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14/02/2019 | FRANCE | N°17-28816;17-28994

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 14 février 2019, 17-28816 et suivant


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° Y 17-28.816 et S 17-28.994 ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° Y 17-28.816 et le moyen unique du pourvoi S 17-28.994, réunis, ci-après annexés :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 11 septembre 2017), que M. et Mme N... ont confié à la société V... X... construction (la société V...), assurée auprès de la société MAAF assurances (la société MAAF), la réhabilitation d'une maison et la construction d'une piscine et de plages ; que la société V... a a

ssigné M. et Mme N... en paiement de sommes, puis a, après expertise, appelé en garantie l...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° Y 17-28.816 et S 17-28.994 ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° Y 17-28.816 et le moyen unique du pourvoi S 17-28.994, réunis, ci-après annexés :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 11 septembre 2017), que M. et Mme N... ont confié à la société V... X... construction (la société V...), assurée auprès de la société MAAF assurances (la société MAAF), la réhabilitation d'une maison et la construction d'une piscine et de plages ; que la société V... a assigné M. et Mme N... en paiement de sommes, puis a, après expertise, appelé en garantie la société MAAF ;

Attendu que M. et Mme N... et la société V... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes formées à l'encontre de la société MAAF ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé, sans violer l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, procédant à la recherche prétendument omise, que l'assureur soutenait que le premier juge avait, à bon droit, écarté la réception expresse de l'ouvrage et que M. et Mme N... poursuivaient la confirmation du jugement en affirmant que le document du 13 septembre 2006 contenant la liste des travaux à achever, autrement dit des réserves, non signé, mais comportant des mentions manuscrites de M. N... et, postérieurement à l'établissement d'un croquis, le document du 8 novembre 2006 comportant la signature de M. N... avec la mention manuscrite « PS : voir la liste des travaux à finir au plus tôt. Merci (liste réception faite par M. V...) » constituaient un procès-verbal de réception de travaux, pour inusuel qu'il fût, la cour d'appel a retenu, appréciant souverainement la portée de ces documents, qu'aucun d'entre eux ne pouvait être tenu comme constituant un procès-verbal exprès de réception des travaux ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que plus d'un tiers du prix des travaux n'avait pas été payé et que ne pouvait être retenue une prise de possession en décembre 2006 caractérisant la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. et Mme N... et la société V... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze février deux mille dix-neuf.

Le conseiller rapporteur le president

Le greffier de chambre

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyen produit au pourvoi n° Y 17-28.816 par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. et Mme N....

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté les maîtres d'un ouvrage (M. et Mme N..., les exposants) de leur demande tendant à voir l'assureur (la société MAAF) d'une entreprise (la société V... X... Construction) tenu à la garantir de sa condamnation à leur verser la somme de 114 668,83 € au titre des désordres affectant l'ouvrage litigieux ;

AUX MOTIFS QU'aucun document produit ne pouvait être tenu comme constituant un procès-verbal exprès des travaux ; que la réception tacite des travaux ne pouvait être retenue qu'autant qu'étaient réunies les conditions exigées pour reconnaître l'existence d'une réception expresse, telles que posées par l'article 1792-6 du code civil, et en particulier la volonté univoque du maître de l'ouvrage de les recevoir et le caractère contradictoire de la réception ; qu'à cet égard, la société MAAF faisait justement valoir que plus d'un tiers des travaux n'avait pas été payé et que cette réception ne pouvait être fixée, comme l'avait fait le tribunal, en décembre 2006 pour la raison que des travaux de reprise étaient intervenus puisqu'ils n'avaient pas conduit les maîtres de l'ouvrage à régler, à quelque stade que ce fût et indépendamment de la réalisation des travaux supplémentaires, le solde des travaux exécutés ; qu'elle ajoutait tout aussi pertinemment qu'en outre ne pouvait être retenue une prise de possession en décembre 2006 caractérisant la volonté univoque du maître de l'ouvrage, d'autant moins que celui-ci écrivait le 15 septembre 2006, soit postérieurement aux travaux de reprise envisagés en septembre 2013 (2006) : « Or, à ce jour, en plus de toutes les malfaçons que nous avons constatées, que nous avons vues ensemble, plusieurs problèmes rest(aient) en suspens » ; qu'à cet égard, l'expert judiciaire, qui observait que les documents en question « (n'étaient) pas très conventionnels », n'envisageait la prise de possession qu'en termes dubitatifs (« (

