LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le troisième moyen du pourvoi principal de M. G..., de Mme U... et de M. D... J... :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 14 février 2017) qu'à la suite du décès, le [...] , d'S... J..., ressortissant russe résidant en France, M. G... et Mme U..., agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de tuteur des enfants mineurs R... et D... J..., ainsi que M. V... S... J... et Mme H... (les consorts J...), ont saisi le 29 octobre 2012, en présence du Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (le FGTI), sur le fondement de l'article 706-3 du code de procédure pénale, une commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI) qui a déclaré leurs demandes irrecevables au motif que les conditions alors posées par ce texte n'étaient pas remplies ; qu'après avoir relevé appel de sa décision, les consorts J... ont saisi la CIVI d'une nouvelle requête, en date du 2 mars 2015, fondée sur les dispositions de l'article 706-3 issues de la loi n° 2013-711 du 5 août 2013, ouvrant désormais l'action devant la CIVI à toute personne victime de faits commis sur le territoire national, puis se sont désistés de leur appel ; qu'il leur en a été donné acte par un arrêt du 14 avril 2015 ;
Attendu que les consorts J... font grief à l'arrêt de déclarer M. D... J... irrecevable en sa nouvelle demande d'indemnité alors, selon le moyen, que selon l'article 2252 du code civil devenu l'article 2235 du même code, la prescription ne court pas contre les mineurs non émancipés et les majeurs en tutelle, sauf pour les actions en paiement ou en répétition des salaires, arrérages de rente, pensions alimentaires, loyers, fermages, charges locatives, intérêts des sommes prêtées et, généralement, les actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou à des termes périodiques plus courts ; qu'aucun texte n'écarte l'application de la suspension de la prescription au profit des mineurs au délai édicté par l'article 706-5 du code de procédure pénale ; qu'en déclarant irrecevables comme tardives les actions en indemnisation engagées le 9 mars 2015 devant la commission d'indemnisation des victimes d'infractions de Charleville-Mézières par M. G... et Mme U..., agissant en qualité de représentants légaux de D... J... dont elle a constaté qu'il était né [...] , la cour d'appel a violé l'article 706-5 du code de procédure pénale, ensemble l'article 2252 du code civil devenu l'article 2235 du même code ;
Mais attendu qu'il résulte de l'arrêt que M. G... et Mme U... ont agi, tant lors de la première que de la seconde saisine de la CIVI, en leur nom personnel, mais aussi en leur qualité de représentants légaux de M. D... J..., aux fins d'indemnisation des préjudices de celui-ci ; qu'il s'ensuit que ce dernier n'a pas été empêché d'agir devant la CIVI du fait de sa minorité et a été en mesure de faire valoir ses droits en justice ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les premier et deuxième moyens annexés des pourvois principal et incident qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCP Lyon-Caen et Thiriez ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. G..., Mme U... et M. D... J....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir déclaré Monsieur C... G..., Madame D... U... et Monsieur D... J... irrecevables en leurs demandes d'indemnité ;
Aux motifs que, lorsqu'une décision d'irrecevabilité a été rendue, une nouvelle demande formée par les mêmes parties et aux mêmes fins ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée du moment que la cause d'irrecevabilité a entre-temps disparu ; qu'en l'espèce, dans sa première décision, la CIVI a déclaré irrecevables les demandes des victimes au motif que l'article 706-3 du Code de procédure pénale, dans sa rédaction applicable au jour du dépôt de la requête, ne permettait pas leur indemnisation car ils n'avaient pas la nationalité française et ils n'étaient ni ressortissants de l'Union européenne, ni en séjour régulier sur le territoire français ; que lorsque les victimes ont déposé leur seconde requête, le 9 mars 2015, cette cause d'irrecevabilité avait disparu suite à