... ne rapportent pas la preuve qu'il s'est acquitté seul du prêt de 89 000 euros ou de l'appartement que le couple loué dans l'attente de la réalisation des travaux ; qu'il ne peut être exclu que les parties avaient la volonté commune de partager les dépenses de la vie commune, Monsieur J... assumant une partie de prêts et Madame O... les frais liés à la vie courante ; que de ce fait le remboursement effectué par Monsieur J... peut s'analyser comme une dépense de la vie courante. Il sera par conséquent débouté de sa demande de créance envers l'indivision ;

il sera également rappelé qu'aux termes des articles 831 du code civil et suivant, l'attribution préférentielle d'un bien entre concubin est impossible. En l'espèce, aucune des parties ne sollicite l'attribution de l'immeuble, laquelle ne pourrait intervenir qu'en vertu de leur accord unanime et si Monsieur J... indique qu'un partage en nature est possible avec une soulte, il n'effectue aucune proposition ;

Madame O... justifie de deux estimations, l'une de Century en date du 7 avril 2014 précisant que la maison est estimée entre 220 et 230 000 euros, la seconde de Bourjois immobilier en date du 19 février 2014 estimant la maison entre 220 et 230 000 euros et le terrain à bâtir entre 60 et 65 000 euros ;

Monsieur J... verse une attestation de valeur de l'agence PARADIMMO en date du 25 juin 2015 indiquant que la maison est estimée à 170 000 euros et le terrain à 45000 euros ;

il convient donc de faire droit à la demande de Madame O... et d'ordonner la licitation des immeubles, de fixer la mise à prix à la somme de 150 000 € pour la maison et de 40 000 euros pour le terrain à bâtir avec faculté d'un quart de la mise à prix. Il conviendra cependant de laisser aux parties la faculté de vendre amiablement et d'un commun accord l'immeuble, si un acquéreur se présente, ou de convenir d'une attribution amiable » ;

1°) ALORS QUE le partage en nature est la règle, la licitation ne devant être ordonnée que si les immeubles ne peuvent être commodément partagés ; qu'il appartient à l'indivisaire qui sollicite la licitation de rapporter la preuve que les biens ne sont pas commodément partageables ; qu'en retenant, pour ordonner la licitation, par motifs propres que M. J... ni ne prouve, ni même n'allègue que les biens situés [...] , sont facilement partageables s'agissant d'une maison individuelle et d'un terrain de valeur bien différente et, par motifs réputés adoptés du jugement que s'il prétend qu'un partage en nature est possible avec une soulte, il n'effectue aucune proposition à cet égard, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation des articles 826 et 1686 du code civil et de l'article 1377 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE le partage en nature est la règle, la licitation ne devant être ordonnée que si les immeubles ne peuvent être commodément partagés ; qu'à supposer qu'elle ait estimé que les biens en cause n'étaient pas commodément partageables, en se bornant à relever le fait qu'il s'agissait d'une maison individuelle et d'un terrain d'une valeur bien différente, motif impropre à expliquer en quoi cette consistance aurait rendu incommode un partage en nature, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 826 et 1686 du code civil et de l'article 1377 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que M. J... n'est titulaire d'aucune créance envers l'indivision au titre de sa participation au financement de l'acquisition et des travaux de la maison et du terrain indivis pendant la vie commune, soit, en l'espèce, jusqu'au mois de juillet 2013 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE

« Sur la licitation du bien :

