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30/01/2019 | FRANCE | N°17-26259

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 janvier 2019, 17-26259


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé par la société Sofratel en 2006 en qualité de responsable d'agence ; qu'il a été licencié pour faute lourde le 15 juin 2012 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de diverses demandes à titre de rappels de salaire et de dommages-intérêts ;

Sur les premier, quatrième et cinquième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement

motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé par la société Sofratel en 2006 en qualité de responsable d'agence ; qu'il a été licencié pour faute lourde le 15 juin 2012 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de diverses demandes à titre de rappels de salaire et de dommages-intérêts ;

Sur les premier, quatrième et cinquième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires, l'arrêt retient, d'une part, que le salarié se prévaut d'un décompte mensuel correspondant à une simple estimation du temps passé à sa tâche, d'autre part, qu'il n'a jamais formé de réclamation sur les heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées, et enfin, qu'il bénéficiait d'une très large autonomie dans l'organisation de son temps de travail et que dans ces conditions les décomptes produits ne permettent pas à l'employeur de répondre de façon efficace et circonstanciée aux revendications du salarié ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article 1315 du code civil, devenu l'article 1353 du code civil ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'une indemnité pour non respect des durées maximales de travail, l'arrêt retient que les pièces produites par les parties ne permettent pas d'établir que l'amplitude et la durée des journées de travail de M. Y... dépassaient les limites prévues par la loi, alors qu'il disposait d'une large autonomie pour organiser ses journées ;

Attendu cependant que la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'employeur ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de ses demandes au titre des heures supplémentaires et du dépassement des durées maximales de travail, l'arrêt rendu le 21 juillet 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Condamne la société Sofratel aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sofratel à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Loïc Y... de sa demande en paiement d'une somme à titre de rappel de salaires sur les minimas conventionnels ;

AUX MOTIFS QUE sur la demande de rappel de salaire sur coefficient, au dernier état de la relation contractuelle, M. Loïc Y... a été classé au coefficient 400 de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité ; Sur la demande de rappel de salaire sur coefficient ; qu'à cet égard, il réclame un rappel de salaire sur 5 ans pour 41.875,95 euros ; qu'il fait valoir qu'étant chargé de la coordination de l'ensemble des équipes de la société en toute autonomie, il aurait dû être classé à la Position ni, échelon B dès son embauche avec un classement à l'échelon 620 de la même convention ; qu'il lui appartient d'en justifier ; que comme le fait exactement observer l'employeur, le coefficient revendiqué se caractérise par des connaissances théoriques, une expérience étendue dépassant le cadre ou conduisant à une haute spécialisation avec une très large autonomie de jugement et d'initiative; que le fait de chapeauter une équipe ne suffit pas à conférer le niveau hiérarchique revendiqué; qu'en l'espèce, M. Loïc Y... ne caractérise pas, par des exemples circonstanciés, en quoi ses fonctions l'amenaient à prendre des décisions avec une « très large autonomie de jugement et d'initiative » ; qu'en tout état de cause celle-ci ne transparaît pas des échanges entre le salarié et sa hiérarchie ; qu'au surplus, il ne justifie pas d'une expérience étendue en son domaine conduisant à une "haute spécialisation ou dépassant le cadre de la spécialisation" ; que dans ces conditions, la demande formée par M. Loïc Y... tant à titre principal que subsidiaire n'est donc pas fondée ;

