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13/03/2019 | FRANCE | N°17-24156

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 mars 2019, 17-24156


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en exécution de contrats de travail temporaire non successifs, Mme U... a effectué, entre le 10 juillet 2000 et le 29 août 2014, 311 missions au sein de la société Prodis, devenue la société VWR international ; que par arrêt mixte, rendu par la cour d'appel d'Orléans le 4 octobre 2016 et passé en force de chose jugée, la salariée a obtenu, dans ses rapports avec l'entreprise utilisatrice, la requalification de ses contrats de mission en un contrat à durée indéterminée,

ayant pris effet le 10 juillet 2000 ;

Sur les premier à troisième moye...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en exécution de contrats de travail temporaire non successifs, Mme U... a effectué, entre le 10 juillet 2000 et le 29 août 2014, 311 missions au sein de la société Prodis, devenue la société VWR international ; que par arrêt mixte, rendu par la cour d'appel d'Orléans le 4 octobre 2016 et passé en force de chose jugée, la salariée a obtenu, dans ses rapports avec l'entreprise utilisatrice, la requalification de ses contrats de mission en un contrat à durée indéterminée, ayant pris effet le 10 juillet 2000 ;

Sur les premier à troisième moyens du pourvoi principal de la salariée et sur les deux moyens du pourvoi incident de l'employeur :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le quatrième moyen du pourvoi principal de la salariée :

Vu l'article L. 1251-40 du code du travail, dans sa rédaction applicable ;

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de dommages et intérêts en réparation de son préjudice lié à ses droits à la retraite, l'arrêt énonce qu'elle ne justifie pas de l'impossibilité dans laquelle elle se serait trouvée de continuer à travailler en intérim et ne produit qu'une seule candidature à un emploi dans la boucherie L... écartée par un courrier du 18 novembre 2014, qu'elle n'établit donc pas qu'elle a effectué des recherches sérieuses d'emploi et que la cessation de la relation contractuelle l'aurait inéluctablement privée des droits à la retraite auxquels elle aurait pu prétendre si elle avait travaillé plus longtemps, que par ailleurs, ce préjudice se trouve déjà inclus dans les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui lui ont été alloués, que sa demande de dommages et intérêts destinée à compenser la perte de droits à la retraite causée par la fin de la relation contractuelle sera en conséquence rejetée tant en ce qui concerne le régime de base que le régime complémentaire ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors que par l'effet de la requalification de ses contrats de travail temporaire en un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 10 juillet 2000, la salariée était réputée avoir occupé un emploi au sein de l'entreprise utilisatrice depuis cette date, et que l'intéressée faisait valoir, dans ses conclusions oralement soutenues, qu'elle avait subi un préjudice de retraite résultant de la privation des avantages liés au fait d'être titulaire d'un contrat à durée indéterminée dès le début de la relation contractuelle, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs inopérants relatifs à la rupture du contrat de travail, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme U... de sa demande de dommages et intérêts en réparation de son préjudice lié à ses droits à la retraite, l'arrêt rendu le 27 juin 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Condamne la société VWR international aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société VWR international à payer la somme de 3 000 euros à Mme U... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize mars deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme U...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué, infirmatif de ces chefs, d'avoir condamné la société VWR International, employeur, à verser à Mme B..., salariée, les sommes de 43.070,78 € à titre de rappels de salaire, 1.793 € à titre d'indemnité de requalification des contrats temporaires en contrat à durée indéterminée, 3.585,35 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 358,53 € au titre des congés payés afférents, 5.976,66 € à titre d'indemnité de licenciement, 22.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et celle de 6.000 € en dédommagement des avantages offerts par le comité d'entreprise ;

