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20/02/2019 | FRANCE | N°17-23768

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 février 2019, 17-23768


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique ci-après annexé :

Attendu que la cour d'appel a, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, constaté que le refus de mutation n'était pas établi, et a ainsi légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Bocage aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme I... ;

Ainsi fait et jugé par la

Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique ci-après annexé :

Attendu que la cour d'appel a, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, constaté que le refus de mutation n'était pas établi, et a ainsi légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Bocage aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme I... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Bocage

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Madame I... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, d'AVOIR, en conséquence, condamné la société FRANCE ARNO aux droits de laquelle vient la société BOCAGE, à lui payer la somme de 60.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié, outre les frais irrépétibles et les dépens et d'AVOIR ordonné à la société FRANCE ARNO de rembourser au Pôle Emploi les indemnités de chômage payées à Madame I... dans la limite de six mois ;

AUX MOTIFS QU' « il convient de rappeler que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les limites du litige. En l'espèce, les termes en sont les suivants : « Nous faisons suite à l'entretien préalable que vous avez eu le 12 juillet 2012 avec votre directeur régional, M. N... et vous notifions par la présente votre licenciement. Lors de cet entretien, vous étiez assistée par Madame U... F..., directrice de magasin. Cette décision, nous vous le rappelons, est motivée par les faits suivants : Par courrier recommandé du 2 avril 2012, nous avons décidé de vous muter au magasin France Arno sis [...] . Nous vous avons précisé que cet établissement avait réalisé aux 12 derniers mois, à fin mars 2012, un chiffre d'affaires de 622 647 euros TTC contre 644 838 euros TTC pour la même période pour le magasin France Arno à [...] dont vous avez la responsabilité. Nous vous avions également indiqué qu'à votre nouveau poste, les conditions d'exécution de votre contrat de travail et notamment votre statut restaient inchangés. En tout état de cause, nous vous garantissions que votre salaire brut mensuel serait au moins égal à celui que vous percevez actuellement. Par ailleurs et à titre tout à fait exceptionnel, nous vous proposions la prise en charge de l'intégralité de vos titres d'abonnement aux transports collectifs pour vos déplacements entre votre domicile habituel à [...] et votre nouveau lieu de travail à [...]. Vous aviez également la possibilité de disposer d'un logement de fonction situé au-dessus du magasin France Arno de [...]. Or, par courrier du 23 juin 2012, vous nous avez informé refuser votre mutation. Lors de l'entretien préalable, M. N... vous a demandé votre position. Vous l'avez renvoyé à la lecture de votre dernier courrier, ajoutant ne rien avoir à dire verbalement. Nous vous rappelons que cette mutation s'inscrivait par application de la clause de mobilité géographique prévue à l'article IV de votre contrat de travail. En conséquence, votre refus d'être mutée au magasin France Arno de [...], malgré la clause de mobilité figurant dans votre contrat de travail, nous contraint à vous notifier par la présente votre licenciement. Vous serez, à dater de la première présentation de cette lettre, en préavis pendant trois mois. Nous vous dispensons toutefois d'effectuer ce préavis et il vous sera en conséquence normalement rémunéré, aux échéances habituelles de paye. À I'expiration de ce préavis, nous vous adresserons votre attestation pour Pôle emploi, ainsi que votre certificat de travail et nous solderons votre compte. Nous vous précisons enfin que vous avez acquis 120 heures au titre du droit individuel à la formation et que vous pourrez utiliser ces heures que vous ayez ou non retrouvé un emploi, pour financer un bilan de compétences, une action de formation ou une validation des acquis de l'expérience. ». S'agissant en premier lieu du refus de mutation que W... I... conteste, la cour relève qu'à la suite de la lettre recommandée avec accusé de réception envoyée par la société France Arno le 2 avril 2012, aux termes de laquelle elle annonce à Mme W... I... sa décision de la muter au magasin France Arno de [...], de nombreux échanges de points de vue et demandes de précision ont eu lieu, au vu des courriers que la salariée verse aux débats : - la lettre recommandée avec accusé de réception du 13 avril 2012 aux termes de laquelle Mme W... I... a formulé des observations en réponse à cette décision de mutation au regard de sa rémunération, rappelant la baisse de rémunération acceptée en 2008, s'agissant d'une mutation à [...] à proximité de son domicile et faisant part du coût prévisible de 584 euros par mois pour ses frais de transport si elle devait travailler à [...], - la lettre recommandée avec accusé de réception du 14 mai 2012 de la société France Arno (réadressée le 8 juin 2012), mentionnant un entretien du 4 mai 2012, au cours duquel la société France Arno a proposé à Mme W... I... de prendre en charge ses frais d'abonnement aux transports collectifs ou de mettre à sa disposition un logement de fonction situé à [...] avec une baisse corrélative de sa rémunération, - la lettre recommandée avec accusé de réception du 15 juin 2012 aux termes de laquelle Mme W... I... a sollicité des compléments d'information sur la prise en charge des frais de transport ainsi que la réattribution de la somme brute de 360 euros correspondant à la réduction de rémunération acceptée en novembre 2008 du fait de son nouvel emploi à proximité de son domicile, - la lettre recommandée avec accusé de réception du 19 juin 2012 aux termes de laquelle la société France Arno lui a répondu qu'une somme de 193,08 euros serait prise en charge par l'employeur pour ses titres de transport mais que son salaire actuel de 2 700 euros bruts serait maintenu, sans qu'il soit envisagé de le majorer de 360 euros, - la lettre recommandée avec avis de réception du 28 juin 2012 aux termes de laquelle Mme W... I... a fait valoir qu'elle ne répondait pas aux critères pour bénéficier du tarif préférentiel pour l'abonnement TER Centre mentionné par l'employeur, de telle sorte que le coût réel du transport est supérieur à celui calculé et proposé par son employeur de 193,08 euros mensuel ; par ailleurs, elle invoque les dispositions de l'article 14 de l'avenant cadres du 10 juin 1982 de la convention collective applicable mentionnant que la mutation ne peut entraîner une réduction de la situation pécuniaire de l'intéressé et fait observer que son temps de transport pour [...] passerait à 4 heures 30 par jour, étant obligée de rester domiciliée [...] où son conjoint travaille et bénéficie d'un suivi médical. En revanche, la société France Arno ne verse pas aux débats la lettre du 23 juin 2012 mentionnée dans la lettre de licenciement, lettre du 23 juin 2012 aux termes de laquelle la société France Arno affirme que Mme W... I... a expressément refusé la mutation au magasin France Arno de [...]. Dès lors, faute pour la société France Arno de rapporter la preuve du refus de mutation qu'elle mentionne dans la lettre de licenciement, refus fondant sa décision de licencier Mme W... I..., la société France Arno ne permet ainsi pas à la cour d'exercer son contrôle quant au caractère réel et sérieux des motifs invoqués, il en résulte que l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement doit, en conséquence, être écartée ; la décision attaquée sera confirmée à ce titre » ;