ALORS QUE sauf accord de classement non équivoque, la classification du salarié s'apprécie en considération des fonctions réellement exercées ; que Monsieur Y... faisait valoir dans ses conclusions devant la cour d'appel que les fonctions qu'il assurait en vertu de son contrat de travail, qui l'amenaient à avoir en charge en toute autonomie la gestion et la coordination de l'ensemble des équipes de la société SOFRATEL, à l'exception du pôle comptable, et donc à maîtriser les domaines de compétence de chacun des pôles d'activité, technique, administratif et commercial, ne relevaient pas du coefficient 400, lequel ne s'appliquait qu'aux ingénieurs en charge de développer un seul secteur sous la responsabilité de leur hiérarchie et sans fonctions managériales, de sorte qu'il devait nécessairement bénéficier du coefficient minimal applicable à un ingénieur exerçant des fonctions transversales ; qu'en se bornant à affirmer que le fait de chapeauter une équipe ne suffit pas à conférer le niveau hiérarchique revendiqué et que Monsieur Y... ne justifie pas d'une expérience étendue dépassant le cadre de la spécialisation, sans procéder à aucune analyse des fonctions réellement exercées par Monsieur Y..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'annexe II de la convention collective nationales des entreprises de prévention et de sécurité, ensemble l'article 1134 devenu les articles 1103 et 1104 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Loïc Y... de sa demande en paiement d'une somme à titre d'heures supplémentaires ;

AUX MOTIFS QUE sur la demande de rappel d'heures supplémentaires, selon l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié; que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que s'il résulte de ces dispositions que la preuve des heures supplémentaires effectuées n'incombe pas spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'en l'espèce, M. Loïc Y... réclame le paiement d'un rappel de 144.624,34 euros sur une période de 5 ans ; qu'à cet égard, il se prévaut un décompte mensuel correspondant à une moyenne de 15 heures supplémentaires correspondant finalement à une estimation du temps passé à sa tâche ; qu'il fait valoir qu'il a été amené à appeler à l'aide de son téléphone mobile professionnel à des heures tardives, démontrant ainsi qu'il travaillait tard, ou qu'il était amené à faire des «journées continues » ; que cependant M. Loïc Y... n'a jamais formé de réclamation sur les heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées ; qu'il bénéficiait d'une très large autonomie dans l'organisation de son temps de travail ; que dans ces conditions les décomptes produits ne permettent pas à l'employeur de répondre de façon efficace et circonstanciée aux revendications du salarié ; qu'il doit donc être débouté de sa demande ;

ALORS, D'UNE PART, QU'en vertu de l'article L.3171-4 du Code du travail, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; qu'en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient seulement au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés ; que la Cour d'appel a constaté que Monsieur Y... avait versé aux débats un décompte mensuel des heures supplémentaires mentionnant une moyenne de quinze heures supplémentaires et qu'il faisait valoir l'existence des communications téléphonique passées ou reçues à des heures tardives ou pendant l'heure de sa pause méridienne ; que dès lors, en déclarant, pour débouter le salarié de sa demande, que ces décomptes ne permettent pas à l'employeur de répondre de façon efficace et circonstanciée aux revendications du salarié quand il résultait de ses constatations que ce dernier avait produit un décompte des heures des heures supplémentaires qu'il estimait avoir réalisées ainsi que d'autres éléments relatifs aux heures de travail alléguées, documents auxquels l'employeur pouvait répondre, la Cour d'appel a violé l'article L.3171-4 du Code du travail ;

ALORS D'AUTRE PART QUE les juges sont tenus d'examiner et d'analyser, fût-ce de façon sommaire, les éléments versés aux débats par le salarié ; que, pour étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires, Monsieur Y... avait aussi produit des courriels adressés par son employeur ou qu'il lui avait adressés à des heures matinales ou tardives ainsi qu'une attestation d'une salariée de l'entreprise, opératrice de télésurveillance et accueil téléphonique de 2006 à 2011, qui témoignait « croiser Monsieur Y... qui venait les saluer à son arrivée vers 8 H et à son départ, généralement entre 19 et 20 H » ; qu'en déboutant le salarié de sa demande au motif que les décomptes produits ne permettent pas à l'employeur de répondre de façon efficace et circonstanciée à ses revendications, sans examiner les autres pièces que celui-ci produisait, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS DE TROISIEME PART QU'à tout le moins, en ne s'expliquant pas sur la portée des éléments susvisés, suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.3171-4 du Code du travail ;

