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27/03/2019 | FRANCE | N°17-23354

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 27 mars 2019, 17-23354


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société NC Numéricable que sur le pourvoi incident relevé par la société Orange :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 juin 2017), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 2 février 2016,pourvoi n° 14-23.921), que la société France Télécom, aux droits de laquelle est venue la société Orange, a conclu en 1999 et 2001 deux conventions avec des câblo-opérateurs aux droits desquels vient la socié

té NC Numéricable ; qu'à la suite d'une décision de l'Autorité de régulation des co...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société NC Numéricable que sur le pourvoi incident relevé par la société Orange :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 juin 2017), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 2 février 2016,pourvoi n° 14-23.921), que la société France Télécom, aux droits de laquelle est venue la société Orange, a conclu en 1999 et 2001 deux conventions avec des câblo-opérateurs aux droits desquels vient la société NC Numéricable ; qu'à la suite d'une décision de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (l'ARCEP), reconnaissant les infrastructures du génie civil de la société France Télécom comme essentielles et imposant à celle-ci de faire droit à toute demande raisonnable d'accès à ces infrastructures dans des conditions transparentes et non discriminatoires, la société France Télécom a, sous l'égide de l'ARCEP, publié une offre d'accès GC FTTX ; que des difficultés étant survenues avec la société NC Numéricable pour harmoniser les conditions d'accès et aménager ses contrats, la société France Télécom a saisi l'ARCEP d'une demande de règlement du différend l'opposant à cet opérateur ; que la décision ordonnant la mise en conformité des contrats prise par l'ARCEP a été confirmée par un arrêt du 23 juin 2011, devenu irrévocable sur ce point ; que la société NC Numéricable a assigné la société France Télécom en responsabilité au titre des modifications apportées à ses contrats ;

Sur le second moyen du pourvoi principal :

Attendu que la société NC Numéricable fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes fondées sur la faute et la déloyauté de la société Orange alors, selon le moyen, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en se bornant à écarter toute fraude de la société Orange dans le cadre de la saisine de l'ARCEP, sans répondre aux conclusions de la société NC Numéricable qui soutenaient, pièces à l'appui, que la société Orange avait également commis une faute en se réservant, dans l'« offre GC Fttx » et les avenants du 12 décembre 2011, un traitement différent de celui réservé aux autres opérateurs, et en ne s'appliquant pas, dans les faits, les formalités imposées par ses soins à ces autres opérateurs, obtenant ainsi un avantage concurrentiel illicite, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que, dans le dispositif de ses conclusions, la société NC Numéricable, après avoir invoqué la modification substantielle des conditions contractuelles, par la société Orange, justifiant, selon elle, la résiliation des contrats aux torts de cette dernière, demandait à la cour d'appel de juger également que le comportement de cette société revêtait un caractère fautif et déloyal à son égard puis réclamait le paiement de dommages-intérêts, d'un montant global de 2 582 680 euros, sans distinguer, ni dans le dispositif ni dans les motifs de ses écritures, le préjudice résultant de la résiliation de celui résultant du comportement fautif invoqué ; que ces conclusions ne mettant pas la cour d'appel en mesure de statuer sur ses réclamations, la société NC Numéricable ne peut lui reprocher de n'y avoir pas répondu ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen du pourvoi principal ni sur le moyen unique du pourvoi incident, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens afférents à son pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mars deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société NC Numéricable (demanderesse au pourvoi principal).

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement ayant débouté la société NC Numericable au titre de ses demandes fondées sur les modifications contractuelles et d'AVOIR condamné la société NC Numericable à verser à la société Orange la somme de 300 000 € au titre des frais irrépétibles, tant de première instance que d'appel,