) sembl(ait) confirmée ») ; que l'assureur poursuivait enfin avec pertinence qu'au surplus les défauts de finition et les désordres affectant les dalles de la piscine constituaient des désordres apparents et que la responsabilité décennale de la société V... ne pouvait être engagée ; qu'il s'évinçait de ce qui précédait que la société MAAF mise en cause au titre de la garantie décennale était fondée à prétendre que devaient être rejetées les prétentions dirigées à son encontre, à défaut de réception expresse ou tacite des travaux, en l'absence de paiement du prix et de la volonté du maître d'accepter l'ouvrage (arrêt attaqué, p. 8, 2ème à 7ème alinéas) ;

ALORS QUE l'existence de réserves lors de la prise de possession des lieux et la rétention du solde du prix dont la majeure partie a été réglée n'excluent pas la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir les travaux et donc la réalité d'une réception tacite de sa part ; qu'en l'espèce, pour écarter la réception tacite des travaux litigieux par les maîtres de l'ouvrage, l'arrêt infirmatif attaqué s'est borné à relever que l'assureur de l'entreprise affirmait « pertinemment » que « ne pouvait être retenue » une prise de possession des lieux en décembre 2006, d'autant moins qu'en novembre 2006 les intéressés avaient exprimé plusieurs réserves, et à tenir compte des termes supposés dubitatifs de l'expert judiciaire suivant lequel la prise de possession « sembl(ait) confirmée » ; qu'en statuant par de tels motifs tout à la fois impropres à écarter toute prise de possession des lieux par les maîtres de l'ouvrage et à caractériser leur volonté non équivoque de ne pas agréer les travaux, la cour d'appel n'a donné aucune base légale à sa décision au regard de l'article 1792-6 du code civil ;

ALORS QUE l'existence de réserves lors de la prise de possession des lieux et la rétention du solde du prix dont la majeure partie a été réglée n'excluent pas la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir les travaux et donc la réalité d'une réception tacite de sa part ; qu'en l'espèce, pour écarter la réception tacite des travaux litigieux par les maîtres de l'ouvrage, l'arrêt infirmatif attaqué s'est borné à relever que l'assureur de l'entreprise faisait « justement » valoir que plus d'un tiers des travaux n'avait pas été payé et que les intéressés n'avaient pas réglé le solde ; qu'en statuant ainsi par des motifs insuffisants à caractériser la volonté non équivoque des exposants de ne pas recevoir les travaux dont, en dépit de réserves, ils avaient réglé la majeure partie du prix, la cour d'appel n'a conféré aucune base légale à sa décision au regard de l'article 1792-6 du code civil. Moyen produit au pourvoi n° S 17-28.994 par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour la société V... X... construction.

- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à garantie décennale et d'avoir en conséquence débouté la société V... X... Construction, prise en la personne de son liquidateur amiable, de leur demande tendant à voir son assureur garantie décennale (la MAAF) tenu à la garantie de sa condamnation à verser aux maitres de l'ouvrage une somme de 114.668,83 € au titre des désordres affectant l'ouvrage litigieux ;

- AU MOTIF QUE formant appel incident, l'assureur soutient que si, à bon droit, le premier juge a écarté la réception expresse de l'ouvrage, le jugement doit être réformé en ce qu'il a retenu l'existence d'une réception tacite avec réserves des travaux en fixant la date à décembre 2006 ; Que M. et Mme N... poursuivent, quant à eux la confirmation du jugement en affirmant que le document du 13 septembre 2006 contenant la liste des travaux à achever, autrement dit : des réserves, non signé, mais comportant des mentions manuscrites de Monsieur N... et, postérieurement à l'établissement d'un croquis, le document du 8 novembre 2006 comportant la signature de Monsieur N... avec la mention manuscrite : "PS : voir la liste des travaux à finir au plus tôt. Merci (liste réception faite par Monsieur V...)" constituent un procès-verbal de réception de travaux, pour inusuel qu'il soit ; Attendu, ceci rappelé, qu'aucun document ne peut être tenu comme constituant un procès-verbal exprès des travaux ; Que la réception tacite des travaux ne saurait être retenue qu'autant que sont réunies les conditions exigées pour reconnaître l'existence d'une réception expresse des travaux telles que posées par l'article 1792-6 du code civil et, en particulier, la volonté univoque du maître de l'ouvrage de les recevoir et le caractère contradictoire de la réception ; Qu'à cet égard et pour contester l'existence d'une telle réception, la société Maaf Assurances fait justement valoir que plus d'un tiers des travaux n'a pas été payé et que cette réception ne pouvait être fixée, comme l'a fait le tribunal, en décembre 2006 au motif que des travaux de reprise seraient intervenus puisqu'ils n'ont pas conduit M. et Mme N... à régler, à quelque stade que ce soit et indépendamment de la réalisation des travaux supplémentaires, le solde des travaux exécutés ; Qu'en outre, ajoute-t-elle tout aussi pertinemment, ne pouvait être retenue une prise de possession en décembre 2006 caractérisant la volonté univoque du maître de l'ouvrage, d'autant que celui-ci écrivait le 15 novembre 2006, soit postérieurement aux travaux de reprise envisagés en septembre 2013 : "or, à ce jour, en plus de toutes les malfaçons que nous avons constatées, que nous avons vues ensemble, plusieurs problèmes restent en suspens" ; qu'à cet égard, l'expert judiciaire qui observe que les documents en question "ne sont pas très conventionnels" n'envisage la prise de possession qu'en termes dubitatifs ("(...) semble confirmée") ; Qu'elle poursuit enfin avec pertinence, qu'au surplus les défauts de finition et surtout "un soulèvement et un début d'effondrement des dalles de la piscine dû à un défaut d'ancrage des terrasses sur les maçonneries" constaté par le cabinet Agora le 17 octobre 2006, tout comme les autres travaux de reprise réalisés et spécifiés dans les factures Bongard des 21 octobre, 2 et 10 novembre 2006 constituent des désordres apparents, décrits dans une expertise technique, et que la responsabilité décennale de la SARL V..., qui s'est abstenue de mettre en oeuvre les remèdes préconisés, ne peut être engagée ; Qu'il s'évince de ce qui précède que la société Maaf Assurances, mise en cause au titre de la garantie décennale, est fondée à prétendre que doivent être rejetées les prétentions dirigées à son encontre, à défaut de réception expresse et tacite de l'ouvrage, en l'absence de paiement du prix et de la volonté du maître d'accepter l'ouvrage ; Que le jugement qui en décide autrement sera donc infirmé de ce chef ;

-1° ALORS QUE D'UNE PART le juge ne saurait ainsi motiver sa décision par voie de simple affirmation ; qu'en se bornant à affirmer, après avoir rappelé que la MAAF soutenait que le tribunal avait écarté à bon droit la réception expresse des travaux et que M. et Mme N... sollicitaient la confirmation du jugement en ce qu'il avait retenu la réception tacite desdits travaux, qu'aucun document ne pouvait être tenu comme constituant un procès-verbal express de travaux, sans autrement en justifier ni même les analyser, la cour d'appel a ainsi statué par une simple affirmation ne permettant pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle au regard des exigences de l'article 455 du Code de procédure civile, ensemble 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ;

2° ALORS QUE D'AUTRE PART le juge ne peut rappeler les prétentions et moyens de certaines des parties, et non des autres, sans faire peser un doute légitime sur l'impartialité de la juridiction ; qu'en infirmant le jugement entrepris sur la question de la réception des travaux et de la garantie de la MAAF après avoir uniquement rappelé sur ce point les prétentions et moyens de la MAAF et ceux de M. et Mme N... à l'exclusion de ceux de la société V... X... Construction, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 455 alinéa 1er du code de procédure civile ;

- 3°) ALORS QUE DE TROISIEME PART le caractère contradictoire de la réception n'est pas subordonné à la signature formelle du procès-verbal de réception dès lors que la participation aux opérations de réception du maître de l'ouvrage qui n'a pas signé, ne fait pas de doute ; qu'en se bornant à affirmer pour exclure l'existence d'une réception expresse de l'ouvrage qu'aucun document ne pouvait être tenu comme constituant un procès-verbal express des travaux sans rechercher, comme elle y était expressément invitée par la société exposante (cf ses conclusions p 9 à 12 et en particulier p 11), si les documents relatifs à ladite réception des travaux (à savoir le procès-verbal du 13 septembre 2006 établi entre les maitres de l'ouvrage et la société V... et la liste manuscrite des travaux à reprendre établis par le maitre de l'ouvrage), même s'ils n'étaient pas très conventionnels comme l'avait relevé l'expert, ne démontraient pas que les maitres de l'ouvrage avaient participé aux opérations de réception et les avaient approuvées, peu important que ledit procès-verbal ne soit pas signé par ces derniers, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1792-6 du code civil ;

- 4° ALORS QUE DE QUATRIEME PART et subsidiairement la réception d'un ouvrage peut également être tacite ; que la réception tacite résulte de la manifestation, par le maître de l'ouvrage, de sa volonté non équivoque de recevoir l'ouvrage, avec ou sans réserve ; que le non-paiement du solde du prix et l'existence de contestations sur la qualité de l'ouvrage réalisé, ne constituent pas des circonstances exclusives de la réception tacite ; que pour exclure la réception tacite de l'ouvrage et infirmer le jugement sur ce point, la cour d'appel s'est fondée sur la circonstance que la MAAF Assurances faisait « justement »valoir que plus d'un tiers des travaux n'avait pas été payé et que les maitres de l'ouvrage n'avaient pas réglé le solde après les travaux de reprise ; qu'en statuant ainsi par des motifs insuffisants à caractériser la volonté non équivoque des maitres de l'ouvrage de ne pas recevoir les travaux dont, en dépit de réserves, ils avaient réglé la majeure partie du prix, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1792-6 du code civil ;

-5° ALORS QU'ENFIN et subsidiairement la réception d'un ouvrage peut être tacite ; que la réception tacite résulte de la manifestation, par le maître de l'ouvrage, de sa volonté non équivoque de recevoir l'ouvrage, avec ou sans réserve ; qu'en se bornant à énoncer pour écarter la réception tacite des travaux litigieux par les maîtres de l'ouvrage et infirmer le jugement entrepris, que l'assureur de l'entreprise affirmait « pertinemment » que « ne pouvait être retenue » une prise de possession des lieux en décembre 2006, d'autant moins qu'en novembre 2006 les intéressés avaient exprimé plusieurs réserves, et à tenir compte des termes supposés dubitatifs de l'expert judiciaire suivant lequel la prise de possession « sembl(ait) confirmée » sans rechercher, comme elle y était expressément invitée par la société exposante (p 10 et 11) si le courrier du 15 novembre 2006 qui visait, par son croquis annexé, le procès-verbal du 13 septembre 2006 n'était pas de nature à corroborer une réception tacite des travaux, ensuite de leur paiement à plus de 80 %, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1792-6 du code civil.

Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-28816;17-28994
Date de la décision : 14/02/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 11 septembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 14 fév. 2019, pourvoi n°17-28816;17-28994


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Le Bret-Desaché, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.28816
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