l'entrée en vigueur de la nouvelle rédaction de l'article 706-3 issue de la loi n° 2013-711 du 5 août 2013, puisque désormais la personne lésée est éligible à l'indemnisation par le Fonds de garantie, même si elle n'a pas la nationalité française, dès lors que les faits ont été commis sur le territoire national, ce qui est le cas en l'espèce (l'homicide à l'origine du dommage ayant été commis à Charleville-Mézières) ; que par conséquent, la cause d'irrecevabilité relevée par la CIVI dans sa décision du 17 avril 2014 ayant disparu, la nouvelle demande des requérants formée le 9 mars 2015 ne se heurtait pas à l'autorité de la chose jugée ;
Et aux motifs que l'article 706-5 du Code de procédure pénale dispose que la demande d'indemnisation doit être présentée, à peine de forclusion, dans le délai de trois ans à compter de la date de l'infraction, mais que ce délai est prorogé lorsque des poursuites pénales sont exercées, de sorte que le délai n'expire qu'un an après la décision de la juridiction qui a statué définitivement sur l'action publique engagée devant la juridiction répressive ; que l'article 2243 du Code civil dispose que l'interruption de la prescription ou de la forclusion est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance, ou si sa demande est définitivement rejetée ; qu'en l'espèce, la première requête déposée par les requérants l'a été le 29 octobre 2012, soit moins d'un an après les décisions de la Cour d'assises qui a statué définitivement sur l'action publique et les intérêts civils ; que toutefois, cette requête a abouti à la décision rendue le 17 avril 2014 par la CIVI aux termes de laquelle les demandes d'indemnités des requérants ont été déclarées irrecevables ; que cette décision d'irrecevabilité est devenue définitive suite au désistement d'appel des consorts J... ; qu'une décision d'irrecevabilité est une décision de rejet ; que dès lors, les requérants ne peuvent se prévaloir de l'effet interruptif de leur requête du 29 octobre 2012, puisqu'elle a été définitivement rejetée ; que leur seconde requête a été déposée le 9 mars 2015, soit largement après les délais prescrits à peine de forclusion par l'article 706-5 précité puisque le point de départ du délai de forclusion annal doit être fixé à la date des arrêts de la Cour d'assises ayant statué en appel sur l'action publique et les intérêts civils, soit le 6 décembre 2011 ; que par conséquent, la présente action engagée par les requérants le 9 mars 2015 doit être déclarée forclose ; que la décision déférée sera infirmée sur ce point ;
Alors que, de première part, lorsque l'auteur d'une infraction est condamné à verser des dommages et intérêts à la partie civile, le délai dont dispose cette dernière pour saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infraction court à compter de l'avis qui doit lui être donné, par la juridiction qui condamne l'auteur de l'infraction, de la possibilité qui lui est offerte de saisir ladite commission ; qu'en fixant au 6 décembre 2011 le point de départ du délai de forclusion annal sans vérifier l'existence et la date de l'avis que devait donner la Cour d'assises sur la possibilité de saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infraction, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 706-5 et 706-15 Code de procédure pénale ;
Alors que, de seconde part, seul le désistement pur et simple rend non avenue l'interruption de prescription, à l'exclusion d'un désistement suivi d'une nouvelle saisine du juge effectuée antérieurement à la constatation dudit désistement ; qu'en décidant, après avoir constaté d'une part, que par requête du 9 mars 2015, Monsieur C... G..., Madame D... U... agissant tant en leurs nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de l'enfant mineur D... J... avaient, à nouveau, saisi la CIVI aux fins d'indemnisation de leur préjudice moral et affectif consécutif au décès de S... J... et, d'autre part, que par arrêt du 14 avril 2015, elle leur avait donné acte de leur désistement d'appel, que ceux-ci ne peuvent se prévaloir de l'effet interruptif de leur requête du 29 octobre 2012 puisqu'elle avait été définitivement rejetée, la Cour d'appel a violé l'article 2243 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré Monsieur C... G..., Madame D... U... et Monsieur D... J... irrecevables en leurs demandes d'indemnité ;