ET AUX MOTIFS, À LES SUPPOSER TACITEMENT ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES QUE « Madame I... a bien été engagée le 9 janvier 1996 en qualité de vendeuse auprès de la société CHAUSSURES HERVE ; qu'elle a été nommée vendeuse responsable de magasin ERAM à compter du 1er novembre 2000; qu'après avoir été nommée gérante directrice de magasin à compter du 1er juin 2001 ; qu'à ce titre elle a été affectée au magasin FRANCE ARNO de [...] à compter du 1er novembre 2008 ; que seule à cette mutation la société FRANCE ARNO a proposé une diminution du salaire brut garanti de 3 060,00 euros à 2 700,00 euros, du fait d'avoir rapproché son lieu de travail à son domicile ; que l'article L3121-4 du Code du travail dispose que : "Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif: Toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière. Cette contrepartie est déterminée par convention ou accord collectif de travail ou, à défila, par décision unilatérale de l'employeur prise après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, s'il en existe. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail n'entraîne aucune perte de salaire" ; que les propositions faites à Madame I... ne prennent pas en compte les éléments de sa vie personnelle ; que la société FRANCE ARNO ne propose pas de réelles compensations financières ; que Madame I... ne rentre pas dans l'attribution des dispositions de la carte AMELYS ; de ce qui précède, le conseil dit que le licenciement de Madame I... ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse » ;

ALORS, TOUT D'ABORD, QUE si elles divergeaient quant à son interprétation les parties s'accordaient à reconnaître que le courrier de Madame I... par lequel, selon la lettre de licenciement, la salariée avait refusé sa mutation à CHARTRES était celui en date du 28 juin 2012 (conclusions d'appel de la société FRANCE ARNO, page 4 ; conclusions d'appel de Madame I..., page 10) produit par Madame I... elle-même (sa pièce n° 11) et non, comme indiqué par erreur dans la lettre de licenciement, un courrier en date du 23 juin 2012 qu'aucune des parties n'avait évoqué dans ses conclusions ; qu'en se contentant d'affirmer, pour dire que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, que la lettre du « 23 » juin 2012 évoquée dans la lettre de licenciement comme illustrant le refus de mutation de la salariée n'était pas produite aux débats, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et a ainsi violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

ALORS, ENSUITE, QU'équivaut à un refus de mutation le fait, pour la salariée, de subordonner l'application d'une mutation décidée par l'employeur en application d'une clause de mobilité à une modification du contrat de travail ; que Madame I... faisait valoir, tant dans les courriers relevés par les juges du fond que dans ses propres conclusions d'appel (pages 18 à 23), que sa mutation ne pouvait être acceptée que sous réserve d'une augmentation de son salaire et de la prise en charge intégrale de ses déplacements entre son domicile dont elle refusait de changer et son nouveau lieu de travail ; que cette position équivalait à un refus de mutation dont les juges du fond devaient constater l'existence puis examiner s'il était justifié ou non ; qu'en déclarant dès lors non établi le refus de mutation qui constituait le motif évoqué dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du Code du travail ;

ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHÈSE, QU'en supposant adoptés les motifs des premiers juges selon lesquels les propositions faites à Madame I... ne prenaient pas en compte les éléments de sa vie personnelle et que la société FRANCE ARNO ne proposait pas de réelle compensation financière, la cour d'appel aurait statué par des motifs impuissants à faire ressortir que la mise en oeuvre de la clause contractuelle portait une atteinte au droit de la salariée à une vie personnelle et familiale et qu'une telle atteinte n'était pas justifiée par la tâche à accomplir ou était non proportionnée au but recherché, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du Code du travail et 1104 [1134, al.3 ancien] du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-23768
Date de la décision : 20/02/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 28 juin 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 fév. 2019, pourvoi n°17-23768


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.23768
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