ALORS DE QUATRIEME PART QUE la renonciation à un droit ne présume pas et ne peut résulter que d'une manifestation claire et non équivoque de volonté ; que l'absence de réclamation du salarié pendant l'exécution du contrat de travail ne pouvait valoir renonciation au paiement des heures supplémentaires ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante que Monsieur Y... n'avait pas jamais émis de réclamation pendant la durée de la relation de travail, pour le débouter de ses demandes, la Cour d'appel a violé les articles L.3171-4 du Code du travail et 1134, devenu les articles 1103 et 1104 du Code civil ;

ALORS DE CINQUIEME PART QU'en se bornant à énoncer, pour estimer que le salarié n'étayait pas sa demande, qu'il bénéficiait d'une très large autonomie dans l'organisation de son temps de travail, quant il était constant que selon les stipulations de son contrat de travail, Monsieur Y... était soumis à l'horaire de travail suivant : « le matin de 8h30 à 12h et l'après-midi de 14h à 17h30 », la Cour d'appel, qui a statué par voie de simple affirmation, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 devenu les articles 1103 et 1104 du Code civil ;

ALORS DE SIXIEME PART, et en toute hypothèse, QUE l'autonomie dont peut disposer un salarié dans l'organisation de ses horaires de travail ne dispense pas l'employeur de fournir les éléments de nature à justifier des horaires effectifs de l'intéressé en réponse à sa demande en paiement d'heures supplémentaires; qu'en estimant que la société SOFRATEL n'était pas tenue de répondre aux revendications de Monsieur Y... au prétexte inopérant que le salarié aurait disposé d'une large autonomie dans l'organisation de son temps de travail, la Cour d'appel a violé l'article L.3171-4 du Code du travail ;

ET ALORS ENFIN QUE la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que le juge ne peut rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires en se fondant sur l'insuffisance de preuves apportées par un salarié dès lors que celui-ci a produit des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'en déboutant Monsieur Y... de sa demande en se fondant sur l'insuffisance prétendue des seuls éléments fournis par ce dernier, qu'elle déduit de motifs inopérants, la Cour d'appel qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé l'article L.3171-4 du Code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Y... de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour violation des durées maximales de travail ;

AUX MOTIFS QUE les pièces produites par les parties ne permettent pas d'établir que l'amplitude et la durée des journées de travail de Monsieur Loïc Y... dépassaient les limites prévues par la loi, alors qu'il disposait d'une large autonomie pour organiser ses journées ; qu'il s'ensuit que le salarié ne caractérise pas en quoi l'employeur a manqué à son obligation de préserver sa santé ; qu'il doit donc être débouté de sa demande ;

ALORS QUE la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'employeur ; qu'en reprochant à Monsieur Y... de ne pas établir que l'amplitude et la durée de ses journées de travail dépassaient les limites prévues par la loi pour le débouter de sa demande de dommages-intérêts formée à ce titre quand il revenait à la seule société SOFRATEL de démontrer qu'elle avait respecté les dispositions légales relatives aux durée maximales de travail, la Cour d'appel a violé l'article 1315, devenu l'article 1353 du Code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Y... de ses demandes en paiement d'un rappel de salaires dus au titre de sa rémunération variable ;

AUX MOTIFS QUE a)Sur la demande de primes entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2010, M. Loïc Y... réclame à ce titre un rappel de salaire ; qu''il n'est pas contesté qu'il était prévu le versement d' une prime variable d'accroissement de chiffre d'affaire à raison d'un plafond de :
- 600 euros, par mois jusque mars 2008,
- 700 euros mensuellement à compter de mai 2008 jusqu'au 31 décembre 2011 ; qu'ayant la charge de la preuve, il appartient à M. Loïc Y... de produire aux débats des éléments permettant d'apprécier le bien-fondé de sa demande ; qu'en l'espèce, le salarié se contente de réclamer le maximum de la prime déduction faite des sommes perçues à ce titre ; que rien de permet, au vu des pièces produites par le salarié, de considérer qu'il était susceptible de percevoir la prime maximale ; qu'il n'est pas établi que l'employeur ne lui a pas fourni les éléments lui permettant d'asseoir le montant de sa rémunération variable ; qu'en sa qualité de responsable d'agence et étant chargé, de son aveu même, de la coordination de l'ensemble des équipes de la société, il disposait nécessairement d'éléments lui permettant d'évaluer son dû ; ue pendant toute la durée de la relation contractuelle, il n'a formé aucune revendication à ce titre, bien qu'ayant perçu des primes mensuellement ; que dès lors, il convient de débouter M. Loïc Y... de ses demandes à cet égard, tant à titre principal que subsidiaire ;