AUX MOTIFS PROPRES QUE la société NC Numericable conteste que les « règles d'ingénierie d'accès » définies par l'offre « GC Fttx » ne soient qu'un simple changement de dénomination des « clauses techniques » définies au cahier des charges (dénommé « Olivia ») des acquisitions de 1999 et 2001, lesquelles « clauses techniques » ne constituant, selon la société NC Numericable, que des règles de l'art à respecter pour l'exécution des travaux, pouvant certes évoluer au fil du temps à la discrétion de France Telecom (devenue Orange), mais ne concernant pas les conditions d'accès aux ouvrages ; qu'elle estime que les avenants régularisés le 12 décembre 2011 en exécution de l'injonction de l'ARCEP, ont substitué un régime d'interdiction de principe d'effectuer la moindre intervention sans l'autorisation préalable d'Orange au système contractuel originel d'autorisation permanente d'accès pour les réparations urgentes et de déclaration préalable pour les opérations de modernisation, la société NC Numericable en déduisant que lesdits avenants constituent une modification substantielle des contrats originels en nuisant « gravement à l'exploitation normale des réseaux cédés » ; que la demanderesse à la saisine estime que la contrepartie du prix payé dès l'origine (soit la contre-valeur de 700 millions d'euros environ), correspond à l'utilisation et à l'occupation des ouvrages de génie civil de France Telecom pour une durée de 20 ans selon des conditions d'accès simplifiées lui permettant, suivant les régimes de la déclaration préalable pour l'accès et de l'autorisation permanente d'accès pour les réparations urgentes, d'exploiter et de réaliser librement en toute indépendance les travaux d'entretien, de réparation et de modernisation des réseaux acquis ; qu'elle prétend que, sans ce régime spécifique d'accès, elle n'aurait pas payé un prix aussi important et estime que les avenants du 12 décembre 2011, imposés par l'ARCEP mais à la demande de France Telecom, suppriment ces régimes d'accès en lui imposant des conditions plus restrictives et plus contraignantes en renforçant le formalisme et en généralisant les procédures systématiques d'autorisation préalable avec l'allongement consécutifs des délais ; mais que, d'une part, la société NC Numericable affirme que, sans le régime spécifique d'accès, elle n'aurait pas payé un prix aussi important, sans cependant en déduire un moyen précis de défense ni articuler une demande spécifique ; que d'autre part, en application de l'article 1315 ancien du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, il appartient à la société NC Numericable de rapporter la preuve de l'existence des obligations dont elle demande l'exécution ; que, tant la convention NTL dite 1G (annexe 1 du protocole du 6 mai 1999) [pièce n° 1 de NC Numericable], que le contrat de génie civil du 18 mai 2001 (dit RAPP 16) [pièce n° 2 de NC Numericable], stipulent tout à la fois que : - un droit de passage est cédé pour 20 ans pour déployer les câbles dans le respect des prescriptions précisées dans la quatrième partie de la convention 1 G [paragraphe 2 (3ème partie, page 13, conditions d'établissement des réseaux rénovés] ce droit ne concernant que le réseau rénové [paragraphe 1 (4ème partie, page 18, droit de passage dans les installations de France Telecom], - un droit d'occuper les installations de génie civil de France Telecom nécessaires pour assurer la maintenance [article 3, contrat de génie civil du 18 mai 2001, page 4], - le droit de procéder à toute modification ou extension des infrastructures implantées dans les installations de génie civil de France Telecom en utilisant si nécessaire de nouveaux tuyaux sur des parcours éventuellement différents et de poser plusieurs câbles dans un même tuyau [paragraphe 1.6, page 17 cahier des charges 'Olivia'] ; que l'harmonisation de ces règles avec celles ultérieurement définies par l'offre « GC Fttx » n'a pas pour effet de modifier substantiellement les clauses contractuelles originelles ; que certes, le cahier des charges « Olivia » (annexé à la convention « RAPP 16 » et dont il n'est pas contesté qu'il a été étendu à la convention 1G) stipule (page 14) une autorisation permanente d'accès aux installations de génie civil de France Telecom contenant des câbles et équipements du réseau câblé, mais qu'il apparaît que les modifications résultant de l'offre « GC Fttx », prévoyant les déclarations d'études, de travaux ou de notification pour maintenance nécessitant un accusé réception de France Telecom, n'apparaissent pas comme substantiellement différentes, dès lors que l'accusé réception peut être automatique et que le formalisme supplémentaire en découlant permet une meilleure coordination, dont bénéficie également la société NC Numericable, entre les différents opérateurs devenus plus nombreux pour accéder aux installations de génie civil de l'opérateur historique ; que dès lors, la société NC Numericable ne démontre pas en quoi les règles d'ingénierie notifiées le 17 septembre 2010 (et formalisées dans les avenants du 12 décembre 2011) viennent substantiellement modifier les contrats initiaux de 1999 et 2001 en ce qui concerne l'accès primitivement prévu aux installations de génie civil de l'opérateur historique ; qu'en conséquence, les demandes de résiliation partielle des contrats et de restitution d'une partie du prix n'étant pas fondées, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a dit qu'il n'y a pas eu résiliation des contrats par la société France Telecom (aujourd'hui Orange) et a débouté la société NC Numericable de sa demande de restitution partielle du prix, étant observé par la cour que la demande d'expertise devient sans objet,