AUX MOTIFS QUE, sur le rappel de salaire, l'accord d'aménagement et de réduction du temps de travail du 26 septembre 2007 sur lequel la salariée fonde sa demande de rappel de salaire est libellé comme suit : - Article 2 : durée annuelle du travail : « au regard de l'ancien accord ARTT, le temps de travail des collaborateurs soumis au décompte horaire n'est pas modifié sur l'année soit une durée de 1.558 h de travail par an (+ 7 h au titre de la journée de solidarité) ; la moyenne hebdomadaire sur l'année 34 h et 20 centièmes est donc conservée mais avec l'attribution de 15 jours de repos RTT par année civile », - Article 3 : durée hebdomadaire du travail : « La durée annuelle du temps de travail étant inchangée, l'attribution de 15 jours de repos par année civile a pour conséquence une diminution du temps de travail hebdomadaire et journalier. La durée hebdomadaire de travail à effectuer par collaborateur passe donc à 36 h 40 mn au lieu de 38 h par semaine de travail ; la durée journalière du travail à effectuer, par collaborateur, passe donc à 7 h 20 mn au lieu de 7 h 36 mn par jour de travail » ; qu'il résulte de ces dispositions que la durée du travail Jean-Christophe BALAT Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation [...] fixée à 38 heures par semaine dans le premier de ces accords et à 36,40 heures dans le second avec 15 jours de congés RTT se limite à 1.558 heures par an ; que le décompte des heures restant dues doit donc s'effectuer sur cette base et non sur un total de 1.778,40 h ; que, par ailleurs, le montant des sommes restant dues doit s'apprécier sur la base du taux horaire du dernier contrat à savoir 1.600,56 € pour 148,20 heures soit encore 10,80 € ; qu'il convient d'ajouter à cette somme le montant des primes d'ancienneté dont le taux moyen sur l'ensemble de la période sera apprécié à 8% du montant total des salaires dus ; qu'il y a lieu par ailleurs de déduire de ce total la somme de 1.644 € correspondant au salaire des 31 jours d'interruption au cours de la période ; que, compte tenu de ces éléments, le montant de la créance de Mme B... doit être fixé à la somme de : (3.831 heures x 10,80 € x 108%) – 1.644,00 € = 43.070,78 € ; que, sur le montant du salaire, compte tenu du taux horaire du dernier contrat et du nombre d'heures évalué supra à 1.558 par an soit 34,20 heures par semaine ou 148,20 heures par mois et de l'ancienneté de la salariée, son salaire mensuel moyen sera évalué à : 148,20 h x 10,80 € x 112% = 1.792,62 € ; que, sur l'absence d'accès aux oeuvres du comité d'entreprise, rien ne permet à la société VWR International d'affirmer que Mme B... n'aurait pas profité des avantages accordés aux salariés par l'intermédiaire du comité d'entreprise si elle en avait eu la possibilité ; que ces avantages ont été évalués à 4,09% de la rémunération brute des salariés en se fondant sur les bilans sociaux individuels délivrés annuellement aux salariés de l'entreprise ; qu'il ressort de ces pièces que, en 2013, « l'entreprise VWR International a alloué un budget de 1.112.421,28 € soit 4,22% de la masse salariale au financement collectif des activités sociales et culturelles de ses comités d'établissement» ; qu'il convient toutefois d'observer que Mme B... n'aurait profité que d'une partie de l'ensemble des avantages alloués par l'intermédiaire du comité d'entreprise qui finance une multitude d'activités et de produits qui intéressent des publics très divers et des périodes très variées de l'année ; que, compte tenu de cet élément et du salaire mensuel de la salariée, la perte de cet avantage sur la durée de la relation contractuelle sera plus justement estimée à 6.000 € ; que, sur le préjudice de retraite, Mme B... ne justifie pas de l'impossibilité dans laquelle elle se serait trouvée de continuer à travailler en intérim et ne produit qu'une seule candidature à un emploi dans la boucherie L... écartée par un courrier du 18 novembre 2014 ; qu'elle n'établit donc pas qu'elle a effectué des recherches sérieuses d'emploi et que la cessation de la relation contractuelle l'aurait inéluctablement privée des droits à la retraite auxquels elle aurait pu prétendre si elle avait travaillé plus longtemps ; que, par ailleurs, ce préjudice se trouve déjà inclus dans les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui lui ont été alloués ; que sa demande de dommages-intérêts destinée à compenser la perte de droits à la retraite causée par la fin de la relation contractuelle sera en conséquence rejetée tant en ce qui concerne le régime de base que le régime complémentaire ; que, sur les indemnités de rupture de la relation de travail, la requalification des contrats de travail temporaires en contrat à durée indéterminée a pour conséquence que la société VWR International est redevable à Mme B... de l'indemnité de requalification du contrat instituée par l'article L.1245-1 du code du travail ainsi que des indemnités de préavis, de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que, compte tenu de ce qui précède, il sera attribué à Mme B... les sommes de 3.585,35 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, soit l'équivalent de 2 mois de salaire, ainsi que les congés payés afférents à hauteur de 328,53 €, et 5.976,66 € au titre de l'indemnité de licenciement eu égard au montant du salaire moyen ci-dessus établi, soit 1.792,62 €, et des dispositions de l'article R.1234-2 du code du travail ; que le montant des dommages-intérêts sera évalué en fonction de ce salaire, de l'ancienneté et de l'âge de la salariée, à la somme de 22.000 € ;