ALORS D'UNE PART QUE lorsque le calcul de la rémunération dépend d'éléments détenus par l'employeur, celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire ; qu'en retenant, pour débouter Monsieur Y... de sa demande en paiement d'un complément de prime dont le montant était assis sur le chiffre d'affaires de l'agence de BOUCHAIN de la société SOFRATEL que rien ne permet, au vu des pièces produites par le salarié, de considérer qu'il était susceptible de recevoir le montant maximal de ladite prime plafonné aux sommes mensuelles de 600, puis 700 euros, quant il revenait à l'employeur de justifier du chiffre d'affaires réalisé pendant la période sur laquelle portait la réclamation, la Cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1353 du Code civil ;

ALORS D'AUTRE PART QU'en se bornant à affirmer qu'en sa qualité de responsable d'agence et étant chargé de la coordination des équipes de la société, il disposait nécessairement d'éléments lui permettant d'évaluer son dû sans tenir compte du fait que l'absence de tout lien hiérarchique de Monsieur Y... avec le service comptable, lequel restait sous l'autorité directe du gérant de l'entreprise, ne lui permettait pas d'avoir connaissance par lui-même des éléments nécessaires au calcul de sa prime sur objectifs, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1221-1 d Code du travail, ensemble l'article 1134 devenu les articles 1103 et 1104 du Code civil ,

ALORS ENFIN, en toute hypothèse et surtout, QUE la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d'une manifestation claire et non équivoque de volonté ; que l'absence de réclamation du salarié ne vaut pas renonciation à se prévaloir d'un droit auprès de son employeur ; qu'en retenant, pour débouter Monsieur Y... de sa demande tendant à obtenir le paiement de la somme de 22.800 euros à titre de rappel de prime variable, que pendant toute la relation contractuelle, il n'a formé aucune revendication à ce titre, la Cour d'appel a violé l'article L.1221-1 du Code du travail, ensemble l'article 1134 devenu l'article 1103 et 1104 du Code civil.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

Ce moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de Monsieur Y... reposait sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir débouté de ses demandes en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que de dommages-intérêts pour rupture blâmable ;

AUX MOTIFS QUE sur le bien-fondé du licenciement, aux termes de son contrat de travail, M. Loïc Y... avait pour mission :- l'organisation, la gestion et le suivi administratif, commercial et technique, - la participation à l'élaboration budgétaire de l'activité travaux et services après-vente de la société, le suivi et la réalisation des objectifs correspondants fixée de concert avec la direction générale de l'entreprise, - le contrôle de la régularité des opérations commerciales liées à l'exploitation et à l'organisation du service, - la mise en oeuvre d'actions et des missions indiquées par la direction générale de la société dans le but d'améliorer les performances de la société ; que M. Loïc Y... justifie, par la production d'attestations de salariés de l'employeur, que l'entreprise connaissait d'importantes difficultés en termes d'organisation ; que pour autant, la Société SOFRATEL démontre que malgré ses réclamations, M. Loïc Y... « laissait passer » des devis incomplets, notamment en termes de dépôts de garantie ; que malgré les directives de l'employeur, l'agence dont il avait la direction transmettait les dossiers pour facturations de façon extrêmement tardive ; que l'employeur démontre que les clients visés dans son courrier de licenciement avaient clairement fait valoir leur mécontentement notamment au sujet du suivi d'installations ; qu'en outre, et surtout, même si l'on fait abstraction du grief afférent à une offre de prix concurrentielle à l'activité de l'entreprise, l'intimée rapporte la preuve qu'à de nombreuses reprises, M. Loïc Y... a utilisé son temps de travail dans des proportions importantes au profit de l'activité de ses propres sociétés, en utilisant le matériel de l'entreprise, et ce au détriment de sa mission ; que ces manquements sont d'une gravité telle qu'ils rendaient impossible le maintien de son contrat de travail ; que son licenciement repose donc sur une cause réelle et sérieuse ;

ALORS D'UNE PART QUE le licenciement prononcé pour faute grave ayant nécessairement une nature disciplinaire ne peut avoir une cause réelle et sérieuse que si le juge constate que les faits reprochés au salarié revêtent un caractère fautif ; que sauf abstention volontaire ou mauvaise volonté délibérée de sa part, l'insuffisance professionnelle d'un salarié, constituée par le fait de ne pas accomplir de façon satisfaisante ses obligations, ne constitue pas une faute disciplinaire ; qu'après avoir écarté la faute lourde invoquée par l'employeur dans la lettre de licenciement ainsi que toute faute grave du salarié, la Cour d'appel a retenu comme constitutifs d'une cause réelle et sérieuse de licenciement le fait que malgré les réclamations Monsieur Y... « laissait passer » des devis incomplets, que malgré les directives de l'employeur, l'agence dont il avait la responsabilité transmettait les dossiers pour facturation de façon extrêmement tardive et que l'employeur démontrait que les clients visés par la lettre de licenciement avaient clairement fait valoir leur mécontentement notamment au sujet du suivi d'installations ; qu'en statuant ainsi sans constater, ni faire ressortir l'existence d'une mauvaise volonté délibérée du salarié à exécuter ses obligations et par là-même sans caractériser le manquement fautif qui aurait permis seul de conférer une cause réelle et sérieuse au licenciement de Monsieur Y... prononcé pour faute lourde, la Cour d'appel a violé les articles L.1232-1, L.1235-1 et L.1331-1 du Code du travail ;

ALORS D'AUTRE PART et en tout état de cause, QUE la lettre de licenciement, sous l'intitulé « Clients », énonçait de manière distincte plusieurs griefs, en reprochant, d'une part, à Monsieur Y..., au sujet des « devis », le fait que les prévisionnels indiqués sur les supports devis étaient « totalement fantaisistes , ni la date de début de chantier, ni celle de facturation ne correspondant à la réalité », et d'autre part, au sujet de la « facturation », le fait des dossiers mis en facturation seraient « incomplets obligeant le service comptabilité à contrôler notamment les dossiers pour les frais et dépôts de garantie » ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que « l'employeur démontre que Monsieur Y... laissait passer des devis incomplets, notamment en termes de dépôts de garantie », la Cour d'appel, qui a statué par des motifs ne permettant pas de déterminer quel grief énoncé par la lettre de licenciement elle considérait établi, n'a pas mis en mesure la Cour de cassation d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1232-1 et L.1235-1 du Code du travail ;