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ET PARTIELLEMENT ADOPTES QU'il n'est pas contesté que les règles d'ingénierie remplacent les clauses techniques qui existaient dans les « contrats », qu'elles concernent quasi exclusivement les fibres optiques, que Numericable et France Telecom ne pouvait douter lors de la signature de ces « contrats » d'une durée de 20 ans que notamment les clauses techniques étaient appelées à évoluer, que France Telecom a commencé dès 2008 à notifier à Numericable ces nouvelles règles d'ingénierie, que le tribunal n'a pas vu de différences notables entre les 4 versions successives de ces règles d'ingénierie, que Numericable avance que la 4eme version de ces règles d'ingénierie en date du 17.09.2010 diffère des 3 précédentes notamment en ce que « ces règles d'ingénierie s'appliquent à tout opérateur accédant aux installations de génie civil de France Telecom et notamment aux clients des offres d'accès aux installations de génie civil de France Telecom » alors que les versions précédentes précisaient que « ces règles d'ingénierie s'appliquent à tout opérateur accédant aux installations de génie civil de France Telecom pour les réseaux Fttx », que Numericable en déduit que France Telecom a imposé l'offre GC Fttx aux réseaux existants de Numericable par le truchement illicite des règles d'ingénierie et ce bien avant la décision du 4.11.2010 ; mais que dans les extraits du site internet de Numericable que fournit France Telecom dans son dossier de plaidoirie figure le nombre de logements connectés et parmi cela le nombre de logements connectés en fibre optique, qu'il se trouve donc que Numericable a un taux d'équipement de son parc en fibre optique de 87%, que la 4eme version ne peut donc constituer comme le prétend Numericable des restrictions mise par France Telecom du droit de Numericable d'accéder librement aux réseaux concernés par les contrats ; que, dans ces conditions le tribunal dira que les règles d'ingénierie ont peut-être modifié les « contrats de manière substantielle », ce que Numericable ne prouve pas, mais qu'au moment où prenait naissance cette instance le problème avait perdu toute actualité sinon tout objet et le tribunal déboutera Numericable de ce moyen ; que l'enrichissement sans cause que Numericable reproche à France Telecom trouve son origine non contestée dans les « contrats » et ne peut donc être sans cause, le tribunal déboutera Numlericable de ce moyen ; qu'il n'est pas contesté que Numericable continue d'intervenir dans le génie civil de France Telecom, qu'en audience de plaidoirie qui s'est tenue le 3 février 2012, et donc plus de 15 mois après la notification de la 4eme version des règles d'ingénierie et plus de 9 mois après l'arrêt de la cour, aucune critique ni plainte circonstanciée, étayée par des exemples concrets, n'a été évoqué sur les conséquences négatives de l'application de ces nouvelles règles d'ingénierie ; que le tribunal considère que France Telecom n'a pas résilié les « contrats» ni en fait ni en droit, la cour ayant statué sur le droit d'accès de Numericable non affecté par les aménagements contractuels décidés par l'ARCEP, et le tribunal sur les règles d'ingénierie qui n'ont pas radicalement changé la position respective des parties compte tenu notamment de l'important pourcentage du réseau de Numericable déjà transformé en fibre optique, et que certains aménagements pourraient s'avérer profitables pour Numericable notamment la prise en charge par France Telecom des coûts de tubage ; que le comportement de France Telecom n'est ni abusif, ni brutal ou déloyal à l'égard de Numericable ; que l'évaluation du préjudice fait par Numericable a été fait dans le cadre d'une résiliation des « contrats » et que la cour en ce qui concerne le droit d'accès et le tribunal en ce qui concerne les règles d'ingénierie statuent sur l'absence de résiliation ou de modifications conséquentes des contrats, que les contrats continuent à se poursuivre à l'heure actuelle, le tribunal déboutera Numericable de ces demandes, le préjudice n'existant pas sauf potentiellement sur 13 % du réseau et pour un temps réduit ce dont Numericable ne prouve pas que cela justifierait le remboursement des loyers payés d'avance et l'allocation de dommages et intérêts ; que Numericable qui apporte à l'appui de ces revendications le rapport de Mr L... H... du 5.10.2010 renforcée par une note additionnelle du 19.09.2011 fait ressortir que la résiliation par France Telecom des contrats d'accès au génie civil de France Telecom entraine un préjudice comprenant la perte de la valeur résiduelle des contrats, perte d'industrie et perte de valeur stratégique liées aux parts de marché perdues par Numericable, que le tribunal a statué sur la non résiliation des contrats par France Telecom, le tribunal déboutera Numericable de sa demande de voir le tribunal ordonner une expertise afin de compléter ou de confirmer les conclusions du rapport L... H...,