ALORS QUE, par l'effet de la requalification des contrats d'intérim en contrat à durée indéterminée, le salarié est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de sa première embauche par l'entreprise utilisatrice ; que, pour fixer à 1.792,62 € le salaire mensuel moyen de Mme B... et calculer en conséquence les rappels de salaire, l'indemnité de requalification, l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, l'indemnité de licenciement, les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et ceux en contrepartie des avantages offerts par le comité d'entreprise, la cour d'appel a retenu un taux horaire de base de 10,80 € correspondant au taux horaire du dernier contrat de mission de la salariée ; qu'en statuant ainsi, cependant que, par l'effet de la requalification de ses contrats de mission en contrat à durée indéterminée à temps plein, Mme B... était en droit d'obtenir, comme elle le demandait, la reconstitution de sa carrière ainsi que la régularisation de sa rémunération, elle a violé les articles L.1221-1, L.1245-1, L.1245-2, L.1234-5, L.1234-9 et L.1235-3 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société VWR International, employeur, à verser à Mme B..., salariée, la somme de 43.070,78 € à titre de rappels de salaire ;

AUX MOTIFS QUE l'accord d'aménagement et de réduction du temps de travail du 26 septembre 2007 sur lequel la salariée fonde sa demande de rappel de salaire est libellé comme suit :

- Article 2 : durée annuelle du travail : « au regard de l'ancien accord ARTT, le temps de travail des collaborateurs soumis au décompte horaire n'est pas modifié sur l'année soit une durée de 1.558 h de travail par an (+ 7 h au titre de la journée de solidarité) ; la moyenne hebdomadaire sur l'année 34 h et 20 centièmes est donc conservée mais avec l'attribution de 15 jours de repos RTT par année civile »,

- Article 3 : durée hebdomadaire du travail : « La durée annuelle du temps de travail étant inchangée, l'attribution de 15 jours de repos par année civile a pour conséquence une diminution du temps de travail hebdomadaire et journalier. La durée hebdomadaire de travail à effectuer par collaborateur passe donc à 36 h 40 mn au lieu de 38 h par semaine de travail ; la durée journalière du travail à effectuer, par collaborateur, passe donc à 7 h 20 mn au lieu de 7 h 36 mn par jour de travail » ; qu'il résulte de ces dispositions que la durée du travail fixée à 38 heures par semaine dans le premier de ces accords et à 36,40 heures dans le second avec 15 jours de congés RTT se limite à 1.558 heures par an ; que le décompte des heures restant dues doit donc s'effectuer sur cette base et non sur un total de 1.778,40 h ; que, par ailleurs, le montant des sommes restant dues doit s'apprécier sur la base du taux horaire du dernier contrat à savoir 1.600,56 € pour 148,20 heures soit encore 10,80 € ; qu'il convient d'ajouter à cette somme le montant des primes d'ancienneté dont le taux moyen sur l'ensemble de la période sera apprécié à 8% du montant total des salaires dus ; qu'il y a lieu par ailleurs de déduire de ce total la somme de 1.644 € correspondant au salaire des 31 jours d'interruption au cours de la période ; que, compte tenu de ces éléments, le montant de la créance de Mme B... doit être fixé à la somme de : (3.831 heures x 10,80 € x 108%) – 1.644,00 € = 43.070,78 € ;

ALORS, D'UNE PART, QUE, par l'effet de la requalification des contrats d'intérim en contrat à durée indéterminée, le salarié est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de sa première embauche par l'entreprise utilisatrice ; qu'en déduisant du rappel de salaires dû à Mme B... une « somme de 1.644 € correspondant au salaire des 31 jours d'interruption au cours de la période », sans constater que la société VWR International apportait la preuve que la salariée ne se tenait pas à sa disposition lors de cette période d'interruption, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles L.1221-1, L.1245-1, L.1245-2 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE, par l'effet de la requalification des contrats d'intérim en contrat à durée indéterminée, le salarié est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de sa première embauche par l'entreprise utilisatrice et est en droit de se prévaloir d'une ancienneté remontant à cette date ; qu'en calculant le rappel de prime d'ancienneté sur la base uniquement des heures restant dues à Mme B..., évaluées à 3.831 heures par l'arrêt attaqué, et non sur la totalité de son temps de travail depuis le jour de sa première embauche par la société VWR International, la cour d'appel a violé les articles L.1221-1, L.1245-1, L.1245-2 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable ;