Aux motifs que l'article 706-5 du code de procédure pénale dispose que le requérant peut être relevé de la forclusion lorsqu'il n'a pas été en mesure de faire valoir ses droits dans les délais requis ou lorsqu'il a subi une aggravation de son préjudice ou pour tout autre motif légitime ; que les consorts J... ne se prévalent d'aucune aggravation de leur préjudice ; qu'en revanche, ils n'étaient pas en mesure de faire valoir leurs droits à indemnisation dans le délai requis, c'est-à-dire dans l'année des arrêts rendus le 6 décembre 2011 par la cour d'assises de la Marne, puisqu'ils n'étaient alors pas encore éligibles à une indemnisation versée par le Fonds de garantie ; que néanmoins, ils pouvaient valablement saisir la CIVI dès l'entrée en vigueur de la loi précitée du 5 août 2013, ce qu'ils se sont abstenus de faire puisqu'ils ont attendu le 9 mars 2015 pour déposer la deuxième requête, soit un retard de 19 mois ; que les intimés soutiennent qu'ils ne pouvaient pas saisir la CIVI plus tôt sur la base de la nouvelle loi au motif qu'ils se seraient heurtés à l'exception de connexité, l'instance introduite par leur première requête du 29 octobre 2012 étant toujours en cours ; que toutefois rien n'interdisait aux consorts J... de se désister de leur demande mal engagée et de déposer dès le mois d'août 2013 une nouvelle requête ; qu'aucun motif véritablement légitime n'est invoqué par les requérants, de sorte qu'il n'y a pas lieu de les relever de la forclusion ; que par conséquent, leurs demandes d'indemnisation seront déclarées irrecevables pour cause de forclusion et la décision déférée sera infirmée en ce qu'elle leur a octroyé des indemnités aux consorts J... ;
Alors que, d'une part, l'existence d'une connexité avec une demande d'indemnisation pendante devant la commission d'indemnisation des victimes d'infractions constitue un motif légitime de différer le dépôt d'une nouvelle requête d'indemnisation identique au bénéfice des mêmes victimes ; qu'en déclarant que ce motif n'était pas véritablement légitime parce que rien n'interdisait aux victimes de se désister de leur demande mal engagée et de déposer dès le mois d'août 2013 une nouvelle requête alors qu'ayant fixé le point de départ du délai de forclusion annal au 6 décembre 2011, une éventuelle action exercée à cette date aurait été forclose, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 706-5 du Code de procédure pénale ;
Alors que, de deuxième part, constitue un motif légitime de relevé de forclusion l'invocation par les victimes du bénéfice des dispositions de loi n° 2013-711 du 5 août 2013 ayant modifié l'article 706-3 du Code de procédure pénale dans l'instance pendante devant la commission d'indemnisation des victimes d'infractions suivie d'un désistement à la suite du rejet de ce moyen par une décision de cette commission ; qu'en déclarant que le motif de connexité invoqué par les victimes n'était pas légitime, la Cour d'appel a violé l'article 706-5 précité du Code de procédure pénale ;
Alors enfin et, en tout état de cause, que les limitations apportées au droit d'accès au juge ne doivent pas restreindre cet accès d'une manière ou à un point tels que le droit s'en trouve atteint dans sa substance même et ne se concilient avec les exigences de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que si elles tendent à un but légitime et s'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé ; qu'en décidant, après avoir constaté que les consorts J... n'étaient pas en mesure de faire valoir leurs droits à indemnisation dans le délai requis, c'est-à-dire dans l'année des arrêts rendus le 6 décembre 2011 par la Cour d'assises de la Marne, puisqu'ils n'étaient pas encore éligibles à une indemnisation versée par le Fonds de garantie, que leur seconde requête était irrecevable parce qu'ils ne s'étaient pas désistés de leur première demande pour déposer celle-ci dès l'entrée en vigueur de la loi n° 2013-711 du 5 août 2013 ayant modifié l'article 706-3 du Code de procédure pénale, la Cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(Subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir déclaré Monsieur Germain J... irrecevable en sa demande d'indemnité ;