ALORS DE TROISIEME PART et en tout état de cause QU'en infirmant le jugement du Conseil de Prud'hommes qui avait retenu, pour écarter le grief relatif à l'élaboration des devis, qu'aucun élément n'était produit par l'employeur permettant d'apprécier la réalité de ce grief, sans préciser sur quels éléments elle fondait son appréciation contraire, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS DE QUATRIEME PART QU'en infirmant le jugement du Conseil de Prud'hommes qui avait retenu, pour écarter le grief relatif au caractère incomplet des dossier mis en facturation à la comptabilité, que « les frais d'enregistrement et dépôts de garante sont conformes aux contrats de prestations et de location et sont bien facturés sur les factures de chacun des clients Larché, Auto System, Mister John us Cars, Novagel, le Phénix etc
», sans préciser davantage sur quels éléments elle fondait son appréciation contraire, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS DE CINQUIEME PART QU'en se bornant à relever également que l'employeur démontrait que les clients visés dans la lettre de licenciement avaient clairement fait valoir leur mécontentement au sujet du suivi d'installations sans qu'il résulte d'aucune de ses constatations que ces plaintes faisaient suite à des erreurs pouvant être imputées personnellement à Monsieur Y... dans le suivi des chantiers alors que ce dernier soutenait être intervenu rapidement lors de chaque réclamation d'un client, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1232-1 et L.1232-5 du Code du travail ;

ALORS DE SIXIEME PART QUE la lettre de licenciement fixe les termes du litige, ce qui interdit à l'employeur d'invoquer, et au juge de retenir, des griefs qui n'ont pas été énoncés dans la lettre notifiée au salariée ; qu'il résulte des termes de la lettre de licenciement de Monsieur Y..., en premier lieu, que le fait d'avoir négligé son activité au sein de l'entreprise pour privilégier celle issue de la création de nouvelles structures n'était invoqué que comme un manquement constitutif d'une violation de la clause d'exclusivité figurant au contrat de travail du salarié, et en second lieu, que le grief tiré de l'utilisation du matériel de l'entreprise n'était pas invoqué dans ladite lettre ; qu'en retenant à l'encontre du salarié le fait qu'il aurait utilisé son temps de travail dans des proportions importantes au profit de l'activité de ses propres sociétés en utilisant le matériel de l'entreprise, la Cour d'appel qui s'est fondée sur des griefs ne figurant pas dans la lettre de rupture, a violé l'article L.1232-6 du Code du travail ;

ALORS DE SEPTIEME PART QUE Monsieur Y... faisait valoir dans ses conclusions d'appel que le grief développé par la lettre de licenciement sous l'intitulé « activité pour des sociétés tierces voire concurrentes » se rapportait à des faits prescrits dans la mesure où l'employeur avait eu connaissance de l'existence de la société LOKALOC dès le 26 septembre 2011 et, se fondant sur la date de sa convocation à un entretien préalable, soutenait qu'aucun fait découvert par la société SOFRATEL antérieurement au 25 mars 2012 ne pouvait être pris en considération ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen ainsi soulevé de la prescription d'une partie des faits invoqués à son encontre, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS DE HUITIEME PART QU' aux termes de l'article L.1332-4 du Code du travail, « aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales » ; que la Cour d'appel qui ne s'est pas prononcée sur la prescription d'une partie des faits invoqués, opposée par Monsieur Y... a violé les articles L.1231-1 et L.1332-4 du Code du travail ;

ALORS DE NEUVIEME PART, et en toute hypothèse, QU' en se bornant à énoncer, pour relever l'existence d'un manquement de Monsieur Y... à ses obligations, qu'il a utilisé son temps de travail « dans des proportions importantes » au profit de l'activité de ses propres sociétés, sans donner aucune indication permettant de mesurer le temps effectif consacré par Monsieur Y... à ses activités personnelles, ni préciser sur quels éléments elle fondait son appréciation, la Cour d'appel a de nouveau entaché sa décision d'un défaut de motifs en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

ET ALORS ENFIN QUE Monsieur Y... sollicitait également devant la Cour d'appel la réparation du préjudice que lui avaient occasionné les circonstances brutales et vexatoires dans lesquelles était intervenue la rupture de son travail, sa mise à pied lui étant annoncée pendant que le fils de l'employeur vidait et changeait la serrure de son bureau et qu'il vidait également son véhicule de fonction ; qu'il faisait également valoir que sa lettre de licenciement avait été lue devant ses collègues de travail ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire des conclusions du salarié, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-26259
Date de la décision : 30/01/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 21 juillet 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 jan. 2019, pourvoi n°17-26259


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.26259
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