1- ALORS QUE la modification substantielle d'un contrat s'entend de celle qui a des incidences importantes sur la situation des parties ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que les avenants du 12 décembre 2011 imposés à l'exposante avaient substitué à une autorisation permanente d'accès aux installations de génie civil de France Telecom, prévue par les contrats initiaux, un système nécessitant une autorisation préalable de France Telecom, laquelle n'était pas nécessairement automatique, et un formalisme supplémentaire contraignant ; qu'en jugeant pourtant qu'il n'était pas justifié de modification substantielle des contrats initiaux, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

2- ALORS, en tout état de cause, QU'une partie ne peut se voir imposer une modification contractuelle à laquelle elle n'a pas consenti, peu important que cette modification soit ou non substantielle ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les avenants du 12 décembre 2011 imposés à l'exposante avaient modifié les contrats initiaux en substituant à une autorisation permanente d'accès aux installations de génie civil de France Telecom un système nécessitant une autorisation préalable de France Telecom, et en ajoutant un formalisme supplémentaire contraignant ; qu'en se fondant sur le fait que de telles modifications n'étaient pas substantielles et pouvaient éventuellement profiter à la société NC Numericable pour débouter l'exposante de ses demandes, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

3- ALORS QUE le juge ne peut pas dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, après avoir souligné dans ses conclusions que le prix payé par elle au titre des contrats « réseaux 1G » et « réseaux RAPP 16 » correspondait pour l'essentiel au prix d'accès au génie civil de France Telecom à des conditions préférentielles, la société NC Numericable en avait tiré pour conséquence expresse que la modification de ces conditions d'accès justifiait la restitution d'une partie du prix payé lors de la signature des contrats, avec réactualisation ; qu'en jugeant pourtant que la société NC Numericable ne déduisait aucun moyen et aucune demande de ses affirmations selon lesquelles le très important prix payé n'était que le corollaire de l'accès au génie civil de France Telecom à des conditions préférentielles, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'exposante, violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile.

4- ALORS QUE lorsque l'exécution du contrat, aux conditions initialement prévues, est devenue impossible, la perte est pour le débiteur qui ne peut plus exécuter ses obligations, peu important l'absence de faute ou de préjudice ; qu'en l'espèce, dès lors que l'exécution des contrats initiaux par la société Orange était devenue impossible, les conditions d'accès au génie civil ayant été modifiées par les avenants, la société Orange devait rembourser prorata temporis les sommes qu'elle avait perçues au titre des contrats initiaux qu'elle ne pouvait plus exécuter, peu important qu'elle soit ou non fautive, que la société NC Numericable justifie ou non d'un préjudice ou que les contrats aient, initialement, eu une cause ; qu'en jugeant au contraire, par motifs éventuellement adoptés, que la société NC Numericable n'avait pas droit au remboursement prorata temporis des sommes qu'elle avait versées au titre des contrats « réseaux 1G » et « réseaux RAPP 16 », qui ne pouvaient plus être exécutés du fait de la modification imposée par les avenants du 12 décembre 2011, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1184 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble les principes régissant la théorie des risques.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement ayant débouté la société NC Numericable au titre de ses demandes fondées sur la faute et la déloyauté de la société Orange et d'AVOIR condamné la société NC Numericable à verser à la société Orange la somme de 300 000 € au titre des frais irrépétibles, tant de première instance que d'appel,

