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07/03/2019 | FRANCE | N°18-11741

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 07 mars 2019, 18-11741


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. et Mme F... et à la Caisse meusienne d'assurances mutuelles du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Eurocéramique et M. R... ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1792 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 2 mars 2017), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ, 7 novembre 2012, pourvoi n° 11-20.532), que M. et Mme F..., propriétaires d'une maison d'habitation détruite par un incendie, et la Caisse meusienne d'assura

nces mutuelles (la CMAM) ont, après expertise, assigné la société Euroceramique, charg...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. et Mme F... et à la Caisse meusienne d'assurances mutuelles du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Eurocéramique et M. R... ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1792 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 2 mars 2017), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ, 7 novembre 2012, pourvoi n° 11-20.532), que M. et Mme F..., propriétaires d'une maison d'habitation détruite par un incendie, et la Caisse meusienne d'assurances mutuelles (la CMAM) ont, après expertise, assigné la société Euroceramique, chargée des travaux de remplacement d'un insert, en indemnisation de leurs préjudices ; que la SMABTP, assureur décennal de cette société, est intervenue volontairement à l'instance ;

Attendu que, pour rejeter ces demandes, l'arrêt retient qu'après avoir déposé un foyer fermé installé par M. F..., l'entreprise Eurocéramique a mis en place un nouvel insert en conservant l'habillage décoratif de cheminée et le conduit principal d'évacuation des fumées, que ses prestations comprenaient, en fourniture et en pose, l'insert, le conduit de raccordement, la pièce jonction de raccordement entre conduit simple paroi et conduit double paroi existant et l'exécution d'une hotte en plaques de plâtre sur ossature métallique, qu'il en découle qu'elle n'a pas exécuté l'installation d'un ouvrage faisant corps avec la construction et ne pouvant en être dissocié et qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il rejette les demandes fondées sur la présomption de responsabilité des constructeurs de l'article 1792 du code civil ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que le désordre affectant l'insert avait causé un incendie ayant intégralement détruit l'habitation de sorte qu'il importait peu que l'insert eût été dissociable ou non, d'origine ou installé sur existant, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;