Aux motifs que l'article 706-5 du Code de procédure pénale dispose que la demande d'indemnisation doit être présentée, à peine de forclusion, dans le délai de trois ans à compter de la date de l'infraction, mais que ce délai est prorogé lorsque des poursuites pénales sont exercées, de sorte que le délai n'expire qu'un an après la décision de la juridiction qui a statué définitivement sur l'action publique engagée devant la juridiction répressive ; que l'article 2243 du Code civil dispose que l'interruption de la prescription ou de la forclusion est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance, ou si sa demande est définitivement rejetée ; qu'en l'espèce, la première requête déposée par les requérants l'a été le 29 octobre 2012, soit moins d'un an après les décisions de la Cour d'assises qui a statué définitivement sur l'action publique et les intérêts civils ; que toutefois, cette requête a abouti à la décision rendue le 17 avril 2014 par la CIVI aux termes de laquelle les demandes d'indemnités des requérants ont été déclarées irrecevables ; que cette décision d'irrecevabilité est devenue définitive suite au désistement d'appel des consorts J... ; qu'une décision d'irrecevabilité est une décision de rejet ; que dès lors, les requérants ne peuvent se prévaloir de l'effet interruptif de leur requête du 29 octobre 2012, puisqu'elle a été définitivement rejetée ; que leur seconde requête a été déposée le 9 mars 2015, soit largement après les délais prescrits à peine de forclusion par l'article 706-5 précité puisque le point de départ du délai de forclusion annal doit être fixé à la date des arrêts de la Cour d'assises ayant statué en appel sur l'action publique et les intérêts civils, soit le 6 décembre 2011 ; que par conséquent, la présente action engagée par les requérants le 9 mars 2015 doit être déclarée forclose ; que la décision déférée sera infirmée sur ce point ;
Alors que selon l'article 2252 du Code civil devenu l'article 2235 du même Code, la prescription ne court pas contre les mineurs non émancipés et les majeurs en tutelle, sauf pour les actions en paiement ou en répétition des salaires, arrérages de rente, pensions alimentaires, loyers, fermages, charges locatives, intérêts des sommes prêtées et, généralement, les actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou à des termes périodiques plus courts ; qu'aucun texte n'écarte l'application de la suspension de la prescription au profit des mineurs au délai édicté par l'article 706-5 du Code de procédure pénale ; qu'en déclarant irrecevables comme tardives les actions en indemnisation engagées le 9 mars 2015 devant la commission d'indemnisation des victimes d'infractions de Charleville-Mézières par Monsieur C... G... et Madame D... U..., agissant en qualité de représentants légaux de D... J... dont elle a constaté qu'il était né [...] , la Cour d'appel a violé l'article 706-5 du Code de procédure pénale, ensemble l'article 2252 du Code civil devenu l'article 2235 du même Code. Moyens produits au pourvoi incident par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour Mme W... B....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré Mme W... B... irrecevable en ses demandes d'indemnité ;
AUX MOTIFS QUE, lorsqu'une décision d'irrecevabilité a été rendue, une nouvelle demande formée par les mêmes parties et aux mêmes fins ne se heurte pas à l'autorité de chose jugée du moment que la cause d'irrecevabilité a entre-temps disparu ; qu'en l'espèce, dans sa première décision, la CIVI a déclaré irrecevables les demandes des victimes au motif que l'article 706-3 du code de procédure pénale, dans sa rédaction applicable au jour du dépôt de la requête, ne permettait pas leur indemnisation car ils n'avaient pas la nationalité française et ils n'étaient ni ressortissants de l'Union européenne, ni en séjour régulier sur le territoire français ; que lorsque les victimes ont déposé leur seconde requête, le 9 mars 