AUX MOTIFS PROPRES QUE la société NC Numericable prétend aussi que la société Orange n'avait aucune obligation de saisir l'ARCEP et ne l'aurait fait, « que pour spolier son cocontractant de ses droits, en profitant abusivement de ses droits de propriétaire pour se livrer à des actes de concurrence déloyale » [conclusions page 57] et aussi afin de freiner le déploiement de la fibre optique pour lui permettre de rattraper son retard en la matière ; qu'elle en déduit que, ce faisant, la société Orange a commis une fraude à la loi en faisant usage « de moyens en apparence légaux pour obtenir un résultat illégal de modification contractuelle forcée sur la base de mensonges et de dissimulations avec l'intention de ne jamais compenser la perte subie par son cocontractant » [conclusions page 53] ; mais qu'il résulte des constatations précédentes, que la société France Telecom, devenue Orange : - en raison de la multiplication des opérateurs susceptibles de déployer un réseau câblé, s'est vue imposer, tant par l'Autorité de la concurrence, que par l'ARCEP, de faire droit à toute demande d'accès à ses ouvrages de génie civil dans des conditions transparentes et non discriminatoires, ce qui l'a contrainte à éditer des règles d'accès communes à tous les opérateurs, entraînant la nécessité d'une mise en harmonie des règles contractuelles antérieures bénéficiant à la société NC Numericable, - a saisi l'ARCEP, en application des dispositions de l'article L. 36-8 du code des postes et des communications électroniques (CPCE), du différent l'opposant à la société NC Numericable sur les conditions d'accès à une infrastructure passive permettant l'exploitation de réseaux de communications électroniques, de sorte que cette dernière, ne rapportant pas la démonstration de la véracité de ses allégations, doit être aussi déboutée de ses demandes correspondantes,

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'il n'est pas contesté que les règles d'ingénierie remplacent les clauses techniques qui existaient dans les « contrats », qu'elles concernent quasi exclusivement les fibres optiques, que Numericable et France Telecom ne pouvait douter lors de la signature de ces « contrats » d'une durée de 20 ans que notamment les clauses techniques étaient appelées à évoluer, que France Telecom a commencé dès 2008 à notifier à Numericable ces nouvelles règles d'ingénierie, que le tribunal n'a pas vu de différences notables entre les 4 versions successives de ces règles d'ingénierie, que Numericable avance que la 4eme version de ces règles d'ingénierie en date du 17.09.2010 diffère des 3 précédentes notamment en ce que « ces règles d'ingénierie s'appliquent à tout opérateur accédant aux installations de génie civil de France Telecom et notamment aux clients des offres d'accès aux installations de génie civil de France Telecom » alors que les versions précédentes précisaient que « ces règles d'ingénierie s'appliquent à tout opérateur accédant aux installations de génie civil de France Telecom pour les réseaux Fttx », que Numericable en déduit que France Telecom a imposé l'offre GC Fttx aux réseaux existants de Numericable par le truchement illicite des règles d'ingénierie et ce bien avant la décision du 4.11.2010 ; mais que dans les extraits du site internet de Numericable que fournit France Telecom dans son dossier de plaidoirie figure le nombre de logements connectés et parmi cela le nombre de logements connectés en fibre optique, qu'il se trouve donc que Numericable a un taux d'équipement de son parc en fibre optique de 87%, que la 4ème version ne peut donc constituer comme le prétend Numericable des restrictions mise par France Telecom du droit de Numericable d'accéder librement aux réseaux concernés par les contrats ; que, dans ces conditions le tribunal dira que les règles d'ingénierie ont peut-être modifié les « contrats de manière substantielle », ce que Numericable ne prouve pas, mais qu'au moment où prenait naissance cette instance le problème avait perdu toute actualité sinon tout objet et le tribunal déboutera Numericable de ce moyen ; que l'enrichissement sans cause que Numericable reproche à France Telecom trouve son origine non contestée dans les « contrats » et ne peut donc être sans cause, le tribunal déboutera Numlericable de ce moyen ; qu'il n'est pas contesté que Numericable continue d'intervenir dans le génie civil de France Telecom, qu'en audience de plaidoirie qui s'est tenue le 3 février 2012, et donc plus de 15 mois après la notification de la 4eme version des règles d'ingénierie et plus de 9 mois après l'arrêt de la cour, aucune critique ni plainte circonstanciée, étayée par des exemples concrets, n'a été évoqué sur les conséquences négatives de l'application de ces nouvelles règles d'ingénierie ; que le tribunal considère que France Telecom n'a pas résilié les « contrats» ni en fait ni en droit, la cour ayant statué sur le droit d'accès de Numericable non affecté par les aménagements contractuels décidés par l'ARCEP, et le tribunal sur les règles d'ingénierie qui n'ont pas radicalement changé la position respective des parties compte tenu notamment de l'important pourcentage du réseau de Numericable déjà transformé en fibre optique, et que certains aménagements pourraient s'avérer profitables pour Numericable notamment la prise en charge par France Telecom des coûts de tubage ; que le comportement de France Telecom n'est ni abusif, ni brutal ou déloyal à l'égard de Numericable ; que l'évaluation du préjudice fait par Numericable a été fait dans le cadre d'une résiliation des « contrats » et que la cour en ce qui concerne le droit d'accès et le tribunal en ce qui concerne les règles d'ingénierie statuent sur l'absence de résiliation ou de modifications conséquentes des contrats, que les contrats continuent à se poursuivre à l'heure actuelle, le tribunal déboutera Numericable de ces demandes, le préjudice n'existant pas sauf potentiellement sur 13 % du réseau et pour un temps réduit ce dont Numericable ne prouve pas que cela justifierait le remboursement des loyers payés d'avance et l'allocation de dommages et intérêts ; que Numericable qui apporte à l'appui de ces revendications le rapport de Mr L... H... du 5.10.2010 renforcée par une note additionnelle du 19.09.2011 fait ressortir que la résiliation par France Telecom des contrats d'accès au génie civil de France Telecom entraine un préjudice comprenant la perte de la valeur résiduelle des contrats, perte d'industrie et perte de valeur stratégique liées aux parts de marché perdues par Numericable, que le tribunal a statué sur la non résiliation des contrats par France Telecom, le tribunal déboutera Numericable de sa demande de voir le tribunal ordonner une expertise afin de compléter ou de confirmer les conclusions du rapport L... H...,

ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en se bornant à écarter toute fraude de la société Orange dans le cadre de la saisine de l'ARCEP, sans répondre aux conclusions de l'exposante qui soutenaient, pièces à l'appui, que la société Orange avait également commis une faute en se réservant, dans l'« offre GC Fttx » et les avenants du 12 décembre 2011, un traitement différent de celui réservé aux autres opérateurs, et en ne s'appliquant pas, dans les faits, les formalités imposées par ses soins à ces autres opérateurs, obtenant ainsi un avantage concurrentiel illicite, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Orange (demanderesse au pourvoi incident).

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la société Orange de sa demande tendant à obtenir la condamnation de la société NC Numéricâble à lui verser des dommages et intérêts ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE la société Orange sollicite à nouveau une indemnité de 50 millions d'euros en réparation d'un préjudice moral, d'image et financier résultant, selon elle, de l'abus de la société NC Numéricâble d'ester en justice et demande en outre la condamnation de celle-ci à payer une amende civile d'un montant de 3.000 euros en application de l'article 32-1 du code de procédure civile ; que l'amende civile prévue par l'article précité est à la disposition, non des parties, mais de la seule juridiction et que la cour n'estime pas nécessaire d'en faire application en l'espèce ; que la demande de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral, d'image et financier se fondant sur une faute civile délictuelle résultant du comportement procédural de la société NC Numéricâble, la société Orange n'est pas fondée, pour justifier cette demande, à invoquer un éventuel défaut de respect des clauses contractuelles d'obligation de discussions préalables en cas de litige ; que, par ailleurs, le droit de saisir les juridictions pour la résolution des litiges étant un droit constitutionnellement garanti, la société Orange, en se bornant à prétendre, même si la société NC Numéricâble succombe dans ses prétentions, que celle-ci « ne peut pas sérieusement arguer avoir subi des modifications substantielles [...] en ayant défendu des thèses fondamentalement incorrectes [...] » sans préciser en quoi, compte tenu de l'importance de la société Orange, le montant indemnitaire demandé procédait de la volonté d'éliminer un concurrent, la société Orange ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de la faute qu'aurait commise la société NC Numéricâble en saisissant les juridictions de manière à faire dégénérer en un abus, son droit d'ester en justice, de sorte que le jugement doit aussi être confirmé de ce chef ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les demandes de Numéricâble étaient en rapport avec ses arguments à savoir que les contrats avaient été résiliés par France Telecom ; la cour en ce qui concerne les droits d'accès et le tribunal en ce qui concerne les règles d'ingénierie ont statué différemment, mais Numéricâble ne saurait être tenue responsable des conséquences pour France Telecom d'avoir demandé en justice des réparations à hauteur de ses dommages estimés ;

1°) ALORS QUE toute faute dans l'exercice des voies de droit est susceptible d'engager la responsabilité de son auteur ; qu'en rejetant la demande formée par la société Orange en indemnisation des préjudices nés de l'abus de la société NC Numéricâble dans l'exercice de son droit d'agir en justice, motif pris qu'elle ne précise pas « en quoi, compte tenu de l'importance de la société Orange, le montant indemnitaire demandé procédait de la volonté d'éliminer un concurrent » (arrêt attaqué, p. 8 in fine), la cour d'appel, qui a ainsi exigé de la société Orange qu'elle rapporte la preuve de l'intention de nuire de la société NC Numéricâble, a violé l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction applicable, devenu l'article 1240 du même code ;

2°) ALORS QUE toute faute dans l'exercice des voies de droit est susceptible d'engager la responsabilité de son auteur ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la société NC Numéricâble n'avait pas abusé de son droit d'agir en justice en sollicitant la réparation d'un préjudice exorbitant, à hauteur de la somme de 2.582.680.000 euros en principal (arrêt attaqué, p. 3), qu'elle savait sans commune mesure avec la nature et le périmètre des modifications contractuelles imposées par l'ARCEP dont elle se plaignait et qui représentait près de dix-sept fois son résultat moyen d'exploitation sur les quatre dernières années, en s'appuyant exclusivement sur un bref rapport d'expertise dépourvu d'annexes et de références et se fondant uniquement sur des hypothèses non vérifiées et dépassées, dès lors que la société Orange était notamment tenue, en exécution de son obligation d'information permanente, de rendre publique cette action judiciaire engagée à son encontre, obligation à laquelle elle s'est conformée dès le 25 février 2011, la Presse s'étant emparée de cette information en commentant précisément le montant de la réparation réclamée par la société NC Numéricâble et l'action Orange ayant perdu 1,5 point concomitamment à la révélation de cette information, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction applicable, devenu l'article 1240 du même code ;

3°) ALORS QUE dans ses dernières conclusions d'appel (pp. 65 et s.), la société Orange a non seulement fait état de la mauvaise foi de la société NC Numéricâble dans le déclenchement des procédures judiciaires et arbitrales et de son abus dans l'exercice de son droit d'agir en justice, mais s'est également prévalue d'une rupture de mauvaise foi, par cette société, des discussions contractuelles, précisant qu'elle avait ainsi manqué à l'obligation générale de bonne foi dans l'exécution des contrats et lui avait causé un préjudice (p. 65) ; qu'ainsi, en écartant la demande indemnitaire de la société Orange en réparation d'un préjudice moral, d'image et financier, motif pris que « se fondant sur une faute civile délictuelle résultant du comportement procédural de la société NC Numéricâble, la société Orange n'est pas fondée, pour justifier cette demande, à invoquer un éventuel défaut de respect des clauses contractuelles d'obligation de discussions préalables en cas de litige », la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QU'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la société NC Numéricâble n'avait pas commis une faute, distincte du caractère abusif de son action en justice, en rompant brutalement et sans motif légitime les négociations engagées pour mettre les contrats conclus avec elle en conformité avec l'offre Gc Fttx, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable, devenu l'article 1104 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-23354
Date de la décision : 27/03/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 16 juin 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 27 mar. 2019, pourvoi n°17-23354


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.23354
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