ET ALORS, ENFIN, QUE le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur ; qu'en condamnant la société VWR International à payer à Mme B... un rappel de salaires d'un montant de 43.070,78 € sans assortir cette condamnation d'une condamnation complémentaire de l'employeur en paiement des congés payés afférents, la cour d'appel a violé les articles L.1221-1, L.1245-1, L.1245-2, L3141-1, L3141-3 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société VWR International, employeur, à verser à Mme B..., salariée, la somme de 6.000 € en dédommagement des avantages offerts par le comité d'entreprise ;

AUX MOTIFS QUE rien ne permet à la société VWR International d'affirmer que Mme B... n'aurait pas profité des avantages accordés aux salariés par l'intermédiaire du comité d'entreprise si elle en avait eu la possibilité ; que ces avantages ont été évalués à 4,09% de la rémunération brute des salariés en se fondant sur les bilans sociaux individuels délivrés annuellement aux salariés de l'entreprise ; qu'il ressort de ces pièces que, en 2013, « l'entreprise VWR International a alloué un budget de 1.112.421,28 € soit 4,22% de la masse salariale au financement collectif des activités sociales et culturelles de ses comités d'établissement » ; qu'il convient toutefois d'observer que Mme B... n'aurait profité que d'une partie de l'ensemble des avantages alloués par l'intermédiaire du comité d'entreprise qui finance une multitude d'activités et de produits qui intéressent des publics très divers et des périodes très variées de l'année ; que, compte tenu de cet élément et du salaire mensuel de la salariée, la perte de cet avantage sur la durée de la relation contractuelle sera plus justement estimée à 6.000 € ;

ALORS QUE tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre les salariés ; que, pour limiter à 6.000 € le montant du dédommagement accordé à Mme B..., la cour d'appel a retenu que les avantages offerts par le comité d'entreprise ont été évalués à 4,09% de la rémunération brute des salariés en se fondant sur les bilans sociaux individuels délivrés annuellement aux salariés de l'entreprise, mais qu'il y avait lieu de réduire le montant des dommages-intérêts dus à ce titre à Mme B... dès lors qu'elle n'aurait profité que d'une partie de l'ensemble des avantages alloués par l'intermédiaire du comité d'entreprise qui finance une multitude d'activités et de produits qui intéressent des publics très divers et des périodes très variées de l'année ; qu'en se déterminant ainsi, sans préciser en quoi Mme B... ne se trouvait pas dans la même situation que celle des salariés auxquels elle se comparaît, lesquels ne profitaient jamais chacun que d'une partie des avantages diversifiés offerts par l'intermédiaire du comité d'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du principe d'égalité de traitement, ensemble les articles L.3221-2, L.3221-3 du code du travail et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction en vigueur.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir débouté Mme B..., salariée, de sa demande de condamnation de la société VWR International, employeur, en paiement de dommages-intérêts au titre de son préjudice complémentaire de retraite ;

AUX MOTIFS QUE Mme B... ne justifie pas de l'impossibilité dans laquelle elle se serait trouvée de continuer à travailler en intérim et ne produit qu'une seule candidature à un emploi dans la boucherie L... écartée par un courrier du 18 novembre 2014 ; qu'elle n'établit donc pas qu'elle a effectué des recherches sérieuses d'emploi et que la cessation de la relation contractuelle l'aurait inéluctablement privée des droits à la retraite auxquels elle aurait pu prétendre si elle avait travaillé plus longtemps ; que, par ailleurs, ce préjudice se trouve déjà inclus dans les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui lui ont été alloués ; que sa demande de dommages-intérêts destinée à compenser la perte de droits à la retraite causée par la fin de la relation contractuelle sera en conséquence rejetée tant en ce qui concerne le régime de base que le régime complémentaire ;