2015, cette cause d'irrecevabilité avait disparu suite à l'entrée en vigueur de la nouvelle rédaction de l'article 706-3 issue de la loi n° 2013-711 du 5 août 2013, puisque désormais la personne lésée est éligible à l'indemnisation par le Fonds de garantie, même si elle n'a pas la nationalité française, dès lors que les faits ont été commis sur le territoire national, ce qui est le cas en l'espèce (l'homicide à l'origine du dommage ayant été commis à Charleville-Mézières) ; que par conséquent, la cause d'irrecevabilité relevée par la CIVI dans sa décision du 17 avril 2014 ayant disparu, la nouvelle demande des requérants formée le 9 mars 2015 ne se heurtait pas à l'autorité de la chose jugée ;
ET AUX MOTIFS QUE l'article 706-5 du code de procédure pénale dispose que la demande d'indemnisation doit être présentée, à peine de forclusion, dans le délai de trois ans à compter de la date de l'infraction, mais que ce délai est prorogé lorsque des poursuites pénales sont exercées, de sorte que le délai n'expire qu'un an après la décision de la juridiction qui a statué définitivement sur l'action publique ou sur l'action civile engagée devant la juridiction répressive ; que l'article 2243 du code civil dispose que l'interruption de la prescription ou de la forclusion est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance, ou si sa demande est définitivement rejetée ; qu'en l'espèce, la première requête déposée par les requérants l'a été le 29 octobre 2012, soit moins d'un an après les décisions de la cour d'assises qui a statué définitivement sur l'action publique et les intérêts civils ; que toutefois, cette requête a abouti à la décision rendue le 17 avril 2014 par la CIVI, aux termes de laquelle les demandes d'indemnités des requérants ont été déclarées irrecevables ; que cette décision d'irrecevabilité est devenue définitive suite au désistement d'appel des consorts J... ; qu'une décision d'irrecevabilité est une décision de rejet ; que dès lors, les requérants ne peuvent se prévaloir de l'effet interruptif de leur requête du 29 octobre 2012, puisqu'elle a été définitivement rejetée ; que leur seconde requête a été déposée le 9 mars 2015, soit largement après les délais prescrits à peine de forclusion par l'article 706-5 précité, puisque le point de départ du délai de forclusion annal doit être fixé à la date des arrêts de la cour d'assises ayant statué en appel sur l'action publique et les intérêts civils, soit le 6 décembre 2011 ; que par conséquent, la présente action engagée par les requérants le 9 mars 2015 doit être déclarée forclose ; que la décision déférée sera infirmée sur ce point ;
ALORS QUE, DE PREMIERE PART, lorsque l'auteur d'une infraction est condamné à verser des dommages et intérêts à la partie civile, le délai dont dispose cette dernière pour saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infraction court à compter de l'avis qui doit lui être donné, par la juridiction qui condamne l'auteur de l'infraction, de la possibilité qui lui est offerte de saisir ladite commission ; qu'en fixant au 6 décembre 2011 le point de départ du délai de forclusion annal sans vérifier l'existence et la date de l'avis que devait donner la cour d'assises sur la possibilité de saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infraction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 706-5 et 706-15 code de procédure pénale ;
ALORS QUE, DE SECONDE PART, seul le désistement pur et simple rend non avenue l'interruption de prescription, à l'exclusion d'un désistement suivi d'une nouvelle saisine du juge effectuée antérieurement à la constatation dudit désistement ; qu'en décidant, après avoir constaté d'une part, que par requête du 9 mars 2015, Mme W... B... avait, à nouveau, saisi la CIVI aux fins d'indemnisation de son préjudice moral et affectif consécutif au décès d'S... J... et, d'autre part, que par arrêt du 14 avril 2015, elle lui avait donné acte de son désistement d'appel, que celle-ci ne peut se prévaloir de l'effet interruptif de sa requête du 29 octobre 2012 puisqu'elle avait été définitivement rejetée, la cour d'appel a violé l'article 2243 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré Mme W... B... irrecevable en ses demandes d'indemnité ;