Considérant que M. J... demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a ordonné la vente sur licitation de l'immeuble en arguant de l'article 826 du code civil qui dispose que « si la consistance de la masse ne permet pas de former des lots d'égale valeur, leur inégalité se compense par une soulte » ;

qu'il expose qu'il serait particulièrement inéquitable de le contraindre à procéder à la vente des immeubles qu'il souhaite conserver, notamment en considération du fait que les enfants du couple y sont particulièrement attachés, et alors même que sa contribution financière à la constitution dudit patrimoine a été considérable, qu'il doit être tenu compte de la « récompense » qui lui est due, eu égard à sa contribution à l'acquisition de l'immeuble, tant par l'apport personnel qu'il a fait, que par le remboursement sur ses deniers propres des concours financiers consentis par le Crédit Agricole aux parties pour l'acquisition et les travaux dans l'immeuble ; que dans ces circonstances, il apparaît essentiel de demander au notaire liquidateur de procéder à l'estimation de la soulte éventuellement due par lui au regard de sa contribution à la constitution du patrimoine indivis ;

considérant que Mme O... conteste tout droit de créance de M. J... sur l'indivision à ce titre ;

qu'elle expose qu'aux termes de ses conclusions de première instance, elle avait demandé au premier juge de dire que M. J... n'était titulaire d'aucune créance envers l'indivision au titre de sa participation au financement de l'acquisition et des travaux des deux biens immobiliers indivis et que bien qu'ayant fait droit à cette demande dans le corps de sa décision, le premier juge n'a pas repris ce point dans son dispositif et qu'elle demande en conséquence à la cour de rectifier cette erreur matérielle ; qu'à supposer qu'il y ait eu un financement inégalitaire des biens immobiliers (acquisition et travaux), c'est à juste titre que le premier juge a retenu l'implication de Mme O... dans la prise en charge de la quasi-totalité des dépenses de la vie commune, et estimé que M. J... n'avait droit à aucune récompense au titre du financement de l'acquisition et des travaux des biens immobiliers indivis, cette solution s'inscrivant d'ailleurs dans le droit fil de la jurisprudence la plus récente de la Cour de cassation ; qu'à titre subsidiaire, la cour devra retenir l'intention libérale de M. J... à l'égard de sa concubine justifiant l'application de l'acte notarié et un partage d'indivision par moitié ;

considérant que M. J... fait état de sa participation selon lui prépondérante dans la constitution du patrimoine immobilier des ex-concubins, pour voir infirmer la disposition du jugement relative à la licitation ;

considérant que toutefois nul n'étant contraint de demeurer dans l'indivision en application de l'article 815 du code civil, la vente par adjudication doit être prononcée aux termes de l'article 1377 du code civil, lorsque les biens indivis ne peuvent être facilement partagés ou attribués ;

considérant que M. J... ni ne prouve ni même n'allègue que les biens situés [...] sont facilement partageables, s'agissant d'une maison individuelle et d'un terrain de valeur bien différente et qu'aucune attribution préférentielle légale n'étant prévue dans le cadre d'une indivision conventionnelle entre ex-concubins, la décision de licitation des biens ne peut qu'être confirmée, étant précisé que les parties peuvent toujours revenir à un partage amiable si elles le souhaitent ;

considérant que M. J... ne demande nullement la fixation d'une créance à son profit, se bornant à solliciter que le notaire calcule une éventuelle soulte, tandis que Mme O... demande à la cour dire que M. J... n'est titulaire d'aucune créance envers l'indivision au titre de sa participation au financement de l'acquisition et des travaux de la maison et du terrain indivis ;

considérant que les parties qui ont acquis un bien en indivision en ont acquis la propriété dans la proportion indiquée par le titre de propriété, sans qu'il y ait lieu d'avoir égard à la façon dont cette acquisition a été financée ; qu'un des indivisaires a seulement la possibilité d'obtenir, lors du partage, le règlement d'une créance s'il prouve avoir financé l'acquisition au-delà de la proportion mentionnée au titre de propriété ;

considérant, en outre, que chacun des concubins doit, en l'absence de volonté exprimée à cet égard, supporter les dépenses de la vie courante qu'il a exposées, sans qu'il y ait lieu à l'établissement d'un compte entre eux, étant précisé que le remboursement des échéances d'un emprunt contracté pour l'acquisition d'un bien immobilier représentant le logement de concubins et de leurs enfants constituent des dépenses de la vie courante ;

considérant, en conséquence, qu'en l'absence de demande chiffrée formulée par l'appelant et eu égard aux règles précitées, il convient de dire que M. J... n'est titulaire d'aucune créance envers l'indivision au titre de sa participation au financement de l'acquisition et des travaux de la maison et du terrain indivis » ;

ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE

« Sur la licitation :

aux termes de l'article 840 du code civil, le partage est fait en justice, lorsque l'un des indivisaires refuse de consentir au partage amiable ou s'il élève des contestations sur la manière d'y (pro)céder ou de le terminer ou lorsque le partage n'a pas été autorisé ou approuvé dans l'un des cas prévu aux articles 836 et 837 ;

en l'espèce, Monsieur J... fait valoir qu'il a engagé des dépenses concernant l'acquisition des immeubles et les travaux d'amélioration ; qu'il est donc créancier de l'indivision ;

en l'espèce, il ressort de l'examen des pièces que l'acte notarié du 16 juin 1993 indique que Monsieur F... J... et Madame Z... O... ont acquis chacun pour moitié ; que l'acquéreur a effectué le paiement du prix au moyen de ses deniers personnels et au moyen d'un prêt consenti à Monsieur J... d'un montant de soixante dix mille francs par la Caisse régionale du crédit agricole de l'Yonne ; que l'acte authentique en date du 22 janvier 2005 indique que les parties sont acquéreurs à concurrence de moitié chacun ; que les parties reconnaissent dans leur écriture être en concubinage depuis 1989 ;

il résulte également des pièces que :

• Madame O... a souscrit un prêt personnel étudiant en 1991 de 50 000 francs dont Monsieur J... s'est porté caution sur une durée de 72 mois ;
• Madame O... a souscrit un prêt à la consommation en 2001 de 100 000 francs pour de l'acquisition de matériel sur une durée de 60 mois dont Monsieur J... s'est porté caution;
• Les parties effectuaient des virements entre leurs comptes respectifs mais également avec les comptes des enfants mineurs ;
• Monsieur J... a souscrit un prêt de 70 000 francs en 1993 sur une durée de 60 mois
• Les parties ont souscrit quatre prêt épargne logement en 2009 et un prêt consommation véhicule en 2010;
• Les parties ont souscrit un prêt de 89 000 euros pour l'acquisition du terrain à bâtir sur une durée de 180 mois ;

il est certain que les parties ont souscrit de nombreux prêts ensemble ; que la maison d'habitation a nécessité des travaux ; que si Monsieur J... justifient de ses relevés bancaires précisant que des sommes ont servi pour l'acquisition des immeubles, il résulte de l'analyse des décomptes qu'il ne peut être écarté que certaines sommes ont été virées par Madame O..., notamment la somme de 50 000 francs ; que Madame O... justifient s'être acquittée de nombreux frais pour la famille et notamment pour les travaux ; que Monsieur J... ne rapportent pas la preuve qu'il s'est acquitté seul du prêt de 89 000 euros ou de l'appartement que le couple loué dans l'attente de la réalisation des travaux ; qu'il ne peut être exclu que les parties avaient la volonté commune de partager les dépenses de la vie commune, Monsieur J... assumant une partie de prêts et Madame O... les frais liés à la vie courante ; que de ce fait le remboursement effectué par Monsieur J... peut s'analyser comme une dépense de la vie courante. Il sera par conséquent débouté de sa demande de créance envers l'indivision ;

il sera également rappelé qu'aux termes des articles 831 du code civil et suivant, l'attribution préférentielle d'un bien entre concubin est impossible. En l'espèce, aucune des parties ne sollicite l'attribution de l'immeuble, laquelle ne pourrait intervenir qu'en vertu de leur accord unanime et si Monsieur J... indique qu'un partage en nature est possible avec une soulte, il n'effectue aucune proposition ;

Madame O... justifie de deux estimations, l'une de Century en date du 7 avril 2014 précisant que la maison est estimée entre 220 et 230 000 euros, la seconde de Bourjois immobilier en date du 19 février 2014 estimant la maison entre 220 et 230 000 euros et le terrain à bâtir entre 60 et 65 000 euros ;