ALORS, D'UNE PART, QUE, par l'effet de la requalification des contrats d'intérim en contrat à durée indéterminée, le salarié est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de sa première embauche par l'entreprise utilisatrice ; que, pour débouter Mme B... de sa demande de dommages-intérêts en réparation de son préjudice complémentaire de retraite, la cour d'appel a retenu qu'elle n'établissait pas que la cessation de la relation contractuelle l'aurait inéluctablement privée des droits à la retraite auxquels elle aurait pu prétendre si elle avait travaillé plus longtemps ; qu'en statuant ainsi, cependant que, par l'effet de la requalification de ses contrats de mission en contrat à durée indéterminée à temps plein à partir du 10 juillet 2000, la salariée était en droit d'obtenir la reconstitution de sa carrière en matière de retraite et de retraite complémentaire, la cour d'appel a violé les articles L.1221-1, L.1245-1, L.1245-2 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable ;

ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'indemnité de licenciement correspond à la réparation du préjudice causé au salarié par la perte de son emploi ; qu'en retenant, pour débouter Mme B... de sa demande de dommages-intérêts en réparation de son préjudice complémentaire de retraite, que ce préjudice se trouvait déjà inclus dans les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui lui avaient été alloués, la cour d'appel a violé les articles L.1245-1, L.1245-2 et L.1234-9 du code du travail.
Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société VWR international

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société VWR International à verser à Mme B... les sommes de 43.070,78 euros à titre de rappel de salaire, 1.793 euros à titre d'indemnité de requalification des contrats temporaires en contrat à durée indéterminée, 3.585,35 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 358,53 euros au titre des congés payés afférents, 5.976,66 euros à titre d'indemnité de licenciement, 22.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

AUX MOTIFS QUE « sur le rappel de salaire, l'accord d'aménagement et de réduction du temps de travail du 26 septembre 2007 sur lequel la salariée fonde sa demande de rappel de salaire est libellé comme suit : - Article 2 : durée annuelle du travail : « au regard de l'ancien accord ARTT, le temps de travail des collaborateurs soumis au décompte horaire n'est pas modifié sur l'année soit une durée de 1.558 h de travail par an (+ 7 h au titre de la journée de solidarité) ; la moyenne hebdomadaire sur l'année 34 h et 20 centièmes est donc conservée mais avec l'attribution de 15 jours de repos RTT par année civile », - Article 3 : durée hebdomadaire du travail : « La durée annuelle du temps de travail étant inchangée, l'attribution de 15 jours de repos par année civile a pour conséquence une diminution du temps de travail hebdomadaire et journalier. La durée hebdomadaire de travail à effectuer par collaborateur passe donc à 36 h 40 mn au lieu de 38 h par semaine de travail ; la durée journalière du travail à effectuer, par collaborateur, passe donc à 7 h 20 mn au lieu de 7 h 36 mn par jour de travail » ; qu'il résulte de ces dispositions que la durée du travail fixée à 38 heures par semaine dans le premier de ces accords et à 36,40 heures dans le second avec 15 jours de congés RTT se limite à 1.558 heures par an ; que le décompte des heures restant dues doit donc s'effectuer sur cette base et non sur un total de 1.778,40 h ; que, par ailleurs, le montant des sommes restant dues doit s'apprécier sur la base du taux horaire du dernier contrat à savoir 1.600,56 € pour 148,20 heures soit encore 10,80 € ; qu'il convient d'ajouter à cette somme le montant des primes d'ancienneté dont le taux moyen sur l'ensemble de la période sera apprécié à 8% du montant total des salaires dus ; qu'il y a lieu par ailleurs de déduire de ce total la somme de 1.644 € correspondant au salaire des 31 jours d'interruption au cours de la période ; que, compte tenu de ces éléments, le montant de la créance de Mme B... doit être fixé à la somme de : (3.831 heures x 10,80 € x 108%) – 1.644,00 € =43.070,78 € ; que, sur le montant du salaire, compte tenu du taux horaire du dernier contrat et du nombre d'heures évalué supra à 1.558 par an soit 34,20 heures par semaine ou 148,20 heures par mois et de l'ancienneté de la salariée, son salaire mensuel moyen sera évalué à : 148,20 h x 10,80 € x 112% = 1.792,62 € ; que, sur les indemnités de rupture de la relation de travail, la requalification des contrats de travail temporaires en contrat à durée indéterminée a pour conséquence que la société VWR International est redevable à Mme B... de l'indemnité de requalification du contrat instituée par l'article L.1245-1 du code du travail ainsi que des indemnités de préavis, de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que, compte tenu de ce qui précède, il sera attribué à Mme B... les sommes de 3.585,35 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, soit l'équivalent de 2 mois de salaire, ainsi que les congés payés afférents à hauteur de 328,53 €, et 5.976,66 € au titre de l'indemnité de licenciement eu égard au montant du salaire moyen ci-dessus établi, soit 1.792,62 €, et des dispositions de l'article R.1234-2 du code du travail ; que le montant des dommages-intérêts sera évalué en fonction de ce salaire, de l'ancienneté et de l'âge de la salariée, à la somme de 22.000 € »,