AUX MOTIFS QUE l'article 706-5 du code de procédure pénale dispose que le requérant peut être relevé de la forclusion lorsqu'il n'a pas été en mesure de faire valoir ses droits dans les délais requis ou lorsqu'il a subi une aggravation de son préjudice ou pour tout autre motif légitime ; que les consorts J... ne se prévalent d'aucune aggravation de leur préjudice ; qu'en revanche, ils n'étaient pas en mesure de faire valoir leurs droits à indemnisation dans le délai requis, c'est-à-dire dans l'année des arrêts rendus le 6 décembre 2011 par la cour d'assises de la Marne, puisqu'ils n'étaient alors pas encore éligibles à une indemnisation versée par le Fonds de garantie ; que néanmoins, ils pouvaient valablement saisir la CIVI dès l'entrée en vigueur de la loi précitée du 5 août 2013, ce qu'ils se sont abstenus de faire puisqu'ils ont attendu le 9 mars 2015 pour déposer la deuxième requête, soit un retard de 19 mois ; que les intimés soutiennent qu'ils ne pouvaient pas saisir la CIVI plus tôt sur la base de la nouvelle loi au motif qu'ils se seraient heurtés à l'exception de connexité, l'instance introduite par leur première requête du 29 octobre 2012 étant toujours en cours ; que toutefois, rien n'interdisait aux consorts J... de se désister de leur demande mal engagée et de déposer dès le mois d'août 2013 une nouvelle requête ; qu'aucun motif véritablement légitime n'est invoqué par les requérants, de sorte qu'il n'y a pas lieu de les relever de la forclusion ; que par conséquent, leurs demandes d'indemnisation seront déclarées irrecevables pour cause de forclusion et la décision déférée sera infirmée en ce qu'elle leur a octroyé des indemnités aux consorts J... ;
ALORS QUE, D'UNE PART, l'existence d'une connexité avec une demande d'indemnisation pendante devant la commission d'indemnisation des victimes d'infractions constitue un motif légitime de différer le dépôt d'une nouvelle requête d'indemnisation identique au bénéfice des mêmes victimes ; qu'en déclarant que ce motif n'était pas véritablement légitime parce que rien n'interdisait aux victimes de se désister de leur demande mal engagée et de déposer dès le mois d'août 2013 une nouvelle requête alors qu'ayant fixé le point de départ du délai de forclusion annal au 6 décembre 2011, une éventuelle action exercée à cette date aurait été forclose, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 706-5 du code de procédure pénale ;
ALORS QUE, DE DEUXIEME PART, constitue un motif légitime de relevé de forclusion l'invocation par les victimes du bénéfice des dispositions de loi n° 2013-711 du 5 août 2013 ayant modifié l'article 706-3 du code de procédure pénale dans l'instance pendante devant la commission d'indemnisation des victimes d'infractions suivie d'un désistement à la suite du rejet de ce moyen par une décision de cette commission ; qu'en déclarant que le motif de connexité invoqué par les victimes n'était pas légitime, la cour d'appel a violé l'article 706-5 précité du code de procédure pénale ;
ALORS ENFIN ET, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE les limitations apportées au droit d'accès au juge ne doivent pas restreindre cet accès d'une manière ou à un point tels que le droit s'en trouve atteint dans sa substance même et ne se concilient avec les exigences de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que si elles tendent à un but légitime et s'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé ; qu'en décidant, après avoir constaté que les consorts J... n'étaient pas en mesure de faire valoir leurs droits à indemnisation dans le délai requis, c'est-à-dire dans l'année des arrêts rendus le 6 décembre 2011 par la cour d'assises de la Marne, puisqu'ils n'étaient pas encore éligibles à une indemnisation versée par le Fonds de garantie, que leur seconde requête était irrecevable parce qu'ils ne s'étaient pas désistés de leur première demande pour déposer celle-ci dès l'entrée en vigueur de la loi n° 2013-711 du 5 août 2013 ayant modifié l'article 706-3 du code de procédure pénale, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme.