LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
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M. Paulo X...,
Mme Maria Z...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 16 mai 2017, qui, pour fraude fiscale, les a condamnés chacun à 2 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 19 décembre 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. d'Huy, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Darcheux ;
Sur le rapport de M. le conseiller D'HUY, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, de la société civile professionnelle FOUSSARD et FROGER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général A... ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur les premier, deuxième et quatrième moyens de cassation ;
Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ;
Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à être admis ;
Mais sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles L. 231, L. 232 et 1741 du livre des procédures fiscales, 2 et 3, 591 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué, après avoir infirmé le jugement déféré en ce qu'il a condamné les prévenus au paiement de la somme de 29 039 euros au titre de l'impôt sur les sociétés, l'a confirmé pour le surplus et a dit que M. Paulo X... et Mme Maria Z... seront solidairement tenus avec la société Projavivenda Construcoes Lda au paiement des impôts fraudés au titre de la TVA et des pénalités y afférentes ;
"aux motifs que les personnes condamnées pour fraude fiscale pouvant être solidairement tenues avec le redevable légal de l'impôt fraudé au paiement de cet impôt ainsi qu'à celui des pénalités fiscales y afférentes, le jugement frappé d'appel, qui a justement apprécié la recevabilité de la constitution de partie civile, la responsabilité de M. X... et de Mme Z... dans le préjudice subi et le montant de l'indemnisation allouée à M. le directeur général des finances publiques au titre de la TVA, sera confirmé ; que compte tenu de la relaxe prononcée au titre de l'impôt sur les sociétés, le jugement déféré qui a condamné les prévenus au paiement de la somme de 29 039 euros sera infirmé ;
"1°) alors que les droits dus au titre de l'impôt éludé relèvent de la seule compétence du juge de l'impôt ; qu'en confirmant le jugement sur ce chef de préjudice et en condamnant les prévenus à verser à l'administration fiscale la somme de 138 769 euros, au titre de la TVA éludée pendant la période de prévention, la cour d'appel qui s'est prononcée sur des droits ne relevant pas sa compétence, a méconnu les articles L. 231 et L. 232 du livre des procédures fiscales ;
"2°) alors que la réparation du préjudice résultant d'une infraction doit être intégrale, sans perte ni profit pour aucune des parties ; que la cour d'appel qui n'a pas recherché si, comme le soutenaient les prévenus, du fait de la remise de factures hors TVA à ses co-contractants, ceux-ci n'avaient pu déduire aucune TVA et dès lors avaient dû payer la TVA sur le prix de leur prestation, comprenant celles de l'établissement des prévenus, ce qui impliquait que l'administration fiscale n'avait subi aucune perte, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;
Vu l'article 1745 du code général des impôts ;
Attendu qu'il se déduit de ce texte qu'il n'appartient pas au juge pénal de fixer le montant des impôts éludés sur lesquels peut trouver à s'exercer la solidarité avec le redevable légal prononcée à l'égard de la personne condamnée en application des articles 1741, 1742 ou 1743 du même code ;
Attendu que, statuant sur les intérêts civils, la cour d'appel, considérant que les premiers juges avaient justement apprécié le montant de l'indemnisation allouée au directeur général des finances publiques, a confirmé le jugement qui a condamné solidairement M. X... et Mme Z... à payer à l'administration fiscale "la somme de cent trente-huit mille sept cent soixante-neuf euros (138 769 euros) au titre de la TVA" ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que la fixation du montant des droits éludés appartient au seul juge de l'impôt, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Reims, en date du 16 mai 2017, en ses seules dispositions confirmant le jugement déféré ayant condamné M. X... et Mme Z... à payer à la Direction générale des finances publiques la somme de 138 789 euros au titre de la TVA, toutes autres dispositions étant expressément maintenues, notamment celles prononçant la solidarité ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le trente janvier deux mille dix-neuf ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.