1/ ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les termes du litige ; qu'en l'espèce, pour déterminer le rappel de salaire dû à Mme B... pour la période courant de 2000 à 2014, les parties s'accordaient pour opérer un calcul prenant en compte un taux horaire variable, augmentant progressivement chaque année depuis le début de la relation contractuelle jusqu'à son terme (production n°6 et tableau établi par la société dans ses conclusions d'appel p. 6 et 7) ; qu'en appliquant un taux horaire fixe de 10,80 euros pour la totalité de la durée de la relation contractuelle, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile,

2/ ALORS QUE lorsqu'un salarié sollicite un rappel de salaire, il doit être tenu compte de l'évolution du taux horaire applicable au fur et à mesure du déroulement de la relation contractuelle ; qu'en l'espèce, les parties s'accordaient pour tenir compte d'une progression du taux horaire au cours des quatorze années concernées par le rappel de salaires litigieux ; que la cour d'appel, après avoir requalifié les contrats de mission en un contrat à durée indéterminée, a calculé le rappel de salaires dû entre 2000 et 2014 en prenant pour base un taux horaire unique de 10,80 euros pour l'intégralité de la période, correspondant au taux horaire du dernier contrat de mission conclu en 2014 ; qu'en n'expliquant pas d'où il résultait qu'un tel taux horaire fixe avait vocation à s'appliquer dès l'année 2000, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1245-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société VWR International à verser à Mme B... la somme de 6.000 euros en dédommagement des avantages offerts par le comité d'entreprise ainsi que 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

AUX MOTIFS QUE : « Sur l'absence d'accès aux oeuvres du comité d'entreprise. Rien ne permet à la société VWR INTERNATIONAL d'affirmer que Mme B... n'aurait pas profité des avantages accordés aux salariés par l'intermédiaire du comité d'entreprise si elle en avait eu la possibilité. Ces avantages ont été évalués à 4,09 % de la rémunération brute des salariés en se fondant sur les bilans sociaux individuels délivrés annuellement aux salariés de l'entreprise. Il ressort de ces pièces que en 2013 'l'entreprise VWR international a alloué un budget de 1 112 421,28 € soit 4,22 % de la masse salariale au financement collectif des activités sociales et culturelles de ses comités d'établissement'. Il convient toutefois d'observer que Mme B... n'aurait profité que d'une partie de l'ensemble des avantages alloués par l'intermédiaire du comité d'entreprise qui finance une multitude d'activités et de produits qui intéressent des publics très divers et des périodes très variées de l'année. Compte tenu de cet élément et du salaire mensuel de la salariée, la perte de cet avantage sur la durée de la relation contractuelle sera plus justement estimée à 6 000,00 €. »

1/ ALORS QU'il appartient au salarié qui prétend avoir subi un préjudice de rapporter la preuve de celui-ci ; qu'en l'espèce, la salariée soutenait avoir été privé des avantages offerts par l'intermédiaire du comité d'entreprise; qu'en retenant, pour lui allouer des dommages et intérêts à ce titre, que rien ne permettait d'affirmer que la salariée n'aurait pas profité des avantages accordés aux salariés par l'intermédiaire du comité d'entreprise si elle en avait eu la possibilité, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil, devenu l'article 1353 du même code.

2/ ALORS QUE les jugements doivent être motivés; qu'en retenant péremptoirement que la salariée aurait profité d'une partie de l'ensemble des avantages alloués par l'intermédiaire du comité d'entreprise, sans aucunement préciser l'élément lui permettant de procéder à une telle affirmation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-24156
Date de la décision : 13/03/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 27 juin 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 mar. 2019, pourvoi n°17-24156


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.24156
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