Monsieur J... verse une attestation de valeur de l'agence PARADIMMO en date du 25 juin 2015 indiquant que la maison est estimée à 170 000 euros et le terrain à 45000 euros ;

il convient donc de faire droit à la demande de Madame O... et d'ordonner la licitation des immeubles, de fixer la mise à prix à la somme de 150 000 € pour la maison et de 40 000 euros pour le terrain à bâtir avec faculté d'un quart de la mise à prix. Il conviendra cependant de laisser aux parties la faculté de vendre amiablement et d'un commun accord l'immeuble, si un acquéreur se présente, ou de convenir d'une attribution amiable » ;

1°) ALORS QU'au moment du partage, il doit être tenu compte selon l'équité des dépenses engagées par l'un des coïndivisaires pour la conservation du bien indivis ; que le règlement d'échéances d'emprunts immobiliers souscrits par l'un des concubins constitue une dépense nécessaire à la conservation de l'immeuble donnant droit à indemnité, sauf à ce qu'en vertu d'un accord tacite, une telle dépense soit destinée à compenser la prise en charge par l'autre concubin de l'essentiel des charges de la vie courante ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de M. J... tendant à ce que le notaire liquidateur établisse les comptes entre les parties en prenant notamment en considération la créance dont il dispose sur l'indivision, que chacun des concubins doit, en l'absence de volonté exprimée à cet égard, supporter les dépenses de la vie courante qu'il a exposées et que les remboursements des échéances d'un emprunt contracté pour l'acquisition d'un bien immobilier représentant le logement de concubins et de leurs enfants constituent des dépenses de la vie courante, la cour d'appel a violé l'article 815-13 du code civil ;

2°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE le motif dubitatif équivaut à un défaut de motifs ; qu'à supposer adoptés les motifs du jugement, en retenant, pour rejeter la demande de M. J... tendant à ce que le notaire liquidateur établisse les comptes entre les parties en prenant notamment en considération la créance dont il dispose sur l'indivision, qu'il ne peut être exclu que les parties avaient la volonté commune de partager les dépenses de la vie commune, M. J... assumant une partie des prêts et Mme O... les frais liés à la vie courante, de sorte que le remboursement effectué par M. J... peut s'analyser comme une dépense de la vie courante, la cour d'appel a statué par des motifs dubitatifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QU'au moment du partage, il doit être tenu compte selon l'équité des dépenses engagées par l'un des coïndivisaires pour la conservation du bien indivis ; que toute somme ayant servi au financement de l'acquisition d'un bien indivis constitue une dépense nécessaire à la conservation de l'immeuble donnant lieu à indemnité ; que M. J... faisait valoir qu'une indemnité lui était due au titre non seulement du remboursement des échéances des prêts immobiliers, mais encore des apports qu'il avait effectués sur ses deniers personnels lors des acquisitions immobilières ; qu'en se bornant, pour rejeter la demande de M. J... tendant à ce que le notaire liquidateur établisse les comptes entre les parties en prenant notamment en considération la créance dont il dispose sur l'indivision, à se prononcer sur la question du remboursement des emprunts, sans rechercher si M. J... pouvait prétendre à une indemnité au titre des apports qu'il avait effectués sur ses deniers personnels pour acquérir les biens, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 815-13 du code civil ;

4°) ALORS QU' le juge ne saurait rejeter une demande au seul motif qu'elle n'est pas chiffrée, si son montant est déterminable au vu des éléments de preuve versés aux débats ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de M. J... tendant à ce que le notaire liquidateur établisse les comptes entre les parties en prenant notamment en considération la créance dont il dispose sur l'indivision, que M. J... ne forme aucune demande chiffrée à cet égard, sans rechercher si cette demande n'était pas déterminable au regard des conclusions de M. J... et des éléments de preuve produits par lui, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-13957
Date de la décision : 03/04/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 décembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 03 avr. 2019, pourvoi n°18-13957


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.13957
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