Condamne la SMABTP aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SMABTP et la condamne à payer à M. et Mme F... et à la Caisse meusienne d'assurances mutuelles la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. et Mme F... et la Caisse Meusienne d'assurances mutuelles.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement rendu le 15 décembre 2005 par le tribunal de grande instance de Verdun en ce qu'il avait rejeté les demandes de M. et Mme F... fondées sur la présomption de responsabilité des constructeurs et tendant à l'application à leur profit de la garantie décennale ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur la garantie décennale, il ressort des conclusions des appelants que leur action à l'encontre de la compagnie d'assurances SMABTP, prise en qualité d'assureur de la SARL Eurocéramique en liquidation judiciaire selon jugement du 7 juin 2013 est fondée sur la présomption de responsabilité des constructeurs et la garantie décennale issue des articles 1792 et suivants du code de civil, ce dont ils déduisent qu'il n'ont donc pas à encourir, quel que soit le point de départ à prendre en compte du délai biennal, la prescription instituée par l'article 1792-3 de ce code ; que pour définir si les travaux effectués par la société Eurocéramique constituent un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil il convient de se référer aux prestations confiées et accomplies par cette entreprise ; qu'à cet égard il y a lieu d'observer que les époux F... n'ont pas produit aux débats les pièces contractuelles relatives à l'intervention de cette société et en particulier le devis émis par elle et accepté par eux-mêmes ; que cependant il résulte du rapport d'expertise judiciaire de M. G... M... en date du 26 mars 2004 que, selon les explications qui lui ont été fournies par les parties et spécialement par les propriétaires sinistrés, en novembre 2002, après avoir déposé un foyer fermé installé en 1986 par M. F..., l'entreprise Eurocéramique a mis en place un nouvel insert en conservant l'habillage décoratif de cheminée (socle, jambages, poutre) le conduit principal d'évacuation des fumées (type métallique isolé composite) et que la prestation de la SARL Eurocéramique comprenait en fourniture et en pose : -l'insert, -le conduit de raccordement (simple inox), -la pièce jonction de raccordement entre conduit simple paroi et conduit double paroi existant, -l'exécution d'une hotte en plaques de plâtre sur ossature métallique ; qu'il en découle que, contrairement aux explications fournies par les appelants dans leurs écritures, la société Eurocéramique n'a pas exécuté l'installation d'un ouvrage faisant corps avec la construction et qui ne pourrait en être dissocié, de sorte qu'en acceptant ces travaux l'entreprise aurait exposé la construction à un risque décennal, de telles affirmations étant en outre contraires aux dispositions de l'article 1792-2 du code civil qui énonce que: -la présomption de responsabilité établie par l'article 1792 s'étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un ouvrage, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert, - et qu'un élément d'équipement est considéré comme faisant indissociablement corps avec l'un des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert, lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage ; qu'or l'expert judiciaire a clairement exposé que l'installation existante non modifiée par l'entreprise Eurocéramique comportait une récupération de chaleur par reprise des calories dans la hotte et distribution par gaine souple, ensemble raccordé à un caisson turbo piloté par une sonde de températures en hotte, ce caisson de ventilation étant placé à l'étage, sur le sol, dans la gaine de passage du conduit de fumées et, dans le cadre des réponses qu'il a apportées aux dires qui lui ont été adressés par les parties, a expliqué (page 12) que l'installation de récupération des calories avec distribution de l'air chaud par un réseau de gaines à partir d'un caisson ventilateur (turbo) est totalement distinct des fourniture et pose d'un foyer insert avec raccordement au conduit existant pour l'évacuation des fumées et que (page 14) l'insert et son raccordement aux conduits de fumée sont susceptibles de fonctionner avec ou sans installation de récupération de chaleur, celle-ci déjà existante n'étant pas concernée par les travaux de l'entreprise Eurocéramique ; que, par suite, il convient de confirmer le jugement dont appel en ce que le tribunal de grande instance de Verdun a considéré devoir rejeter la demande des époux F... en ce que celle- ci était fondée sur la présomption de responsabilité des constructeurs au sens des articles 1792, 1792-4 et 1792-2 du code civil ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte de l'article 1792 que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; qu'il ressort du rapport d'expertise que l'élément de construction à l'origine de l'incendie est le caisson de récupération de chaleur ; qu'il s'agit d'un élément dissociable de l'ouvrage, qui en l'espèce est une cheminée ; que, dès lors la garantie décennale ne trouve pas application en l'espèce ;

ALORS QUE les désordres affectant des éléments d'équipement, dissociables ou non, d'origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu'ils rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination ; qu'en retenant, pour écarter la responsabilité décennale de la société Eurocéramique et, partant, la garantie de son assureur la SMABTP, que « la société Eurocéramique n'a pas exécuté l'installation d'un ouvrage faisant corps avec la construction et qui ne pourrait en être dissocié » (arrêt, p. 8, 1er §), cependant qu'il était constant que le désordre affectant l'insert avait causé un incendie ayant intégralement détruit l'habitation de sorte qu'il importait peu que l'insert ait été dissociable ou non, d'origine ou installé sur existant, la cour d'appel a violé l'article 1792 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-11741
Date de la décision : 07/03/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

ARCHITECTE ENTREPRENEUR - Responsabilité - Responsabilité à l'égard du maître de l'ouvrage - Garantie décennale - Domaine d'application - Eléments d'équipement du bâtiment - Malfaçons rendant l'ouvrage impropre à sa destination

ARCHITECTE ENTREPRENEUR - Responsabilité - Responsabilité à l'égard du maître de l'ouvrage - Garantie décennale - Domaine d'application - Ouvrage en son ensemble impropre à sa destination - Désordres affectant des éléments d'équipement installés sur un ouvrage existant

Ne tire pas les conséquences légales de ses propres constatations une cour d'appel qui rejette les demandes fondées sur la présomption de responsabilité des constructeurs de l'article 1792 du code civil, après avoir constaté que le désordre affectant un insert avait causé un incendie ayant intégralement détruit une habitation de sorte qu'il importait peu que l'insert eût été dissociable ou non, d'origine ou installé sur existant


Références :

article 1792 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 02 mars 2017

Sur l'application de la garantie décennale aux désordres affectant des éléments d'équipement, dans le même sens que :3e Civ., 26 octobre 2017, pourvoi n° 16-18120, Bull. 2017, III, n° 119 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 07 mar. 2019, pourvoi n°18-11741, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.11741
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